AM 463 FREE

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INDÉPENDANCE

Le monde change, le continent doit

Vite. par Zyad Li ma m

L’Afrique du Sud face Ă  la tempĂȘte Trump

Interviews

SOPHIE BESSIS

◗ DOUNIA HADNI

BUSINESS

Terres rares : l’Afrique, champ de bataille

INDÉPENDANCE 2.0

Ce l a fa it a pp roxi ma ti ve me nt s oi xa nt e an s, plu s ou moins , qu e l’Afriqu e est ind Ă©p endante (et pour certains, comme la Namib ie, un peu plus de trente an s) C’est pe u au re ga rd de l’ hi stoi re mu ltim ill Ă©n aire du conti n e nt et de l’hu ma ni tĂ©, et c’est nettement moins que les deux siĂšcles d’oppression de « l’homme blanc ». Pour tant, en soixante ans, malgrĂ© la di ff ic ul tĂ© de con st ruire de s nation s com me de ssin Ă©e s su r un co in de ta ble, malgrĂ© l’ hĂ© ri ta ge so cio -Ă© con omiq ue dĂ© sa st re ux de l’ Ăšre co lonial e, mal grĂ© l e p oids d e l a p au vretĂ© et l a p er m an en ce des conflits, l’Afriqu e a changĂ© Elle se transform e, ani mĂ© e par de s fo rc es pu is sa nte s et st ru ct urell es Une rĂ©alitĂ© nettement plus complexe que la perception com pl ais ante et car ic at ural e d’un contin ent immobile et mal gouvernĂ©. Qu’on le veuille ou non, l’Afrique immense est en mouvement.

Au dĂ©but des annĂ©es 1960, nous Ă©tions Ă  peine 30 0 millions d’Africains. Aujourd’hui, nous sommes un peu plus de 1,5 milliard (x5), et demain, Ă  l’horizon 2050, probablement aux alentours de 2 milliards. Un continent marginal, dĂ©peuplĂ© (en par ticulier par l’esclavage et la traite), se retrou ve en un peu plus de deux gĂ©nĂ©rations dĂ©mographiqu ement au centre du mo nd e. De ma in , un hu main su r qu atr e se ra af ri ca in L’Af ri qu e com ptera pl us d’ hab itants qu e l’Europe, l’AmĂ©rique latine et l’AmĂ©rique du Nord rĂ©unies Cette jeunesse sera source d’oppor tunitĂ©s, de modernisation, mais aussi de ruptures, de tensions.

Elle exigera une mobilisation des États pour la formation, l’emploi, la santĂ© La dĂ©mographie fait l’histoire. L’Af riqu e, vi eu x contin ent pe up lĂ© de ce ntai ne s de millions de jeunes, sera au cƓur des enjeux du siĂšcle

Pour le meilleur ou pour le pire, ou pour les deux en mĂȘme temps probablement

Nous Ă©t ion s tr Ăšs , tr Ăšs pa uvres . Nous sommes to uj ou rs pa uvr es , mai s ne tt em ent moi ns , et la dynamique est diffĂ©rente Notre richesse a Ă©tĂ© multipliĂ©e par 50 Nous sommes passĂ©s d’un PIB estimĂ© de 50 milliards de dollars Ă  un PIB de 2 60 0 milliards de dollars (constant) Des pays enchaĂźnent des taux de croissance Ă©levĂ©s sur de longues pĂ©riodes [voir notre DĂ© couver te CĂŽte d’Ivoi re, pag es 48 -78] Ce rta in s pe uvent prĂ©ten dre Ă  l’ Ă©m erge nc e rĂ© el le En accentuant des politiques vertueuses de croissance, l’Afrique pourrait toucher la barre des 5 000 milliards en 2030. Et viser, en projections « modĂ©rĂ©es », un seuil de 10 000 milliards en 20 50. Et un seuil de 15 000 milliards de dollars en projections « optimistes ». Soit le niveau de la Chine aujourd’hui.

Cette progression n’empĂȘche pas la prĂ©caritĂ© ni sur tout les in Ă©g ali tĂ©s. Ce rtai ns Af ri ca in s vivent littĂ©ralement au XXIe siĂšcle, dans le monde global, et d’autres, nombreux, sont pris au pi Ăšge d’un Moyen Âg e Ă©c onomi qu e et so ci al. Entre 35 % et 40 % de s Af ric ain s vi ve nt en cor e av ec moin s de de ux do lla rs pa r jo ur. Ma is 35 0 mi llio ns so nt entrĂ© s dan s le pĂ© rim Ăšt re, ce rtes im prĂ©c is et frag il e, de la « cla ss e moye nn e ». Le s ta ux de mor ta litĂ© in fa nt il e ont Ă©tĂ© rĂ©duits de plus de 70 % depuis les annĂ©es 1960, malgrĂ© l’explosion dĂ©mographiqu e. Il y a encore de la marge (43 dĂ© cĂšs pour 1 000 naissances en Afriqu e po ur un e mo ye nn e mon dial e de 27 po ur 1 000 ). Mais c’est tout de mĂȘme une grande victoire. Nous viv io ns Ă  l’ Ă©p oqu e mo in s de 40 an s. No us vivon s aujourd’hui en moyenne 65 ans. Hier, moins de 10 % de s Af ricain s po uvai ent se prĂ©val o ir de sa vo ir li re, com pter, Ă©c ri re Aujo urd’hu i, nou s at te ig non s de s ta ux d’alp h ab Ă©t is ati on de 60 % (a ve c de s po inte s Ă  90 % en Afriqu e du Nord et en Afriqu e australe).

PA R ZYAD LI MAM

Ce continent, autrefois largement rural, s’urbanise Ă  la vitesse grand V. 45 % des Africains vivent aujourd’hui en ville. D’immenses mĂ©galopoles appara is se nt (K in sh asa, Jo burg, Le Ca ire, Na irob i, Casabl an ca , Ab id ja n
), av ec d’ im me nses prob lĂš me s, mais aussi d’imm enses oppo rt unitĂ©s Ces ci tĂ©s so nt des accĂ©lĂ©rateurs de croissance, de modernisation, de mixitĂ©, d’émancipation C’est aussi ici que naissent des ar tistes, des crĂ©ateurs, des cultures, des sons, des Ɠuvres Ă  la portĂ©e globale, qui transforment l’image qu e l’Af riqu e a d’el le -m ĂȘm e et l’ imag e qu’e ll e projette ve rs le mond e ex tĂ© ri eu r. Cu lturel le me nt, nou s nou s lib Ă©ron s, sa ns compl exe Et no us bĂ© nĂ© fi cion s des rĂ©volutions technologiques En 1960, les Africains n’avaient pas ou presque de lignes de tĂ©lĂ©phone fixe. Aujourd’hui, on estime qu’ils sont plus de 50 0 millions Ă  pouvoir bĂ©nĂ©ficier d’un accĂšs Internet Avec 1 milliard de connexions mobiles actives

Ph ys iq ue me nt , le s ch an ge me nt s se vo ie nt , l’Af rique est di ffĂ©rente. Elle se construit malgrĂ© tout, malgrĂ© sa difficultĂ© Ă  mobiliser les financements. Beaucoup reste Ă  fa ire, ma is ceux qu i so nt su ff isam me nt ĂągĂ©s pour avoir voyagĂ© dans les annĂ©es 1970 et 1980 peuvent en tĂ©moigner Le dĂ©cor, la dynamique ne sont plus les mĂȘmes. Nous avons changĂ© d’époque

L’Afrique change, se transforme, mais le rĂ©alisme compte. Le phĂ©nomĂšne est fragile, la rĂ© gression est toujours possible, les conflits sont beaucoup trop nombreux et dĂ©vastateurs. La croissance est lĂ , mais il faut viser plus, plus durablement. Pour briser le paradigme de la pauvretĂ© Ă©tern ell e, pour exister vraim ent, pour entrer dans des processus de dĂ©veloppement Ă  l’asiati qu e, nou s devo ns all er bea uco up pl us vite (a prĂšs to ut, l’Af ri qu e to ut enti Ăšre d’au jo urd’ hu i pĂš se Ă©c onomiquement autant qu e la France), et de maniĂšre plus au daci eu se Se conce ntre r su r ce qui com pte : la crĂ©ation de richesses, la libĂ©ration des Ă©nergies, la promotion de l’entreprise et de la crĂ©ativitĂ©, l’inclusivitĂ© so cial e, l’intĂ© grati on, et la co nst ructi on de l’ Ă©tat de droit, chemin nĂ©cessaire vers le pluralisme

Cette exigence d’accĂ©lĂ©ration, de dĂ©multiplication , de paci fication intĂ©rieure devrait nous engager tous, collectivement. Parce que le monde est lui aussi en train de changer. Avec la montĂ©e des populismes en Europe, aux États-Unis, le ralentissement de la Chine. Avec la crise durable du climat, ses impacts et les replis illusoires qu’elle gĂ©nĂšre Donald Trump, incarnation presque caricaturale de l’ Ă©poque, ne cache

pas son dĂ©dain pour le continent Et pour le codĂ©veloppement. Le prĂ©sident et son alliĂ© Elon Musk ont lit tĂ©ralement oblitĂ©rĂ© l’USAID, l’agence amĂ©ricaine d’aide, premier donateur mondial (40 % du montant global).

Washington veut Ă©galement bouleverser le commerce mondial avec la remise en place de tarifs douaniers Y compris trĂšs probablement avec l’Afrique. Le systĂšme prĂ©fĂ©renti el de l’AG OA , mi s en pl ac e pa r Bi ll Cl into n en mai 20 00, est menacĂ© L’af faire n’est pas qu’économique L’assaut politico -Ă© conomique sur l’Afrique du Su d [v oi r pag es 32 -3 9] mo nt re Ă  qu el po in t le tru mpi sm e est au ssi un e vo lo nt Ă© de domin at ion Pretoria est « coupab le » Ă  plus ieur s de grĂ©s : pour sa supposĂ© e politique « anti -Blancs », pour le « wokisme » con su bs ta nt ie l Ă  la na tio n ar c- en -c ie l, po ur so n appr oc he mu lti ra cial e, po ur so n po siti on ne me nt pro-Palestiniens (et ce depuis les annĂ©es de combat de Nelson Mandela et de l’ANC) et sa politique internationale relativement indĂ©pendante.

Face Ă  l’ampleur de la turbulence, une Afrique sans rĂ©action, recroquevillĂ©e, comme si cela ne la concerna it pa s vraiment, une Afrique oĂč certaines Ă©l ites ne cachent pas, par ai ll eur s, un e fa sc ina ti on pour tant stĂ©rile pour les homm es forts, le trumpisme ou le poutinisme, cette Afrique- lĂ  aurait beaucoup Ă  perdre de ce nouvel ordre mondial. De cette nouvelle sĂ©quence, oĂč le chacun pour soi va devenir la norme. Et oĂč les plus fragiles vont sĂ©vĂšrement trinquer L’aide va baisser fortement et structurellement. C’est aussi la fin d’un long cycle de mondialisation Ă  l’origine de la chute spectaculaire de la pauvretĂ© dans les pays du su d. Les pays riches, dĂ©jĂ  peu pa rtag eurs, fragilisĂ©s par les crises, vont se concentrer sur eux- mĂȘmes.

Le choc Ă  court terme sera rude pour l’Afrique. Mais nous devons voir au -delĂ  de ce systĂšme moura nt. Il fa ud ra com pe nse r par des fo rc es et des ressources intĂ©rieures Ne plus accepter que notre santĂ©, que notre humanitarisme dĂ©pendent presque exclusivement de donateurs ex tĂ©rieurs Nous devrons crĂ©er plus de richesses, en Ă©tant plus compĂ©titifs, et repenser notre commerce ex tĂ©rieur. Nous devons levrager mieux encore nos arguments, en augmentant notre pouvoir de nĂ©gociation avec les uns et les autres, les nouveaux acteurs, les nouvelles puissances, les nouvelles entreprises En projetant aussi, c’est impor tant, un e im ag e pl us crĂ©d ib le de no us -m ĂȘm es En no us dĂ©barrassant des slogans creux sur l’anti -impĂ©rialisme ou le nĂ©ocolonialisme La souverainetĂ© vraie se base

Au si ùg e de l’Un ion af ricain e (UA), à Ad dis -A be ba

su r un e r ich esse autonom e et un reg ard rĂ©a liste su r ce qui nous entoure et sur nos intĂ©rĂȘts. Le monde nouveau est ce qu’il est. À nous d’y prendre notre place. Tout cela est, bien sĂ»r, facile Ă  Ă©crire
 Cette nouvelle indĂ©pendance, cette indĂ©pendance 2.0 sera longue Ă  construire. L’une des clĂ©s du reset, l’une des mĂ©thodes pour survivre et prospĂ©rer serait paradoxalement de revenir Ă  l’origine, de proposer un modĂšle moderne de panafricanisme, de redonner du contenu Ă  la notion d’intĂ©gration, de penser et promouvoir un futur collectif, celui par exemple dessinĂ© par l’agenda 20 63 de l’UA (« Af ri ca we wa nt ») No us avon s bea ucoup en commun. Sur le plan historique et dans notre relation au monde. Nous avons un grand projet, complexe, de marchĂ© uniqu e. Nous avons des richesses en hydrocarbures, des ressources minĂ©rales, fluviales, agricoles Et pour tant, nos divisions l’empor tent PlutĂŽt que de mettre nos forces en commun, nous nous combattons. PlutĂŽt que de prĂ©senter un front uni lors des

discussions internationales, nous arrivons fragmentĂ©s, avec un faible pouvoir d’influence et de nĂ©gociation. À la merci d’une donation, d’une « faveur » rendue par une grande puissance. Les sujets ne manqu ent pas sur lesquels nous pourrions rechercher des positions commun es et ef ficac es : cl imat, AG OA , di scu ssio ns commerciales, nouvelle architecture financiĂšre internationale, G20, Nations unies, prĂ©sence au Conseil de sĂ©curitĂ© des Nations unies


Fa ce Ă  ce tt e ex ige nc e d’un e no uv el le indĂ©pe nd an ce, de ce n o uvea u pa na fr ic an ism e, fa ce au x ex ig ences de cette jeu ne sse nom breu se, pu issa nte et Ă©r uptive, le s fe mm es et le s ho mm es d’Éta t por tent un e im me nse resp onsabilitĂ©. C’est Ă  eu x de bie n go uv erner la re s pu bl ica, la ch ose pu bl iqu e, c’est Ă  eux de s’émanciper des pratiques archaĂŻques du po uvoi r, de trac er un che mi n de mod ernitĂ©, de crĂ©ativitĂ©, de liber tĂ©s, afin de rĂ©pondre Ă  la promesse africaine ■

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N° 463 AV RI L 20 25

3 ÉDITO

Indépenda nce 2.0 par Zyad Limam

8 ON EN PARLE

C’EST DE L’A RT, DE LA CU LT UR E, DE LA MODE ET DU DESIGN Fusion, hybr idation

28 PA RCOURS

Sarah Lélé par Astr id Kr ivian

31 C’EST COMMENT ?

Une intelligence afr icaine ? par Emmanuelle Pontié

114 VINGT QU ESTIONS À
 Chadia Chaibi Loueslati par Astr id Kr ivian

TEMPS FORTS

32 L’A fr iq ue du Sud face Ă  la tempĂȘte Tr ump par CĂ©dr ic Gouver neur

40 « Sortir de la civilisation judéo-ch rétien ne » par Fr ida Dahmani

80 « Le Coran vu d’ailleu rs » Ă  Tu nis par Fr ida Dahmani

86 Max Lobe : « J’ai fait le pari de ne pas rester spectateu r » par Catherine Faye

92 Dounia Hadni : « Il faut s’accorder le droit de dĂ©cevoir » par Astr id Kr ivian

98 Jean-Claude Barny : « À Blida, avec Frantz Fanon » par Astr id Kr ivian

Afrique Magazine est interd it de diffusion en AlgĂ©r ie depuis mai 2018. Une dĂ©cision sa ns aucu ne just i cation. Cette grande nation africaine est la seule du continent (et de toute notre zone de lect ure) Ă  exercer une mesure de censure d’un autre temps.

Le maintien de cette interd iction pĂ©nalise nos lecteu rs algĂ©riens avant tout, au moment oĂč le pays s’engage dans un grand mouvement de renouvellement. Nos am is algĂ©r iens peuvent nous retrouver su r notre site Internet : www.afriquemagazine.com

DÉCOUVERTE

47 CÔTE D’IVOIRE : UNE ÉMERGENCE À 360 ° par Zyad Limam, avec Emmanuelle PontiĂ©, Philippe Di Nacera, Jihane Zorkot , AmĂ©lie Monney-Maurial

48 Changements d’époq ue

53 Parcou rs chiffrés

56 Émergence, mode d’emploi

60 Ça, c’est la Cîte d’Ivoire !

78 Babimania

104 Terres rares : l’Afrique, champ de bataille

108 Fran k Dixon Mugyenyi : « La géologie ne connaßt pas de frontiÚres »

110 Quelles alternatives pour se passer de l’USAID ?

111 L’aq uacult ure africaine en plein essor

112 Les promesses de l’énergie solaire « hors rĂ©seau »

113 Les MassaĂŻs s’opposent aux crĂ©dits carbone par CĂ©dr ic Gouver neur

FONDÉ EN 1983 (41e ANNÉE)

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Zyad Limam

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Assisté de Lau re nce Lim ou si n llimousin@afriquemagazine.com

RÉDACTI ON

Em manu el le Po nt iĂ© DIRECTRICE ADJOINTE DE LA RÉDACTION epontie@afriquemagazine.com

Isabella Meomartini DIR ECTR ICE ARTISTIQUE imeomartini@afriquemagazine.com

Camille Lefùvre PREMIÈRE SECRÉTAIRE DE RÉDACTION sr@afriquemagazine.com

Amanda Rougier PHOTO arougier@afriquemagazine.com

ON T CO LL ABO RÉ À CE NU MÉ RO

Jean- Marie Chazeau, Frida Dahmani

Philippe Di Nacera, Catherine Faye, Cédric Gouverneur Dominique Jouenne, Astrid Krivian, Amélie Monney-Maurial, Luisa Nannipieri, Sophie Rosemont, Jihane Zorkot

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ON EN PA RL E

C’est ma in te na nt , et c’est de l’ar t, de la cu ltu re , de la mo de , du de si gn et du vo ya ge

FUSION, HYBRIDATION

LA FONDAT ION H accuei lle Ă  Anta na na rivo un solo show majeur de l’ar t iste br itan nico-n igĂ©r ia n YI NK A SHON IBAR E : une grande prem iĂšre su r le cont inent.

YINK A SHONIBA RE CBE RA (1962) est un artiste britannico-nigĂ©rian connu dans le monde entier pour son travail interdisciplinaire sur des sujets liĂ©s Ă  l’identitĂ© culturelle, au postcolonialisme et Ă  la mondialisation Ses Ɠuv res font partie des collections de la Tate de Londres

ou du MoMA Ă  New York et ont Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©es Ă  la Serpentine Galler y ou Ă  la Biennale de Venise. La Fondation H l’invite aujourd’hui Ă  dĂ©ployer dans ses locaux d’Antananarivo une exposition monographique inĂ©dite sur le continent. Parmi les Ɠuvres choisies pour retracer ses vingt ans de carriĂšre

ressort l’étonnante Af rican Librar y (2018) Une installation monumentale constituĂ©e de 6 000 livres reliĂ©s en wax, estampillĂ©s des noms des personnalitĂ©s qui ont façonnĂ© l’Afrique postcoloniale. Une interface digitale permet d’en savoir plus sur chacune d’elles. IntitulĂ©e « Safiotra » – un mot

malgache qui dĂ©finit l’hybridation de deux Ă©lĂ©ments pour crĂ©er une nouvelle entitĂ©, tout en prĂ©ser vant leurs caractĂ©ristiques distinctes –, l’expo prĂ©sente Ă©galement une sĂ©rie de sculptures emblĂ©matiques de l’artiste et est enrichie d’une sĂ©lection d’Ɠuv res majeures de la collection de la Fondation H, sous le commissariat de Shonibare. Un projet curatorial qui explore la construction de l’histoire africaine depuis les indĂ©pendances ■ Luisa Nannipieri

« SAFIOTRA [HYBRIDITÉS/ HYBRIDITIES] », Fondation H, Anta na na rivo (Madagascar), du 11 avril au 28 fĂ©vrier 2026. fondation -h.com

The African Library, 2018 Ci -contre, Refugee Astronaut X 2024

RE NDE ZVO US

PATRIMOINE GA ZAOUIENPÉRIL

Àl ’I MA,u ne collection except ionnel le constituĂ©e de piĂšces de grande va leu r SAUV ÉESDUDÉSASTR E.

OASISCON VOITÉEpoursapositionstratĂ©giquedansles enjeux Ă©g ypto-perses, port desrichesses de l’Orient, de l’Arabie,del’A frique et de la MĂ©diterranĂ©e,GazarecĂšlequantitĂ©desites archĂ©ologiques de toutes lesĂ©poques, depuis l’ñgedubronze. Depuis le dĂ©butde la guerre IsraĂ«l-Hamas en octobre 2023,l’Unesco observe, en se basant surdes images satellitaires,des dommages sursoixanteneuf sitesculturels gazaouis,dĂ©truisantchaquejourunpeu plus le patrimoinedeceterritoire. En partenariat avecleMusĂ©e d’art et d’histoire de GenĂšve (M AH), devenu le musĂ©e-refuge d’une collection deprĂšsde529 Ɠuv resappartenant Ă l’AutoritĂ©nationale palestinienne,l’Institutdumonde arabemet en lumiĂšrelarichesse et la fragilitĂ©deces tĂ©moignagesdes civilisationsĂ©gyptienne, nĂ©oassyrienne, grecqueouromaine. UnesĂ©lection de 130chefsd’Ɠuvre, issusdes fouilles franco-palestiniennesdĂ©marrĂ©es en 1995,dont la spectaculairemosaĂŻqued’Abu Baraqeh, ainsi quedes artefactsprovenant de la collection privĂ©e de Jawdat Khoudary,prĂ©sentĂ©s pour la premiĂšre fois en France, attestentainsi de cinqmilleans d’histoire menacĂ©spar la guerre et la prĂ©dation. Plusencoredepuisque Donald TrumpaannoncĂ© vouloiren prendrelecontrĂŽle et crĂ©er la «Riviera du Moyen-Orient».À travers un patrimoinetrĂšsfragilisĂ© mais encore bien vivant,c’est une rĂ©flexion surleprestigieux passĂ©del’enclave palestinienne,sur sa mĂ©moireetson identitĂ©.BrĂ»lant et nĂ©cessaire. ■ Catherine Faye

«TRÉSORS SAUVÉS DE GAZA.5 000 ANSD’HISTOIRE», IM A, Paris(France), jusqu’au 2novembre2025. imarabe.org/fr

SO UN DS

Àécouter maintenant !

Florence Adooni

A.O. E. I.U.,Phi lophon /Modulor

La grĂącemĂȘlĂ©e Ă la dextĂ©ritĂ©: surcenouvel album, A.O.E.I.U. (pour« An Ordinary ExerciseinUnity »),la chanteuse ghanĂ©enne incarneson fraf ra-gospel et rappelle sonamour pour le highlife. Pleind’ñme mais aussidansants, se jouant des ry thmiques et desvariationsvocales, lessept morceaux sont instantanĂ©ment intemporelstoutens’inscrivantdans l’air du tempsartistiquedeKumasi.

Ki n’GongoloK in iat a Ki ni at a,Hel ic oMusic/Aut re di st ribut ions

SuperbeentrĂ©e en matiĂšre, Kiniata exploreles possibilitĂ©s tant organiques que sy nthĂ©tiques de la pop made inKin shasa.Sil’on se laisse porter parlegrooveimparable de ce groupe,son discours n’en estpas moins engagĂ©,d’autantque sesinstruments ont Ă©tĂ©fabriquĂ©s parlesoindes musiciens, utilisantdumĂ©tal ou du plastique. Du pur DI Ymixantafropop,Ă©lectro et punk !

Pier re Kwenders

Te ars on th eD an ce oor,Moonshine .

NĂ© Ă K inshasa, ce multiinstrumentiste surdouĂ© basĂ© Ă MontrĂ©al, et fondateurducollectif poly-artistique Moonshine, rev ient avec un EP oĂč il inv iteaussibienla chanteusenigĂ©riane Lady Donlique le producteur ghanĂ©enGafacci.Ces Tears on theDancefloor tĂ©moignent toujours de sonĂ©patantehybriditĂ© musicale, mĂȘlant lessonoritĂ©s d’oĂč qu’elles viennent,aussibienenanglais qu’en tshiluba et kikongo. ■ SophieRosemont

ILSN ’AURONTPAS SA HAINE

Le «NelsonMandela du Proche-Orient» poursu it sonCOM BAT POUR LA PA IX,sei ze ansaprĂšs le bombardement israĂ©l ienq ui at uĂ© troisdeses fi lles et sa niĂšce da ns leu rmaisondeGaza


«J’A ILECHOIX D’ÊTRE en colĂšre,tellement de gens s’attendent Ă ceque je haĂŻsse. Je leur rĂ©pondsque je ne haĂŻrai pointcar il yaencoredel’espoir. »Ainsi parleledocteur Izzeldin Abuelaishdanscedocumentairefranco-canadien quiraconte le parcours exemplairedecet homme, dont le noma Ă©tĂ©citĂ©plusieurs fois pour le prix Nobel de la paix Gy nĂ©cologue obstĂ©tricien rĂ©putĂ©,nĂ©dansuncampde rĂ©fugiĂ©s de Gaza il yasoixante-dixans,ilaĂ©tĂ© le premier mĂ©decin palestinien autorisĂ© Ă exercer dans un hĂŽpital israĂ©lien.Maisunsoirdejanvier 2009,alorsqu’il se trouve chez lui, dans la bandedeGazaenproie Ă une opĂ©ration militairedeTsahal, un char tire un obus sursamaison, tuanttrois de sesfilles :Bessan,Mayar et Aya, ainsique sa niĂšceNoor. SĂ©quence fortedufilm :ilpar vientĂ  joindreun amijournaliste israĂ©lienqui se trouve alorsendirectsur un plateautĂ©lĂ©etqui va faireentendre, viason mobile,la voix de ce pĂšre criant sa douleur et dĂ©crivantses enfants touchĂ©sĂ latĂȘte. Quinzeans plus tard,leDrAbuelaish se souvient :« Leurs cervellestapissaient lesmurs de leur chambre
 »D’autresimagesdel’époque le montrenten survĂȘtement, tachĂ©dusangdeses enfants, accompagnant dans un hĂŽpitalisraĂ©lien uneniĂšce de 12 ansgriĂšvement

UN MÉDECINPOU RLAPAIX (Canada, France), de TalBarda. Avec le Dr Izzeld in Abuela ish. En sa lles blessĂ©e puis,passĂ© l’état de choc, continuant Ă parlerde« la coexistence» entreIsraĂ©liensetPalestiniens. Aucune volontĂ© de vengeance–« la haineest destructrice », dit-il –, mais un long combat juridiquepourobtenir,en vain,des excusesdel’Étatd’IsraĂ«l. RĂ©fugiĂ©auCanada, Ă Toronto, avec sescinqenfants survivants,ilpublie en 2010 un livre traduiten23langues (Je ne haĂŻrai point,RobertLaffont), donts’est inspirĂ©e la cinĂ©aste francoamĂ©ricaineTal Barda,nativede JĂ©rusalem, pour raconter ce parcours hors du commun. ElleadĂ»ajouter unesĂ©quenceaprĂšs lesattaquesduHamas du 7octobre 2023,car plus de 50 membres de la famille du praticien sont mortsdepuisĂ Gazasousles bombes israĂ©liennes.Unnouveau degrĂ© dans la tragĂ©die quinefait queconforter la conviction du Dr Abuelaish: «L’avenirdes Palestiniensetdes IsraĂ©liens estprofondĂ©mentliĂ©.» ■ J.-M.C

SalifKeita ENTREQUATREMURS

C’estdansu ne cham bred ’hĂŽtel japona iseq ue le lĂ©gendai re CH AN TEUR MA LI EN aenreg istrĂ©cenouvela lbum cĂ©lĂ©brant

sona mour de la guita re.Rencont re.

BLOUSE BL ANCHEbrodéededoré, lunettes noires,humilitésouriante.

SalifKeita estfaceĂ nous, dans les loges de RadioFrance. Il se prĂ©pare Ă interprĂ©ter quelques titres de son nouvel album, So Kono,oĂčilreprend, en plus d’unepoignĂ©e d’inĂ©dits, des chansons dĂ©jĂ  bienconnues :« Tassi», «Soundiata »ouencore« Laban» Sa voix yrĂ©sonne au plus prĂšs des cordes,parfois accompagnĂ©edeBadiĂ© Tounkaraaungoni et de Mamadou KonĂ© auxpercussions.Cette approche Ă©purĂ©e fait toutelaforce de ce disque quiconfirmelecharismedu chanteur, descendantdel’illustresouverain mandingueSoundiata Keita. AM : So Kono,« danslamaison» en mandingue,est en ef fet trĂšs intime.Pourquoi le choix decet enregistrement en solitaire, ou presque?

SalifKeita : On m’asouvent demandĂ© de montrer commentje composais mes morceaux,qui naissent quandjesuis seul avec ma guitare. Et c’estune fois quej’aitrouvĂ©mes mĂ©lodies queles

parolesmev iennent
 Je l’ai toujours dit, la guitareest ma premiĂšre femme. Ma moitiĂ© !Cette complicitĂ©,c’est ce quejevoulais partager avec So Kono. RĂ©interprĂ©terces morceaux m’aaussi rappelĂ©les momentsdurantlesquels je lesai composĂ©s,les Ă©motions qui m’animaient souvent,chezmoi,dans monv illageauMali, au bord du fleuve Cetalbum,vousl ’avezenregistrĂ© et produitdansune chambre d’hĂŽtelĂ Kyoto,villehautement spirituelle


Nousavons visitĂ© destemples, avonsdĂ©couvert l’originalitĂ©dela culturejaponaise, quiĂ©lĂšve l’ñme, invite Ă lamĂ©ditation. D’autant que, lorsque je compose, je suis vraiment habitĂ© parlaspiritualitĂ©hĂ©ritĂ©e de mesancĂȘtresmandingues. Quand on estalbinosetqu’on estostracisĂ© dĂšsleplusjeune Ăąge, ce quiaĂ©tĂ© mon cas, cettecroyance-lĂ  est prĂ©cieuse. MĂȘme si lesalbinossont moinspersĂ©cutĂ©saujourd’huietque desassociationssesont créées pour lutter contre cettediscrimination


SALIFKEITA, So Kono, NĂž FĂžrmat.Sor tiele11avr il En concer tauTrianon le 21 ma i.

La musique, c’estvotre maison àvous?

Oui,ellem’a prouvĂ© queje n’étaispas venu au mondepar hasard.Que je devais assumerma destinĂ©e.EtmĂȘmequand je suis loindechezmoi,ellemepermet de ne pasmesentirseul. ■ propos recueillispar Sophie Rosemont

Madeleine,d ’aprĂšs M.- G. Benoist «ModĂšle noir », 2024.

ÉV ÉN EM EN T

VOLTE-FACE

ÀLens, le BĂ©ni nois ROMÉO

MI VEKA NN IN revisite leschefs-d ’Ɠuv re du Louv re.

C’ESTdanslePavillon de verre, dans lequel la nature et le paysages’invitent, quel’artiste,d’abord forméà l’ébĂ©nisterie et Ă l’architecture, expose son travail,consistantici en une rĂ©interprĂ©tation d’Ɠuvres cĂ©lĂšbres dont il se saisit. CettedĂ©marche politiqueinterroge noshĂ©ritages,collectifs et intimes,etpropose unerelecture Ă contresens de l’histoire. La techniquedecet arriĂšre-petit-filsdeBĂ©hanzin(r. 18891894), dernierroi du DahomeyetopposantĂ lacolonisation françaiseauBĂ©nin,s’inspire du vaudou,dont il utilisedes Ă©lixirs issusdepratiques rituelles. Il en imbibe destissusrĂ©cupĂ©rĂ©s qu’ilcoudensembleetsur lesquels il repeintles toiles qu’il reproduitenyinsĂ©rantson autoportrait.Parmi lesƓuvres choisies,le Radeau de la MĂ©duse –lenaufraged’une frĂ©gate en partance pour lescolonies,aularge de la Mauritanie –, oĂč RomĂ©oMivekannin se glisse dans la peau de l’homme noir quiagite le drapeaudel’espĂ©rance, figure hĂ©roĂŻque que GĂ©ricaultavait reprĂ©sentĂ©epours’insurgercontre l’esclavage, au sommet du tableau. ExceptĂ©qu’ici, l’hommeregarde le spectateur.Tel un clin d’Ɠil. Telleune revanche. ■ C.F.

«ROMÉO MIVEKA NNIN,L’ENV ERSDUT EMPS », Louv re-Lens, Lens (Fra nce),jusqu’au2jui n. louvrelens.fr/

AVENTURES SANS FRONTIÈRE

Un POLA RSOCIA L percutant, oĂč policiers et ma lf rats cava lent d’Abidja nĂ  AngoulĂȘme.

LE TROISIÈMEvolumedes aventures du commissaireKouamĂ©s’inspire desnombreux voyagesdeMargueriteAbouetenCĂŽte d’Ivoire.Elley aobser vĂ© la montĂ©e en puissancedes rĂ©seaux criminels et la rĂ©alitĂ© amĂšre d’unejeunessequi,cherchant Ă fuir, tombedansladrogueousejette dans lesmĂ©andresdel’émigration clandestine. AccompagnĂ©edeDonatienMar ypour le dessin,lascĂ©naristedelaBDculte Aya de Yopougon proposedanscetroisiĂšme tome unehistoire plus sombre,plusbrutale queles prĂ©cĂ©dentes. DĂšslacouverture, on retrouve l’incorruptibleetintraitable Marius KouamĂ© et sonfidĂšleadjoint ArsĂšne,assaillispar des silhouettesmenaçantes,presque zombifiĂ©es. L’intriguedĂ©bute parune affairedetraficde drogue international,Ă  Abidjan, oĂč un caĂŻd s’échappedeprison, laissant derriĂšre lui lescadav resdedeuxpoliciers corrompus Elles’étend ensuiteautrafichumain, Ă A ngoulĂȘme, oĂč unejeune Ivoirienne adisparu,enlevĂ©e parunrĂ©seaudetraite de personnes. Deux affaires redoutables, quimĂšnentversunfinal haletant. ■ C.F.

MARGU ER IT EABOUETETDONATIEN MARY, Commissaire KouamĂ© –Tome3 : On ne fait pasdefeu sous un arbre en fleur, Gallimard, 102pages,22 €

MANUEL COHEN -D R-D R

FI LM

CINÉMA DÉCOLONIAL

AprĂšsu nBIOPICA LGÉR IENrestĂ© trop conf identiel l’an dern ier, uneproduct ionf ra nçaise vientĂ©clai rerlav ie de FR AN TZ FA NON, dont on cĂ©lĂšbrelecentena iredelanaissance.

IL EX ISTE PEUDEPHOTOSdel’auteurdes DamnĂ©s de la terre,penseur du colonialisme et du racisme, inspirateurdes BlackPanthers. Sonparcours Ă©clair (ilest mort Ă 36ans,en 1961)s’est fait en partie dans la clandestinitĂ©, auxcĂŽtĂ©sdes indĂ©pendantistes algĂ©riens. Centans aprĂšssanaissance en Martinique, le cinĂ©asted’origine guadeloupĂ©enne JeanClaude Barny(Le Gang desAntillai s)lui redonne chair sous lestraitsdel’impeccable comĂ©dien franco-camerounaisA lexandre Bouyerdansunfilm efficace, mais parfois rĂ©ducteur :raccourcisbiographiques, personnagessecondaires esquissĂ©s, musique surlignant lepropos
 L’an dernier, le cinĂ©aste algĂ©rien Abdenour Zahzah avait prĂ©sentĂ© Ă Berlinuntoutpremierbiopic*, sortifin novembre2024dansles salles

algĂ©riennes–maistoujourspas en France –, oĂč ledocteur Frantz FanonĂ©tait incarnĂ©par le subtil Franco-HaĂŻtien AlexandreDesane. Un film en noir et blancassez figĂ©,mais peut-ĂȘtreplusauthentique,tournĂ©dans leslocauxmĂȘmes de l’hĂŽpitaldeBlida oĂč le praticienavait exercĂ©(alorsque JeanClaude Barnys’est repliĂ© en Tunisie, pays quiavait accueilliFanon aprĂšssaf uite de l’AlgĂ©riefrançaise). On se demandeceque pourrait donner un troisiĂšmeFanon,annoncĂ© cesderniĂšresannĂ©espar RaoulPeck, le rĂ©alisateurde IAmNot Your Negro
 ■ J.- M.C.

*Son titrec om pl et est Ch roniques fidĂš le s su rvenue sausiĂšcleder nier Ă l’hĂŽpita lpsych iatrique Bl ida- Joinvi lleautemps oĂč le Dr Fr antz Fa non Ă©t aitc he fdelac inqu iĂš me divi sion entre1953 et 1956 .P ri xd elaSemaine de la cr it ique au Fe spac ol e1er ma rs de rnier

FA NON (France), de Jean-ClaudeBar ny. Avec Alexandre Bouyer,Débora h François,Mehdi Senoussi. En sa lles

Le comédien Alexandre Bouyer danslerÎle- titre.

« LA COULEUR PARLE TOUTES LES LANGUES ».

ƒuvres choisies de la collection Al Than i, Hîtel de la Mari ne, Paris (France), jusqu’au 5 octobre 2025 hotel- de -la-marine.paris/

TRÉSORS ARC- EN -CIEL

Les couleu rs de la COLLECTION AL TH AN I su bl imées.

TÊTE DE RELIQUAIRE en bois, fer et laiton (Gabon), amphorisque en cristal de roche et os (Empire romain), figure royale en jaspe rouge (Égypte), perle en forme de chouette en or (PĂ©rou), coupe en lapis-lazuli et coquillage (MĂ©sopotamie), hache-ostensoir en jade nĂ©phrite, fibre de coco et poils de chauve-souris roussette (Nouvelle-CalĂ©donie) Chacun de ces trĂ©sors de la prestigieuse collection Al Thani, couv rant la pĂ©riode nĂ©olithique jusqu’à l’époque contemporaine, fait Ă©cho Ă  l’une des quatre couleurs et des deux nuances qui constituent les six sections du parcours de l’exposition Ă  l’HĂŽtel de la Marine : noir cosmique, blanc lumiĂšre, rouge vital, jaune d’or, bleu prĂ©cieux et vert vĂ©gĂ©tal. Quelque 80 Ɠuvres de civilisations diverses, issues des cinq continents (A frique, AmĂ©rique, Asie, Europe, OcĂ©anie), y sont ainsi prĂ©sentĂ©es avec des interprĂ©tations sur la signif ication de leur teinte, dans le contexte oĂč elles ont Ă©tĂ© créées Pour les historiens de l’ar t, regarder les Ɠuv res sous l’angle de la couleur revient Ă  s’interroger sur le lien entre leur matĂ©rialitĂ© et leur sy mbolique. Le choi x d’un matĂ©riau, la technique utilisĂ©e pour le transformer en une production ar tistique, l’usage Ă©ventuel d’une crĂ©ation et son Ă©volution au cours du temps interagissent avec la signification des tonalitĂ©s dans une culture, selon une temporalitĂ© donnĂ©e À l’aune de la richesse de l’inventiv itĂ© humaine et du pouvoir universel de l’ar t Ă  travers les Ăąges ■ C.F.

Anthony Joseph Odyssée afrofuturiste

C’est un bijou inclassa ble, entre ja zz et psychĂ©dĂ©lique, que propose le POÈT E ET MUSICI EN ANGL AIS or ig inai re de Tr in idad.

DES TE XTES ULTR A-POÉTIQUES tout en Ă©tant narratifs, parcourant les tragiques traumas et la magie des hĂ©ritages, une trame musicale d’une grande richesse, concoctĂ©e par le producteur et multiinstrumentiste Dave Okumu. Bienvenue dans le voyage sonore de Rowing up River to Get Our Names Back EnroulĂ© autour du spoken word trĂšs performant d’Anthony Joseph, des chƓurs Ă  se damner, des cordes funky, des cuivres en fusion, des Ă©chos dub, du psychĂ© distillĂ© çà et là
 N’en jetez plus ! De « Satellite » Ă  « Milwaukee & Ashland », tout suit le fil rouge d’un rĂ©cit afro-futuriste passionnant, nĂ© d’une nouvelle Ă©crite il y a deux dĂ©cennies, The Af rican Origins of UFO’s ■ S.R

ANTHONY JOSEPH, Rowing up River to Get Our Names Back, Heaven ly Sweetness.

RE

NC ON TR E

JustineSow Retisser le ïŹl de l’histoire

La jour na liste, autrice et dessinat rice belged ’origi ne gui nĂ©en ne signe Wa xParadoxe,u ne ba ndedessi nĂ©e

pa ssionnante et docu mentĂ©e su rL’H ISTOIR EET

LESENJ EU XACT UELS DE CE TISSUCHATOYA NT,

pa rcou rued ’u ne quĂȘteident it ai re de son hĂ©roĂŻne.

AM : Quelssontles paradoxesduwax ?

Justine Sow: DĂ©couv rirses multiples facettes rĂ©vĂšle plusieurs cont radictions. C’estunproduit cult urel dotĂ© d’unelourde charge identitaire: despersonnes revendiquentleurappartenance, leur relation affective Ă cetissu,t ypiquement africain Ă leurs yeux.Maisil estaussitrĂšscommercial, utilisĂ©pour gĂ©nĂ©rer du profit demaniĂšre dĂ©sincarnĂ©e. L’apport de l’Afrique dans sonsuccĂšsest indĂ©niable.PerçucommeemblĂ©matique despersonnes quiĂ©taient sous le joug colonial, il aĂ©tĂ© créé au XIXe siĂšcle pardes colonshollandais, quisesont emparĂ©s d’unetechniquedeteintureĂ  la cire en IndonĂ©sie. Àt ravers le mouvement No Wa x, certains ref usentde porter du waxpourmettreenavant le st is su st radition ne ls af rica in s. Indi s so ciable du cont inent, il est africain sans l’ĂȘtre.J ’aiprofitĂ© de ces pa radoxesdansunbut constr uc tif pour raconter l’histoire de ce tissu, mais aussil’histoire humaine–les

dĂ©placements de populations, lesinspirations, la culture.Aux Pays-Bas,l’usine historique de Vlisco proposeunproduit de luxe ;c’est unefaçon pour lesĂ©litesdesedistinguer. Mais elle rivalise difficilement aveclewax confectionnĂ© en Asie,moins cher,parfois de bonnequalitĂ©,qui inonde le marchĂ© africain ParfoisinspirĂ©s de l’iconographieafricaine, les motifs de ce tissu auxcouleursĂ©clatantespossĂšdent un sens,une histoire, un message,une symbolique. LescommerçantesenAfrique les ontbaptisĂ©s, parexemple:« Monmaricapable », «L’Ɠil de ma rivale », «Lafamille », «Fleursdemariage»,« Ouvrir son cƓur », «ChĂ©rinemetourne pasledos » 

LesA fr icaines ontinvest ilewax de touteleur culture, ellesenont fait un produitvivantenl’insĂ©rant dans desmoments de vie, tels queles naissances,les mariages,les ritesfunĂ©raires,lepassageĂ l’ñge adulte, etc. Le nometlesensdecertainsmotifsvarient d’un pays Ă l’autre,enfonction du tempsaussi. Cetobjet a sa propre vie.

En menant son Ă©tude surlewax,votre hĂ©roĂŻne belgo-congolaise, qui vitĂ  Bruxelles,effectue aussiune quĂȘteidentitaireetrenoueavec sesoriginesafricaines.Pourquoi ?

L’ex plorationdecetissu se mueenexplorat ion d’elle-mĂȘme, de sonh istoirefamil ia le,deson af rica nitĂ© Ă elleetĂ son pĂšre, et de sonhĂ©r it age. J’ét abli s un pa ra llĂšleent re la comple xitĂ© cu lt urel le du wa xet lesparadoxes identita ires d’un per sonnagemĂ©t issĂ© et af rode scenda nt.Viv re da ns le rega rd de l’autredev ient in suppor table, il faut trouverson propre chem in.D’aucu ns considĂšrent queles facettes plur ielles de nosidentitĂ©sgĂ©nĂšrent destiraillementsintĂ©rieurs,alorsqu’on le vitavecune harmonie personnelleauquotidien. ■ propos recueillispar AstridKrivian

JUSTIN ESOW, WaxParadoxe, Baya rd Graphic, 136pages,22 €

Emm anue l Ag grey Ti eku ,

A Nati on Und er S iege, 20 24

L’ART VU DU GHANA

Le ju ry du pr ix El lipse a dĂ©voilĂ© les fi na listes de sa 5e Ă©d it ion dĂ©diĂ©e au Ghana : ils exposent ce mois-ci leu rs Ɠuvres au MI X DESIGN HU B, Ă  Accra. PR IX EL LI PS E

DEPUIS 2021, le prix Ellipse met Ă  l’honneur les scĂšnes artistiques Ă©mergentes du continent et de ses diasporas. Cette annĂ©e, il a impliquĂ© les artistes rĂ©sidant au Ghana et les GhanĂ©ens rĂ©sidant sur le continent sur le thĂšme « Effet Papillon ». Le jury a dĂ©pouillĂ© 82 candidatures et sĂ©lectionnĂ© cinq finalistes qui, du 11 au 27 avril, prĂ©senteront leur travail lors d’une exposition collective Ă  Accra. Le Mix Design Hub, lieu polyfonctionnel emblĂ©matique de la scĂšne artistique locale, accueillera dans sa galerie de 1 000 m2 des piĂšces qui touchent Ă  la photo, Ă  la peinture ou encore Ă  la composition plastique et texturĂ©e. Dela Anyah crĂ©e ses Ɠuvres abstraites Ă  partir de pneus, chambres Ă  air et plaques d’immatriculation usĂ©es. Il rĂ©investit les techniques de vannerie et fait de la dĂ©gradation des matiĂšres son langage expressif. Emmanuel Aggrey Tieku utilise, quant Ă  lui, des textiles abandonnĂ©s qu’il revalorise Ă  travers des techniques de teinture et d’assemblage pour composer des ovnis, entre sculptures et canevas, interrogeant le spectateur sur

Ci -c ontre, De la A nya h, El em enta ry

Re bir th, 20 23 Ci -d essous , Nana Fr im po ng

Od uro, Atte ntio n See ki ng, 20 24

Se na Bu rg un dy, Dave Ri sing, 20 23.

l’identitĂ©, la surconsommation et l’hĂ©ritage colonial. CĂŽtĂ© peinture, les paysages oniriques de Sena Kofi Appau, alias Sena Burgundy, mettent en scĂšne des figures bleues, symboles d’une introspection universelle.

Son univers, nourri par le cinĂ©ma et la musique, et inspirĂ© par la philosophie nosce te ipsum (connais-toi toi-mĂȘme), offre un aperçu de sa quĂȘte d’identitĂ©.

Tous les deux photographes, Reginald Boateng et Nana Frimpong Oduro ne pourraient avoir une esthĂ©tique plus diffĂ©rente. Si le travail du premier est axĂ© sur la richesse des textures et des couleurs inspirĂ©es par le tissu Kente et veut offrir un regard contemporain sur la vie quotidienne et l’hĂ©ritage ghanĂ©en, le deuxiĂšme puise ses inspirations dans le surrĂ©alisme Il crĂ©e une poĂ©sie visuelle en tonalitĂ©s sombres, oĂč l’homme Ă©merge de l’eau, incarnant fluiditĂ©, Ă©motion et profondeur. Le laurĂ©at du prix sera annoncĂ© le 4 juin. Il bĂ©nĂ©ficiera d’une bourse de production et exposera Ă  la foire internationale AKAA, Ă  Paris, en octobre. ■ L.N

ON EN PA RL E

CHASSÉS-CROISÉS

ÊTRES D’AMOUR

EN SOMALIE

Une chronique familiale Ăąpre et colorĂ©e dans un pays est-africain plus connu pour ses guerres que son cinĂ©ma
 Ce film, d’une grande puissance visuelle, VIENT D’ÊTRE RÉCOMPENSÉ AU FESPACO.

L’ex pĂ©dition palpitante de l’écrivain bourlingueur au x mille vi sages. RÉCIT LÉGENDAIRE, ce roman de Henr y de Monfreid (1879-1974) est inspirĂ© par sa vie d’aventurier. PrĂ©facĂ©e par LoĂŻc Finaz, amiral et spĂ©cialiste de la traque des sous-marins, cette réédition de l’extraordinaire Ă©popĂ©e du commerçant et auteur français, publiĂ©e pour la premiĂšre fois en 1931, est un brĂ©v iaire pour la libertĂ©. « LibertĂ© face aux Ă©lĂ©ments (mer ou dĂ©sert) et leurs tempĂȘtes, [
] face aux Ă©vĂ©nements et leurs palinodies, [
] face aux hommes (dont les pires ne sont pas toujours les ennemis officiels) et leurs trahisons ou mesquineries, [
] face au sort qui alors n’est pas toujours un destin » EncouragĂ© Ă  Ă©crire par Joseph Kessel, l’« Ă©crivain-corsaire » y narre ses pĂ©ripĂ©ties sur la mer Rouge, qui le retiendra sa vie durant ArrivĂ© Ă  trente-deux ans Ă  Djibouti, il devient commerçant en cuirs et cafĂ©s, mais cette existence le lasse vite Il achĂšte un boutre, se lance dans la pĂȘche aux perles d’abord, puis dans le commerce des armes. Entre espionnage, bagarres et poursuites, un voyage passionnĂ©. ■

HENRY DE MONF REID,

Les Secrets de la mer Rouge, Grasset, 400 pages, 24 €

UN VILL AGE de pĂȘcheurs nommĂ© Paradis, sur la cĂŽte somalienne DrĂŽle de nom quand tout autour s’étend un dĂ©sert de sable frappĂ© par les vents et les attaques de drones Depuis la mort de sa femme, Mamargade y Ă©lĂšve seul son petit garçon, le malicieux Cigaal, quand Araweelo, sa sƓur tout juste divorcĂ©e, vient vivre avec eux. Commence alors une cohabitation pleine de non-dits, chacun essayant de s’en sortir comme il peut MĂȘme s’il s’agit d’habitants trĂšs pauv res de cette rĂ©gion, le cinĂ©aste n’en fait jamais des victimes. Natif de Mogadiscio, oĂč il a grandi avant d’émigrer en Autriche, Mo Harawe a tenu Ă  tourner avec une Ă©quipe 100 % africaine : une gageure, dans un pays sans industrie cinĂ©matographique (le tiers des techniciens vient d’Ég ypte et du Kenya). Premier film somalien sĂ©lectionnĂ© au Festival de Cannes l’an dernier, il s’est vu dĂ©cerner le 1er mars Ă  Ouagadougou, dans le cadre du Fespaco, l’Étalon d’argent de Yennenga, remis par le jury que devait prĂ©sider feu Souley mane CissĂ©, lequel n’aurait probablement pas reniĂ© ce film d’une grande force visuelle ■ J.-M.C

LE VILLAGE AU X PORTES DU PARADIS (Aut riche, Somalie), de Mo Harawe. Avec Ah med Al i Fa ra h, Anab Ah med Ibra hi m, Ah med Moha mud Sa leba n. En sa lles

CI NÉ MA

FI CTI ON

Connais-toi toi-mĂȘme

Quat re femmes af rica ines, leurs amou rs, leurs aspi rations, leurs dési rs. Un récit transcenda nt de CH IM AM ANDA NGOZI ADICHI E, écriva ine majeure de la scÚne littérai re contempora ine.

ENTR EMÊL ANT des flash-back de leur enfance et de leur dĂ©but d’ñge adulte avec des Ă©pisodes se dĂ©roulant dans le prĂ©sent – pendant la pandĂ©mie de Covid-19 –, L’Inventaire des rĂȘves raconte les destins croisĂ©s de quatre femmes immigrĂ©es aux États-Unis. Chiamaka, Ă©crivaine de voyage, Zikora, avocate, et Omelogor, ancienne banquiĂšre devenue Ă©tudiante diplĂŽmĂ©e, sont nigĂ©rianes ; Kadiatou, femme de chambre d’hĂŽtel, est guinĂ©enne. DĂšs les premiĂšres phrases, la narration Ă  la premiĂšre personne de Chiamaka donne au roman un ton mĂ©lancolique : « J’ai toujours rĂȘvĂ© d’ĂȘtre connue par un autre ĂȘtre humain telle que je suis vraiment, dĂ©clare-t-elle Parfois, nous vivons durant des annĂ©es avec des dĂ©sirs intenses que nous ne pouvons nommer. Jusqu’au jour oĂč une fissure apparaĂźt dans le ciel, s’élargit et nous rĂ©vĂšle Ă  nous-mĂȘmes [
]. » Seule, en plein confinement, elle se souv ient de ses anciens amants, se dĂ©bat avec ses choix et ses regrets. Zikora, sa meilleure amie, a tout rĂ©ussi, jusqu’à ce qu’elle se retrouve abandonnĂ©e par le pĂšre de son enfant. Omelogor, la cousine de Chiamaka, effectue une brillante carriĂšre, mais commence Ă  se questionner sur sa propre valeur Le rĂ©cit est ensuite dĂ©chirĂ© par la tragĂ©die de l’histoire de Kadiatou, agressĂ©e sexuellement par un client influent de l’hĂŽtel de luxe amĂ©ricain oĂč elle travaille – une histoire inspirĂ©e du cas rĂ©el de Nafissatou Diallo et de Dominique Strauss-Kahn. Vingt-deux ans aprĂšs la publication d’Americanah (2013), succĂšs planĂ©taire, Chimamanda Ngozi Adichie raconte la vie de ces femmes, une par une, sous diffĂ©rents angles, et reconstitue progressivement le puzzle du parcours Ă©motionnel des personnages. Revenant sans cesse Ă  une question centrale : est-il possible d’ĂȘtre vĂ©ritablement connu(e) par un autre ĂȘtre humain ? Traduite dans plus de cinquante-cinq langues, l’auteure de L’Hibi scus pourpre (2003) et de L’Autre MoitiĂ© du soleil (2008) aborde ici la nature mĂȘme de l’amour. Sans jamais cesser d’élever la voix contre toutes les formes de discrimination et de pensĂ©e unique ■ C.F.

CHIM AM ANDA NGOZI ADICHIE, L’Inventaire des rĂȘves, Ga lli ma rd, 656 pages, 26 €

À Abu Dhabi, l’Afrique en majestĂ©

Le Louv re Ă©m irat i, en pa rtenar iat avec le MUSÉE DU QUAI BR AN LY, consacre la prem iĂšre exposition d’ar t af rica in de la rĂ©gion

AU X ROIS ET REIN ES DU CONT IN EN T.

Sc ulptu re de co q, Ed o, roya um e du BĂ© ni n, Nig er ia

EN PR ÉSENTA NT plus de 350 objets issus des collections du musĂ©e du quai Branly et de plusieurs institutions africaines, la premiĂšre exposition dĂ©diĂ©e Ă  l’art du continent aux Émirats arabes unis se penche sur le rĂŽle central que l’expression artistique a eu dans la formation des concepts d’autoritĂ©, d’identitĂ© et de pouvoir en Afrique subsaharienne. Les piĂšces, qui comprennent notamment des tenues royales d’une grande finesse et des figures spirituelles importantes, ont Ă©tĂ© rĂ©parties sur trois sections. Celle consacrĂ©e Ă  l’Afrique de l’Ouest met en lumiĂšre l’hĂ©ritage artistique d’Ife, du BĂ©nin, du Dahomey, et des peuples Akan et Yoruba, explorant le rĂŽle de l’art dans la formation du pouvoir et de l’identitĂ© La section dĂ©diĂ©e Ă 

l’Afrique centrale prĂ©sente les royaumes Kongo, Luba et Teke, et tĂ©moigne du lien entre art, spiritualitĂ© et autoritĂ©.

Celle sur l’Afrique australe et orientale se penche sur les royaumes zoulous et Ă©thiopiens, Ă  travers des objets qui cĂ©lĂšbrent les riches traditions artistiques de la rĂ©gion. Le voyage s’achĂšve avec une section Ă  part, consacrĂ©e au pop art, Ă  la bande dessinĂ©e contemporaine et aux jeux vidĂ©o. Rappelant la richesse et la diversitĂ© du patrimoine du continent, depuis l’antiquitĂ© Ă  nos jours. ■ L.N.

« ROIS ET REINES D’AFRIQUE : FORMES ET FIGURES DU POUVOIR », Louv re Abu Dhabi (Émirats arabes unis), jusqu’au 25 mai. louvreabudhabi.ae

Ci -c ontre, statu e anth ro po mo rp he son in kĂ©, Mal i. Ci -d essou s, po rtra it de BĂ© hanz in, ro i d’Abom ey, pa r Ro mĂ©o Mi ve ka nnin.
TĂȘte de la re in e Ol uwo, Ife, Nigeria

LA STAR, C’EST LA COUPE

L’ Ă©lĂ©gance essent ielle de NEW TA NGIER exalte la ligne des ha bits fa it s ma in et invite Ă  se les approprier, mĂȘme lorsqu’elle fa it son ci nĂ©ma.

À LA TÊTE DE NEW TA NGIER DEPUIS 2014, Kenza Bennani revendique une vision de la mode Ă©loignĂ©e des codes de l’industrie occidentale. DĂšs 2020, elle Ă©largit son champ d’action de la maroquinerie textile au prĂȘt-Ă -por ter, et propose des crĂ©ations intemporelles qui trouvent leur raison d’ĂȘtre dans les formes et les st ruct ures traditionnelles maghrĂ©bines et du continent. Ses silhouet tes contredisent l’imaginaire orientaliste et opulent qu’on tend Ă  associer au x vĂȘtements marocains, et Ă©v itent aussi le piĂšge d’une mode qui impose son idĂ©al au x corps. D’oĂč le choi x de ne produire que de confor tables modĂšles taille unique, personnalisables, que l’on peut aussi bien porter au quotidien avec des baskets que sublimer avec des accessoires pour une grande occasion. Le but est de mett re en avant la fonctionnalitĂ© et la st ruct ure des habits, plutĂŽt que leur cĂŽtĂ© or nemental, tout en valorisant le savoir-faire ar tisanal local. « Les techniques de base sont les mĂȘmes, mais on s’en sert autrement »,

explique la designeuse. « Prenons le point de crochet randa, qu’on utilise pour crĂ©er des dĂ©corations st yle dentelle sur les kaf tans et les djellabas. Nous, on s’en sert pour des finitions qui nous Ă©v itent de recourir au x doublures. »

La marque sort une collection par an et joue avec les couches et les matiĂšres pour proposer des tenues que l’on peut porter Ă©tĂ© comme hiver. Les tissus sont sourcĂ©s dans les fins de stocks et ils sont le point de dĂ©part du processus crĂ©atif Cette annĂ©e, les trouvailles ont inspirĂ© une collection marquĂ©e par le rouge vermillon. Une couleur trĂšs prĂ©sente dans les films d’AlmodĂłvar. Kenza Bennani, qui Ă  ses dĂ©buts Ă©tait costumiĂšre, a saisi l’occasion pour faire de cette capsule-lĂ  une lettre d’amour au cinĂ©ma et Ă  son esthĂ©tique Elle y Ă©voque des films qui l’ont marquĂ©e, comme De grandes espĂ©rances, et des icĂŽnes de notre inconscient collectif. Comme une robe d’Elizabeth Taylor dans ClĂ©opĂątre ou la statuette des Oscar, qui se dĂ©gage de cet Ă©tonnant boubou dorĂ©. newtangier.com ■ L.N.

La ro be Africa, évoq ua nt la statu et te de s Osca rs.
La ju pe Li na en so ie rouge.
La st yl is te Ke nza Be nn ani

Simplicité audacieuse

Le crĂ©ati f TA REK SH AM MA propose trois piĂšces lu xueuses et modernes fa ites Ă  pa rt ir de matiĂšres profondĂ©ment Ă©g yptien nes, comme L’AL BÂTR E ET LE CA LCAI RE.

DESIGNER et architecte, l’Ég yptien Tarek Shamma vient de dĂ©voiler son dernier projet : la « FLIP collection ». Cette capsule se compose de trois meubles sculpturaux, inspirĂ©s par la simplicitĂ© intemporelle des blocs de construction des enfants. Les premiers jouets de ce ty pe ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s dans des tombes Ă©g yptiennes datant d’il y a quatre mille ans. Jouant sur le contraste entre l’albĂątre et le calcaire, Shamma transforme le cylindre, le triangle, le rectangle et le carrĂ© en objets Ă  la fois fonctionnels, versatiles et artistiques. La console Dnats (stand), la table basse Tesni (inset) et la table d’appoint Tsiwt (twist) ref lĂštent sa volontĂ© de crĂ©er des objets ref lĂ©tant les traditions, la culture, les matĂ©riaux et l’histoire de son pays, tout en rĂ©imaginant leur potentiel Ă  travers des compositions audacieuses et ludiques Le but du crĂ©atif, qui vit entre Le Caire et Londres et a travaillĂ© aux cĂŽtĂ©s des architectes Zaha Hadid et David Chipperfield, avant de lancer son propre studio et de captiver Christian Louboutin, est de prĂ©ser ver la mĂ©moire et le savoir-faire d’une culture ancestrale avec des piĂšces tout Ă  la fois rĂ©solumment Ă©g yptiennes et universelles tarekshamma.com ■ L.N.

Ch ez Boudou po ur un th ieb inoub liabl e et dans le re sto d’Ote pour de ri ch es saveur s rĂ©unionnaises

UNE CUISINE NÉE D’UN RÊVE

L’envie de partager LES SAVEURS DE LEURS SOUV EN IRS les a poussĂ©s Ă  tenter leur chance Ă  Paris, pour le bonheur de nos papilles.

SON HISTOIRE est devenue virale : le Mauritanien Bakar y Boudou avait transformĂ© la chambre de son foyer en resto Ă  emporter et son talent de cuisinier, notamment pour le thieb, avait conquis des stars comme Kaaris, Fary ou Omar Sy Dans la foulĂ©e de son succĂšs, il vient d’ouvrir son premier resto Ă  Paris, Chez Boudou. Une cantine conv iv iale d’une vingtaine de places, avec un espace VIP dĂ©corĂ© de tapis et de coussins pour se sentir comme chez soi. En plus de son cĂ©lĂšbre thieb, composĂ© et serv i Ă  sa façon, avec alloco maison et sauce Boudou, dont il garde le secret, il peut maintenant proposer des accras ou des pastels et, cĂŽtĂ© lĂ©gumes, du gombo et de l’attiĂ©kĂ©. La carte comprend aussi du mafĂ© et du yassa, Ă  base d’agneau, poulet, bƓuf, poisson ou vĂ©gĂ© Plus de choix, donc plus de bonheur. OtĂ©, interjection crĂ©ole de stupeur, est le projet de trois

amis qui ont laissĂ© leurs papilles sur l’üle de la RĂ©union et qui veulent partager la richesse de ses recettes mĂ©tissĂ©es et solaires avec la mĂ©tropole. On y sert la gastronomie de l’üle Intense, conf luence d’Asie et d’Afrique, comme les emblĂ©matiques bouchons au poulet et le rougail saucisse. L’ambiance est pop, aux couleurs du drapeau rĂ©unionnais, la vaisselle Ă©maillĂ©e fait un clin d’Ɠil aux parcours de randonnĂ©e autour du volcan et la carte, pĂ©dagogique, invite au voyage culinaire entre tradition et modernitĂ© (voir les burgers rev isitĂ©s), misant sur la valeur ajoutĂ©e gustative des ingrĂ©dients. De la vanille IGP exceptionnelle, du thĂ© et des Ă©pices, mais aussi les arrangĂ©s maison et les rhums de la distillerie rĂ©unionnaise Savanna Un vrai rĂ©gal. @bakar yboudou / ote -restaurant.com ■ L.N.

Une fac dans le Sahara

Da ns le sud du Ma roc, LE PROJ ET DE SA MA met la trad it ion au serv ice d’un pĂŽle universitai re moderne, qu i revend iq ue son identitĂ© loca le.

LA FACULTÉ de mĂ©decine et de pharmacie de LaĂąyoune, dans le Sarah occidental marocain, a fait peau neuve. L’intervention avait Ă©tĂ© imaginĂ©e dĂšs 2015, dans le cadre du projet de dĂ©veloppement des prov inces du Sud. Le cabinet Sama Architectes, basĂ© Ă  Rabat, a remportĂ© le concours pour sa construction grĂące Ă  un projet qui dialogue avec l’identitĂ© et l’environnement de la rĂ©gion, en s’inspirant des oasis. Les volumes Ă©purĂ©s et gĂ©omĂ©triques des bĂątiments principaux, inaugurĂ©s lors de la derniĂšre rentrĂ©e, donnent sur une grande esplanade plantĂ©e d’essences locales, qui est le cƓur battant de la facultĂ©. Les allĂ©es sont protĂ©gĂ©es par des panneaux ajourĂ©s suspendus, qui permettent tant de filtrer la lumiĂšre du jour Ă  l’intĂ©rieur que de protĂ©ger les piĂ©tons du soleil Ă  l’extĂ©rieur. Ces derniers Ă©voquent les moucharabiehs et ont Ă©tĂ© dĂ©corĂ©s avec les motifs gĂ©omĂ©triques ty piques des ksour du sud-est du pays Le choix des matĂ©riaux est un autre clin d’Ɠil Ă  l’architecture traditionnelle : le travertin donne un charme particulier au projet grĂące Ă  ses textures variĂ©es et Ă  ses lignes ondulĂ©es qui marquent les murs ocre, en contraste avec le ciel bleu de la ville. Les trois pĂŽles de la facultĂ© sont reliĂ©s par une trame de routes et de cours intĂ©rieures ombragĂ©es qui canalisent le flux des visiteurs RĂ©affirmant la modernitĂ© et la praticitĂ© du lieu sans renier les liens Ă  la tradition samaarchitectes.com/ ■ L.N.

Sarah Lélé

L’HUMORISTE BELGO-CAMEROUNAISE, Ă  22 ans, est un talent du stand-up prometteur. Avec sa verve, ses punchlines et son naturel, elle parle dans son premier spectacle de double culture, de football, de fĂ©minisme, de colonisation. propos re cueillis par Astrid Krivian

Clin d’Ɠil Ă  l’album d’anthologie The Mi seducation of Laur yn Hill de son idole du mĂȘme nom, La Mauvaise Éducation est l’occasion pour l’humoriste belgo-camerounaise d’explorer les contradictions liĂ©es Ă  sa double culture, avec un regard aiguisĂ©, mordant et des punchlines dĂ©capantes. Sarah LĂ©lĂ© puise matiĂšre Ă  rire dans ce dĂ©calage, cette opposition, parfois, entre les valeurs camerounaises inculquĂ©es par ses parents, celles transmises Ă  l’école et son expĂ©rience en tant que femme de la diaspora dans une rĂ©alitĂ© europĂ©enne. De ce tiraillement, elle fait un atout. « Mon Ă©ducation europĂ©enne nuance mon Ă©ducation africaine, et vice versa. Elles me dĂ©finissent, font ma force. Je les assume. J’accepte ce conf lit intĂ©rieur : en perpĂ©tuel dĂ©bat, mes deux cultures me permettent de questionner, d’évoluer, d’ĂȘtre tolĂ©rante », confie l’humoriste, qui a grandi Ă  Bruxelles et s’est rĂ©cemment installĂ©e Ă  Paris. Parmi les traits culturels hĂ©ritĂ©s du Cameroun, elle reste attachĂ©e au respect des aĂźnĂ©s, Ă  la valeur travail et Ă  cette confiance en soi, souvent perçue par les autres comme de l’arrogance. « Savoir ce que l’on vaut et le mettre en avant, c’est trĂšs camerounais. » On veut bien la croire, au vu du talent et de l’aisance scĂ©nique de cette artiste de 22 ans au naturel dĂ©sarmant, Ă  la verve pertinente, pleine de fraĂźcheur. Sur les planches, elle raconte ses vacances d’enfance passĂ©es dans le pays des origines familiales, oĂč on l’appelle « la Blanche », quand en Belgique elle est « la Noire ». Elle parle de football, sa passion : « Les compĂ©titions internationales rĂ©vĂšlent des rĂ©alitĂ©s sociales et politiques comme le racisme, l’homophobie », dit-elle De colonisation aussi : « L’histoire coloniale permet de comprendre les sociĂ©tĂ©s actuelles. » Enfin de fĂ©minisme. Elle regrette que le rire soit encore un apanage masculin, surtout dans les relations amoureuses « Être drĂŽle n’est pas un atout fĂ©minin. Beaucoup d’hommes veulent que l’on rie Ă  leurs blagues, mais n’acceptent pas qu’une femme ait de l’humour » Sarah LĂ©lĂ© a le stand-up en elle depuis toujours En classe, au collĂšge, ses professeurs apprĂ©cient peu son sens de la repartie, sa tchatche, sa volubilitĂ©, et l’incitent plutĂŽt Ă  monter sur scĂšne pour un one-woman-show en fin d’annĂ©e. À l’adolescence, elle parcourt les scĂšnes ouvertes des comedy clubs. Ses parents ne s’y opposent pas, Ă  condition qu’elle poursuive ses Ă©tudes en droit et en science politique aprĂšs le bac, et qu’elle vise l’excellence. Aujourd’hui adoubĂ©e par Gad Elmaleh, elle s’inspire beaucoup de lui. « ModĂšle pour les autres gĂ©nĂ©rations, il reprĂ©sente le haut niveau C’est mon but. Je veux serv ir l’art du stand-up, m’inscrire dans l’histoire de cette discipline, contribuer Ă  ce cercle vertueux Être une star ne m’intĂ©resse pas. » Moment unique de partage, de connexion, le show est aussi un prĂ©cieux temps d’écoute. « À travers les rires, j’entends quelles rĂ©pliques touchent le public, le font rĂ©flĂ©chir, lesquelles prennent du temps Ă  ĂȘtre encaissĂ©es. » Elle compose son spectacle Ă  l’oral, teste et dĂ©veloppe ses idĂ©es sur scĂšne, face aux rĂ©actions directes du public ; ses vannes Ă©mergent spontanĂ©ment dans l’échange. « Je n’ai pas l’esprit mathĂ©matique de la blague. Mon spectacle est un prolongement de moi-mĂȘme. » ■

La Mauva is e Éd ucati on, le s mardi s Ă  21 h, au Th éù tre Le Contresc ar pe Pa ri s Ve

«En perpĂ©tuel dĂ©bat, mes deux cultures me permettent de questionner, d’évoluer, d’ĂȘtre tolĂ©rante.»

UNE INTELLIGENCE AFRICAINE ?

L’ in te llig en ce ar ti fi ci ell e et ses pr o me sses rĂ© vo lu ti on nair es po ur le mon de, et su rtou t po ur l’Af ri qu e, s’ invitent par to ut Au So mm et po ur l’ac tion su r l’IA , en fĂ© vri er de rni e r Ă  Pa ri s, Ă  un e ta bl e ro nd e dĂ© di Ă©e Ă  l’Af riqu e Ă  l’Un es co et au fo rum Af rica AI V il la ge dan s le mĂȘ me te mp s
 Ou en core en ce to ut dĂ© bu t avri l Ă  Ki ga li , au Rw and a, au So mm et mond ia l s ur l’ inte lli ge nc e ar ti fici ell e, av ec po ur thĂš me « L’IA et le di vi de nd e dĂ© mograp hi qu e de l’Af riqu e ».

Dan s la fo ulĂ© e do it se lanc er le Co nse il af ricain de l’IA , ann onc Ă© pa r

Sm ar t Af rica , un e all ia nc e d’un e qu aranta in e d’États qui s’at te ll e Ă  promo u vo ir l’uti lis at ion de s no uv el le s te ch no logi es su r le con ti ne nt Le bu t : fo urni r un e plate- fo rm e pe rm et ta nt au x nat ion s de tirer pa rt i du no uv el ou til po ur t ra ns fo rm er le urs Ă©c on omi es , le urs indu stri es et le urs so ci Ă©tĂ©s

Ca r il es t bie n lĂ  , l’en je u de de main . L’ IA po urrait bie n sĂ» r pall ie r bo n no mbre de caren ce s en ma ti Ăšre de sa ntĂ©, d’ Ă©d ucat ion , d’agr ic ultu re, de ge stion , etc. El le es t d’ores et dĂ© jĂ  con si dĂ© rĂ© e comm e un e so urce d e prog rĂš s ve rt ig in eu x.

Bi en sĂ»r, le co n ti ne nt n’es t pa s en co re as se z « fo rma tĂ© » po ur la dĂ© ve lopp er et l’ut ilise r. La fa ib le dispo nib il itĂ© d’Inte rn et, so n co Ă»t qu i de me ur e Ă©l evĂ© et le s mau va is es co nn ex ion s so nt un rĂ© el ob stac le. Ai ns i qu e la pĂ© nu ri e de da ta ce nt er s nĂ© ce ss ai re s au trai te me nt de s mass es de don nĂ© es qu i ap prov isi on ne nt le s ap pl ic ati on s ba sĂ© es su r l’IA .

Se me tt re Ă  la pag e ent ra Ăźn er ai t, au -d el Ă  d’un e vo lon tĂ© fo rt e, de gr os fi na nc em en ts . Po ur aut an t, sa ns ima gin er dĂš s de mai n un e IA mad e in Afric a, on pe ut es pĂ© re r qu e de s te chn olo gi es pe rformante s, créée s ai ll eurs , pu iss ent ĂȘt re im p or tĂ© es su r le contin ent af in q u’ il en profi te En at te nd ant qu e le se cteur privĂ©, au -d el Ă  de s so uti en s de s États , s’emp ar e du suj et et inve st iss e.

Po ur qu oi pa s ? L’Af riqu e re go rg e de jeun es , ca pa bl es de se fo rm er ra pide me nt au x se rv ic es nu mĂ© ri qu es no uvea ux et ro dĂ© s au dĂ©ve lopp em ent d’app lis ad ap tĂ© es au x be so in s du q uoti di en af ricai n. Le s in cu ba te urs et pĂ© pi ni Ăšr es de star t- up se dĂ© ve lopp en t, su rtou t en Af riqu e angloph on e. Le vivi er de ta le nt s et l’ap pĂ© te nc e so nt lĂ  Et il es t fo rt prob ab le qu e, con trair em en t au x stat is ti qu es ch agri ne s qui pr Ă©d is en t dĂ© jĂ  qu e le co nt in en t se ra de rni er de la cla sse en ma ti Ăšre d’IA , l’Af riqu e su rprenn e le mond e
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