Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le quartier Nord

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PROGRAMME DE PREVENTION URBAINE Cahier Diagnostic 2024, n° 3

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord

PPU
GARE DU NORD PLACE DE LA REINE BOTANIQUE PLACE LIEDTS

Programme de prévention urbaine

Cahier Diagnostic 2024, n°3

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord

Ce diagnostic offre une analyse approfondie des problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes dans le quartier Nord. Il a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© en collaboration avec divers acteurs locaux du social, de la santĂ©, de la sĂ©curitĂ© et de la prĂ©vention. Ainsi, ce document reprend les constats partagĂ©s dans le quartier Nord, les difficultĂ©s rencontrĂ©es par les acteurs locaux dans l’accompagnement du public, et apporte des pistes de solutions aux problĂ©matiques identifiĂ©es.

CoordonnĂ© par la cellule Évaluation du Programme de prĂ©vention urbaine (PPU), les cahiers diagnostics reprennent l’ensemble des travaux de diagnostic rĂ©alisĂ©s et/ou coordonnĂ©s par la cellule Évaluation du PPU. L’objectif de cette collection est de documenter les thĂ©matiques et territoires d’action du Programme de prĂ©vention urbaine.

Auteur

David Cognaux, Évaluateur interne, dcognaux@1030.be

Responsables du Programme de prévention urbaine

Bertrand Dhuyvetter, Responsable du département, bdhuyvetter@1030.be

David Lebrun, Responsable-adjoint du département, dlebrun@1030.be

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord Cahier Diagnostic 2024, n° 03

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SOMMAIRE INTRODUCTION 5 A. MÉTHODOLOGIE 6 A.1. Cadre du diagnostic 6 A.2. ComitĂ© d’accompagnement et comitĂ© de suivi 6 A.3. Collecte et analyse des donnĂ©es 8 A.4. Limites de ce diagnostic 9 B. COMPREHENSION DES ENJEUX 10
Interaction prĂ©caritĂ© – consommation – santĂ© mentale 11 B.2. Tendances 12 B.3. ConsĂ©quences sur le quartier 14 C. FREINS A L’ACCOMPAGNEMENT DU PUBLIC 15 C.1. Limites de l’offre locale de services 15 C.2. Obstacles institutionnels 16 C.3. DifficultĂ©s du travail social et de la santĂ© 16 C.4. DifficultĂ©s liĂ©es au public 18 C.5. Obstacles politiques 18 03
B.1.

D.1. DĂ©velopper l’interprĂ©tariat et la mĂ©diation culturelle 20

D.2. Étendre le programme « Housing First » en RĂ©gion de Bruxelles-Capitale 20

D.3. Renforcer et pérenniser les financements de la premiÚre ligne 21

D.4. Étendre spĂ©cifiquement les services dits « bas seuils » 21

D.5. Favoriser le travail de rue et l’accueil par permanence 22

D.6. Promouvoir le travail « mixte » 22

D.7. DĂ©velopper des lieux d’échanges pour les acteurs locaux 22

D.8. Créer un hub multidisciplinaire de proximité 23

D.9. Mettre en place un chauffoir dans le quartier Nord 23

D.10. Ouvrir une salle de consommation Ă  moindre de risque dans le quartier Nord 23

D.11. Établir une convention entre le CPAS et les partenaires locaux 24

D.12. Former les services de premiĂšre ligne aux problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes 24

D.13. Sensibiliser les pharmacies locales à la délivrance des traitements de substitution 24

D.14. Décriminaliser les usagers de drogues 25

D.15. Étendre et amĂ©liorer l’accĂšs aux toilettes publiques 25

D.16. Impliquer toutes les parties prenantes dans la mise en place d’actions 25

D.
ET PISTES D’ACTIONS 20
RECOMMANDATIONS
E. CONCLUSIONS 26 F. RÉFÉRENCES 27 G. NOTES 28 04

INTRODUCTION

En 2023, un premier diagnostic faisait Ă©tat des problĂšmes d’insĂ©curitĂ© rencontrĂ©es par les acteurs de la prĂ©vention et de la sĂ©curitĂ© dans le Quartier Nord. Les constats de ce document 1 sont sans appels : violences, vols, consommation, incivilitĂ©s, malpropretĂ©, dĂ©gradations, etc.

Le Quartier Nord combine ainsi quasi toutes les problĂ©matiques d’insĂ©curitĂ©. Parmi celles-ci, deux problĂ©matiques majeures du quartier ont particuliĂšrement pris de l’ampleur ces derniĂšres annĂ©es : les problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes.

En novembre 2022, le meurtre du policier Thomas Monjoie dĂ©montre la gravitĂ© et la complexitĂ© des problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes rencontrĂ©es dans le Quartier Nord 2 . Cette complexitĂ© appelle Ă  des rĂ©ponses concertĂ©es qui mobilisent Ă  la fois les acteurs de la sĂ©curitĂ©, mais Ă©galement du social et de la santĂ©. Dans ce sens, ce second diagnostic vise Ă  approfondir et Ă  analyser les enjeux spĂ©cifiques de la santĂ© mentale et des assuĂ©tudes dans le Quartier Nord, en collaboration avec les partenaires locaux. Il a pour objectif de mieux comprendre ces phĂ©nomĂšnes et de proposer des solutions adaptĂ©es et concertĂ©es Ă  ces problĂ©matiques complexes rencontrĂ©es dans l’espace public.

Le premier chapitre permet d’abord de dĂ©tailler la mĂ©thodologie mise en Ɠuvre pour ce diagnostic. Le cadre dĂ©limitant la problĂ©matique, le processus d’élaboration de ce document, les mĂ©thodes de collecte de donnĂ©es, ainsi que les limites du diagnostic y sont prĂ©sentĂ©s.

Le second chapitre identifie les problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes prĂ©sentes dans et autour du Quartier Nord. Il s’efforce d’en identifier les causes profondes et d’en Ă©valuer les rĂ©percussions sur les individus et leur environnement social. Un aspect particuliĂšrement crucial de cette analyse rĂ©side dans l’exploration de l’interaction entre les problĂšmes de santĂ© mentale, d’assuĂ©tudes et de prĂ©caritĂ© au sein du quartier. Deux cas plus concrets, rencontrĂ©s dans les pratiques des acteurs de terrain y sont dĂ©taillĂ©s.

Ensuite, ce diagnostic documente les obstacles rencontrĂ©s par les acteurs de terrain dans leur mission d’accompagnement des personnes en situation de dĂ©tresse psychologique ou de dĂ©pendance. Comprendre ces difficultĂ©s et les freins Ă  l’accompagnement du public sont essentiels si l’on veut offrir des rĂ©ponses adaptĂ©es aux obstacles auxquels font face les professionnels et les bĂ©nĂ©ficiaires.

Enfin, le dernier chapitre de ce document ambitionne de dĂ©passer le stade de la simple observation en proposant des pistes d’action concrĂštes pour les acteurs de terrain et en formulant des recommandations pour les autoritĂ©s compĂ©tentes. Ce diagnostic vise donc Ă  contribuer Ă  l’amĂ©lioration des politiques et des pratiques en matiĂšre de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes dans le quartier Nord.

INTRODUCTION 05

A. METHODOLOGIE

Ce chapitre présente la méthodologie utilisée pour mener à bien ce diagnostic sur la santé mentale et les assuétudes dans le Quartier Nord, en mettant un accent sur le cadre délimitant ce diagnostic, la composition des comités et des groupes de travail, les étapes de collecte de données, ainsi que les limites de ce document.

A.1. CADRE DU DIAGNOSTIC

L’étude s’inscrit dans une dĂ©marche visant Ă  comprendre et Ă  documenter les problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes chez les individus frĂ©quentant l’espace public du Quartier Nord, principalement sur Schaerbeek, depuis la fin des mesures liĂ©es Ă  la pandĂ©mie de COVID-19 en Ă©tĂ© 2022. Cette Ă©tude cible spĂ©cifiquement les personnes prĂ©sentant des problĂšmes de santĂ© mentale et/ou d’assuĂ©tudes dans cet espace gĂ©ographique prĂ©cis.

La figure 1, et plus spĂ©cifiquement la zone bleue, offre une dĂ©limitation de la zone concernĂ©e par ce diagnostic. Dans un souci de comparaison, la zone jaune dĂ©limite le territoire Ă©tudiĂ© dans le cadre du premier diagnostic faisant Ă©tat de l’insĂ©curitĂ© dans la zone Brabant-Nord 3

A.2. COMITÉ D’ACCOMPAGNEMENT ET COMITÉ DE SUIVI

Pour garantir la qualitĂ© et la pertinence de ce diagnostic, deux comitĂ©s ont Ă©tĂ© constituĂ©s. Le premier comitĂ©, dit « d’accompagnement », qui est Ă  l’initiative de la commande de ce diagnostic. Ce comitĂ© comprenait les membres suivants :

- Le cabinet de la Bourgmestre, représenté par la ConseillÚre Police ;

- La Zone de Police Bruxelles Nord, représenté par le conseiller au Chef de Corps de la zone ;

- Le Programme de Prévention Urbaine, représenté par le Responsable du Département.

Ensuite, un comitĂ© de « suivi » a Ă©galement Ă©tĂ© constituĂ©, celui-ci composĂ© d’acteurs du Programme de PrĂ©vention Urbaine directement concernĂ©s par les problĂ©matiques adressĂ©es dans ce diagnostic. Les membres de ce comitĂ© ont jouĂ© un rĂŽle de suivi et de conseil dans la rĂ©alisation du document. Ce comitĂ©, dirigĂ© par l’évaluateur interne de la cellule d’évaluation du Programme de PrĂ©vention Urbaine, comprenait :

- La chargĂ©e de projets diagnostic de Quartier de la Cellule Évaluation ;

- La responsable de Latitude Nord ;

- Le psychologue de Latitude Nord ;

- La coordinatrice-adjointe des Travailleurs sociaux de rue (TSR) ;

- Le coordinateur de l’équipe des TSR de l’Équipe 58.

Ce comitĂ© a jouĂ© un rĂŽle crucial tout au long du processus de collecte, d’analyse et de rĂ©daction en conseillant et en orientant la rĂ©alisation du diagnostic.

MÉTHODOLOGIE 06
MÉTHODOLOGIE 07
Figure 1. Cartographie délimitant la zone du Quartier Nord pour ce diagnostic

A.3. COLLECTE ET ANALYSE DES DONNÉES

La collecte des donnĂ©es s’est principalement faite de maniĂšre qualitative, aux travers d’échanges avec les acteurs professionnels locaux de la sĂ©curitĂ©, du social et de la santĂ©. Celle-ci s’est dĂ©roulĂ©e en plusieurs Ă©tapes, allant de la sĂ©ance d’information initiale Ă  la rĂ©union finale de travail sur les pistes d’actions et les recommandations. La mĂ©thode Ă©tait participative et collaborative, basĂ©e sur l’échange interdisciplinaire des participants.

La premiĂšre Ă©tape a Ă©tĂ© la sĂ©ance d’information en septembre 2023, celle-ci visait Ă  prĂ©senter le projet de diagnostic aux acteurs locaux policiers, de la prĂ©vention, du social et de la santĂ© directement impliquĂ©s dans les problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes dans le Quartier Nord. Cette prĂ©sentation avait Ă©galement pour objectif de recevoir les feedback des acteurs sur la mĂ©thodologie proposĂ©s et les objectifs attendus du diagnostic.

Ensuite, aprÚs validation de la méthodologie, les séances 2, 3 et 4 du diagnostic ont été structurées de la maniÚre suivante :

1. Le groupe se retrouve en plĂ©niĂšre. Chaque plĂ©niĂšre est animĂ©e autour d’un point spĂ©cifique au diagnostic : d’abord objectiver la situation dans le Quartier Nord. Ensuite, identifier les freins rencontrĂ©s dans l’accompagnement du public, et enfin formuler les recommandations et pistes d’actions pour pallier aux problĂ©matiques Ă©noncĂ©es.

2. Lors de chaque sĂ©ance, le groupe est divisĂ© en plusieurs « focus groups » interdisciplinaires, mĂ©langeants policiers, travailleurs sociaux, travailleurs de la santĂ©, et agents de la prĂ©vention. Le groupe est alors divisĂ© en 3-4 « focus groups » de 5 Ă  7 personnes, ceux-ci Ă  chaque fois accompagnĂ©s d’un modĂ©rateur. Chaque « focus group » bĂ©nĂ©ficie ainsi d’un temps de discussions et d’échanges en petits comitĂ©s.

3. À l’issue de ces discussions en « focus groups », un dĂ©lĂ©guĂ© est dĂ©signĂ© pour synthĂ©tiser les Ă©changes et les prĂ©senter en plĂ©niĂšre Ă  l’ensemble du groupe.

4. S’ensuit alors une discussion en plĂ©niĂšre sur l’ensemble des Ă©lĂ©ments ayant Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©s. Cette derniĂšre Ă©tape permet alors Ă  chacun d’ajouter de nouveaux Ă©lĂ©ments, de nuancer certains propos, ou de marquer leur dĂ©saccord sur ce qui a Ă©tĂ© Ă©noncĂ©.

Cette mĂ©thodologie interactive a permis d’échanger sur les points de vues, ainsi que de recueillir des donnĂ©es qualitatives riches, nuancĂ©es, et variĂ©es. Ce diagnostic est donc le reflet d’un constat partagĂ© par les diffĂ©rents acteurs de la police, de la prĂ©vention, du social et de la santĂ© ayant participĂ© Ă  sa rĂ©alisation.

Ensuite, pour garantir la fiabilitĂ© des informations fournies, celles-ci ont Ă©tĂ©, dans la mesure du possible, croisĂ©es avec des donnĂ©es quantitatives en provenance de ces mĂȘmes acteurs locaux et de la zone de police, ainsi qu’avec d’autres sources documentaires (rapports, autres diagnostics locaux, Ă©tudes, etc). Cette approche mixte a permis une analyse plus approfondie des problĂ©matiques identifiĂ©es.

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord
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Les institutions ayant participés à la réalisation de ce diagnostic sont les suivantes :

- La Zone de Police, avec des représentants des commissariats 1, 4 et 5 ;

- Les travailleurs sociaux de rue de l’équipe 58, du Programme de prĂ©vention urbaine (PPU) ;

- Le service Vie de Quartier, du PPU ;

- Latitude Nord, du PPU ;

- Le CPAS de Schaerbeek ;

- PsyBru, Antenne Bruxelles Est ;

- Cliniques universitaires Saint-Luc (Équipe Mobile de Crise, EMUT) ;

- Le Centre Hospitalier Jean Titeca ;

- Safe Brussels ;

- Le Samusocial ;

- Le SMES ;

- Transit ASBL ;

- Le projet Lama ;

- Espace P.

A.4. LIMITES DE CE DIAGNOSTIC

MalgrĂ© la rigueur appliquĂ©e dans la mise en Ɠuvre de ce diagnostic, plusieurs limites doivent ĂȘtre reconnues. Tout d’abord, les focus groups, bien qu’ayant rĂ©uni une grande diversitĂ© d’acteurs locaux, ceux-ci Ă©taient exclusivement composĂ©s de professionnels. Cette composition restreint la reprĂ©sentativitĂ© des perspectives, laissant de cĂŽtĂ© les expĂ©riences vĂ©cues par les autres parties prenantes tels que les habitants, les usagers, les commerçants du quartier, ainsi que les bĂ©nĂ©ficiaires eux-mĂȘmes.

De plus, bien que les donnĂ©es qualitatives aient Ă©tĂ© croisĂ©es avec des donnĂ©es quantitatives provenant des acteurs locaux et de la zone de police, cette dĂ©marche n’a pas Ă©tĂ© systĂ©matique dans toutes les phases de l’analyse. De telles donnĂ©es, Ă  l’échelon sont parfois difficiles d’accĂšs. Par consĂ©quent, certains aspects des problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes pourraient ne pas avoir Ă©tĂ© entiĂšrement Ă©tayĂ©s par des donnĂ©es quantitatives, limitant ainsi la robustesse des constats.

En outre, la focalisation sur les phĂ©nomĂšnes d’insĂ©curitĂ© dans l’espace public du Quartier Nord a exclu de facto les aspects des problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes qui ne se manifestent pas dans cet environnement spĂ©cifique ou n’impactant pas l’ordre public. Ainsi, Ă  titre d’exemple, une personne souffrant de dĂ©pression prĂ©sente bien une problĂ©matique de santĂ© mentale, mais celle-ci ne sera pas perceptible ni problĂ©matique dans ses interactions dans l’espace public. Dans ce mĂȘme sens, les phĂ©nomĂšnes de consommation n’induisant pas de changements de comportements, et donc n’impactant pas l’ordre public, ne sont pas non plus abordĂ©s dans ce document.

Enfin, comme cela sera dĂ©crit dans la partie suivante, la distinction entre les problĂ©matiques de santĂ© mentale et les problĂ©matiques d’assuĂ©tudes est difficile Ă  Ă©tablir, et ces deux domaines peuvent s’alimenter mutuellement. Dans ce sens, aucune sĂ©paration claire n’est Ă©tablie entre ces deux problĂ©matiques dans ce diagnostic. Au contraire, il est important de reconnaĂźtre leur interconnexion et leur influence rĂ©ciproque. Ainsi, tout au long de ce document, les aspects liĂ©s Ă  la santĂ© mentale et aux assuĂ©tudes peuvent ĂȘtre Ă©troitement entrelacĂ©s, reflĂ©tant la rĂ©alitĂ© complexe et multifacette de ces enjeux.

MÉTHODOLOGIE 09

B. COMPRÉHENSION DES ENJEUX

Ce chapitre fait Ă©tat des constats dits « gĂ©nĂ©raux » Ă©tablis sur l’espace public dans le Quartier Nord pour la pĂ©riode et le public dĂ©finis prĂ©cĂ©demment. Cette partie dresse donc un premier tableau du quartier et met en avant les dynamiques propres aux problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes qui s’y retrouvent.

B.1. INTERACTION PRÉCARITÉ – CONSOMMATION – SANTÉ MENTALE

Le principal constat qui ressort du groupe de travail est qu’il existe une interaction forte entre prĂ©caritĂ©, assuĂ©tudes et santĂ© mentale. Ces trois problĂ©matiques interagissent et s’autoalimentent. Lorsqu’une des trois problĂ©matiques se prĂ©sente, les deux autres pĂŽles ont tendance Ă  venir alimenter le premier. On peut donc Ă  la fois retrouver ces problĂ©matiques comme causes et comme consĂ©quences les unes des autres.

Ces trois Ă©lĂ©ments ne sont cependant pas pour autant tous prĂ©sents dans tous les cas, il s’agit bien d’une tendance. Certaines personnes peuvent prĂ©senter des troubles de santĂ© mentale sans pour autant consommer de produits et vice versa. De mĂȘme, une personne prĂ©caire ne sera pas nĂ©cessairement soumise Ă  des problĂšmes d’assuĂ©tudes ou de santĂ© mentale et vice versa.

Pour illustrer ce propos, Latitude Nord, au travers de son travail d’accompagnement, rĂ©pertorie trois thĂ©matiques intrinsĂšquement liĂ©es aux problĂšmes de santĂ© mentale : «  le mal-logement et l’errance, les violences liĂ©es Ă  la migration et les consĂ©quences d’un usage abusif de drogues. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, l’équipe observe, chez le public, les consĂ©quences psychiques de trauma (guerre, parcours migratoires, violences intrafamiliales, passages en rue...), une perte d’espoir (syndrome d’auto-exclusion), l’adoption de mĂ©canismes de survie (prises de risques, isolement, coupure avec la rĂ©alité ), mais Ă©galement l’expression de conduites agressives et violentes.  » 4 Latitude Nord observe donc un lien fort entre, d’une part la santĂ© mentale, et de l’autre les problĂšmes de prĂ©caritĂ© et d’assuĂ©tudes.

Également, les acteurs locaux ont soulignĂ© la difficultĂ© de poser un diagnostic sur un comportement dans l’espace public et dire s’il s’agit d’un comportement induit par une consommation ou par un trouble mental. Il n’est pas toujours Ă©vident de parler de santĂ© mentale lorsque l’intrapsychique 5 n’est pas visible au premier coup d’Ɠil. Dans ce sens, comme cela a Ă©tĂ© soulignĂ© dans les limites de ce diagnostic, il y a des troubles psychiques qui sont visibles et gĂ©nĂšrent des situations insĂ©curisantes dans l’espace public, mais Ă  l’inverse d’autres personnes ont des problĂ©matiques de santĂ© mentale qui ne gĂ©nĂšrent pas de situations insĂ©curisantes. Pour ces personnes, les troubles peuvent ĂȘtre totalement maĂźtrisĂ©s. Toutes les problĂ©matiques de santĂ© mentale ne sont donc pas considĂ©rĂ©es comme problĂ©matiques du point de vue sĂ©curitaire, et cela vaut Ă©galement pour la consommation.

Figure 2. ReprĂ©sentation schĂ©matique de l’interaction santĂ© mentale - assuĂ©tudes - prĂ©caritĂ©

COMPRÉHENSION DES ENJEUX
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Assuétudes Précarité Santé mentale

Le cas du trauma

Le trauma est une rĂ©alitĂ© complexe dans le quartier Nord, agissant Ă  la fois comme une cause et une consĂ©quence des problĂšmes rencontrĂ©s. Il constitue souvent le point de dĂ©part d’une spirale nĂ©gative, oĂč chaque nouvel Ă©vĂ©nement traumatique alimente davantage les difficultĂ©s existantes. Les consĂ©quences du trauma peuvent ĂȘtre graves, se manifestant parfois par des symptĂŽmes psychotiques 6, qui se traduisent frĂ©quemment par des comportements violents ou agressifs dans l’espace public. De plus, certaines personnes traumatisĂ©es peuvent recourir Ă  la consommation de drogue comme mĂ©canisme d’adaptation ou pour attĂ©nuer l’anxiĂ©tĂ© liĂ©e Ă  leur situation.

À titre d’exemple, le quartier Nord est particuliĂšrement frĂ©quentĂ© par un public migrant. 7 8 Ceux-ci fuyant les conflits, la persĂ©cution ou la misĂšre de leur pays endurent un pĂ©riple dangereux Ă  la recherche d’une vie meilleure. Ce voyage expose ces individus Ă  des traumatismes physiques et psychologiques graves, incluant les violences des passeurs, les conditions prĂ©caires dans les camps de rĂ©fugiĂ©s et les situations d’exploitation. Ces expĂ©riences peuvent entraĂźner des sĂ©quelles psychologiques durables, telles que le stress post-traumatique, l’anxiĂ©tĂ© et la dĂ©pression, aggravĂ©s par l’incertitude sur leur avenir et les difficultĂ©s d’intĂ©gration dans leur nouveau pays. 9

Le cas de la précarité

La prĂ©caritĂ©, qu’elle soit marquĂ©e par un manque de revenus, des difficultĂ©s d’accĂšs au logement ou des obstacles Ă  l’éducation, peut exercer une pression Ă©crasante sur les individus, les exposant ainsi Ă  des risques accrus de dĂ©velopper des troubles de santĂ© mentale. 10 Les conditions de vie instables et l’incertitude quant Ă  l’avenir peuvent engendrer un sentiment d’impuissance et de dĂ©sespoir, qui sont des facteurs de risque connus pour les troubles psychologiques tels que l’anxiĂ©tĂ© et la dĂ©pression. De plus, le stress chronique associĂ© Ă  la prĂ©caritĂ© peut perturber le fonctionnement du cerveau et contribuer au dĂ©veloppement de troubles mentaux.

Le constat des acteurs de terrain est que face à ces difficultés, certaines personnes peuvent chercher des moyens de soulager leur détresse, et la consommation de substances psychoactives peut sembler une échappatoire temporaire. Les produits stupéfiants offrent parfois un répit momentané de la réalité difficile, induisant un sentiment de soulagement ou de plaisir immédiat.

Si l’on se penche sur le quartier Nord, on s’aperçoit qu’il figure parmi les plus prĂ©carisĂ©s de la rĂ©gion de Bruxelles-Capital. Si l’on reprend quelques indicateurs clĂ©s, dans le secteur statistique du quartier Brabant, le taux d’activitĂ© en 2021 Ă©tait infĂ©rieur Ă  la moyenne rĂ©gionale, avec 55,4 % contre 63,6 % respectivement. De mĂȘme, le revenu imposable mĂ©dian des dĂ©clarations pour l’annĂ©e 2019 Ă©tait Ă©galement plus bas dans le quartier Brabant, s’élevant Ă  15 307 € par rapport Ă  20 427 € au niveau rĂ©gional. Enfin, la proportion de demandeurs d’emploi dans la population de 18 Ă  64 ans Ă©tait plus Ă©levĂ©e dans le quartier Brabant, avec 16,1 % contre 11,3 % 11 au niveau rĂ©gional. Également, le quartier Nord est, comme beaucoup de quartiers du « croissant pauvre  » de Bruxelles, un quartier d’arrivĂ©e privilĂ©giĂ© pour les populations immigrantes en provenance de pays dits « pauvres » ou « intermĂ©diaires  ». 12

Alors mĂȘme que le quartier Nord prĂ©sente dĂ©jĂ  une situation de fragilitĂ© socio-Ă©conomique, s’ajoutent Ă  cela la prĂ©sence de publics particuliĂšrement vulnĂ©rables : personnes en errance, personnes sans-abris, sans-papiers, consommatrices. Des squats et autres campements de fortune sont rĂ©guliĂšrement observĂ©s dans le quartier Nord. 13

COMPRÉHENSION DES ENJEUX 11

B.2. TENDANCES

La premiĂšre grande tendance partagĂ©e par tous les intervenants est l’augmentation de la consommation/vente de stupĂ©fiants, celles-ci Ă©tant visibles dans l’espace public. Ce dernier Ă©lĂ©ment est important, car cela Ă©tait, selon ces mĂȘmes intervenants, encore impensable il y a quelques annĂ©es Ă  une Ă©poque oĂč la vente et la consommation Ă©taient cachĂ©es. Les donnĂ©es relevĂ©es par la Zone de Police dans la zone du Commissariat 5 14 entre 2021 et 2023 reflĂštent bien cette tendance d’augmentation de la vente et consommation dans le quartier, qui comptabilise Ă  lui seul prĂšs de la moitiĂ© des faits enregistrĂ©s.

Pour la Zone de Police les consommateurs frĂ©quentent particuliĂšrement le quartier Nord, car c’est un lieu oĂč il est facile d’acheter des produits stupĂ©fiants et oĂč les prix sont intĂ©ressants. Le phĂ©nomĂšne est particuliĂšrement prĂ©sent autour de la Gare du Nord, aux rues verte, Rue LinnĂ©, Rue de la Prairie, Place de la Reine, Place Liedts, ainsi que dans le parc Reine verte. La police constate Ă©galement un effet de dĂ©placement constant des problĂ©matiques. En effet, lorsqu’une attention policiĂšre spĂ©cifique est donnĂ©e Ă  un lieu problĂ©matique, le trafic et la consommation ne font que se dĂ©placer temporairement vers un autre espace Ă  proximitĂ©, qui devient Ă  son tour problĂ©matique.

Également, liĂ©e Ă  cette consommation, la police souligne la prĂ©sence de rĂ©seaux de trafic de stupĂ©fiants qui se disputent la main mise sur le quartier. Ce phĂ©nomĂšne joue un rĂŽle important sur la dynamique du quartier, les nuisances et les violences qui en dĂ©coulent. L’actualitĂ© rĂ©cente relative aux fusillades Ă  Bruxelles illustre bien cette dynamique . MĂȘlĂ©es Ă  ce trafic, de nombreuses personnes prĂ©carisĂ©es et sans moyens de subsistance finissent par contribuer Ă  ce trafic en vendant eux-mĂȘmes des stupĂ©fiants afin de se faire un peu d’argent pour subvenir Ă  leurs besoins.

Également, les intervenants constatent une augmentation du nombre de personnes souffrant de problĂšmes de santĂ© mentale. À titre indicatif, Latitude Nord, service d’accueil bas seuil communal, rapporte dans son rapport d’évaluation 2023, 16 une augmentation du nombre de demandes posĂ©es en permanences d’accueil relatives Ă  la santĂ© mentale. Latitude Nord rapporte 6173 passages 17 lors de ses permanences en 2023, contre 4555 en 2023. Ces passages ont dĂ©coulĂ© sur 4427 demandes de dĂ©marches auprĂšs de l’équipe (contre 3379 l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente). Sur ces 4427 demandes, 14 % concernent des problĂ©matiques de santĂ© mentale, contre 11 % l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente, soit une augmentation de 66 % de demandes en lien avec la santĂ© mentale entre les deux annĂ©es. Sur les demandes de 2023, Latitude Nord a pu ouvrir 77 dossiers d’accompagnement Ă  long terme 18, sur ces dossiers 68 % d’entre eux comportent une « dimension santĂ© mentale » 19 , soit plus des 2/3 des dossiers ouverts sur cette mĂȘme annĂ©e.

Figure 3. DonnĂ©es policiĂšres relatives aux faits en lien avec les stupĂ©fiants entre 2021 et 2023. Ces donnĂ©es sont issues de la Direction StratĂ©gique de la Zone de Police Bruxelles-Nord. Les donnĂ©es policiĂšres sont le reflet de l’activitĂ© policiĂšre dans le quartier. Dans ce cadre, la Gare du Nord a fait l’objet, en 2023, d’une opĂ©ration spĂ©cifique de lutte contre le trafic de stupĂ©fiants dans et autour de la gare par la Task Force PolBruNo-Parquet.

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord 12

Trois critĂšres permettent Ă  Latitude Nord d’objectiver qu’un dossier comporte une dimension santĂ© mentale :

- Changement de comportement observĂ© chez la personne qui influence le contact et l’accompagnement de la personne, ce qui reprĂ©sente 42 % des dossiers.

- Passages en psychiatrie dans le parcours de la personne, ce qui représente 30 % des dossiers concernés.

- PrĂ©sence d’un rĂ©seau de soins en santĂ© mentale autour de la personne : psychiatre, psychologue, service de santĂ© mentale
 Ce qui reprĂ©sente 28 % des dossiers.

Plus spĂ©cifiquement concernant la consommation, sur les 5 derniĂšres annĂ©es, le type de produits a Ă©voluĂ©. Par le passĂ©, Ă©taient principalement consommĂ©s des opiacĂ©s. Aujourd’hui la consommation est plus orientĂ©e vers les stimulants, plus proches du mode de vie/survie des consommateurs, qui cherchent des stimulants pour rester Ă©veillĂ©s, comme le crack. À titre indicatif, Transit ASBL rapporte une augmentation de la consommation de CocaĂŻne/Crack parmi les usagers du territoire communal, passant de 68 % en 2022 Ă  81 % en 2023. 20

Également, plus rĂ©cemment est constatĂ©e une explosion du trafic et de la consommation de mĂ©dicaments qui sont dĂ©tournĂ©s de leur usage et surconsommĂ©s pour induire d’autres effets que ceux pour lesquels ils sont mis sur le marchĂ©. Pour en citer deux, le Lyrica et les BenzodiazĂ©pines sont largement consommĂ©s.

Enfin, la consommation de protoxyde d’azote est en augmentation. Ce dernier phĂ©nomĂšne touche tous les publics, jeunes et moins jeunes, prĂ©carisĂ©s et moins prĂ©carisĂ©s. En plus des effets physiques courts termes du produit, la consommation Ă  long terme peut entraĂźner de graves sĂ©quelles neurologiques. 21 Les professionnels ayant participĂ© aux focus groups rapportent que la consommation de ce produit touche un large public, y compris les jeunes et les trĂšs jeunes. Selon eux, la sensibilisation est insuffisante concernant cette consommation. Pour les consommateurs, le produit est souvent perçu comme n’étant pas une drogue puisque le produit n’est pas interdit. Par ailleurs, le produit est Ă©galement perçu comme peu nocif et donc pas dangereux pour la santĂ©. Les chiffres policiers de la Zone de Police nous permettent d’objectiver l’augmentation de la consommation de ce produit, principalement dans le quartier Nord (zone du commissariat 5).

Selon les donnĂ©es policiĂšres, on voit trĂšs clairement une surprĂ©sence du produit dans la zone d’intervention du Commissariat 5, correspondant pratiquement Ă  la zone du quartier Nord. Plus des deux tiers des PV relatifs Ă  la possession et l’utilisation de gaz hilarant y sont enregistrĂ©s.

Figure 4. DonnĂ©es policiĂšres relatives aux PV en lien avec la possession ou l’utilisation de gaz hilarants entre 2021 et 2023. Ces donnĂ©es sont issues de la Direction StratĂ©gique de la Zone de Police Bruxelles-Nord. Les donnĂ©es policiĂšres sont le reflet de l’activitĂ© policiĂšre dans le quartier.

COMPRÉHENSION DES ENJEUX
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B.3. CONSÉQUENCES SUR LE QUARTIER

Face Ă  la violence, qui peut Ă©merger dans certains endroits du quartier, les travailleurs de terrain, aussi bien des services publics que du milieu associatif, sont pris Ă  parti. Des organisations comme Espace P rapportent que les travailleurs.euses du sexe (TDS) ont Ă©laborĂ© des stratĂ©gies de contournement, Ă©vitant ainsi certaines rues ou zones jugĂ©es dangereuses. Espace P rapporte Ă©galement que des TDS, afin de maintenir leur tranquillitĂ©, en viennent Ă©galement Ă  payer des dealers ou des consommateurs pour Ă©viter les conflits et prĂ©server leur espace de travail. Étant donnĂ© ce climat de violence, certaines ASBL prennent la dĂ©cision de quitter le quartier pour s’installer ailleurs, faute de pouvoir remplir leurs missions. Également, Latitude Nord a pris la dĂ©cision, en fĂ©vrier 2024, de fermer temporairement sa permanence aprĂšs l’agression physique, dans ses locaux, de deux de ses travailleurs sociaux par un bĂ©nĂ©ficiaire.

Par ailleurs, la police rapporte observer des tensions entre les commerçants et les usagers du quartier. Les commerçants se sentant parfois obligĂ©s d’intervenir directement face aux vols et aux agressions. Ce climat de tension et de trafic est renforcĂ© par la prĂ©sence de jeunes tentĂ©s par l’économie souterraine, notamment la vente de drogue, en raison du manque d’opportunitĂ©s d’emplois rĂ©munĂ©rateurs. Les jeunes, attirĂ©s par l’argent facile offert dans le quartier nord, se retrouvent ainsi exposĂ©s Ă  des situations de vulnĂ©rabilitĂ©, tandis que les personnes sans papiers, dans des situations d’impasse et d’absence de perspectives, deviennent Ă©galement des cibles faciles dans ce contexte.

COMPRÉHENSION DES ENJEUX
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C.

FREINS A L’ACCOMPAGNEMENT DU PUBLIC

C.1. LIMITES DE L’OFFRE LOCALE DE SERVICES

Le quartier Nord, et plus largement la RĂ©gion de Bruxelles-Capitale, fait face Ă  des limites significatives en ce qui concerne l’accessibilitĂ© Ă  des services de premiĂšre et de deuxiĂšme ligne 22 adaptĂ©s aux besoins des publics cibles. Également, les problĂ©matiques locales nĂ©cessitent des approches intĂ©grĂ©es, prenant en considĂ©ration les diffĂ©rentes problĂ©matiques rencontrĂ©es par le public dans le quartier Nord, qui sont trĂšs souvent Ă  la croisĂ©e entre problĂšmes de santĂ© mentale, d’assuĂ©tudes et de prĂ©caritĂ©.

Manque de personnel

Si l’on compare le quartier Nord au reste de la rĂ©gion bruxelloise, ce dernier constitue un rĂ©el « hotspot » particuliĂšrement touchĂ© par les problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes. Un tel « hotspot » nĂ©cessite donc une attention particuliĂšre et des moyens consĂ©quents pour prendre en charge les problĂ©matiques qui y sont prĂ©sentes. Cependant, le constat partagĂ© par tous les partenaires prenant part Ă  ce diagnostic, qu’ils soient acteurs de la sĂ©curitĂ©, du social ou de la santĂ©, est qu’ils sont tous submergĂ©s par la charge de travail. Ils tĂ©moignent ainsi tous d’un manque de moyen qui empĂȘche une prise en charge optimale du public cible.

Manque de travail social mixte

Un des problĂšmes majeurs rĂ©side dans le manque de travail social mixte, capable d’offrir Ă  la fois des services d’accueil et une accroche du public au travers de l’outreaching. 23 MalgrĂ© la prĂ©sence de quelques rares structures dans le quartier qui propose ce type de services mixtes, il reste encore beaucoup Ă  faire pour atteindre pleinement les publics qui ont besoin d’une intervention proactive. Dans ce sens, l’accĂšs aux services de premiĂšre ligne reste un dĂ©fi, avec une offre souvent inadaptĂ©e aux situations complexes rencontrĂ©es par les individus dans le quartier.

À titre d’exemple, quand une personne prĂ©sente des problĂšmes de santĂ© mentale, on la redirige vers des services de psychiatrie, sans nĂ©cessairement considĂ©rer les problĂšmes de consommation auxquels fait face cette mĂȘme personne. Dans ce cas l’intervention ne sera pas adaptĂ©e Ă  la personne, et la prise en charge Ă©chouera trĂšs certainement. Inversement certaines personnes se retrouveront dans un service de sevrage pour mettre fin Ă  une addiction Ă  un produit, mais du fait de la non-prise en compte des problĂšmes de santĂ© mentale l’intervention n’est pas non adĂ©quate.

Inaccessibilité des services de deuxiÚme ligne

Une autre lacune importante rĂ©side dans l’inaccessibilitĂ© aux services de deuxiĂšme ligne. Comme pour la premiĂšre ligne, les CPAS, les services psychiatriques d’urgence et les maisons mĂ©dicales, sont surchargĂ©s, avec des listes d’attente dĂ©courageantes pour les bĂ©nĂ©ficiaires, qui finissent par renoncer aux accompagnements planifiĂ©s. Pour le cas spĂ©cifique des assuĂ©tudes, l’offre pharmaceutique est limitĂ©e, avec peu de pharmacies proposant des solutions adaptĂ©es dans le quartier Nord. Selon l’un des intervenants sociaux prĂ©sents lors des focus groups, les pharmacies schaerbeekoises donnant effectivement accĂšs Ă  des traitements de substitution se font de plus en plus rares. En effet, le public toxicomane est perçu comme particulier et plus difficile Ă  prendre en charge, ce qui dissuade les pharmaciens pour la prise en charge de ce public. Par ailleurs, la dĂ©livrance quotidienne (par exemple de mĂ©thadone) reprĂ©sente une charge de travail supplĂ©mentaire pour les pharmacies.

Concernant la police, la saturation de leurs services et l’absence de coordination entre les acteurs du social/de la santĂ© et des forces de l’ordre crĂ©ent des obstacles supplĂ©mentaires pour ceux qui cherchent de l’aide. Les options policiĂšres sont Ă©galement restreintes. Étant donnĂ© le manque de moyens et le manque de connaissance spĂ©cialisĂ©e en santĂ© mentale et assuĂ©tudes, la police doit se limiter Ă  des interventions rĂ©actives plutĂŽt qu’à des approches prĂ©ventives et d’accompagnement du public cible. La police est, dans ce sens, preneuse de davantage de travail transversal pour pallier cette difficultĂ©.

FREINS A L’ACCOMPAGNEMENT DU PUBLIC 15

C.2. OBSTACLES INSTITUTIONNELS

Obstacles administratifs et numériques

La lourdeur administrative constitue un obstacle majeur de prise en charge du public. Le processus bureaucratique de mise en ordre administrative, phase obligatoire pour assurer l’accĂšs aux droits sociaux et aux soins, est difficile Ă  comprendre et prend du temps Ă  mettre en Ɠuvre, aussi bien pour les usagers que pour les accompagnants de premiĂšre ligne. Cette lourdeur et cette complexitĂ© administrative entraĂźnent des retards considĂ©rables dans l’accĂšs Ă  un parcours de remise en logement, d’accĂšs Ă  une allocation, ou d’accĂšs aux soins, ce qui complique davantage les possibilitĂ©s de prise en charge d’un public dĂ©structurĂ© de personnes prĂ©sentant des troubles de santĂ© mentale et/ou d’assuĂ©tudes.

De plus, la remise en ordre administrative se fait généralement via les communes. De ce fait, pour le public en errance et sans abris, les déplacements entre communes peuvent entraßner la perte des droits acquis, créant ainsi des obstacles supplémentaires pour les personnes en mobilité. Ces démarches administratives, de plus en plus longues et complexes, agissent comme un parcours du combattant, décourageant ainsi de nombreuses personnes et entravant leur accÚs aux services de santé mentale, sociaux et de logement.

La pandĂ©mie de COVID-19 a accentuĂ© ces dĂ©fis en accĂ©lĂ©rant la numĂ©risation des services publics. Bien que la numĂ©risation puisse offrir des avantages certains en termes de commoditĂ© pour une majoritĂ© d’usagers, elle crĂ©e Ă©galement une «fracture numĂ©rique» pour ceux qui n’ont pas accĂšs Ă  internet, aux outils numĂ©riques, ou qui ont des compĂ©tences numĂ©riques limitĂ©es. L’accĂšs en ligne aux services, souvent sur rendez-vous, peut Ă©galement rĂ©duire le contact humain et compromettre la qualitĂ© de l’accueil, un Ă©lĂ©ment essentiel dans l’accompagnement des personnes. Ainsi, la numĂ©risation des services publics a davantage fragilisĂ© un public qui Ă©tait dĂ©jĂ  fragile et prĂ©caire.

Morcellement des compétences

Les travailleurs sociaux et de santĂ© se trouvent confrontĂ©s Ă  des dĂ©fis considĂ©rables en raison de la fragmentation des compĂ©tences institutionnelles en Belgique, en raison de son systĂšme fĂ©dĂ©ral et de l’existence de nombreux niveaux de pouvoir. Avec la rĂ©partition des responsabilitĂ©s entre le niveau fĂ©dĂ©ral, rĂ©gional, communautaire et communal, ainsi qu’entre diffĂ©rentes institutions, il devient difficile pour les professionnels d’orienter et de coordonner efficacement les soins et les services pour les individus confrontĂ©s Ă  des problĂšmes d’assuĂ©tudes et de santĂ© mentale.

C.3. DIFFICULTÉS DU TRAVAIL SOCIAL ET DE LA SANTÉ

Manque de reconnaissance

Les mĂ©tiers du social et de la santĂ© sont souvent peu valorisĂ©s et peu reconnus, bien qu’ils soient essentiels Ă  la prise en charge des problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes. Pour les participants, ces professions impliquent souvent un travail Ă©motionnellement exigeant, nĂ©cessitant une grande empathie, une capacitĂ© d’écoute et une rĂ©silience face Ă  la dĂ©tresse humaine. Cependant, ces compĂ©tences ne sont pas toujours pleinement comprises ou apprĂ©ciĂ©es Ă  leur juste valeur.

Également, le manque de reconnaissance peut se manifester Ă  travers des conditions de travail difficiles, un manque de soutien institutionnel et une pression constante pour fournir des services avec des ressources limitĂ©es. Tout cela peut dĂ©courager les individus talentueux et motivĂ©s de poursuivre une carriĂšre dans ces domaines, ce qui entraĂźne un manque de professionnels qualifiĂ©s et engagĂ©s pour rĂ©pondre aux besoins consĂ©quents du quartier.

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord 16

Perte de sens dans l’accueil bas seuil

La perte de sens dans l’accueil bas seuil constitue un dĂ©fi majeur. Par manque de moyens, certaines prises en charge doivent ĂȘtre refusĂ©es, ce qui a pour effet direct de « rehausser » le seuil de l’accueil. Autrement dit, par manque de moyens, les travailleurs sont obligĂ©s de prioriser certains accompagnements par rapport Ă  d’autres, ce qui est contradictoire avec les principes de l’accueil bas seuil qui se veut inconditionnel et universel.

Cette tension se manifeste notamment dans les centres d’hĂ©bergement et les lieux d’accueil, oĂč la violence devient la principale de communication des bĂ©nĂ©ficiaires Ă  l’égard des Ă©quipes d’accompagnants. Parfois, cette violence atteint un tel niveau que des exclusions ou l’intervention de la police sont nĂ©cessaires. Cette rĂ©alitĂ© laisse les bĂ©nĂ©ficiaires dans une situation encore plus prĂ©caire qu’avant leur arrivĂ©e. Souvent, les travailleurs de premiĂšre ligne absorbent cette violence, mettant en pĂ©ril leur propre bien-ĂȘtre. La frustration est palpable lorsqu’on constate que des personnes sont exclues et retournent Ă  la rue, renforçant ainsi le cycle infernal de la prĂ©caritĂ©.

Cette Ă©volution vers des conditions d’accueil plus restrictives remet en question le sens mĂȘme du travail social, alimentant un sentiment d’épuisement au sein des Ă©quipes. Ce sentiment d’impuissance se traduit par un risque accru de burnout et d’absentĂ©isme, amplifiĂ© par une charge de travail croissante et des moyens insuffisants dans tous les services, qu’ils soient sociaux, policiers ou de santĂ©.

Violences Ă  l’égard des travailleurs de premiĂšre ligne

En lien avec la perte de sens, la violence constitue un problĂšme majeur dans les interactions entre services de premiĂšre ligne et usagers/bĂ©nĂ©ficiaires. Lorsque la violence devient le principal moyen de communication, le dialogue et l’aide sont relĂ©guĂ©s au second plan. Les travailleurs sociaux se retrouvent ainsi confrontĂ©s Ă  des situations de violence immĂ©diate, impliquant parfois l’utilisation d’armes blanches ou Ă  feu.

Face Ă  de telles circonstances, les accompagnants se sentent dĂ©munis, manquant souvent des outils nĂ©cessaires pour intervenir efficacement. Le public prĂ©sentant des problĂšmes de santĂ© mentale et/ou d’assuĂ©tude est un public particuliĂšrement difficile Ă  apprĂ©hender. Cette ambiguĂŻtĂ© rend les interventions encore plus complexes pour les travailleurs sociaux, qui doivent composer avec un environnement imprĂ©visible et potentiellement dangereux.

NĂ©cessitĂ© d’adaptation aux nouveaux phĂ©nomĂšnes

Les professionnels sont confrontĂ©s Ă  l’évolution constante des produits et des modes de consommation. L’adaptation Ă  ces changements s’avĂšre souvent difficile et nĂ©cessite de nombreux « essais et erreurs » dans la comprĂ©hension et la prise en charge de ces nouvelles rĂ©alitĂ©s. Dans ce sens, le mĂ©tier du social, en particulier en premiĂšre ligne, doit constamment se transformer, s’adapter et se rĂ©inventer. Les travailleurs doivent repenser leurs pratiques, intĂ©grer de nouvelles dimensions du travail social qui dĂ©passent parfois les connaissances acquises lors de leur parcours de formation. Cette rĂ©invention demande un ajustement constant et une remise en question de ses propres mĂ©thodes de travail. En effet, dans les Ă©changes entre professionnels, nombreux sont ceux qui expriment leurs doutes et leurs interrogations quant Ă  la pertinence de leurs approches. Bien que leur intuition soit souvent juste, les travailleurs n’ont pas toujours un cadre adĂ©quat qui leur permette de sortir des pratiques conventionnelles qui ne sont plus toujours adaptĂ©es.

Ainsi, les partenaires soulignent la nĂ©cessitĂ© d’un temps de pause, d’un recul pour repenser les pratiques, afin d’ĂȘtre de nouveau efficacement prĂ©sent auprĂšs du public. Cependant, la formation continue, pourtant cruciale dans ce processus d’adaptation est souvent entravĂ©e par les contraintes prĂ©cĂ©demment mentionnĂ©es, notamment de surcharge de travail induit par un manque de personnels et de moyens. Dans des situations de saturation des services, il est difficile pour les travailleurs de premiĂšre ligne de prendre le temps de partir en formation, surtout quand il y a des suivis et des permanences Ă  assurer. Cette situation crĂ©e un cercle vicieux oĂč le souffle du social de premiĂšre ligne se trouve d’autant plus affaibli.

FREINS A L’ACCOMPAGNEMENT DU PUBLIC
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C.4. DIFFICULTÉS LIÉES AU PUBLIC

DifficultĂ©s liĂ©es Ă  l’interculturalitĂ©

Le quartier Nord se distingue par sa diversitĂ© culturelle prononcĂ©e, oĂč les usagers ne maĂźtrisent pas toujours une des langues nationales et pour qui les perceptions de la santĂ© et de la maladie peuvent diffĂ©rer de celles de la culture occidentale. Cette rĂ©alitĂ© soulĂšve la nĂ©cessitĂ© de repenser l’assistance de maniĂšre spĂ©cifique et adapter en fonction du public visĂ©. En effet, certaines nationalitĂ©s ont des conceptions diffĂ©rentes de la santĂ© et des soins, exigeant ainsi des travailleurs une approche transculturelle.

Bien que certains soient sensibles Ă  ces problĂ©matiques, il est impĂ©ratif d’approfondir davantage ces initiatives dans le Quartier Nord, notamment pour favoriser l’accroche avec tous les types de publics. Cela met en lumiĂšre l’importance de dĂ©velopper des compĂ©tences et des mĂ©thodes de travail qui prennent en compte la diversitĂ© culturelle et les besoins spĂ©cifiques des diffĂ©rents groupes de population dans ce quartier.

Précarité et instabilité du public

La prise en charge des personnes exclues des droits constitue un dĂ©fi majeur. Le fonctionnement institutionnel fait que seules les personnes Ă©ligibles, c’est-Ă -dire en ordre administrativement, peuvent ĂȘtre rĂ©ellement accompagnĂ©es par les services sociaux et de santĂ© prĂ©sents dans le quartier nord. De cette façon, les personnes sans titre de sĂ©jour, publics qui reprĂ©sentent une part non nĂ©gligeable du public des partenaires du quartier Nord, ne sont pas Ă©ligibles Ă  l’accĂšs aux soins ou aux aides sociales. À l’inverse, une grande part des bĂ©nĂ©ficiaires des services de premiĂšre ligne rentrent dans les conditions d’accĂšs aux droits, mais sont complĂštement dĂ©connectĂ©s du systĂšme institutionnel, et ne veulent pas y rentrer. Ainsi, ce public spĂ©cifique demande parfois un investissement sur la durĂ©e, avec un contact rĂ©gulier pouvant parfois s’étendre sur plusieurs annĂ©es, ne serait-ce que pour tisser un premier lien de confiance pour ensuite convaincre la personne de se rendre aux administrations et de faire valoir ses droits. 24

Dans ce sens, les publics dĂ©sinstitutionnalisĂ©s se heurtent Ă  des obstacles administratifs, par exemple dans l’accĂšs Ă  un traitement mĂ©dical ; comment financer un traitement mĂ©dical, tel qu’un traitement de substitution ou des antibiotiques, pour ceux qui ne sont pas couverts par l’assurance maladie ou n’ont pas de carte de santĂ© ?

La prĂ©caritĂ© du public pose Ă©galement des dĂ©fis de communication, notamment en ce qui concerne le suivi et la prise de rendez-vous. Par exemple, de nombreux bĂ©nĂ©ficiaires disposent d’un tĂ©lĂ©phone temporaire, qui peut ĂȘtre rapidement perdu, volĂ© ou vendu, compliquant ainsi le suivi psychologique ou la communication pour les rendez-vous administratifs. Cette instabilitĂ© affecte Ă©galement les prises de rendez-vous avec les services sociaux, en particulier lorsque les personnes n’ont pas d’adresse fixe pour recevoir du courrier.

C5. OBSTACLES POLITIQUES

Surmédiatisation du quartier

MalgrĂ© les efforts pour attaquer les problĂšmes complexes prĂ©sents dans le quartier Ă  moyen et long terme, les Ă©quipes de terrain sont souvent contraintes de rĂ©agir, sous l’influence mĂ©diatique, Ă  des situations immĂ©diates amplifiĂ©es par la presse ou les rĂ©seaux sociaux. De fait, le quartier Nord fait rĂ©guliĂšrement l’objet d’attentions des mĂ©dias, souvent au travers d’un contenu qui stigmatise le quartier et ses habitants. En rĂ©action Ă  cela, les pressions des politiques pour des solutions rapides et immĂ©diates Ă  des problĂšmes structurels et complexes ne font qu’accentuer les dĂ©fis rencontrĂ©s par les Ă©quipes de terrain, soulignant ainsi les tensions entre les demandes mĂ©diatiques et politiques instantanĂ©es et les rĂ©ponses durables nĂ©cessaires pour rĂ©soudre les problĂšmes de fond dans le quartier.

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord 18

Gentrification du quartier

La gentrification des quartiers historiquement populaires, tels que le quartier Nord, engendre d’importantes rĂ©percussions sur la dynamique sociale. Les nouveaux rĂ©sidents et occupants souvent plus aisĂ©s peuvent exercer des pressions pour des politiques de dĂ©veloppement qui ne rĂ©pondent pas aux besoins des populations prĂ©carisĂ©es. En consĂ©quence, la gentrification du quartier peut fragmenter davantage la communautĂ© et accroĂźtre les disparitĂ©s socioĂ©conomiques, rendant la prise en charge des populations prĂ©carisĂ©es plus difficile et complexe.

Lutte contre le trafic de drogues

La police tĂ©moigne d’un manque de moyens pour lutter contre le trafic de drogues. D’une part, le trafic de drogue s’internationalise, rendant la remontĂ©e des filiĂšres complexe pour les forces de l’ordre au niveau local. Les rĂ©seaux de trafic sont alimentĂ©s par d’autres villes, voire d’autres pays, la seule rĂ©ponse que la police locale peut apporter dans ce contexte est une rĂ©ponse rĂ©active. Également, les ressources financiĂšres et humaines allouĂ©es aux services de police au niveau local sont insuffisantes, ce qui restreint la capacitĂ© des services Ă  mener des opĂ©rations de grande envergure et Ă  maintenir une prĂ©sence constante dans les quartiers touchĂ©s par le trafic de drogue. Pour lutter contre ce trafic de grande ampleur, la police locale n’a ni les moyens humains ni les capacitĂ©s de remonter les filiĂšres.

Criminalisation des usagers de drogue

Comme soulignĂ© par la Fedito Bxl, la loi du 24 fĂ©vrier 1921 n’interdit pas l’usage de drogues, mais elle interdit tous les comportements « pĂ©riphĂ©riques » Ă  cette consommation. 25 Ainsi, une personne qui achĂšte et dĂ©tient de la drogue pourra ĂȘtre pĂ©nalement condamnĂ©e, alors mĂȘme que la consommation ne peut se faire sans l’obtention et la dĂ©tention des produits. Par ailleurs, aucune distinction n’est faite entre consommateurs et trafiquants, la dĂ©tention reste interdite, mĂȘme lorsqu’il s’agit d’une consommation personnelle.

De ce fait, la criminalisation de l’usage de drogue complique davantage le travail des Ă©quipes de terrain et de la police. Les consommateurs se retrouvent dans un Ă©tat d’insĂ©curitĂ© et de stigmatisation, entravant ainsi leur accĂšs aux filiĂšres d’accompagnement social et de santĂ© vers lesquelles ils pourraient se tourner.

Crise de l’accueil

D’aprĂšs l’article 6 de la loi du 12 janvier 2007, tout demandeur d’asile doit bĂ©nĂ©ficier d’une aide matĂ©rielle qui est dĂ©finie comme « l’hĂ©bergement, les repas, l’habillement, l’accompagnement mĂ©dical, social et psychologique et l’octroi d’une allocation journaliĂšre », et ce le temps nĂ©cessaire Ă  la procĂ©dure. Depuis l’étĂ© 2022, ce droit n’est plus respectĂ© et impacte considĂ©rablement la situation dans le quartier Nord.

D’une part, les demandeurs d’asile se retrouvent livrĂ©s Ă  eux-mĂȘmes, en errance dans la rue, sans moyens de subsistance, avec toutes les consĂ©quences physiques et psychiques que ces conditions de vie prĂ©caires impliquent. À la suite de cela, de nombreux demandeurs d’asile tombent dans une d’auto-exclusion et de consommation de substances, s’ensuit alors un cercle vicieux pour ces personnes.

D’autre part, cette situation impacte considĂ©rablement les structures d’accueil qui se retrouvent dĂ©bordĂ©es par de nouvelles demandes de ce public. Les services de premiĂšres lignes doivent alors adapter leurs maniĂšres de travailler Ă  cette nouvelle difficultĂ©, ce qui entrave leur capacitĂ© Ă  mener Ă  bien leurs missions. Ces services se retrouvent Ă  faire des dĂ©marches et des accompagnements qui ne devraient pas ĂȘtre faits si la loi Ă©tait bel et bien respectĂ©e.

FREINS A L’ACCOMPAGNEMENT DU PUBLIC 19

D. RECOMMANDATIONS ET PISTES D’ACTIONS

Dans ce dernier chapitre, diffĂ©rentes recommandations et pistes d’actions sont formulĂ©es. Celles-ci sont issues des intervenants et des groupes de travail auxquels ils ont participĂ©. Au total, seize propositions ont ainsi Ă©tĂ© formulĂ©es et sont reprises ci-dessous.

D.1. DÉVELOPPER L’INTERPRÉTARIAT ET LA MÉDIATION CULTURELLE

Il est impĂ©ratif de dĂ©velopper et de renforcer les services d’interprĂ©tariat et de mĂ©diation interculturelle dans le quartier Nord. Ce quartier, caractĂ©risĂ© par une forte diversitĂ© ethnique et linguistique, nĂ©cessite des efforts accrus pour assurer une communication efficace avec ses habitants. Les mĂ©diateurs interculturels jouent un rĂŽle essentiel en tant que facilitateurs de comprĂ©hension et de collaboration entre les diffĂ©rentes communautĂ©s prĂ©sentes dans le quartier. Ils agissent Ă©galement en tant que passeurs de connaissances en matiĂšre de services sociaux et de santĂ©, fournissant des informations cruciales sur l’accĂšs aux soins et aux ressources disponibles.

Il est frĂ©quent de constater que certains habitants et usagers du quartier n’utilisent pas les services mĂ©dicaux, soit parce qu’ils ne connaissent pas les procĂ©dures et les modalitĂ©s d’accĂšs, ou bien parce qu’ils n’ont pas les mĂȘmes « rĂ©fĂ©rentiels » culturels, cela est notamment le cas pour la santĂ© mentale. Ainsi, la mĂ©diation culturelle est indispensable pour surmonter les barriĂšres linguistiques et culturelles, assurant ainsi une meilleure accessibilitĂ© et une utilisation plus efficace des services de santĂ© et sociaux dans le quartier. Cette recommandation est Ă©galement dĂ©fendue par le MĂ©ridien dans son diagnostic communautaire. 26

D.2. ÉTENDRE LE PROGRAMME « HOUSING FIRST » EN RÉGION DE BRUXELLES-CAPITALE

Il est crucial d’allouer davantage de ressources aux programmes de remise en logement de type « Housing First ». Ce type d’action vise Ă  remettre en logement des personnes en situation de sansabrisme. La remise en logement est utilisĂ©e comme premier levier d’action pour une rĂ©intĂ©gration du public prĂ©carisĂ©. Ce type d’action a dĂ©jĂ  ses preuves. 27 Étant donnĂ© les rĂ©sultats positifs et les besoins criants en termes de logement pour les personnes prĂ©carisĂ©es, une telle initiative doit ĂȘtre renforcĂ©e. Renforcer ce dispositif permettrait de sortir de nombreuses personnes actuellement contraintes de faire appel Ă  des centres d’accueil d’urgence, ces derniers Ă©tant complĂštement engorgĂ©s et n’offrant qu’une solution Ă  court terme et d’urgence aux publics accompagnĂ©s. Selon les chiffres du dĂ©nombrement de Bruss’help, plus de 7000 personnes sans encore sansabris dans la rĂ©gion de Bruxelles en 2022 (contre 5313 en 2020). 28

Par ailleurs, ce type de dispositif doit ĂȘtre Ă©tendu, car de nombreuses personnes ne sont pas, Ă  l’heure actuelle, « éligibles » pour bĂ©nĂ©ficier de ce type de logement, notamment les personnes en situation irrĂ©guliĂšre, qui composent une part non nĂ©gligeable du public en rue et souffrant de problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes, notamment dans le quartier Nord.

Dans ce sens, de nombreux espaces inoccupĂ©s en RĂ©gion de Bruxelles-Capitale 29 peuvent ĂȘtre mobilisĂ©s pour rĂ©pondre aux besoins en hĂ©bergement des populations prĂ©carisĂ©es. Pour ce faire, il est essentiel d’adopter une politique proactive d’activation des espaces vacants et inoccupĂ©s. Cela implique d’identifier les espaces «vides» ou sous-utilisĂ©s, tels que les bĂątiments abandonnĂ©s ou sous-exploitĂ©s, et de les rĂ©affecter pour pouvoir offrir un logement aux personnes prĂ©carisĂ©es, premiĂšre Ă©tape dans un processus de rĂ©insertion sociale et de santĂ©. Cette approche permettrait de pallier le manque d’hĂ©bergements disponibles et d’exploiter de maniĂšre efficace les ressources existantes pour rĂ©pondre aux besoins de logement des populations vulnĂ©rables.

RECOMMANDATIONS ET PISTES D’ACTIONS 20

Une seconde alternative Ă  envisager est la crĂ©ation d’un modĂšle similaire au Housing First, qu’on pourrait appeler « Working First » 30. Ce modĂšle vise Ă  valoriser les compĂ©tences des personnes peu qualifiĂ©es ou ne maĂźtrisant pas la langue, en leur offrant des activitĂ©s rĂ©munĂ©rĂ©es et valorisantes dans le respect de leur dignitĂ©, et cela afin de les autonomiser. Ce type de dispositif serait Ă©galement bĂ©nĂ©fique pour Ă©viter que ces individus ne tombent dans l’économie informelle, notamment le trafic de drogue, comme observĂ© dans le quartier Nord. Dans ce sens, il est important de proposer des alternatives concurrentielles et rĂ©munĂ©ratrices telles que des emplois temporaires rĂ©munĂ©rĂ©s Ă  la journĂ©e, mĂȘme au niveau communal.

D.3. RENFORCER ET PÉRENNISER LES FINANCEMENTS DE LA PREMIÈRE LIGNE

Il est essentiel de revaloriser et de renforcer les services de premiĂšre ligne en leur assurant des budgets pĂ©rennes. Comme mis en avant prĂ©cĂ©demment, les acteurs de premiĂšre ligne sont dĂ©bordĂ©s et font face Ă  un manque structurel de personnel. Par ailleurs, de nombreux services fonctionnent sur la base d’initiatives financĂ©es temporairement, sous forme d’appels Ă  projets. Avec ce format, les financements ne sont que temporaires et ne sont pas assurĂ©s dans la durĂ©e. Cela a pour effet d’entraĂźner une perte d’effectifs et d’expertise au fil du temps dans les associations et services financĂ©s de la sorte. De fait, un financement temporaire n’est ni attractif ni enviable. Cette instabilitĂ© annuelle crĂ©e un climat d’incertitude qui nuit Ă  la qualitĂ© et la pĂ©rennitĂ© des services offerts aux bĂ©nĂ©ficiaires. Il est donc primordial de pĂ©renniser les financements des programmes de premiĂšre ligne afin de garantir une continuitĂ© dans l’intervention sociale et sortir d’une logique d’intervention dans l’urgence et Ă  court terme.

D.4. ÉTENDRE SPÉCIFIQUEMENT LES SERVICES DITS « BAS SEUILS »

Plus spĂ©cifiquement Ă  la premiĂšre ligne, il est nĂ©cessaire de promouvoir les services d’accueil dit « bas seuil ». 31 Ces services bas seuils ont la particularitĂ© d’offrir un accueil universel et de toucher les publics prĂ©carisĂ©s qui ne trouvent de place dans aucuns autres services de premiĂšre ligne. En effet, ces services adaptent leurs offres d’accompagnement et leurs mĂ©thodes d’accroche aux rĂ©alitĂ©s et contraintes du public, notamment en allant directement sur leurs lieux de vie. Ainsi, les publics concernĂ©s par ce diagnostic, ceux ayant des problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes, qui sont parmi les plus dĂ©connectĂ©s des parcours institutionnels, sont spĂ©cifiquement accrochĂ©s par les services dits « bas seuils ». Pour lutter efficacement contre les problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes dans le quartier Nord, il est donc impĂ©ratif que les services d’accueils bas seuils soient renforcĂ©s au travers de ressources humaines et financiĂšres supĂ©rieures.

RECOMMANDATIONS ET PISTES D’ACTIONS 21

D.5. FAVORISER LE TRAVAIL DE RUE ET L’ACCUEIL PAR PERMANENCE

Également, et dans le sens d’un accueil plus adaptĂ© aux publics prĂ©carisĂ©s, sujets Ă  des problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tude, il est crucial d’amĂ©liorer l’accĂšs aux services publics, sociaux, et de santĂ© du quartier Nord. Pour ce faire, il convient de revoir les modalitĂ©s d’accĂšs actuelles, en passant notamment par la mise en place de systĂšmes de permanences plutĂŽt que par des systĂšmes de rendez-vous. Cette approche plus flexible permettrait de faciliter l’accĂšs aux services pour les personnes instables ou prĂ©carisĂ©es, qui peuvent avoir des difficultĂ©s Ă  respecter des contraintes horaires et des rendez-vous fixĂ©s Ă  l’avance.

De plus, afin de garantir un accompagnement efficace, il serait opportun d’offrir la possibilitĂ© aux travailleurs sociaux de se dĂ©placer avec les usagers et de les accompagner lors de leurs rendezvous, ce qui favoriserait une prise en charge globale et adaptĂ©e Ă  leurs besoins spĂ©cifiques. Cependant, ce type d’accompagnement est chronophage et demande des ressources humaines supplĂ©mentaires.

Enfin, il est important de souligner l’importance du travail de rue, qui permet aux travailleurs sociaux d’ĂȘtre en contact direct, sur les lieux de vie des usagers, et de toucher les populations les plus dĂ©sinstitutionnalisĂ©es. En mettant en Ɠuvre ces mesures, il serait possible d’amĂ©liorer significativement l’accĂšs aux services sociaux et de santĂ© dans le quartier Nord.

D.6. PROMOUVOIR LE TRAVAIL « MIXTE »

Pour de nombreux partenaires ayant participĂ© Ă  l’élaboration de ce diagnostic, le travail mixte est une de piste de solutions aux problĂšmes rencontrĂ©s dans le quartier. Comme prĂ©sentĂ© prĂ©cĂ©demment, les problĂšmes de santĂ© mentale ne peuvent ĂȘtre compris et traitĂ©s sans considĂ©rer leur interaction avec les problĂšmes d’assuĂ©tudes et de prĂ©caritĂ©. Dans ce sens, il est judicieux d’envisager la crĂ©ation d’équipes dites « mixtes » 32, alliant plusieurs champs d’expertise pour optimiser la prise en charge et l’impact des interventions auprĂšs du public cible. Par exemple, des Ă©quipes interdisciplinaires rĂ©alisant des maraudes mixtes impliquant les Ă©quipes travaillant dans le domaine de la santĂ© mentale, de la prĂ©caritĂ© et de la prĂ©vention, en collaboration avec la police.

Toutefois, il est crucial de reconnaĂźtre les spĂ©cificitĂ©s de chaque mĂ©tier et de maintenir une approche nuancĂ©e envers les publics visĂ©s, notamment en tenant compte des perceptions diffĂ©rentes de la prĂ©sence policiĂšre dans les actions sociales et de santĂ©. Il est donc suggĂ©rĂ© d’explorer des modĂšles d’association et de mutualisation des services du secteur de la sĂ©curitĂ©, du social et de la santĂ© Ă  moyen terme afin de mieux rĂ©pondre aux nouveaux enjeux et dĂ©fis rencontrĂ©s sur le terrain.

D.7. DÉVELOPPER DES LIEUX D’ÉCHANGES POUR LES ACTEURS LOCAUX

Il est proposĂ© de dĂ©velopper un cadre dĂ©ontologique favorisant les espaces de concertation et de discussion entre les diffĂ©rents services, tels que la police, les services de prĂ©vention, sociaux, de santĂ©, et tout autre acteur touchĂ© par les problĂ©matiques de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes. Un tel dispositif permettrait une meilleure communication, une coopĂ©ration et une comprĂ©hension accrue des rĂŽles de chacun, favorisant ainsi le suivi des problĂ©matiques dans le quartier.

Dans ce sens, il est essentiel de faciliter l’accĂšs Ă  des outils permettant une connaissance approfondie des ressources disponibles au niveau local. Parmi ces outils, il serait bĂ©nĂ©fique de mettre en place un systĂšme d’accĂšs Ă  la carte sociale pour tous les acteurs institutionnels et associatifs du quartier. Cette carte offrirait un inventaire dĂ©taillĂ© avec les coordonnĂ©es des institutions et des services disponibles sur le territoire. Par exemple, la crĂ©ation d’une cartographie du travail de rue ainsi que la mise en place d’un site internet rĂ©pertoriant les acteurs et initiatives locales dans le quartier pourraient Ă©galement s’avĂ©rer trĂšs utiles pour favoriser la coordination et la collaboration entre les diffĂ©rents acteurs communautaires.

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord 22

D.8. CRÉER UN HUB MULTIDISCIPLINAIRE DE PROXIMITÉ

Afin d’assurer un meilleur accĂšs aux soins et Ă  l’aide matĂ©rielle, il est proposĂ© de dĂ©velopper des solutions d’accompagnement social et de santĂ© adaptĂ©s et intĂ©grĂ©s, en bas seuil, en mettant en place un hub social-santĂ© local, idĂ©alement situĂ© Ă  proximitĂ© de la Gare du Nord. Ce hub devrait offrir un ensemble de services variĂ©s, par exemple des consultations mĂ©dicales, la possibilitĂ© d’ouvrir les droits sociaux, de dĂ©bloquer des situations administratives, de donner accĂšs Ă  une adresse de rĂ©fĂ©rence, etc. Tout ceci dans un seul et mĂȘme lieu.

Il serait bĂ©nĂ©fique que ce hub soit conçu comme un projet multidisciplinaire rĂ©unissant divers acteurs, tels que des travailleurs sociaux, des professionnels de la santĂ©, des psychologues, etc., afin de rĂ©pondre efficacement aux besoins complexes des habitants et usagers du quartier nord. Dans ce sens, il est primordial de veiller Ă  ce que toutes les interventions nĂ©cessaires se fassent sur place, sans rediriger les personnes vers d’autres services. Les services communaux et du CPAS sont des acteurs primordiaux dans l’ouverture des droits qui pourraient se faire dans ce hub.

D.9. METTRE EN PLACE UN CHAUFFOIR DANS LE QUARTIER NORD

En complĂ©ment de la proposition prĂ©cĂ©dente, le quartier pourrait se doter d’un chauffoir de jour Ă  destination du public prĂ©carisĂ© occupant le quartier. Un tel dispositif Ă  l’avantage d’attirer le public prĂ©carisĂ©, et notamment les personnes prĂ©sentant des problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes. Cela permettrait alors aux travailleurs sociaux d’accrocher plus aisĂ©ment ce public spĂ©cifique, dans un lieu qui permet de crĂ©er un premier de confiance, afin d’initier un processus de resocialisation et de soin. Il faut Ă©galement prĂ©ciser qu’une telle initiative avait Ă©tĂ© mise en place par le passĂ©, Ă  l’initiative du CPAS, Ă  proximitĂ© du quartier Nord. Malheureusement, ce chauffoir a dĂ» fermer par manque de moyens, au regret des Ă©quipes de premiĂšre ligne. 33 L’ouverture d’un chauffoir dans le Quartier Nord, en addition du projet de hub social santĂ©, pourrait offrir une solution intĂ©grĂ©e et efficace aux freins prĂ©cĂ©demment Ă©noncĂ©s dans ce diagnostic.

D.10. OUVRIR UNE SALLE DE CONSOMMATION À MOINDRE DE RISQUE DANS LE QUARTIER NORD

À l’image des initiatives rĂ©centes en rĂ©gion bruxelloise, la mise en place d’une salle de consommation Ă  moindre risque dans le quartier Nord permettrait de rĂ©pondre Ă  un besoin largement partagĂ© par les acteurs locaux. Plusieurs initiatives de ce type ont Ă©tĂ© initiĂ©es, mais ces installations ne touchent que les usagers dans un pĂ©rimĂštre restreint autour de l’implantation. Dans ce sens, les usagers du quartier Nord sont trop loin que pour que ces initiatives leur soient bĂ©nĂ©fiques. Ainsi, une salle de consommation Ă  moindre risque, dans le quartier Nord, permettrait d’accrocher les consommateurs de cette espace.

Cette initiative serait bĂ©nĂ©fique pour plusieurs raisons : elle offrirait un environnement de consommation sĂ©curisĂ©, rĂ©duisant ainsi les risques pour la santĂ© des usagers et limitant leur exposition dans l’espace public. Cela contribuerait Ă  dĂ©sengorger les lieux de consommation actuels et Ă  amĂ©liorer la sĂ©curitĂ© et la qualitĂ© de vie dans le quartier. En somme, la crĂ©ation d’une salle de consommation Ă  moindre risque dans cette zone constituerait une mesure proactive pour rĂ©pondre aux besoins de santĂ© publique et amĂ©liorer le bien-ĂȘtre des habitants et usagers du quartier

RECOMMANDATIONS ET PISTES D’ACTIONS 23

D.11. ÉTABLIR UNE CONVENTION ENTRE LE CPAS ET LES PARTENAIRES LOCAUX

Pour surmonter les obstacles liĂ©s Ă  l’accĂšs aux soins et aux aides sociales dans le quartier Nord, il est impĂ©ratif d’optimiser la collaboration entre le CPAS et les partenaires locaux. La mise en place de procĂ©dures simplifiĂ©es entre le CPAS et ces organisations locales constituerait une avancĂ©e majeure, accĂ©lĂ©rant et facilitant ainsi l’accompagnement dispensĂ© par les travailleurs sociaux actifs dans le quartier, qui auraient alors un point de contact privilĂ©giĂ© avec le CPAS. Il est Ă©galement crucial d’adresser la question de la distance entre le quartier Nord et le CPAS de Schaerbeek, qui constitue un frein Ă  l’accĂšs aux droits pour les personnes prĂ©carisĂ©es.

Pour ces raisons, une solution envisageable serait la conclusion de conventions entre les CPAS et les organisations locales bas seuil, permettant ainsi une meilleure collaboration dans la prise en charge du public prĂ©sentant des problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes dans le quartier Nord. De plus, l’établissement d’une prĂ©sence locale du CPAS, avec la possibilitĂ© d’ouvrir des droits sur place, renforcerait considĂ©rablement l’accessibilitĂ© aux services sociaux dans le quartier.

D.12. FORMER LES SERVICES DE PREMIÈRE LIGNE AUX PROBLÉMATIQUES DE SANTÉ MENTALE ET D’ASSUÉTUDES

Afin de promouvoir un accueil respectueux et adaptĂ© aux besoins des usagers, il est essentiel de sensibiliser le personnel non spĂ©cialisĂ© aux rĂ©alitĂ©s des personnes prĂ©sentant des problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes. Cela nĂ©cessite une campagne d’information visant Ă  combattre les prĂ©jugĂ©s et les mĂ©connaissances liĂ©s Ă  ces populations et des formations spĂ©cifiques Ă  la prise en charge de ce type de public.

De nombreux programmes de qualitĂ© existent, mais ils doivent ĂȘtre accessibles et suivis par un plus large public de travailleurs de premiĂšre ligne, notamment ceux qui ne sont pas familiers avec les problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes. Au travers de la formation des services dits « gĂ©nĂ©ralistes », il serait possible d’amĂ©liorer la qualitĂ© de l’accueil et des services offerts aux personnes vulnĂ©rables, tout en renforçant les compĂ©tences et la collaboration entre les professionnels du social, de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ©.

D.13. SENSIBILISER LES PHARMACIES LOCALES À LA DÉLIVRANCE DES TRAITEMENTS DE SUBSTITUTION

Le manque d’accĂšs aux traitements de substitution, pour les personnes consommatrices, est un frein majeur Ă  la sortie d’addictions. Les acteurs locaux le confirment ; trĂšs peu de pharmacies proposent actuellement ces traitements dans le Quartier Nord, ce qui crĂ©e des obstacles significatifs pour ceux qui souhaitent rentrer dans un processus de rĂ©tablissement.

Pour remĂ©dier Ă  cette lacune importante dans notre systĂšme de santĂ©, les pharmacies doivent ĂȘtre sensibilisĂ©es et encouragĂ©es Ă  dĂ©livrer ces traitements de substitution. Cela pourrait se faire par le biais de partenariats avec des organisations spĂ©cialisĂ©es dans le traitement des addictions, des campagnes de sensibilisation et des incitations financiĂšres pour les pharmacies qui s’engagent Ă  fournir ces services vitaux. Également, une formation adĂ©quate du personnel sur les besoins spĂ©cifiques des personnes aux prises avec des addictions serait Ă©galement essentielle pour garantir une prestation de services de qualitĂ©.

Diagnostic santé mentale et assuétudes dans le Quartier Nord 24

D.14. DÉCRIMINALISER LES USAGERS DE DROGUES

Comme exposĂ© dans les obstacles politiques Ă  l’accompagnement du public, la criminalisation de l’usage de drogues complique la prise en charge du public consommateur. Ce diagnostic soutient la dĂ©criminalisation de l’usage de drogues, comme dĂ©fendu par la Fedito Bxl. 34 La dĂ©criminalisation prĂ©sente plusieurs avantages. Tout d’abord, elle met fin Ă  la criminalisation de comportements qui ne causent pas de prĂ©judice direct Ă  autrui, permettant une rĂ©orientation des ressources judiciaires et policiĂšres vers des activitĂ©s plus prioritaires.

En traitant l’usage de drogues comme un enjeu de santĂ© publique plutĂŽt que comme un crime, les individus concernĂ©s peuvent accĂ©der plus facilement Ă  des services de prĂ©vention, de traitement et de rĂ©habilitation, favorisant ainsi une approche plus efficace pour rĂ©duire les dommages associĂ©s Ă  la consommation de drogues.

Enfin, la décriminalisation contribue à désengorger le systÚme judiciaire et policier, permettant une utilisation plus efficiente des ressources et une meilleure focalisation sur la prévention et la réduction des risques liés à la consommation de drogues.

D.15. ÉTENDRE ET AMÉLIORER L’ACCÈS AUX TOILETTES PUBLIQUES

La question de l’accĂšs aux toilettes publiques revĂȘt une importance cruciale, notamment pour le public cible affectĂ© par des problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tude, susceptibles de rencontrer des difficultĂ©s liĂ©es Ă  l’hygiĂšne personnelle. Toutefois, la simple disponibilitĂ© de toilettes ne suffit pas ; il est impĂ©ratif de veiller Ă  leur entretien et Ă  leur surveillance afin d’assurer des conditions sanitaires optimales. De simples cabines temporaires de type toilettes de chantiers ne sont pas suffisantes. Pour cela, il convient d’envisager la crĂ©ation de mĂ©tiers dĂ©diĂ©s Ă  l’entretien et Ă  la surveillance de ces installations, dans le but de garantir leur propretĂ© et de prĂ©venir tout usage dĂ©tournĂ© ou abusif.

En lien avec la proposition prĂ©cĂ©demment Ă©noncĂ©e de dĂ©veloppement de partage des ressources, une rĂ©flexion approfondie sur la localisation des toilettes publiques est Ă©galement nĂ©cessaire, notamment en Ă©tablissant une cartographie exhaustive de toutes les installations disponibles dans le quartier nord de Bruxelles. Cette cartographie pourrait ĂȘtre mise Ă  disposition des travailleurs sur le terrain, facilitant ainsi l’orientation des bĂ©nĂ©ficiaires vers des installations sanitaires appropriĂ©es. En outre, il est important de sensibiliser la communautĂ© locale Ă  l’importance de maintenir des toilettes publiques propres et sĂ©curisĂ©es, ainsi qu’à l’existence de ces ressources dans leur environnement.

D.16. IMPLIQUER TOUTES LES PARTIES PRENANTES DANS LA MISE EN PLACE D’ACTIONS

Enfin, il est vivement recommandĂ© d’inclure activement les habitants, les commerçants et des pairs-aidants 35 du quartier dans la conception et la mise en Ɠuvre de stratĂ©gies visant Ă  amĂ©liorer la santĂ© mentale et Ă  rĂ©duire les assuĂ©tudes. Leur participation directe permettra de recueillir des perspectives prĂ©cieuses sur les dĂ©fis spĂ©cifiques rencontrĂ©s par la population concernĂ©e, ainsi que sur les solutions potentielles qui pourraient mieux rĂ©pondre Ă  leurs besoins. Cette dĂ©marche favorisera non seulement une comprĂ©hension plus profonde des enjeux locaux, mais Ă©galement une plus grande lĂ©gitimitĂ© et acceptation des mesures prises. En impliquant activement ces parties prenantes, il est assurĂ© que les initiatives mises en place sont rĂ©ellement adaptĂ©es aux rĂ©alitĂ©s locales et bĂ©nĂ©ficient du soutien nĂ©cessaire pour leur succĂšs Ă  long terme.

RECOMMANDATIONS ET PISTES D’ACTIONS 25

E. CONCLUSIONS

Au travers de ce diagnostic, les rĂ©alitĂ©s complexes et les dĂ©fis multiples auxquels les acteurs locaux du social, de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ© ont Ă©tĂ© mis en avant. Parmi cette rĂ©alitĂ© complexe, il est important de mettre en avant l’interaction Ă©troite entre prĂ©caritĂ©, santĂ© mentale et assuĂ©tudes. DĂšs lors, les problĂšmes de santĂ© mentale et d’assuĂ©tudes ne peuvent pas ĂȘtre compris sans les mettre en interactions avec les problĂšmes sociaux auxquels ils sont liĂ©s.

Ce diagnostic s’est Ă©galement attardĂ© sur les difficultĂ©s rencontrĂ©es par les Ă©quipes de terrain. Que ça soit pour les acteurs du social, de la santĂ© ou de la sĂ©curitĂ©, les constats Ă©tablis sont largement partagĂ©s et font consensus. Pour les acteurs ayant participĂ© Ă  ce processus de diagnostic, les obstacles sont multiples : manquements dans l’offre de services, difficultĂ©s spĂ©cifiques Ă  l’accompagnement social/santĂ©, difficultĂ©s liĂ©es au public accompagnĂ©, mais Ă©galement, divers obstacles institutionnels et politiques.

En examinant les recommandations Ă©manant de ce diagnostic, il devient Ă©vident que des actions concertĂ©es et ciblĂ©es sont nĂ©cessaires et peuvent apporter des Ă©lĂ©ments de solution pour amĂ©liorer la qualitĂ© de vie dans le quartier Nord. Des mesures telles que le renforcement des services d’interprĂ©tariat et de mĂ©diation culturelle, le renforcement et l’extension des programmes de type « Housing First », le dĂ©veloppement de hubs multidisciplinaires de proximitĂ©, d’installation d’une salle de consommation dans le nord de la rĂ©gion, reprĂ©sentent des opportunitĂ©s tangibles pour rĂ©pondre aux besoins urgents du quartier.

Cependant, ces recommandations ne peuvent ĂȘtre efficacement mises en Ɠuvre que si elles s’inscrivent dans un cadre plus large de coopĂ©ration interdisciplinaire, de participation communautaire, de renforcement et pĂ©rennisation des financements. Il est impĂ©ratif de promouvoir la concertation entre les diffĂ©rents acteurs locaux, de donner la voix aux habitants et aux usagers du quartier dans le processus dĂ©cisionnel, et d’assurer des ressources financiĂšres stables et consĂ©quentes pour soutenir les initiatives Ă  long terme.

CONCLUSIONS 26

F. RÉFÉRENCES

Belga. « Violences liĂ©es au milieu de la drogue Ă  Bruxelles : une quarantaine d’associations tirent la sonnette d’alarme », 27 fĂ©vrier 2024. https://www.rtbf.be/article/violences-liees-au-milieu-de-la-drogue-a-bruxellesune-quarantaine-dassociations-tirent-la-sonnette-dalarme-11336081.

Bruxelles Logement. « Un cadastre rĂ©gional des logements prĂ©sumĂ©s inoccupĂ©s », 22 dĂ©cembre 2021. https://logement.brussels/un-cadastre-regional-des-logements-presumes-inoccupes/.

David Cognaux. « État de l’insĂ©curitĂ© dans la zone Brabant-Nord ». Cahier diagnostic. Programme de PrĂ©vention Urbaine, 24 fĂ©vrier 2023.

FEDITO BXL. « DĂ©criminaliser les usagers de drogues en Belgique ». Bruxelles : FEDITO BXL, septembre 2022.

FrĂ©dĂ©rique Bauwin et Jean-Lionel Lacour. « Usage rĂ©crĂ©atif du protoxyde d’azote (gaz hilarant) dans l’espace public en RĂ©gion Bruxelles Capitale ». Flash Paper. Bruxelles : Safe. Brussels, avril 2023.

Furtos, Jean. « La prĂ©caritĂ© et ses effets sur la santĂ© mentale ». Le Carnet PSY 156, no 7 (2011): 29-34. https://doi.org/10.3917/lcp.156.0029.

Gilles Van Hamme, Taïs Grippa, et Mathieu Van Criekingen. « Mouvements migratoires et dynamiques des quartiers à Bruxelles ». Brussels Studies, Collection Générale, no 97 (2016). https://doi.org/10.4000/brussels.1331.

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Le Méridien SSM. « Diagnostic communautaire 2018-2021 ». Bruxelles : Le Mérdien SSM, 2022. https://cbcs.be/wp-content/uploads/2022/06/Diagnostic-communautaireLeMeridien-Rapport-final.pdf.

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Transit ASBL. « Analyse des données communales - 2022 - Schaerbeek ». ORBA. Bruxelles : Transit ASBL, 2023.

———. « Analyse des donnĂ©es communales - 2023 - Schaerbeek ». ORBA. Bruxelles : Transit ASBL, 2024.

V.d.T. « Le chauffoir du CPAS de Schaerbeek ferme ses portes : “Cette mission n’avait plus de sens” ». BX1, 5 janvier 2023. https://bx1.be/categories/news/le-chauffoir-du-cpas-de-schaerbeek-ferme-ses-portescette-mission-navait-plus-de-sens/.

RÉFÉRENCES 27
28

H. NOTES

1 David Cognaux, « État de l’insĂ©curitĂ© dans la zone Brabant-Nord », Cahier diagnostic (Programme de PrĂ©vention Urbaine, 24 fĂ©vrier 2023).

2 Julien Rensonnet, « Plaque commĂ©morative et minute de silence pour Thomas Monjoie, policier tuĂ© au quartier Nord : “Comme un batteur qui soutient le groupe” », 10 novembre 2023, L’Avenir Ă©dition, https://www.lavenir.net/regions/bruxelles/st-josse-ten-noode/2023/11/10/plaque-commemorative-et-minute-de-silencepour-thomas-monjoie-policier-tue-au-quartier-nord-comme-un-batteur-il-etait-le-metronome-de-la-zone5JGWJZ7E6JG3RD7ZUMZQ6LXXBA/.

3 David Cognaux, « État de l’insĂ©curitĂ© dans la zone Brabant-Nord ».

4 Latitude Nord, « Rapport d’évaluation 2023 » (Schaerbeek : Programme de PrĂ©vention Urbaine, 31 janvier 2024).

5 Ce qui naĂźt, qui se joue au sein du psychisme personnel de l’individu, c’est-Ă -dire relevant de l’esprit, de la pensĂ©e.

6 Qui modifie les pensées, les croyances et les perceptions

7 La dĂ©nomination « migrant » regroupe un large panel de profils diffĂ©rents et est compris ici selon une dĂ©finition large, qui est « toutes personnes qui s’expatrient ». Dans ce sens, on retrouve alors des statuts et des parcours de migration variĂ©s, avec notamment ceux rĂ©cemment arrivĂ©s sur le territoire, certains avec un titre de sĂ©jour, d’autres sans. Certains sont en procĂ©dure de demande d’asile, d’autres sont en attente ou ont reçus un ordre de quitter le territoire. D’autres encore n’ont formulĂ© aucune demande et sont « en transit » par la Belgique. On retrouve Ă©galement dans ce public des personnes ayant migrĂ© depuis des annĂ©es et Ă©tant en situation rĂ©guliĂšres.

8 David Cognaux, « État de l’insĂ©curitĂ© dans la zone Brabant-Nord ».

9 Organisation Mondiale de la SantĂ©, « SantĂ© mentale et dĂ©placements forcĂ©s », 31 aoĂ»t 2021, https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/mental-health-and-forced-displacement.

10 Jean Furtos, « La prĂ©caritĂ© et ses effets sur la santĂ© mentale », Le Carnet PSY 156, no 7 (2011): 29-34, https://doi.org/10.3917/lcp.156.0029.

11 Institut Bruxellois de Statistiques et d’Analyse, « Monitoring des Quartiers », Monitoring des Quartiers, consultĂ© le 21 fĂ©vrier 2024, https://monitoringdesquartiers.brussels/.

12 Gilles Van Hamme, TaĂŻs Grippa, et Mathieu Van Criekingen, « Mouvements migratoires et dynamiques des quartiers Ă  Bruxelles », Brussels Studies, Collection GĂ©nĂ©rale, no 97 (2016), https://doi.org/10.4000/brussels.1331.

13 David Cognaux, « État de l’insĂ©curitĂ© dans la zone Brabant-Nord ».

14 La zone d’intervention du commissariat 5 couvre une large portion du Quartier Nord tel que dĂ©fini prĂ©cĂ©demment.

15 Belga, « Violences liĂ©es au milieu de la drogue Ă  Bruxelles : une quarantaine d’associations tirent la sonnette d’alarme », 27 fĂ©vrier 2024, https://www.rtbf.be/article/violences-liees-au-milieu-de-la-drogue-a-bruxelles-une-quarantainedassociations-tirent-la-sonnette-dalarme-11336081.

16 Latitude Nord, « Rapport d’évaluation 2023 ».

17 Les travailleurs sociaux recensent le nombre de passages lors de permanences, c’est-Ă -dire : -Des personnes qui passent sans effectuer de dĂ©marches administratives. Elles viennent prendre un cafĂ©, chercher un lien, utiliser le tĂ©lĂ©phone, ou demander une information ; -Des personnes pour lesquelles une orientation vers un autre service est rĂ©alisĂ©e directement : recherche d’un lieu oĂč se doucher, d’un mĂ©decin, d’un avocat
 ;

-Des personnes pour lesquelles leurs demandes nĂ©cessitent l’ouverture d’un dossier dans le cadre d’un entretien individuel : l’orientation demande plus de temps, la personne a plusieurs demandes, la personne nĂ©cessite un suivi individuel plus approfondi


18 Il s’agit de dossiers comprenant un nombre important de dĂ©marches, sur une pĂ©riode relativement longue et nĂ©cessitant un travail de rĂ©seau indispensable Ă  la mise en place d’un relais. Cette valeur ne prend pas en compte les dĂ©marches isolĂ©es ou « one shot », telle que les demandes d’informations, les orientations rapides


19 Le service dĂ©finit les problĂšmes de santĂ© mentale comme Ă©tant une souffrance psychique induite par la rue ou les contextes prĂ©caires. Cette souffrance relĂšve Ă©galement des troubles psychiatriques et des addictions. Ce sont des Ă©tats qui empĂȘchent la comprĂ©hension d’une situation ou qui entravent les dĂ©marches nĂ©cessaires Ă  l’amĂ©lioration d’une situation.

20 Transit ASBL, « Analyse des donnĂ©es communales - 2022 - Schaerbeek », ORBA (Bruxelles : Transit ASBL, 2023) ; Transit ASBL, « Analyse des donnĂ©es communales - 2023 - Schaerbeek », ORBA (Bruxelles : Transit ASBL, 2024).

21 FrĂ©dĂ©rique Bauwin et Jean-Lionel Lacour, « Usage rĂ©crĂ©atif du protoxyde d’azote (gaz hilarant) dans l’espace public en RĂ©gion Bruxelles Capitale », Flash Paper (Bruxelles : Safe. Brussels, avril 2023).

22 Les services de premiĂšres lignes sont dits « gĂ©nĂ©ralistes ». C’est-Ă -dire qu’ils sont le premier point de contact des bĂ©nĂ©ficiaires. Ils traitent les demandes gĂ©nĂ©rales et redirigent vers les services compĂ©tents ou spĂ©cialisĂ©s en fonction des besoins et des exigences d’intervention. Également, les services de secondes lignes sont dits « spĂ©cialisĂ©s », traitent des situations plus complexes ou plus spĂ©cifiques. Leur accĂšs se fait alors gĂ©nĂ©ralement via un relais ou via une prise de rendez-vous, contrairement aux services de premiĂšre qui ont accessibles via des permanences d’accueil.

23 L’outreaching est une modalitĂ© d’intervention visant Ă  aller Ă  la rencontre du public cible et Ă  agir au sein mĂȘme de leurs milieux de vie.

NOTES 29

24 Furtos, « La prĂ©caritĂ© et ses effets sur la santĂ© mentale ».

25 FEDITO BXL, « DĂ©criminaliser les usagers de drogues en Belgique » (Bruxelles : FEDITO BXL, septembre 2022).

26 Le MĂ©ridien SSM, « Diagnostic communautaire 2018-2021 » (Bruxelles : Le MĂ©rdien SSM, 2022), https://cbcs.be/wp-content/uploads/2022/06/Diagnostic-communautaireLeMeridien-Rapport-final.pdf.

27 Housing First Belgium, « Housing First in Belgium: It Works ! », consulté le 13 mars 2024, http://www.housingfirstbelgium.be/medias/files/housing-first-belgium-results-en.pdf.

28 Louise Paquot, « DĂ©nombrement des personnes sans-chez-soi en RĂ©gion de Bruxelles-Capitale » (Bruxelles : Bruss’help, 8 octobre 2022), https://brusshelp.org/images/Rapport_denombrement_2022_FR.pdf.

29 Bruxelles Logement, « Un cadastre rĂ©gional des logements prĂ©sumĂ©s inoccupĂ©s », 22 dĂ©cembre 2021, https://logement.brussels/un-cadastre-regional-des-logements-presumes-inoccupes/.

30 A l’image d’autres projets similaires comme « Tapaj » en France. Pour plus d’informations : https://tapaj.org/

31 Sont des services dits « universels », il n’y a pas de conditions d’accĂšs Ă  ces services. Toutes les demandes sont prises en charge, peu importe le profil, la situation et l’état de la personne qui se prĂ©sente.

32 Équipes pluridisciplinaires, composĂ©es de travailleurs de diffĂ©rents secteurs. Par exemple du social, de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ©.

33 V.d.T., « Le chauffoir du CPAS de Schaerbeek ferme ses portes : “Cette mission n’avait plus de sens” », BX1, 5 janvier 2023, https://bx1.be/categories/news/le-chauffoir-du-cpas-deschaerbeek-ferme-ses-portes-cette-mission-navait-plus-de-sens/.

34 FEDITO BXL, « Décriminaliser les usagers de drogues en Belgique ».

35 Les pairs-aidants sont des individus qui ont eux-mĂȘmes vĂ©cu des expĂ©riences similaires Ă  celles des personnes qu’ils aident. Ils peuvent fournir un soutien Ă©motionnel, des conseils pratiques, et partager leur propre expĂ©rience pour aider les autres Ă  surmonter des difficultĂ©s telles que des problĂšmes de santĂ© mentale ou des assuĂ©tudes.

30 NOTES

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