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ÊTRE EN AFRIQUE, ÊTRE DANS LE MONDE. TOUT LE

TEMPS.

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CAP À L’EST

C’est devenu un débat permanent à la fois rationnel et irrationnel : le poids de la Chine en Afrique. En quelques années, l’empire du Milieu s’est imposé comme le premier partenaire du continent africain. Dans le domaine particulièrement crucial des infrastructures, la Chine est devenue le principal bailleur bilatéral, avec un montant qui excède les financements combinés de la Banque africaine de développement (BAD), de l’Union européenne, de la Société financière internationale (IFC), de la Banque mondiale et du G8 ! Il y a évidemment la dette, importante, mais aussi l’investissement direct extérieur (IDE). L’IDE chinois en Afrique s’élèverait à près de 300 milliards de dollars entre 2005 et 2018, selon le groupe de réflexion American Enterprise Institute (AEI). Et puis il y a ce méga-grand plan des nouvelles routes de la soie dans lequel l’Afrique joue un rôle clé. Bref, faisons-nous face à une nouvelle colonisation, plus ou moins subtile, à une mise sous tutelle économique via une vague incontrôlable de capitaux, de prêts, d’investissements, de contrats et de contraintes ? La question mérite d’être posée. La Chine n’est pas une puissance angélique, elle défend ses intérêts à long terme. L’avantage, c’est que cette stratégie permet aussi de répondre à des besoins cruciaux de l’Afrique, au moment où les pays occidentaux et les bailleurs traditionnels sont aux abonnés plus ou moins absents… Ce cap à l’est pris par l’Afrique n’est pas une option. Pour reprendre un fameux raccourci historique, le XIXe siècle aura été européen, le XXe siècle américain, et le XXIe siècle sera asiatique (et peut-être un peu africain aussi). L’Asie sera le centre de gravité du futur, le cœur de l’économie, du commerce, de l’innovation (pour le meilleur et pour le pire, comme le montrent les avancées chinoises en termes de reconnaissance faciale de masse). L’Asie représente déjà démographiquement la moitié de l’humanité. Près de 5 milliards d’habitants dont 1,4 milliard de Chinois et presque autant d’Indiens.

D’ici à 2050, les pays asiatiques contribueront pour plus de la moitié à la production économique mondiale. Et par leurs poids économique et démographique, ils vont progressivement jouer un rôle majeur dans la résolution des défis globaux : régulation financière internationale, changement climatique, nouveaux modèles énergétiques, risques technologiques, insécurité alimentaire… Dans ce contexte, rien ne prouve que la Chine s’impose comme la puissance ultra-dominante. On a parlé de l’Inde, évidemment. Selon le chercheur Parag Khanna (auteur de The Future Is Asian*), « la Chine, par le biais de nouvelles routes de la soie, va faire monter des puissances régionales qui vont atténuer sa propre hégémonie.

L’Asie retournera alors à ce qu’elle a toujours été historiquement, un équilibre multipolaire de puissances ». Pour l’Afrique, le choix est donc clair, il faudra s’arrimer à cette zone d’expansion massive.

On voit déjà à quel point les pays de la façade est du continent, Djibouti et le Kenya en particulier, bénéficient de l’énergie en provenance de l’Est. Et si, démographiquement, le XXIe siècle sera asiatique, il sera aussi africain : la population de l’Afrique sera de 2 à 3 milliards à l’horizon 2050 puis 4,4 milliards en 2100. En clair, l’Asie et l’Afrique représenteront 80 % des êtres humains à la fin du siècle ! Il y a forcément une grande stratégie à mettre en œuvre, une alliance des continents qui serait mutuellement favorable et historiquement révolutionnaire. Reste à l’Afrique à démontrer sa capacité à mieux défendre ses intérêts. Dans la négociation, elle n’est pas démunie : elle a des ressources, des matières premières, des perspectives de croissance. Les bons contrats restent possibles, favorisant la création d’emplois, le transfert de technologies, le respect des normes environnementales. Comme le soulignait la chercheuse Folashadé Soulé dans Le Monde du 14 février, c’est avant tout, côté africain, une question de gouvernance. La fameuse gouvernance, élément clé, central, de notre futur ! ■

* The Future Is Asian, de Parag Khanna, Simon & Schuster, 2019.

SOMMAIRE

TEMPS FORTS

3 ÉDITO

Cap à l’est par Zyad Limam

ON EN PARLE

6 Livres : Le dormeur à gages de Tahar Ben Jelloun par Catherine Faye

8 Écrans : Une zone franchement drôle par Jean-Marie Chazeau

10 Musique : Muthoni Drummer Queen, girl power ! par Sophie Rosemont

12 Agenda : Le meilleur de la culture par Loraine Adam et Catherine Faye.

15 C’EST COMMENT ? Oui ou non ? par Emmanuelle Pontié

16 PARCOURS

Germaine Acogny par Astrid Krivian

36 CE QUE J’AI APPRIS

Harry Roselmack par Fouzia Marouf

98 VINGT QUESTIONS À…

Laurence Fishburne par Fouzia Marouf

18 Abdelaziz Bouteflika

Un destin algérien, la fin d’une époque par Zyad Limam

30 Le franc CFA, notre meilleur ennemi ? par Cédric Gouverneur

38 Benghazi

La vie après la guerre par Maryline Dumas

46 Le gazoduc Nigeria-Maroc ira-t-il au bout ? par Julie Chaudier

52 Le couscous, graines de concorde par Frida Dahmani

58 Toutânkhamon : L’étoile éphémère par Catherine Faye

78 Salif Keita

« L’expérience m’a apaisé » par Astrid Krivian

84 Rania Benchegra American dream par Fouzia Marouf

66

L’émergence en danger par Jean-Michel Meyer

FONDÉ EN 1983 (34e ANNÉE)

31, RUE POUSSIN – 75016 PARIS – FRANCE

Tél. : (33) 1 53 84 41 81 – fax : (33) 1 53 84 41 93 redaction@afriquemagazine.com

Zyad Limam

MADE IN AFRICA

88 Escapades : Addis-Abeba le parfum de la « nouvelle fleur » par Luisa Nannipieri

91 Carrefours : Nadine Engelbrecht pense l’habitat de demain par Luisa Nannipieri

92 Fashion : Diarrablu, l’élégance de l’algèbre par Luisa Nannipieri

VIVRE MIEUX

94 Bien nourrir son intestin, la clé de l’équilibre

95 Pour vous soigner au naturel, optez pour les huiles essentielles

96 Lutter contre les acouphènes

97 Articulations qui font mal : on agit !

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION

DIRECTEUR DE LA RÉDACTION zlimam@afriquemagazine.com

Assisté de Maya Ayari mayari@afriquemagazine.com

RÉDACTION

Emmanuelle Pontié

DIRECTRICE ADJOINTE DE LA RÉDACTION epontie@afriquemagazine.com

Isabella Meomartini DIRECTRICE ARTISTIQUE imeomartini@afriquemagazine.com

Jessica Binois PREMIÈRE SECRÉTAIRE DE RÉDACTION sr@afriquemagazine.com

Amanda Rougier PHOTO arougier@afriquemagazine.com

ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO

Loraine Adam, Julie Chaudier, Jean-Marie Chazeau, Frida Dahmani, Catherine Faye, Alexandra Fisch, Glez, Cédric Gouverneur, Dominique Jouenne, Astrid Krivian, Élise Lejeune, Fouzia Marouf, Jean-Michel Meyer, Luisa Nannipieri, Sophie Rosemont, Nathalie Simon.

VIVRE MIEUX

Danielle Ben Yahmed RÉDACTRICE EN CHEF avec Annick Beaucousin, Julie Gilles.

VENTES

EXPORT Laurent Bouin

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AFRIQUE MAGAZINE EST UN MENSUEL ÉDITÉ PAR

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PRÉSIDENT-DIRECTEUR GÉNÉRAL : Zyad Limam. Compogravure : Open Graphic Média, Bagnolet. Imprimeur: Léonce Deprez, ZI, Secteur du Moulin, 62620 Ruitz. Commission paritaire : 0219 D 85602

Dépôt légal : octobre 2019.

La rédaction n’est pas responsable des textes et des photos reçus. Les indications de marque et les adresses figurant dans les pages rédactionnelles sont données à titre d’information, sans aucun but publicitaire. La reproduction, même partielle, des articles et illustrations pris dans Afrique magazine est strictement interdite, sauf accord de la rédaction. © Afrique magazine 2018.

AFRIQUE MAGAZINE

« L’INSOMNIE », Tahar Ben Jelloun, Gallimard, 272 pages, 20 €.

Le dormeur à gages de Tahar Ben Jelloun

L’écrivain franco-marocain revient avec un THRILLER rocambolesque dans lequel il aborde les nuits blanches de son héros avec cynisme et humour noir.

Catherine Faye

« J’AI TUÉ MA MÈRE. Un oreiller sur le visage. J’ai appuyé un peu. Elle n’a même pas gigoté. Elle a cessé de respirer. C’est tout. Ensuite j’ai dormi, longtemps, profondément. » Commencer un roman par une telle attaque est un pari risqué. Pas pour Tahar Ben Jelloun, 74 ans, qui n’a cessé de construire une œuvre multiforme et propose ici un texte très différent de tout ce qu’il a écrit jusqu’à présent. L’histoire ? Un scénariste de Tanger, grand insomniaque, découvre que pour

pouvoir enfin bien dormir il lui faut tuer quelqu’un. Sa mère est sa première victime. Hélas, avec le temps, l’effet s’estompe. Il doit récidiver. Plus sa victime est une personne importante, plus il dort. Et c’est l’escalade. On découvre alors que sa femme, qu’il déteste, est à l’origine de ses insomnies. Se libérer d’elle serait donc en réalité le seul remède à ses nuits blanches. Il en est incapable. Cette haine est d’ailleurs réciproque : elle aussi veut le tuer. Mais elle se montre plus forte que lui. Il a beau se prendre pour un tueur impitoyable et un brillant scénariste, il se fait avoir par cette femme apparemment insignifiante, qui utilise toutes les ressources imaginables pour le maintenir dans une relation de dépendance. Dans ce roman d’un dormeur à gages, Tahar Ben Jelloun aborde un mal courant qui touche des millions de personnes, l’insomnie. Mais il y interroge également la complexité des relations entre les individus et le réel, avec malice, fantaisie et même une pointe d’ambiguïté. Son narrateur est-il d’ailleurs véritablement un tueur ou ne raconte-t-il pas tout simplement les scénarios qu’il élabore durant ses nuits sans sommeil ?

Prix Goncourt 1987 pour La Nuit sacrée, l’auteur de L’Enfant de sable (1985) et du Bonheur conjugal (2012) est l’écrivain francophone le plus traduit dans le monde. La publication en 1973 de Harrouda, son premier roman, avait fait scandale car il abordait le tabou de la sexualité. Depuis, son œuvre est ancrée dans les méandres de la société marocaine, ses problèmes et ses violences. Du reste, d’où lui est venue l’idée de cette fable grinçante ? « L’insomnie est pour moi une vieille compagne, elle vient du traumatisme de ma détention dans une prison militaire au Maroc, il y a cinquante ans. » Un épisode sur lequel il revient dans son précédent roman La Punition, paru l’année dernière.

Pour parler de l’insomnie, il s’est d’abord intéressé à Marcel Proust et à Franz Kafka, deux grands insomniaques. Mais, peu à peu, il comprend que pour traiter d’un sujet aussi grave il faut que ce soit léger et drôle. « L’humour noir est la seule chose qui peut nous sauver. » Voici donc venu le temps pour cet écrivain, aussi poète et peintre à ses heures, de s’amuser un peu. « S’il vous plaît… Un petit peu de sommeil… Un petit peu de cette douce et agréable absence… » écrit-il dans ce roman qui lui permet aussi d’aborder, en filigrane, le sujet délicat de la mort. Car dormir, n’est-ce pas accepter de lâcher prise ? De laisser mourir un peu de soi ? En tout cas, une chose est sûre, son héros, ce criminel sympathique, dort vraiment, lui, à l’issue de chacun de ses meurtres. La boucle est bouclée. ■

roman

PROTÉGER

OU MOURIR

« ON LEUR a donné quinze jours. Quinze jours et une certaine quantité d’ivoire à rapporter. » C’est une guerre bien particulière entre braconniers et rangers qui va se jouer entre le delta de l’Okavango et la rivière Chobe, au Botswana. Là, les animaux, et en particulier les éléphants, y ont trouvé un refuge contre la barbarie. Des hommes y veillent nuit et jour, comme Seretse, qui travaille pour le gouvernement

premier roman DÉSIR

D’ENFANT

YEJIDE ET AKIN forment un couple harmonieux, ils ont tout pour être heureux. Tout sauf un enfant. Yejide a essayé, en vain. Lorsqu’une délégation familiale se présente à sa porte escortant une seconde épouse pour sauver l’honneur d’Akin, c’est au-dessus de ses forces. Commence alors pour elle un parcours de combattante pour sauver son couple, dans un contexte de chaos politique. Traduit dans 18 pays, ce récit tragi-

« IVOIRE », Niels Labuzan, JC Lattès, 250 pages, 18 €.

botswanéen, Erin, qui a quitté la France pour vivre dans une réserve, ou encore Bojosi, ancien braconnier reconverti en garde. Ce roman inspiré pose une question nécessaire : que signifierait un monde sans animaux sauvages ? ■ C.F.

RESTEAVEC MOI

« RESTE AVEC MOI », Ayòbámi Adébáyò, Charleston, 320 pages, 22,50 €.

comique, où alternent les points de vue de l’épouse et du mari, propulse la jeune auteure nigériane, qui a étudié l’écriture aux côtés de Chimamanda Ngozi Adichie, sur la scène littéraire internationale. ■ C.F.

PARLE ON EN

Clemantine Wamariya a été nommée au conseil du musée du Mémorial de l’Holocauste de Washington par Barack Obama.

« LA FILLE AU SOURIRE DE PERLES », Clemantine Wamariya et Elizabeth Weil, Les Escales, 312 pages, 20,90 €.

témoignage

UNE LEÇON DE VIE

NÉE À KIGALI, Clemantine Wamariya a 6 ans quand le conflit rwandais éclate en 1994. Avec sa sœur, elle fuit les massacres et traverse sept pays d’Afrique. Recueillie par un couple aisé à Chicago, elle découvre soudain une tout autre réalité, devient pom-pom girl, fait de brillantes études qui la mènent jusqu’à Yale. Un véritable rêve américain… Mais comment se reconstruire après l’enfer ? Quel sens donner à son histoire ? Aujourd’hui militante pour les droits de l’homme, elle publie le récit de sa vie. Un témoignage qui nous incite à regarder au-delà du statut de victime. ■ C.F.

« KATANGA, TOME III : DISPERSION », Sylvain Vallée et Fabien Nury, Dargaud, 68 pages, 16,95 €.

bd

DES DIAMANTS ET DU SANG

COURSES-POURSUITES, fusillades et rebondissements, on retrouve tout ce qui fait le sel des précédents volumes de cette trilogie. Une plongée en BD dans la crise katangaise, entre guerre d’indépendance et chasse aux diamants. On y rencontre des mercenaires impitoyables, des hommes politiques corrompus, d’anciens nazis, des victimes annoncées… L’œuvre est basée sur des faits historiques précis, le propos est quasi documentaire. Un récit violent, iconoclaste et pour autant jubilatoire. ■ C.F.

Une zone franchement drôle

Raconter le choc des cultures entre des jeunes Parisiens branchés et les habitants débrouillards des cités : c’est le PARI RÉUSSI de Mohamed Hamidi pour dépasser les clichés avec le sourire. par Jean-Marie Chazeau

FORT DU SUCCÈS de La Vache (plus d’un million d’entrées en France en 2016), le réalisateur franco-algérien joue de nouveau sur l’opposition des contraires : après le bled et la France, c’est Paris et sa banlieue. L’histoire d’une entreprise de communication qui a longtemps profité des avantages fiscaux qu’offre une zone franche, La Courneuve, en y installant… une simple boîte aux lettres. Sommé par les services des impôts d’y emménager vraiment sous peine de devoir rembourser plusieurs millions, Fred, le bouillant dirigeant de cette petite société (excellent Gilles Lellouche), emmène ses salariés de l’autre côté du périphérique. Ils y découvrent les voitures brûlées (le tournage a eu lieu avant les gilets jaunes sur les Champs-Élysées…), les incivilités,

« JUSQU’ICI TOUT

VA BIEN », (France) de Mohamed Hamidi. Avec Gilles Lellouche, Malik Bentalha, Sabrina Ouazani.

les magouilles, les gangs et les trafics de drogue… mais ce n’est jamais très méchant ni violent. Un regard bienveillant qui n’empêche pas de provoquer le rire : c’est la force des situations et des comédiens. Les Parisiens bon teint débarquent avec leurs préjugés, même une beurette qui a pris du galon y revient à reculons (lumineuse Sabrina Ouazani). Le casting du recrutement local imposé pour la zone franche donne lieu à une galerie de portraits très drôle. En passeur de ces deux mondes, le très lunaire Samy (Malik Bentalha, ex-Jamel Comedy Club, vu dans Pattaya et Taxi 5) fait parfois glisser le film vers la comédie romantique, sans mièvrerie. Pas vraiment un pamphlet, tant le film insiste sur ce qui fonctionne au-delà du périph : solidarité, générosité, adaptabilité. Un peu trop idéaliste ? C’est ce qu’on se demande, vingtcinq ans après La Haine, quand surgit seulement à la fin, comme un avertissement, le titre du film… ■

animation

La clé de l’espoir

PETITE PALESTINIENNE d’un camp de réfugiés à Beyrouth, Wardi découvre l’histoire des siens depuis 1948, l’année de la catastrophe (la Nakba) pour les 700 000 Palestiniens expulsés à la création de l’État d’Israël. Un jour, son arrière-grand-père lui confie la clé de sa maison en Galilée et une porte sur bien des souvenirs. Dans ce film, les flash-back sont animés en 2D, les personnages sont des marionnettes d’une très fine expressivité et le décor

du camp très réaliste. Là-bas, en 70 ans, « la seule chose qui a changé, ce sont les tours : à chaque nouvelle génération, un étage ». Poétique et politique à la fois, pour petits et grands. ■ J.-M.C.

comédie La fille de son père

PRÉSENTÉ AU DERNIER FESTIVAL de Toronto, c’est le premier film nigérian sélectionné par la plateforme Netflix. Réalisé, produit et coécrit par une star de Nollywood, Genevieve Nnaji, qui incarne elle-même la fille du patron d’une entreprise de transport (Lionheart), ambitieuse mais respectueuse de son père. Quand elle pense pouvoir lui succéder, la compagnie est au bord de la faillite… On sourit et on suit avec plaisir les tribulations de la superbe et magnétique héroïne, qui s’impose en douceur dans un monde machiste et corrompu. Les (courtes) séquences de prières évangéliques et de musiques signalent qu’on est bien dans un film made in Nollywood, mais sans perdre le spectateur qui n’en a pas les codes. En prime, les vues aériennes d’Enugu montrent un Nigeria affairé et moderne, même loin de Lagos. ■ J.-M.C. « LIONHEART » (Nigeria) de Genevieve Nnaji. Avec elle-même, Nkem Owoh, Peter Edochie.

documentaire Papa, pourquoi ?

Wardi et son arrière-grand-père ou comment transmettre son histoire à travers les générations et dans l’exil.

« WARDI » (Norvège-France-Suède) de Mats Grorud Avec pour la VF les voix de Pauline Ziadé, Aïssa Maïga, Saïd Amadis.

LE RÉALISATEUR ALASSANE DIAGO rend visite à sa mère, qu’il avait filmée en 2009 dans Les Larmes de l’émigration. Dans la cour de sa maison au Sénégal, elle raconte sa résignation (« c’est la volonté divine ») et sa tristesse d’avoir vu partir son mari, qui n’est jamais revenu. Le cinéaste, qui n’apparaît pas à l’image, se rend ensuite au Gabon, à la rencontre de ce père qui y a fondé un autre foyer. L’homme parle très peu mais se laisse filmer dans son quotidien, et face caméra il écoute ce fils retrouvé tardivement, sans effusion, plus qu’il ne lui répond. Il faut attendre près d’une heure pour que soit posée la question qui fâche : « Pourquoi as-tu abandonné ta famille ? » De cette lente confrontation rugueuse naît une formidable émotion qui cueille le spectateur quand il ne s’y attend pas. ■ J.-M.C. « RENCONTRER MON PÈRE » (France) d’Alassane Diago.

Muthoni Drummer Queen Girl power !

Pour son troisième album, la chanteuse kenyane affirme pour de bon son féminisme et sa passion pour la musique urbaine. Incomparable.

« JE REPRÉSENTE une femme africaine puissante. J’ai inventé (et continue d’inventer) une vie sur des chemins artistiques moins fréquentés. Je pense que j’aide les gens à imaginer leur propre grandeur. J’aime ça. » Mesdames et messieurs, bienvenue dans l’univers haut en couleur de Muthoni Ndonga, la musicienne la plus enthousiasmante du Kenya d’aujourd’hui. Son audace verbale est au diapason de sa musique, féministe, secouée de rythmes intransigeants et de mélodies sensationnelles. En effet, son nouvel album, She, brosse le portrait de battantes. « Kenyan Message » donne la parole à une doctoresse engagée, « Million Voice » nous plonge dans la peau d’une réfugiée somalienne, « Caged Bird » rend hommage à son écrivaine de prédilection, Maya Angelou… Elle, Muthoni, domine le terrain avec son flow tour à tour langoureux et féroce, mêlant sans complexe ses influences R’n’B’, hip-hop, reggae, afrotrap et soul. Sur un titre comme « Squad Up », on entend même du rock’n’roll diablement électrique. Muthoni ne manque pas d’inspiration, elle a fait de sa plume une arme, au même titre que son timbre vocal. Issue d’un milieu modeste, elle a dû faire preuve de pugnacité pour occuper la scène, même si elle rêve depuis toute petite d’être sous le feu des projecteurs. C’est Whitney Houston qui l’a fait

« SHE

», Muthoni Drummer Queen, Yotanka Records

vibrer pour la première fois : « Le contrôle de sa voix et son look averti dans “I Wanna Dance With Somebody” m’ont vraiment impressionnée. Je voulais absolument chanter comme elle ! » Quelques années plus tard, elle découvre ce qu’est le show scénique grâce à Michael Jackson : « Ce n’est que par les clips et des extraits d’émissions télévisées que j’ai pu réaliser à quel point la danse et les costumes étaient bons ! Qu’il pouvait chanter et danser tout en ayant cette présence plus grande encore que la scène où il évoluait. » D’où un irrésistible amour du beat, qu’elle pratique avec ses talents de percussionniste et qu’elle cultive aujourd’hui aux côtés du duo de producteurs suisses avec lesquels elle façonne ses chansons, GR! & Hook. Ensemble, ils ont enregistré She lors de sessions bootcamp en Suisse. Entre-temps, elle a étudié les relations internationales et la philosophie à l’United States International University Africa, au Kenya, et a fondé le festival Blankets & Wine à Nairobi…

Ces jours-ci, Muthoni est d’ailleurs dans la capitale kenyane avec GR! & Hook pour imaginer de nouvelles chansons. Pas du genre à se reposer sur ses lauriers, l’artiste compte bien continuer à prouver que rap et féminisme font bon ménage. ■

MÉLODIE

COUSUE DE FIL D’OR

Avec Thread of gold, le trio d’Hejira revient en beauté.

DÈS LE TITRE « Save it for Another », une pop éthérée et intimiste jaillit toute en suspension… Après le décès de son père, la chanteuse d’Hejira, Rahel Debebe-Dessalegne, est partie à la recherche de ses racines en Éthiopie. C’est là qu’elle a imaginé ces nouvelles chansons et qu’elle a convoqué le reste du groupe afin de les enregistrer. On retrouve bien la fusion habituelle entre folk, jazz et pop classieuse, mais avec une présence plus intellectualisée des influences africaines du trio. Le résultat porte bien son nom : oui, les chansons sont ourlées d’or par la somptueuse voix de Rahel mais aussi par une instrumentation de haute voltige. ■ S.R. « THREAD OF GOLD », Hejira, Limo Lima Records/Big Wax Distribution

world music

ANITA FARMINE PERSEPOLIS MUSICAL

DE L’IRAN quitté en 1979 à Orléans, en passant par les terres algériennes et Dunkerque, cette multi-instrumentiste accomplie chante en français, en anglais mais aussi en persan. Pour son troisième album, Seasons, elle préserve cette recette magique parfaitement assortie à son timbre chaleureux et à son amour des rythmiques – sans oublier la guitare électrique qu’elle se plaît à convoquer, histoire de bousculer une ou deux ritournelles… L’exil, les deuils, le temps qui passe et les nouveaux départs nourrissent, de loin en loin, les chansons de cet album qui se veut avant tout intemporel. ■ S.R. « SEASONS », Anita Farmine, Palapapaï Prod

musique

afropop

RINA MUSHONGA, UN VRAI MELTING-POP

ELLE HABITE le sud de Londres, mais ses origines se situent entre le Zimbabwe et les Pays-Bas. Depuis la sortie de son premier album en 2014, The Wild, The Wilderness, on mise beaucoup sur cette artiste aussi bien influencée par Paul Simon que par Eurythmics et Santigold. Avec son afropop engagée sous influence dancehall, Rina Mushonga allie l’organique et l’électro en faisant preuve d’un sens inné des rythmes. De « Pipe Dreamz » à « Jungles » en passant par l’addictif « 4qrts », In a Galaxy résonne fort et juste, entre contes africains, mythologie grecque et transes occidentales. ■ S.R. « IN A GALAXY », Rina Mushonga, Pias

hip-hop GET INTO THE GROOVE

ON NE PRÉSENTE plus le duo ghanéen formé par M3nsa et Wanlov the Kubolor, qui, depuis douze ans et cinq albums, réussit à dominer les classements de la pop continentale. Aujourd’hui, ils proposent un EP bref mais intense : dans le bien nommé Afrobeats Lol, Fokn Bois s’amuse à explorer le rap et l’électro dans leurs recoins les plus inattendus. Enregistré entre Accra, Budapest, Londres et Yokohama, ce nouveau disque témoigne d’un sens de la mélodie s’affirmant aussi bien en studio que sur le dance floor. ■ S.R. « AFROBEATS LOL », Fokn Bois, Idol

Place aux jeunes artistes, tels Janet Siringwani-Nyabeze (à g.) et Troy Makasa (à dr.).

exposition CAP SUR LE ZIMBABWE

Des ARTISTES PEINTRES

redessinent et interrogent l’actualité de leur pays.

VINGT-NEUF ARTISTES DU ZIMBABWE ont interrogé pendant sept mois la vie quotidienne de leur pays, mais aussi leur société à travers la peinture, sur le thème « peindre à la fin d’une époque ». Five Bhobh (à prononcer « five bob »), c’est le tarif à payer qu’annoncent les chauffeurs de kombi (minibus) au Zimbabwe, une fois les passagers entassés à l’intérieur. C’est aussi le nom donné à cette exposition, où chaque artiste s’est glissé dans la peau d’un passager au cœur de cet engin-nation, pour dépeindre les multiples questionnements que soulève une période de grande peur. Les œuvres interrogent l’actualité, inventent mille et un avenirs, racontent des histoires imbriquées les unes dans les autres. Un voyage chaotique et prégnant au cœur de la vie quotidienne zimbabwéenne, dans le plus grand musée d’Art contemporain africain du monde. ■ C.F. « FIVE BHOBH – PAINTING AT THE END OF AN ERA », musée Zeitz Mocaa, au Cap, Afrique du Sud, jusqu’au 31 mars. zeitzmocaa.museumw

festival

MUSIQUES ÉLECTRO AU BURKINA FASO

La 4e édition du festival Africa Bass Culture (ABC) se tient du 1er au 10 mars à Ouagadougou et continue du 15 au 17 mars à Bobo-Dioulasso. Bien plus qu’un rendez-vous musical, ABC réunit l’Afrique digitale à travers des ateliers, des performances, des soirées DJ-VJ… Cette manifestation, lieu de rencontres avantgardiste, est le carrefour artistique de l’afro-électro sur le continent ! ■ « FESTIVAL AFRICA BASS CULTURE (ABC) », Institut français de Ouagadougou, du 1er au 10 mars 2019 ; Institut français de Bobo-Dioulasso, du 15 au 17 mars 2019.

découverte PLUME ET CRAYON

Des livres mêlant texte et dessin, jamais édités, sortent enfin au grand jour.

LA FONDATION MARTIN BODMER et le musée d’Art moderne et contemporain de Genève proposent « Cahiers écrits, dessinés, inimprimés », qui réunit des ouvrages d’artistes, d’écrivains ou de philosophes jamais imprimés mais suffisamment travaillés pour être considérés comme des livres à exemplaire unique. Où parentés graphiques et familiarités visuelles établissent des passerelles entre différents univers écrits, dessinés, tracés ou coloriés tels ceux du Franco-Suisse Marcel Miracle et de l’Ivoirien Frédéric Bruly Bouabré (1923-2014). Celui qui, suite à une « révélation divine », archiva le monde contemporain à la façon d’un entomologiste, glanant traces du réel et du spirituel. Une cosmogonie qu’il consignait en milliers de dessins réalisés aux stylo à bille et crayons de couleur sur du papier cartonné de petit format. Un immense artiste africain qui, grâce à son invention de l’alphabet bété, avait dès 1958, bien avant l’heure du succès, retenu l’attention du grand savant, naturaliste et anthropologue Théodore Monod. ■ L.A. « CAHIERS ÉCRITS, DESSINÉS, INIMPRIMÉS », Fondation Bodmer, Genève, Suisse, jusqu’au 25 août 2019. fondationbodmer.ch

Le festival ABC, un haut lieu de la musique digitale.

commémoration

Révolution tunisienne

Le Mucem revient sur ces 29 jours qui, il y

a huit ans, ont entraîné la chute de BEN ALI.

Au programme, des photos d’archives et des caricatures. événement

L’EXPOSITION PRÉSENTÉE AU MUCEM (à Marseille) est une adaptation de « Before the fourteenth, instant tunisien – Archives de la révolution », inaugurée au Musée national du Bardo, près de Tunis, le 14 janvier (jusqu’au 31 mars), à l’occasion du 8e anniversaire de la révolution tunisienne. Elle en retrace les moments historiques, entre l’immolation par le feu du jeune vendeur de rue Mohamed Bouazizi (17 décembre 2010) et la fuite du président Zine el-Abidine Ben Ali (14 janvier 2011) après vingt-trois ans de pouvoir sans partage. Vingt-neuf jours décisifs qui racontent la révolution. Spontanée, indépendante de toute idéologie et sans guides politiques, celle-ci a trouvé son expression dans l’image et a inauguré le mariage des nouvelles technologies et de la rue, introduisant un nouveau mode de mobilisation et d’action politique, de nouvelles expressions artistiques. L’exposition s’articule autour d’un vaste fonds d’archives : vidéos, photos, blogs, statuts Facebook, articles de journaux, enregistrements de témoins, caricatures, graffitis, slogans, dessins, poèmes et chansons, et aussi communiqués et déclarations de la société civile, collectés à travers tout le pays. ■ C.F. « INSTANT TUNISIEN, ARCHIVES DE LA RÉVOLUTION », Mucem, Marseille, du 20 mars au 30 septembre 2019. mucem.org

Une fleur d’acier, de verre et de béton de fibres pour incarner la puissance qatarie.

LA ROSE DES SABLES DE DOHA

Le

NOUVEAU

Musée national nous plonge dans l’histoire

multiséculaire du Qatar.

APRÈS EMMANUEL MACRON, qui avait inauguré le Louvre Abou Dhabi avec l’homme fort des Émirats arabes unis, cheikh Mohammed ben Zayed Al-Nahyane, en novembre 2017, c’est au tour du Premier ministre français, Édouard Philippe, de se rendre à Doha, ce 28 mars, pour couper le ruban rouge du nouveau musée emblématique qatari, sous le haut patronage de l’émir du Qatar, cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani. Un musée de 40 000 m2, en forme de rose des sables, imaginé par l’architecte Jean Nouvel et construit autour du palais historique, qui vient d’être restauré. Concrètement, le Musée national, dont la directrice n’est autre que la sœur de l’émir, cheikha Al-Mayassa, présidente de Qatar Museums Authority, exposera des œuvres contemporaines d’artistes qataris et internationaux, des objets rares et précieux, parmi lesquels le célèbre tapis de perles commandé par le maharajah de Baroda en 1865, orné de plus de 1,5 million de perles du golfe Persique (émeraudes, diamants, saphirs), et offrira une expérience immersive dans l’histoire du Qatar, allant de 700000 avant JésusChrist à nos jours, le long de plus de 2 km de galeries. L’art de la démesure… ■ C.F.

« NATIONAL MUSEUM OF QATAR », Doha, Qatar. qm.org.qa

UN CENTRE DE FORMATION PANAFRICAIN QUI INVESTIT DANS L’HUMAIN

Conçu pour accompagner la montée en compétences des talents africains,

de l’entreprise de renforcer leurs expertises métiers.

professionnels externes. Depuis peu, il propose également

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Bénéficiant d’une renommée internationale, le CFPP s’appuie sur l’expertise de formateurs

sein des équipes de Bolloré Transport & Logistics. Ils sont sélectionnés pour leurs compétences, leur rigueur mais aussi pour leur capacité à transmettre leur savoir-faire avec passion. Le CFPP propose en outre des programmes sur-mesure en adéquation

des professionnels en formation.

DES CERTIFICATIONS INTERNATIONALES, GAGES DE QUALITÉ À ce titre, le centre est par ailleurs régulièrement

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Au-delà de la formation initiale, le CFPP s’est vocation principale de faciliter l’intégration sociale compter au moyen de supports numériques.

Émilien Konan, Formateur au sein du CFPP témoigne :

« Les collaborateurs que nous accueillons au CFPP peuvent s’exercer à leur rythme au moyen d’une application simple d’utilisation. Nous veillons tout particulièrement à les accompagner durant leur apprentissage en instaurant un suivi régulier même après

Les cours qu’ils reçoivent leur apportent

quotidienne. Voulant être un employeur de de contribuer au développement

OUI OU NON ?

On connaît, très spécifiquement en Afrique centrale, le syndrome de la porte fermée et la lueur de bonheur qu’on lit dans la pupille du portier observant avec délice la file d’attente qui s’est formée devant telle administration, telle ambassade, tel grand magasin ou tel stade. Un grand classique : la porte à double battant ouverte à moitié pour que les gens s’écrasent les uns contre les autres en la franchissant, ou celle qui se ferme quinze minutes avant l’horaire prévu, claquée pile au nez d’une pauvre retardataire qui croyait (à juste titre) être dans les temps. Le maître de la porte, héritier d’une once de pouvoir ponctuel, petit havre de plaisir dans son quotidien bien terne, en use et en abuse. Normal. Il a l’immense pouvoir de dire non. On connaît encore le vendeur renfrogné, derrière son étal de légumes au marché presque content de ne pas avoir les avocats que vous cherchez. Ou encore le fonctionnaire ravi de vous annoncer, après vos quarante-cinq minutes de queue, que les timbres fiscaux sont en rupture… Bref, le non bien frontal, très bantou et un brin caractériel, c’est presque culturel. Il rabat le caquet éventuel du client fortuné ou pressé, de celui qui croit que la vie est facile, et que l’on doit satisfaire ses désirs, alors que le petit employé, lui, il souffre. Plus loin, disons globalement en Afrique de l’Ouest, on se heurte à un autre type de non, beaucoup moins direct, peut-être plus subtil, fruit d’une culture bien différente, celle du « faux oui ». En gros, quoi que vous demandiez ou souhaitiez, on vous répond oui neuf fois sur dix, avec un grand sourire vissé sur le visage. Ce qui, déjà, crée une ambiance plus conviviale. Certes. Pourtant, avec le temps, vous vous rendez compte que les oui tardent à être suivis d’effets. On vous dit « bien sûr, je vais vous trouver ça », et, après plusieurs relances, votre interlocuteur continue à vous jurer sur tous les saints qu’il n’y a pas de problème, que

c’est sûr, ça va le faire… Mais, rien. Idem pour une signature, que l’on vous promet tous les jours, et qui souvent ne vient jamais. Bref le « faux oui » se transforme vite en un « vrai non » qui ne dit pas son nom. Différents cieux, différentes mœurs. Après, chacun ses goûts. Le visiteur, touriste ou homme d’affaires, a le choix. Vaut-il mieux se heurter à un non direct ou être baladé pendant des jours par un faux oui ?

Le truc, c’est de ne pas perdre de vue, qu’à Dakar comme à Douala, obtenir un vrai oui, ce n’est pas toujours facile. Que ce soit pour cause d’impuissance non avouée ou le fruit d’un caractère rebelle, c’est quand même, au final, un goût immodéré pour le non qui prédomine. Qu’on se le dise ! ■

À

Dakar comme à Douala, obtenir un vrai oui, ce n’est pas toujours facile.

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