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Les boss et futurs grands de la neige française face à leurs objectifs









Miles Holden
« Shooter Romain Allemand fut intense, et sa capacité à réaliser de nombreux tricks a vraiment rehaussé l’ambiance de la séance », nous dit le photographe néo-zélandais à propos de sa session avec le snowboardeur. Page 52

Amanda Fordyce
Photographe de Londres, elle s’est rendue à Brixton pour connecter avec la rappeuse Cristale. « La photographier dans les rues où elle a grandi et voir son attachement à la communauté m’a inspirée créativement. » Page 58

Laurent Gnoni
Un illustrateur de bandedessinée depuis plus de vingt ans, Laurent Gnoni vient de s’illustrer avec la sortie de PUMP. Pour ce numéro, il croque avec un style énergique et expressif les athlètes à l’honneur de notre Une.
Dans ce numéro, nous mettons à l’honneur cinq athlètes français
uniques. Alexis Pinturault, Clément Noël et Flavio Vitale incarnent l’excellence du ski alpin, tandis que Tess Ledeux, icône du ski freestyle, et Romain Allemand, futur grand du snowboard freestyle, veulent tout donner à leurs disciplines respectives. Leur talent, leur détermination et leur passion nous laissent envisager de grands moments de performance sur les pistes italiennes prochainement. Côté culture, nous célébrons les artistes qui façonnent l’avenir. La rappeuse anglaise Cristale impose son flow percutant. Superpoze, nous livre ses secrets de création. Enfin, une résidence en studio exceptionnelle réunit la DJ et productrice lyonnaise Flore et Slikback, talent de la scène électronique kenyane, pour une fusion musicale inédite.
Bonne lecture ! La Rédaction

Inspiration
Charline 22
L’ennemi intérieur
Adés The Planet 24
Tout ce qu’elle est Sellycats 26
Une voix qui monte
Cinq athlètes d’attaque et à suivre de près cet hiver.
L’explosif
Rencontre avec Alexis Pinturault, le meilleur skieur français de tous les temps.
Cristale, ou le futur du rap UK. Beaucoup lui prédisent une destinée à la Little Simz.
Entre les études et le plus haut niveau, Flavio Vitale assure.
Fraîchement doté d’un casque Red Bull, Romain Allemand se lance à fond.
Le joyau du rap anglais qui pourrait écrire son futur.
Musique
Une carrière riche et un retour au son gagnant. Musique
Entretien rare avec l’un des boss du YouTube game. Spécial neige
Pour Clément Noël, il y a le ski, bien sûr. Mais aussi le reste. Et le reste compte.
10 points de carrière et d’actu avec Tess Ledeux.
De l’énergie pure à Lyon, aux Red Bull Music Studios.
85 Voyage
90 À fond La Farm
93 Arcade mode
94 Balancez
96 Ours
98 First Move

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auprès de l’ORIAS sous le numéro 20002932 en ses qualités de CIF, membre de la CNCEF, chambre agréée par l’AMF, de MOBSP, de MIA et d’AGA sous le contrôle de l’ACPR.


Le 13 septembre 2025, des dizaines de milliers de spectateurs se sont rassemblés autour du circuit de Nevers Magny-Cours pour une folie : la première édition de Red Bull Motormania. Isack Hadjar, et sa Visa Cash App Racing Bulls, y a célébré son premier podium, soutenu par un public conquis. Sébastien Loeb (en 208 T16 Pikes Peak, comme à moto !), Sarah Lezito (boss du stunt) et les Drift Brothers ont brillé dans un show mêlant F1, MotoGP, FMX et drift. Entre démos spectaculaires et initiations immersives, ce sont plusieurs générations qui ont vibré. redbull.com

Le 27 septembre, le mythique circuit de Charade a accueilli la première édition du Red Bull Cycling Survivor : 200 amateurs ont participé à cette course à élimination directe sur quatre boucles variées. Heïdi Gaugain, vice-championne paralympique, et Yann Chaptal ont été sacrés cyclistes les plus complets. Tous ont salué la beauté du parcours (ici le Puy de Dôme) et l’opportunité unique de rouler sur des routes fermées. redbull.com



Le 11 octobre dernier, la Néerlandaise
Jaïra Joy (gauche) a triomphé lors de la finale mondiale du Red Bull Dance Your Style face à WAACKXXXY (Corée du Sud), lors d’un duel explosif mêlant puissance et charisme. De son côté, Wavee, le danseur slovaque (à droite), s’est démarqué plus tôt dans la compétition par son style fluide et captivant. Cette édition mémorable s’inscrit comme une célébration de la danse freestyle et de la diversité des talents internationaux. redbull.com

Ce projet est si gros qu’on croirait un fake. Le skateur brésilien Sandro Dias a transformé le Centro Administrativo Fernando Ferrari en une rampe géante pour un exploit fou : dévaler 70 m depuis le toit de ses 22 étages à 103 km/h. À 50 ans, il a réalisé un rêve vieux de treize ans, inspiré par des légendes urbaines et des vidéos virales. Tony Hawk a salué ce défi comme un moment clé dans l’évolution et l’histoire du skate.
IG : @diassandro

La DJ et productrice lyonnaise Flore profte d’une session aux Red Bull Music Studios pour nous partager ses plus belles trouvailles.
Figure emblématique de la bass music et pierre angulaire du label POLAAR, la DJ et productrice lyonnaise Flore n’en finit pas de nous surprendre. À l’image de son album très remarqué, RITUALS (2020) – véritable plongée dans une psyché aux textures multiples, entre effroi, rêverie incandescente et pulsion primitive – son dernier single Come Up impressionne par son ouverture et sa minutie : des lignes de basse, qui font vibrer les particules du corps, une véritable transmutation des fluides. Mais le spectre musical de Flore ne se limite pas à la bass music : au fil des années, tout en restant fidèle à ses racines UK drum & bass, son univers a glissé vers des terrains plus expérimentaux, plus breakés, parfois plus techno. Ce que la productrice traque, c’est la tension : le dialogue entre les éléments d’un morceau et la manière dont ils se répondent. Retour sur les artistes qui ont capté son attention.

Découvrez l’intégralité de l’univers de Flore.

Gyrofield
These Heavens (2024)
« J’ai découvert Gyrofield assez tardivement, par le biais de sa release sur XL Recordings These Heavens. J’ai été instantanément intriguée par sa démarche artistique à contre-courant. À l’heure où il est de bon ton de taper violemment et vite, Gyrofield a fait le choix de la délicatesse, avec des inspirations jazzy qu’on trouve trop rarement depuis quelques années. »


SNKLS
Essence (2024)
« Artiste de mon label qui se bonifie de release en release. Lorsque je décide de travailler avec un·e artiste, je recherche une vision, un son, et SNKLS en a clairement un. Mordu de modulaire, il arrive à créer des morceaux minimalistes mais qui groovent à mort. C’est un mélange mutant entre de la musique contemporaine et du footwork et il arrive à me surprendre à chaque fois. »

Ehua
Panta Rei (2025)
« Connue grâce à ses morceaux percussifs pleins de surprises polyrythmiques et ses excellents DJ sets, elle a surpris tout le monde en début d’année avec ce superbe album downtempo, totalement délicieux, qui me fait penser à un mélange hybride entre Erykah Badu et 4hero. Cet album, c’est comme un fondant au chocolat, on y revient à coup sûr. »

ZULI
Lambda (2025)
« J’ai pris une telle tarte lorsque j’ai découvert son dernier LP ! J’ai toujours trouvé que Zuli était un prodige et Lambda en est clairement la preuve. Totalement inclassable, entre trap de l’espace, collage noise tendant vers la composition contemporaine, ambient empreint de sa culture arabe, c’est la chose la plus audacieuse que j’ai entendue ces derniers mois. »




















Refuges alpins
Nichés dans des lieux reculés et en haute altitude, ces abris de montagne ne sont accessibles qu’aux plus courageux.
Architecture primée. Emplacements époustouflants en pleine nature. Beaucoup sont même entièrement gratuits. Il existe des milliers de ces refuges peu fréquentés à travers la planète : des haltes hors réseau où les visiteurs sont accueillis pour une nuit, avec la possibilité de vivre une expérience d’évasion ultime. La contrepartie ? Ces joyaux cachés se trouvent généralement dans des environnements inhospitaliers, en haute altitude, accessibles uniquement aux plus endurants, à pied (ou avec crampons et piolet).
Les Romains furent les premiers à construire ces abris dans les montagnes, et des versions plus modernes commencèrent à apparaître au milieu du XXe siècle.
« Les refuges existent depuis plus d’un siècle dans certaines régions des Alpes, leur essor coïncidant avec celui de l’alpinisme et de l’exploration en montagne », explique
Aaron Rolph, aventurier britannique, auteur de l’ouvrage
Alpine Refuges: The Architecture and Culture of Mountain Shelters. « Au départ, c’était souvent de simples abris en bois qui offraient aux alpi-

L’auteur et aventurier
Aaron Rolph ; le Bivacco Gervasutti dans les Alpes italiennes (en haut).
nistes une protection cruciale contre les conditions météorologiques extrêmes… Depuis, les refuges ont évolué pour devenir des structures sophistiquées, alliant fonctionnalité et styles architecturaux locaux variés. »
Âgé de 36 ans, Aaron Rolph a parcouru la planète, de la Nouvelle-Zélande à la Norvège, pour séjourner dans ces lieux improbables, avec des amis et des inconnus.
« J’ai expérimenté une forme de solitude singulière au cœur des montagnes, dit-il. Plus l’accès en était laborieux et les conditions extrêmes, plus l’arrivée au refuge était gratifiante. Il y a une beauté particulière dans le fait de pouvoir apprécier les choses les plus simples dans un endroit qui, autrement, ne serait que dur et sauvage. »
Son coup de cœur va au Bivacco Gervasutti (photo) dans les Alpes italiennes, à deux pas de la frontière suisse. On pourrait croire à une illusion devant cette construction futuriste.
« C’est une cabane moderne, sans gardien, perchée au bord d’une falaise et cernée de glaciers – difficile de ne pas la considérer comme un refuge exceptionnel, explique-t-il. Cette capsule tubulaire, blanche et rouge, contraste avec le décor ambiant. Une fois à l’intérieur, la grande fenêtre encadre magnifiquement les montagnes qui plongent vers la vallée d’Aoste. »
Mais ces lieux sont bien plus que des abris pour attendre la fin d’une tempête. En créant son livre, Aaron Rolph a découvert la culture unique que ces refuges ont fait naître : « Les refuges de montagne sont devenus des symboles de la résilience humaine, soutient-il, et participent à entretenir un esprit de communauté. Ils permettent de partager son expérience de la montagne avec le monde. »
Alpine Refuges est disponible en anglais ; uk.gestalten.com




30 & 31 JAN 1 FEV 2026

Courageuses, audacieuses, déterminées : en Inde, de jeunes skateuses brisent les anciens stéréotypes. La photographe berlinoise Chantal Pinzi a accompagné cette révolution du skate. Ses images montrent le pouvoir que peut conférer le sport.
À Janwaar, un village rural situé dans l’État central du Madhya Pradesh, en Inde, se trouve un skatepark construit par la communauté – et au Janwaar Castle, comme on l’appelle, il y a une règle d’or : les filles d’abord. Cette philosophie va à l’encontre des normes dans un pays où l’on attend encore des femmes qu’elles se conforment à des idées traditionnelles sur le genre et où elles sont souvent exclues des espaces publics. « C’est fou de voir un skatepark au milieu de nulle part comme ça, avec des buffles qui le traversent… C’est comme si on était dans une autre dimension », raconte la photographe Chantal Pinzi. En 2024, l’Italienne basée à Berlin a voyagé

La photographe Chantal Pinzi a été récompensée, pour la série de photos présentée ici, par le prestigieux Sony World Photography Award dans la catégorie Sport.
pendant vingt heures à travers l’Inde en train et en bus pour rencontrer Asha Gond, alors âgée de 23 ans, dont la passion pour le skateboard brisait les stéréotypes.
Liberté
En tant que femme membre de la tribu Adivasi – un groupe marginalisé dans le système de castes hiérarchique de l’Inde – les opportunités de Gond dans la vie étaient limitées jusqu’à ce qu’elle découvre ce sport. « Le skateboard me donne du pouvoir en tant que femme parce que cela me donne confiance et liberté d’être une voix et non plus un écho, raconte-t-elle. Chaque fois que je réussis une figure, je me sens plus forte ; je me prouve à moi-même que je peux faire des choses que les gens disent que je ne peux pas faire. Dans ma communauté, on dit souvent aux filles de rester silencieuses ou de rester à la maison, mais quand je fais du skate, je me sens libre. Au skatepark, je ne suis pas juste une fille – je suis une skateuse, comme tout le monde. »
En avril dernier, les images de Gond et d’autres membres de la scène émergente du skateboard féminin en Inde, prises par Pinzi dans le cadre de son projet en cours Shred






Shruti Bhosle, 20 ans (à gauche) ; Asha Gond, seule représentante de l’Inde au Championnat du monde de skateboard 2018 (ci-dessus) ; tatouage au henné (en bas) ; les skateuses posent à Goa (à droite).
the Patriarchy – qui l’a également menée au Maroc et en Éthiopie – ont remporté la catégorie Sport aux Sony World Photography Awards 2025. Elle-même skateuse, Pinzi comprend à quel point ce sport peut être source d’émancipation : « On ne réussit pas une figure du premier coup ; il faut être persévérante. On essaie encore et encore, on tombe, parfois on se blesse, mais on continue jusqu’à ce que l’on y arrive. Cela te donne un sentiment de liberté. Une fois que tu es sur la planche, tout autour de toi disparaît complètement. Tu ne penses plus aux problèmes de ta vie ; tu te concentres juste sur la figure et sur l’instant précis. C’est vraiment précieux. »
Bien que le conservatisme en Inde ait tendance à mettre de côté l’ambition des femmes – surtout dans le sport – Pinzi pense que les mentalités sont en train de changer, en grande partie grâce au fait que le skateboard a obtenu le statut olympique. « Cela a changé beaucoup d’opinions, poursuit-elle. L’Inde est une société vraiment complexe et le fait d’apporter de l’honneur à sa propre communauté grâce à une victoire, grâce à une médaille, ça compte beaucoup. Cette reconnaissance donne la liberté de pratiquer, surtout pour les femmes. C’est triste qu’il faille cela, mais je pense que ça a été un tournant. »
IG : @chantalpinzi.photography

Grand amateur de gadgets, ce designer industriel a créé un appareil sous-marin dont n’importe quel agent secret serait fer.
La scène de cinéma qui a captivé Archie O’Brien (et changé sa vie) c’est l’ouverture du film Le monde ne suffit pas (1999) : James Bond (joué par Pierce Brosnan) saute dans un bateau propulsé par un jet et traverse le bâtiment du MI6 pour atterrir dans la Tamise. Magistral ! Mais ce n’était pas l’action de 007 qui subjuguait O’Brien : « J’ai toujours été fasciné par la technologie de Q, déclaret-il. Je trouvais ça génial qu’il puisse fabriquer n’importe quoi. »
Près de vingt ans plus tard, en 2017, alors qu’il étudiait le
design industriel à l’université de Loughborough, O’Brien commence à travailler sur son propre gadget à la manière de Q. Le jeune homme de 28 ans reconnaît être « complètement obsédé par le fait de créer des choses » : « Je voulais quelque chose qui procure de l’adrénaline, que ce soit fun ; il fallait que ce soit lié au sport. Et surtout, que ça n’existe pas encore. »
Passionné d’apnée, Archie O’Brien se lance alors dans le développement du CudaJet, le premier jetpack sous-marin au monde. Et même s’il ressemble à une technologie

Archie O’Brien, fondateur et PDG de CudaJet Ltd ; son jetpack aquatique (en haut).
tout droit sortie d’un film d’espionnage, son créateur fait référence aux superhéros : « Regardez Superman, Iron Man… Ils volent ! Mon engin, c’est pareil ! »
Porté comme un sac à dos, fixé à un harnais en néoprène, et relativement léger (14 kg), le CudaJet s’active via une gâchette manuelle qui enclenche son système de propulsion sous-marin breveté. Le nageur contrôle la direction avec le corps, tandis que le jetpack le propulse à des vitesses allant jusqu’à 3 m/s, avec une force de traînée comparable à celle d’un vol à plus de 290 km/h dans les airs.
L’appareil fonctionne grâce à des batteries lithium, d’une autonomie de 90 minutes. D’après O’Brien, les utilisateurs maîtrisent les bases en cinq minutes ; le seul équipement supplémentaire requis est un masque de plongée couvrant le nez.
Bien que le CudaJet soit opérationnel jusqu’à 40 m de profondeur, une limite de sécurité à 3 m est intégrée : à cette profondeur, la propulsion s’arrête automatiquement et le jetpack se transforme en dispositif de flottaison pour ramener l’utilisateur à la surface. Même s’il est conscient de l’intérêt croissant du côté des opérateurs de caméras submersibles, des chercheurs marins ou pour des missions de sauvetage, O’Brien pose des limites : le CudaJet « est le jouet ultime pour les yachts de luxe ». En effet, pour l’instant, il est n’est destiné qu’au loisir, et est fabriqué uniquement sur commande (pour la modique somme de… 26 000 €).
Utiliser ce jetpack est « addictif », selon lui : « C’est une sensation inédite. La surcharge sensorielle du début est vite oubliée. Une fois que habitué, on se détend et on profite. On peut explorer des endroits qu’on n’aurait jamais vus autrement. »
cudajet.com







Le
destin d’une famille qui se dresse contre une dégénérescence neurologique (pour l’instant) impitoyable et en a fait un moteur. Forte et souriante, Charline Pouillet affronte la maladie de Huntington grâce au sport.
Texte Pierre-Henri Camy Photo Enzo Castillon
the red bulletin : Qui est Charline Pouillet, en ce 7 août 2025 ?
charline pouillet : J’ai 25 ans, je suis diplômée d’une école de commerce et d’un double cursus en STAPS. Je travaille dans l’événementiel sportif, avec une expérience marquante de deux ans à Paris 2024. J’ai fondé en 2018 l’association On détonne contre Huntington, pour sensibiliser à cette maladie via des projets sportifs. Mon père en est atteint, et je suis porteuse du gène. Mon objectif est d’éveiller les consciences et de contribuer à la recherche d’un traitement curatif.
La maladie de Huntington, qui se déclare chez les personnes porteuses du gène entre 30 et 50 ans, est-elle un sujet de recherche depuis longtemps ?
Le gène responsable n’a été identifé qu’en 1993, ce qui rend la recherche encore récente à l’échelle scientifque. Plus cette maladie sera connue, plus elle mobilisera des soutiens fnanciers et institutionnels pour accélérer la recherche.
Parlez-nous de l’un de vos projets de dépassement marquants ?
L’ascension du Kilimandjaro, en 2022, a été un tournant. Mon père, alors dans le déni de sa maladie, a accepté un suivi médical pluridisciplinaire après ce déf. Gravir un sommet de près de 6 000 mètres est une prouesse pour un malade de Huntington. Cet exploit a transformé son état d’esprit : il est passé de « je me laisse mourir » à « je peux encore accomplir des choses ».
Votre frère, Théo, 21 ans, a-t-il passé les tests génétiques ?
Oui, récemment. Et heureusement, il n’est pas porteur du gène.
Comment gérez-vous cette situation : une maladie qui sommeille en vous ?
Je m’appuie sur le sport pour évacuer l’anxiété et me concentrer sur l’instant présent. Cela m’aide à transformer la peur en énergie positive, bien que je traverse parfois des moments de solitude.
Quels résultats positifs avez-vous observés avec votre association ?
La maladie de Huntington a été identifiée en 1993 C’est ? Une dégénérescence neurologique héréditaire, incurable et orpheline qui se développe sur trois axes : cognitif, psychiatrique et moteur Entre 7 et 8 000 personnes sont touchées en France Soutenez l’asso On détonne contre Huntington
Et s’il n’y avait pas eu le Kilimandjaro ?
Mon père, aujourd’hui dépendant des aides à domicile, aurait probablement subi un accident fatal, comme cela arrive souvent à de nombreux malades.
Y a-t-il eu une suite à ce déf ?
Le mois dernier, nous avons atteint le mont Ventoux à vélo en tractant mon père, qui a lui même roulé quelques heures. Ce projet combinait exploit sportif, adaptation à ses capacités et moments de partage avec les habitants des villes traversées. Une parfaite illustration de notre mission : sensibiliser, partager et repousser les limites.
Il semble que votre aventure face à la maladie est relatée dans un ouvrage ?
Oui, dans deux livres écrits par Jeanne Yliss : De colère et d’amour et Du chaos aux sommets (parus respectivement en juin et septembre). Ils décrivent nos défs depuis 2018 et aussi l’histoire familiale marquée par le déni et les tensions liés à la maladie.
Votre père niait-il sa maladie ?
Oui, malgré les antécédents familiaux, il refusait d’accepter la réalité, un déni profondément ancré.
Nous avons dépassé la peur et l’isolement liés à la maladie en passant par le sport, qui permet d’en parler sans pathos. Nos actions touchent un public varié, bien au-delà des familles concernées. Par exemple, notre documentaire, difusé dans des festivals, sensibilise des personnes éloignées du domaine médical. Nos initiatives résonnent auprès de nombreuses personnes, car elles abordent aussi des thèmes universels comme les liens familiaux face à l’épreuve.
Vous avez récemment participé à une épreuve à vélo, Autour de la Rance, organisée en Bretagne par un youtubeur, LeBouseuh. Vous le connaissiez ?
Non, et j’ai découvert quelqu’un d’hyper simple. Un Monsieur tout le monde, quelqu’un d’une grande simplicité qui a spontanément abordé mes projets. J’ai été très agréablement surprise de cette rencontre avec LeBouseuh.
Quel bilan tirez-vous de cette expérience auprès d’infuenceurs ?
Sur le plan humain, j’ai adoré l’ambiance conviviale et la simplicité des youtubeurs, qui se fondaient parfaitement parmi les participants. J’ai également été impressionnée par l’organisation logistique et la production de l’événement. Bien que le parcours ne fasse que 35 km, il était exigeant et compétitif, ce que j’ai adoré.
Qu’est-ce qui vous a motivée à participer à Autour de la Rance ?
Mon frère, très branché YouTube, m’a encouragée à postuler. J’aime relever des défs et sortir de ma zone de confort.
IG : @on_detonne_contre_huntington ; De colère et d’amour et Du chaos aux sommets, de Jeanne Yliss, dispos en librairie.

« Le sport m’aide à transformer la peur en énergie positive. »
ADÉS THE PLANET a déjà tout d’une grande. Rencontre avec une des rappeuses les plus intrigantes du game.
Texte Dolores Bakela Photo Lea Harmoza
ADÉS THE PLANET n’a pas fni de bousculer le(s) genre(s). Après trois EPs, son projet Bâtarde sensible sorti début octobre pourrait défnitivement placer la prolifque artiste et productrice d’origine ivoirienne sur la map d’un rap exigeant et toujours ovniesque. C’est dire s’il aura une place de choix dans sa discographie : elle a présenté ces nouveaux morceaux fn novembre à Paris à la Main Room : « Ma première date à l’afche en solo. » Reconnue pour sa voix singulière et son univers sombre – l’un de ses précédents opus s’appelle J’pleure en dansant –ADÉS THE PLANET a peu parlé d’elle jusqu’ici. On ne s’attend pas à la trouver aussi volubile, lorsqu’elle descend d’un vélo pour s’installer à la terrasse où on l’attend pour l’interview. L’échange débute coïncidemment avec son amour pour le Red Bull, qu’elle clame en énumérant ses goûts préférés. Elle qui avoue « ne rien laisser au hasard » a fait de ce quatrième efort une œuvre d’art totale, signifante dès sa cover, qu’elle a l’habitude de soigner, « bossée et conceptualisée cette fois avec une artiste 3D et vieille connaissance de Côte d’Ivoire ».
Retourner le stigmate
La couv nous met sur plusieurs pistes en installant les enjeux au cœur du projet : l’articulation de sa complexité, aventureuse musicalement et qui sème plein d’indices biographiques et de sa vision de la vie tout au long des textes. Quand on regarde le visuel, on se demande si c’est une hydre à plusieurs têtes qui y fgure, pour marquer son côté multi-facettes ou elle qui se dépeint en pleine mu(e)tation. « Un peu des deux ! On voit un personnage qui sort pour laisser place à un autre, et qui traduit le fait que je m’ouvre,
En tournée en 2026
Rennes 29 janvier, au 360 Lille 5 février, à La Bulle Café Bordeaux 7 février, au Rocher de Palmer Nancy 14 février, à L’Autre Canal Lyon 20 février, au Marché Gare
et qu’il y a encore plein de choses à découvrir de moi. C’est aussi pour représenter le côté bâtard et le côté sensible que j’ai en moi. » Le titre de la mixtape sonne au demeurant comme un clin d’œil au titre du deuxième album de TTC, sorti il y a à peu près vingt ans. « C’est surtout une manière de me réapproprier ces deux termes. Le bâtard n’est pas seulement celui qui b**** des meufs tout le temps, c’est aussi quelqu’un qui est né hors mariage, dont on a du mal à identifer les origines, qui n’a pas de repères. Tout ça, c’est moi aussi. »
Un des singles du projet, Bokit indique qu’elle est aussi antillaise, et amorce d’autres considérations identitaires comme lorsqu’elle dit :« J’suis pas un garçon ni une flle /J’suis équilibrée », qu’elle tord d’un rieur-rictus : « Non, j’rigole. » La fulgurance recouvre une réalité, celle de l’ablation de sa poitrine, opération longtemps désirée qu’elle a documentée sur Tiktok, sans vouloir être porte-parole. Femme cisgenre, non-binaire, elle a toujours ressenti le besoin de masculiniser son torse. « Je ne suis pas trans, je suis tout aussi femme sans cette poitrine qui gênait la perception de mon corps au quotidien. » Après s’être un peu débattue avec sa légitimité de le faire, s’être stabilisée quelque part – post-COVID, elle a passé trois ans en Côte-d’Ivoire avant de revenir en France – et être en mesure de fnancer ce geste, ADÉS THE PLANET franchit le pas, toujours dans une démarche
d’authenticité, d’alignement avec ellemême, montrer que c’est possible. « Je ne serai pas avocate, je ne bosserai pas dans l’immobilier, voilà qui je suis ! »
Les planètes d’ADÉS
À l’entendre, sa vie d’artiste est arrivée de manière accidentelle. « Une succession d’événements inattendus. » Et de ruptures, avec son quotidien, la France, direction San Francisco où elle part sur un coup de tête faire des études en droit foncier. C’est dans cette capitale queer et importante pour l’histoire des Afrodescendant·e·s qu’elle se découvre, qu’elle apprend à vivre seule et se connecte pour la première fois avec des gens qui font de la musique. Mais comme on l’entend dans Hollywood, morceau rock premier degré qu’on dirait pensé en forme de clin d’œil au rock ivoire – car tous les styles que touchent les Ivoirien· ne·s deviennent le leur – « c’est surtout que le rock et la trap se marient super bien », la rappeuse ne cache ni ses excès passés, ni sa rage.
À son retour en France, après avoir validé sa licence, le COVID l’empêche de retourner aux États-Unis. « J’ai commencé la musique une fois rentrée en France, privée d’indépendance et de perspectives professionnelles prévues par mes études. Tu vois le moment entre l’inspiration et l’expiration ? C’est dans ce laps de temps, que j’ai décidé de repartir en Côte-d’Ivoire où j’ai maquetté plein de sons. » Parmi lesquels, entre autres, Millions. Le déracinement a créé un enracinement dans la musique. Pas stable « mais saine, qui reconnaît ses faiblesses et ses névroses ». Capable, ADÉS veut infuencer dans le bon sens. « Pour certaines personnes tu es une bénédiction, et dans le même temps une malédiction. » La rappeuse a donc fait un projet qui lui ressemble, consciente et toujours prompte à jouer le jeu de l’honnêteté même quand elle dépeint une réalité moche, « pas linéaire, avec des incursions nettes dans d’autres styles que le rap – comme dans Tattoo – parce que pourquoi pas ? Ce n’est jamais risqué d’essayer. » ADÉS veut toujours qu’on danse, mais on pleure un peu moins.

Écouter la mixtape d’ADÉS THE PLANET ; IG : @adestheplanet

« Le bâtard c’est aussi quelqu’un [...] qui n’a pas de repères. »
ADÉS au sujet de son choix de titre ultra personnel et de ses origines.
À
18 ans, Célia « Sellycats » Catselides s’impose comme le nouveau visage de l’animation esport sur Apex Legends et Valorant. Un talent brut, bien décidé à ne pas s’arrêter là.
Texte Hugues Pascot Photo Elise Outteryck
Peu de jeunes de 18 ans peuvent se targuer d’avoir « fait » Bercy. Pourtant, c’est devant plus de 15 000 personnes que Célia « Sellycats » Catselides a tenu le micro, début octobre, en direct sur place et sur la chaîne Twitch française Valorant, pour l’une des compétitions esport les plus prestigieuses au monde : les VCT Champions. Je la retrouve dans le Gaming Ground de Red Bull, encore grisée par l’événement qui vient de s’achever. « C’était incroyable. Je ne pensais pas vivre un truc pareil si tôt. Le rythme était intense, mais c’était vraiment stimulant et challengeant. » Le challenge, c’est ce qui fait vibrer notre host esport, à l’aisance saisissante face caméra. Derrière ce visage, un cheminement construit avec rigueur, passion et détermination.
Son destin
C’est à Marseille que le parcours de Sellycats débute, entre les tatamis de judo qu’elle pratique à haut niveau, l’esprit de compétition et un besoin viscéral de s’exprimer. D’emblée, la nécessité de se dépasser prend toute la place. « J’avais très tôt cette envie de parler devant un public, de participer à des concours d’éloquence au collège, de prendre la parole », confie-telle. Cette soif de performance, elle l’assouvira également dans les jeux vidéo, qu’elle découvre grâce à ses parents. « Ils jouaient souvent à Lara Croft ou Grand Theft Auto. Ils ne me laissaient pas jouer, mais m’autorisaient parfois à regarder. Mon père me laissait seulement conduire les voitures dans GTA » Une petite fenêtre s’ouvrait sur un univers qui allait, quelques années plus tard, forger son destin. Sellycats se souvient du déclic :
Focus
Sellycats trace sa route : À 12 ans Découverte du jeu vidéo Apex Legends À 15 ans Première couverture d’un événement esport professionnel en qualité de Cast à l’ESpot 2024 Elle a remporté le showmatch sur la série des World Apex À 18 ans Host les VCT Champions à Bercy
le 5 février 2019, jour de sortie en France du FPS Apex Legends. « Ce jeu a apporté exactement ce que tout le monde cherchait : de la nervosité et une complexité incroyable. Un mélange de Call of Duty, Fortnite et du Valorant actuel. » Elle le décrit comme une spirale qui l’a aspirée.
Détermination
À 12 ans, Selly s’investit pleinement dans Apex Legends, avec l’objectif de progresser, d’accumuler des compétences et d’atteindre un niveau suffisant pour ses premières compétitions professionnelles. Un engagement total qui, combiné à un diagnostic HPI (Haut Potentiel Intellectuel), crée un décalage avec le cadre scolaire, qu’elle assimile à un vrai calvaire : on lui a fait sauter des classes, mais l’inadaptation était toujours là, avec la souffrance qui l’accompagne. La voie traditionnelle est incompatible avec ses ambitions.
À 15 ans, période qui coïncide avec le Covid, elle quitte le système éducatif classique et s’inscrit au CNED. Ses capacités lui permettent alors d’accroître et de canaliser son potentiel. « J’ai pu me former à travers les jeux vidéo tout en suivant des cours en parallèle. » Progressivement, Selly délaisse le clavier et la souris au profit du micro et des caméras. On lui
reproche au début d’avoir une voix inadaptée ou de ne pas bien s’exprimer. Qu’importe, sa détermination la pousse à continuer jusqu’à ce qu’une opportunité se présente : l’ESpot de Paris lui propose de commenter la Crucial Assent, une compétition locale.
Ce premier pas devant un public coïncide avec la perte brutale de son père. « C’était un passionné de compétition. Il me mettait la pression pour que je réussisse. Et il a disparu. Il n’a rien pu voir de tout ça. » Portée par un mental d’acier et le soutien indéfectible de sa mère, elle relève le défi. Sur place, elle noue des contacts, avance au feeling ; elle allie préparation et instinct et se fait rapidement remarquer par son professionnalisme. « Je sortais d’une période terrible. D’un coup, les gens m’ont vu pour qui j’étais et ce que j’aimais. Ce fut beaucoup d’émotions en peu de temps ». De là, elle enchaîne les LANs, élargit son champ au commentary sur Valorant sous l’impulsion de Loupiote, également présentatrice sur la chaîne française officielle du jeu, et impose progressivement son style. Jusqu’à Bercy.
Curiosité infinie
Selly semble avoir trouvé sa voie. Sur le terrain de l’esport, elle mène un combat qui lui paraît juste : mettre en avant la scène féminine de l’esport avec notamment des compétitions ouvertes exclusivement aux femmes et aux personnes marginalisées, comme les RTS ou Game Changers pour aboutir à la mixité dans les compétitions majeures. « On ne pourra jamais avoir du mixte si on ne passe pas par l’étape féminine : elle est un tremplin vers la mixité pour que les filles commencent par être à l’aise sur le fait de jouer en compétition, s’améliorer et venir sur des événements mixtes. »
Les envies et les ambitions de Selly la conduisent vers des rêves plus grands. « J’ai une curiosité infinie donc demain, si tu me dis que je dois host une compétition de bilboquet, je suis là ! Mon rêve, c’est de pouvoir commenter du sport plus “traditionnel”. Je n’ai pas envie de me restreindre et de me limiter à l’esport. Et j’ai envie de me détacher du besoin de validation et de l’injonction à m’améliorer de jour en jour. »
IG : @sellycats_ ; Twitch : @Sellycats

« Je n’ai pas envie de me restreindre et de me limiter à l’esport. »
Sellycats sur ses ambitions futures.

Pour tous, l’année 2026 sera riche, avec notamment un rendez-vous de portée mondiale en Italie. Unis pas la perf, le plaisir et un terrain de jeu – la neige – Tess Ledeux et Romain Allemand (ski et snow freestyle),
Alexis Pinturault, Flavio Vitale et Clément Noël (alpin), débutent ou continuent d’écrire leur histoire. À leur façon, avec leur style et leur personnalité propres. Rencontres.


Qu’ils soient les boss de leur discipline ou en dessinent le futur, ces athlètes osent.

Alexis Pinturault, 34 ans, ce sont 34 victoires en Coupe du monde, 6 Globes de Cristal, 8 médailles aux Championnats du monde et 3 obtenues lors de la plus grande compétition mondiale. Entretien avec le meilleur skieur français de tous les temps.

the red bulletin : Si vous aviez à résumer votre carrière jusqu’à présent, quels seraient les titres les plus marquants ?
alexis pinturault : Parmi les plus importants, il y a forcément le gros Globe de Cristal et l’année 2021. Mes titres de Champion du monde, et mes trois plus belles médailles, même s’il n’y pas d’or !
Vous avez fait toutes les disciplines de l’alpin, comment vous préparez-vous pour gérer ces eforts antagonistes ?
De manière générale, on se prépare pour le noyau dur, c’est-à-dire la force et la puissance ; surtout la puissance, qui se travaille en musculation. L’autre noyau dur, c’est le travail de fond, à savoir l’endurance, qui permet d’encaisser l’ensemble de l’hiver, notamment la complexité et la fatigue que ça engendre. Donc avoir un bon système immunitaire qui sait bien récupérer, bien fonctionner tout au long de la saison. Plus spécifquement, en tant que géantiste, on met plus l’accent sur l’explosivité que sur la force pure, au contraire d’un descendeur. Là où j’ai les meilleurs résultats, ce sont dans les disciplines techniques, donc on a axé plus sur ces qualités d’explosivité.
Quelle est, selon vous, la discipline la plus exigeante ?
Elles le sont toutes mais avec leurs particularités. En slalom et en géant, on va venir travailler le soufe. Avec les petits virages, on fatigue moins les muscles, mais on produit quand même de l’acide lactique alors qu’en descente, on est plus sur de la force pure, avec du lactique qui va être localisé sur les jambes et un soufe moins impacté. C’est surtout le tracé qui fait la diférence.
Comment passe-t-on de la polyvalence à une seule discipline ?
Ça a été un peu forcé par mon historique. Je me suis blessé coup sur coup les deux dernières années, en 2024 et 2025. Même si la deuxième blessure a été moins importante que la première (à la réception d’un saut dans le super-G à Wengen en Suisse, le skieur de Courchevel s’était rompu le ligament croisé antérieur du genou gauche, ndlr), cela m’a tenu éloigné des circuits pendant quatre mois. C’est cela qui m’a poussé à me reconcentrer sur ma discipline la plus forte pour maximiser ce temps relativement court, le mettre à proft le plus possible pour regagner en performance, avec l’objectif du grand rendez-vous de février.
Revenir de blessure, qu’est-ce que ça implique dans votre préparation ?
Lors d’une saison normale, on est en vacances en mai, pour un mois. Quand on ré-attaque la saison, on repart à 80 % de notre plein potentiel. Quand on revient de blessure, on part parfois de zéro. Sur ma première blessure, j’étais à 60 % de mes capacités, sur la seconde, je dirais un peu plus, mais encore loin des 100 %. Il faut d’abord entrer dans un protocole de rééducation pour se reconstruire : ça passe par recommencer à marcher, puis à courir, ce qui prend six à sept mois. Quand on reprend le ski, on revient de loin…
Cela veut dire quoi, concrètement ? Il faut récréer un athlète. Les bases, c’est fastidieux, mais là où ça change, c’est quand la saison de compétition commence, puisqu’au lieu de faire une course
deux ou trois fois par semaine, je ne vais pouvoir en faire qu’une par semaine, voire une toutes les deux semaines. Ce qui me laissera le temps pour me perfectionner et raccrocher le fameux train qui avance perpétuellement, que je dois rattraper, et aussi de me reposer afn d’éviter les infammations. Ces 20 % que je vais aller chercher, c’est moins sur le physique et plus sur la technique, l’engagement, la prise de risques. Quand on revient de blessure, on est encore plus focalisé sur soi que d’habitude.
Pouvez-vous lister vos plus grands atouts ?
L’explosivité qui me permet de faire des trajectoires un peu plus directes et tendues grâce à des appuis plus puissants sur un laps de temps plus court, ma force mentale et ma pugnacité. Le mental, c’est difcile à quantifer, quand la technique et le physique sont là, le mental suit, mais c’est un triptyque extrêmement important, voire indissociable. On peut leur attribuer un tiers à chacun.
Peut-on aussi parler des manques, ce que vous travaillez en particulier ?
Je vais avoir besoin de travailler des trajectoires de plus en plus directes, ça va avec la confance, la technique le physique. À l’heure actuelle, je mets en place des choses pour rattraper le fameux train et ensuite récupérer le wagon de tête !
Revenons sur ce mental. Comment le conditionne-t-on ?
J’ai eu plusieurs coaches mental, même des psys, ça dépend de la période, de ce qu’on a besoin de travailler. Ça peut être de la sophrologie, des exercices de
« En tant que géantiste, on met plus l’accent sur l’explosivité que sur la force pure, au contraire d’un descendeur. »

visualisation, de concentration. Ça peut être du travail de post-blessure : quand on se blesse comme moi à plus de 100 km/h, l’impact est très violent et ça laisse des traces, comme un accident de voiture sans carrosserie. Il faut aussi accepter de le revivre en s’exposant à nouveau à de très grandes vitesses.
Vous avez tout vécu côté palmarès et carrière. Comment se relève-t-on, c’est quoi votre fuel ? Le premier, c’est le plaisir que je trouve dans le ski ; le second, c’est la recherche de performance. Il faut être à l’aise avec ses choix. Même si je m’amuse parfois à l’entraînement, le plaisir se manifeste plus en compétition, avec cette adrénaline décuplée. Quand on arrive à imbriquer la perf, le stress, à cet état de fow (la performance ultime), c’est là qu’on a le plus de sensations et de plaisir.
Ce plaisir, quand se manifeste-t-il précisément ? Sur le podium, sur la ligne ?
Le podium est le moment de recueillement, le moment où on partage avec nos proches, on savoure, on se remémore par quoi on est passés. Mais le moment le plus puissant pour moi reste quand je franchis la ligne d’arrivée, je vois le résultat réalisé : là, c’est le paroxysme de la montée d’adrénaline.
Dans quel état d’esprit êtes-vous à l’approche du grand rendez-vous ? Impatient que la saison commence, pour m’étalonner par rapport aux autres concurrents. Conscient du travail qu’il me reste à accomplir.
À quoi passez-vous vos moments de détente ?
Avec la famille, l’entraînement, les compétitions, et les grandes échéances qui approchent, ça laisse de moins en moins de temps, mais je pratique pas mal de sports : le tennis, le padel, le wake, le golf. Dans la région, on a de la chance d’avoir de beaux terrains de jeu !
« Ce que je fais le plus, ce sont les étirements, des exercices de mobilité et du Pilates. Ça, c’est tous les jours. La musculation, j’en fais plus en pointillé, deux à trois fois par semaine et moins pendant l’hiver. Tout ce qui est endurance, c’est l’été avec 17 semaines de renforcement musculaire, du vélo, de la course à pied, du travail du haut du corps, de la proprioception, du travail d’appuis. À l’approche des grands événements, il y a une phase de repos, pour se ressourcer, on est plus sur des séances courtes, mais de haute intensité, pour “faire du jus”. »
IG : @alexispinturault

« Je m’appelle Clément Noël, je suis skieur alpin et athlète Red Bull. Je fais du slalom en Coupe du monde. Je participe au circuit international, aux Championnats du monde et au-delà. J’ai gagné plusieurs courses, des belles et des moins belles. »

Mr Noël. À gauche : Clément s’impose à Kitzbühel (Autriche) en janvier 2025. Il devient alors le Français le plus titré en slalom.
Discuter avec Clément Noël, 28 ans, c’est évoquer le ski au plus haut niveau, bien sûr, mais aussi aborder la notion de mental, le golf ou la gastronomie. Rester focus sur les bonnes choses pourrait être une approche qui le défnit impeccablement. Du coup, on a un peu cuisiné le slalomeur français le plus titré de l’histoire…
the red bulletin : Comment vous sentez-vous à l’approche du grand rendez-vous de février en Italie ? clément noël : Bien. La phase de préparation s’est bien déroulée. On est encore loin du rendez-vous italien. Même si la saison de ski n’a pas encore commencé, on a bien travaillé en amont. Je suis plutôt confant. Content, en tout cas, de la manière dont je suis en ce moment. La préparation estivale, c’est toujours un peu particulier. On n’a pas exactement les mêmes repères que ceux qu’on aura en hiver. L’entraînement c’est l’entraînement, la course c’est la course. Physiquement, je me sens bien, je n’ai pas de bobos. On a fait une grosse préparation physique aussi, il ne nous reste plus qu’à aller de l’avant, vers la saison et voir ce qu’il se passe…
À propos de vos phases de préparation, vous faites chaque année un stage à Ushuaïa au début du mois de septembre. Comment ça se passe là-bas ? On y va quasiment tout le mois de septembre, entre trois semaines et un mois, ça dépend des années. On est de plus en plus nombreux à y aller. C’est très important d’aller s’entraîner dans l’hémisphère sud pour retrouver des conditions hivernales. Le gros bloc de la préparation, c’est une vingtaine de jours de ski.
Kévin Page, responsable du Groupe technique hommes de l’équipe de France, dit de vous que vous lui avez rendu une très bonne copie pour ce stage. Est-ce aussi votre ressenti ?
J’ai fait un bon stage, j’ai plutôt bien skié. Je me suis bien adapté à toutes les conditions. Moi, ce sont ces conditions que j’ai besoin d’expérimenter à Ushuaïa. Ce sont des conditions assez difciles avec des terrains marqués, des trous, etc. Je suis meilleur quand c’est de la glace et que c’est lisse. J’ai bien progressé là-dedans, je pense donc que c’est utile.
En décembre dernier, vous avez fait une chute et vous êtes blessé à Vald’Isère. Comment avez-vous géré ce moment ?
C’était une petite blessure, rien de grave ni de dramatique. Je n’ai pas eu beaucoup à réféchir. Il fallait que je me remette vite sur pied parce que c’était une blessure pas très grosse qui me permettrait de continuer la saison. La période d’invalidité n’était pas défnie. Le problème, c’était la douleur… J’ai serré les dents, je me suis concentré, j’ai pris soin de moi, je me suis adapté aux sensations et me suis eforcé d’écouter mon corps. J’ai été éloigné du ski à peine une semaine. Puis je m’y suis remis : c’était douloureux au début, je portais des straps. Ce n’était pas facile, surtout à l’entraînement. En course, j’arrivais à gérer à peu près la douleur. Ce sont des moments où l’on n’a pas besoin de beaucoup réféchir. J’étais dans l’action à me dire : « Il faut, que je m’y remette et que ça continue. »
Depuis quelques années maintenant, on parle beaucoup de santé mentale dans le sport. Est-ce que vous vous faites accompagner par un ou une psychologue du sport ?
Ouais, j’ai une psychologue, avec qui je travaille depuis l’année dernière, et ça se passe bien. Je n’en ressentais pas forcément le besoin avant, mais maintenant oui : ça m’aide à mettre les bonnes choses en place pour être bien dans ma tête le moment venu, et pour être bon au moment où il faut. Ces aides supplémentaires, ce soutien psychique, c’est aussi important que d’être prêt physiquement. Voire même être prêt mentalement a peutêtre plus d’importance en vue de performer. Après, au fl d’une carrière, il y a des moments où on en aura plus besoin que d’autres. Je pense que tout le monde peut s’améliorer en se faisant accompagner.
La vie en dehors du ski : c’est quoi, pour Clément Noël, un vrai jour of réussi ?
Ça dépend. Si je suis fatigué et que j’ai besoin de me reposer, c’est une journée pendant laquelle je ne fais rien, je regarde du sport à la télé, je joue au poker sur mon ordinateur. Si je suis encore un peu en forme, je peux aller jouer au golf, me faire un petit resto, éventuellement boire une petite bière la veille. Ça, c’est l’idéal !
Que regardez-vous comme autre sport ?
Un peu de tout mais principalement du golf. Je regarde le cyclisme, du tennis, un peu de foot et les sports d’hiver. J’aime bien aussi l’athlétisme quand il y a de grandes compétitions.
Vous êtes aussi passionné de golf. Qui est votre golfeur préféré ?
J’aime bien Rory McIlroy, je pense que c’est un des plus grands golfeurs à l’heure actuelle.
Qu’est-ce que vous appréciez chez lui ?
Son style de jeu ?
Oui, il a un style de swing hyper élégant, propre. C’est beau, il n’y a rien qui dépasse. Ça paraît presque facile. J’aime bien ce genre de sportifs : leur sport semble facile, alors que généralement, c’est ce qu’il y a de plus dur à faire. J’aime les sportifs qui ont une belle technique, type Roger Federer même si je préfère Nadal à Federer. (Rires)
Vous parlez d’élégance et de précision. Y a-t-il des parallèles entre votre sport et le golf ?
Ce sont des sports très diférents mais on peut toujours trouver des similitudes. Être classe, avoir une façon de skier fuide et élégante, je trouve que c’est plus joli mais ce n’est pas le plus important. On
« Il faut aussi que j’adapte mon temps pour pouvoir penser à autre chose que le ski et faire autre chose que du ski. »

Clément à l’entraînement, avec les différents groupes fédéraux, hommes et femmes, sur le glacier des DeuxAlpes, en juin 2025.

Red Bull accompagne Clément Noël au quotidien, notamment via son Athlete Performance Center (APC) installé à Salzbourg, en Autriche. Il raconte.
« L’APC mis en place par Red Bull est un outil vraiment hyper intéressant pour les athlètes et que j’utilise ou que j’essaye d’utiliser de plus en plus d’année en année. Au fur et à mesure, je me rends compte de l’utilité de ce centre. J’y vais environ trois à quatre fois par an pour faire des tests en fin de saison, pour faire le point sur ce que la saison m’a coûté physiquement et voir où j’en suis. J’y vais aussi pour faire des grosses périodes de préparation physique, j’en profite pour refaire des tests et voir si on a bossé dans le bon sens. Je fais même une semaine entière à l’APC au mois d’août pour à la fois tester
et m’entraîner là-bas parce qu’il y a des outils qu’on peut vraiment bien utiliser à l’entraînement. On bosse sur des exercices physiques, et on bénéficie d’un accompagnement médical. Si on a de petits soucis, le suivi est hyper pro. On est aussi accompagné par un physio, des kinés et des ostéos, tous très bons, très techniques. Mon coach vient toujours avec moi et est impliqué dans ce processus. Il prend les informations dont il a besoin afin de nous permettre de travailler dessus ensemble par la suite. C’est un accompagnement qui m’a vraiment beaucoup apporté ces dernières années. »
a tendance à dire que ce n’est pas « comment » mais « combien ». Et dans tous les sports, c’est pareil : c’est le temps qui compte, et la manière, on s’en fout un peu. Mais c’est quand même pas mal d’avoir un joli style. Et souvent, ceux qui ont une belle technique ont aussi une bonne vitesse.
Vos terrains de golf préférés ?
On joue pas loin de chez moi, au Golf des Alpes, proche du lac d’Annecy. C’est plutôt cool, il y a une ambiance assez chill. On est super bien accueillis et c’est le parcours qu’on connaît le mieux. Après, dans le coin, il y en a plein. On joue à Méribel, à Aix-les-Bains, à Tignes. On a un beau terrain de jeu, pas seulement pour le golf. Toutes les montagnes font qu’on a un beau terrain de jeu pour le sport en général.
Quelques mots sur Flavio Vitale, de huit ans votre cadet. Quelle relation entretenez-vous avec lui ?
Il est très bon, très mature pour son âge. J’ai une bonne relation avec Flavio, on s’entend bien, il a un bon état d’esprit, il est très motivé. On a des points communs que je trouve drôles mais il y a aussi pas mal de diférences entre nous. On n’a pas du tout le même caractère par exemple. Ça me fait rire de le voir évoluer dans sa jeunesse. Moi, je n’étais pas comme lui. Je le trouve très professionnel, il sait ce qu’il veut, il sait où il va. Pour un sportif, c’est une grosse qualité.
Comment étiez-vous à son âge ?
Comme lui, je faisais preuve de maturité assez jeune, mais contrairement à lui, j’étais beaucoup plus relax. Il est très impliqué dans son projet, très professionnel. Il est même plus professionnel que moi à l’heure actuelle alors que j’ai huit ans de plus et plus d’expérience. Moi, j’ai une façon de fonctionner où j’essaie de faire les choses très bien, très consciencieusement, mais de manière à en faire aussi un peu le moins possible.
C’est-à-dire ?
Dans le sens où il faut que je fasse le boulot vraiment correctement, mais il faut aussi que j’adapte mon temps pour pouvoir penser à autre chose que le ski et faire autre chose que du ski.
Ça n’est pas l’approche de Flavio que vous percevez ?
Flavio, c’est un peu diférent : il est vachement focus sur sa carrière, il fait beaucoup de choses et du coup, ça donne un état d’esprit légèrement diférent du mien.
« L’objectif global, c’est d’être heureux et en bonne santé – et sur les skis, d’être le plus rapide possible. »
Mais par contre avec une grosse motivation, un gros professionnalisme et un gros talent. Il est encore jeune et il n’a pas encore eu de gros résultats mais il y a moyen que ça vienne très vite. Flavio fait partie des bosseurs. Il n’y a pas de secret. Ceux qui réussissent font souvent partie de la catégorie des gens qui travaillent.
Hormis le ski et le golf, j’ai vu que vous aimiez bien voyager.
On parle des voyages pour voyager ou des voyages pour le ski ? Les voyages, on en fait beaucoup avec le sport et on découvre pas mal d’endroits mais on n’a pas beaucoup de temps pour visiter. De temps en temps, quand on va aux États-Unis, on prend quelques jours pour aller à San Francisco par exemple, et quand j’étais allé au Japon il y a quelques années, j’ai fait un petit tour après, donc c’est toujours cool de pouvoir découvrir des pays, des cultures. Quand je pars en vacances, ça peut m’arriver aussi d’aller un peu loin pour pouvoir me vider la tête après une longue saison. J’ai toujours envie d’aller dans un endroit diférent.
Et vous êtes féru de gastronomie. D’où cela vous vient-il ?
Je ne sais pas, on est une famille qui aime bien manger. Pas forcément dans des restos gastronomiques mais simplement pour vivre un moment de convivialité au restaurant. Ça fait partie de ma culture, j’ai été élevé comme ça. Mon grand-père et mes parents ont cette habitude de se retrouver au restaurant au moins une fois par semaine. Comme moi, mon frère est un passionné de gastronomie et de vin puisque mon grand-père était vendeur de vin. On aime ça dans la famille et au fur et à mesure, en gagnant de mieux en mieux ma vie, j’ai eu aussi envie de découvrir de nouveaux restos, de nouvelles saveurs et donc d’aller dans des
restaurants gastronomiques. J’en essaye un de temps en temps. J’aime ça, et le vin. Ce sont des passions assez infnies. On découvre toujours de nouvelles choses.
Votre dernier coup de cœur gastronomique ?
Le dernier restaurant gastronomique dans lequel je me suis rendu, c’est un endroit où je suis allé plusieurs fois, c’est la Maison Aribert à Saint-Martin-d’Uriage. Il a deux étoiles au Guide Michelin. C’est un super beau resto. C’est un chef engagé qui fait tout chez lui, il a un potager, il est « extrême » sur ses prises de position mais il fait ça très bien.
D’autres recommandations ?
Plein ! Par exemple, à Tignes, je suis copain avec Clément Bouvier qui tient l’Ursus et Le Panoramic ; celui-là, c’est l’un de mes préférés, il est situé à 3 000 mètres d’altitude. Là-haut, ils ne font que des viandes grillées à la famme ou au barbecue. Je pense aussi au restaurant d’Emmanuel Renaut, à Megève, il est magnifque. Ou encore à l’Auberge du Père Bise de Jean Sulpice, au bord du lac d’Annecy. Il y a tellement d’endroits qui valent le coup…
Pour terminer, quels sont vos futurs objectifs à ski ?
Essayer d’être performant en Coupe du monde, m’eforcer d’être le plus régulier possible. On ne peut pas tout miser sur un objectif qui ne se présente qu’une fois tous les quatre ans. Ça ne dure que deux fois cinquante secondes, donc si on mise tout là-dessus, on risque de tomber de haut si ça se passe mal. Alors je me prépare pour la saison et j’espère être en forme et performant. L’objectif global, c’est d’être heureux et en bonne santé – et sur les skis, d’être le plus rapide possible.
IG : @clement.noel

La dernière fois que The Red Bulletin avait croisé Tess Ledeux, 24 ans, l’une des plus grandes championnes de ski frestyle, c’était en 2021, à l’aube d’un grand rendez-vous. Quatre ans plus tard, à la veille d’un autre événement mondial, on a abordé avec elle 10 points de carrière et d’actu.



« Ma motivation est de 10 sur une échelle de 10. Je suis dans les starting-blocks, je n’attends que ça : qu’on me donne le feu vert ! »
L’envie de ski de Tess, qui, au moment de notre entretien, revient sous peu à l’action après une blessure.
The red bulletin : Depuis 2021 et la dernière grande échéance, comment allez-vous ? tess ledeux : Ça va bien, de mieux en mieux même si je me suis blessée en fn de saison 2025, je dois donc gérer encore quelques petites galères…
Peut-on dérouler les grandes étapes de votre carrière sportive de ces quatre dernières années ? On commence par quoi, LES BONS MOMENTS ?
Il s’est passé pas mal de choses depuis quatre ans : la saison 2021-22 est la meilleure de ma vie, puisque j’ai gagné les X-Games en Big Air et en slopestyle la même année. Je suis la première flle à réaliser ça en ski. Assez fou ! C’était dix jours avant de remporter l’argent en Chine et ça confrmait ma forme du moment. On sortait du Covid, et j’ai eu la chance de pouvoir célébrer cette médaille à mon retour en France. La saison 202223, a été plus compliquée au début, avec beaucoup de fatigue accumulée, des petites blessures mais en février 2023, j’ai remporté mon 3e titre de championne du monde, ça a efacé les galères de l’automne. En 2024, j’ai refait un doublé aux X-Games. Cette fois, j’ai battu le record de médailles gagnées en ski chez les femmes lors de cette compétition. Le feu d’artifce !
Mis à part obtenir l’or en février prochain en Italie, je crois avoir checké tout ce que j’avais envie de checker !
Et LES MOMENTS DIFFICILES ?
Ces quatre dernières années, il y a eu quelques petits pépins physiques, mais du classique quand on est sportif de haut-niveau, des maux de dos qui persistent, des petits crashes par-ci par-là qui vous arrêtent deux ou trois semaines.
Mais en mars dernier, lors des fnales de Coupe du monde, en France en plus, devant toute ma famille, j’ai fait une grosse chute. Résultat : commotion cérébrale. Au début, ça n’inquiète pas grand-monde, car c’est un accident assez banal dans la discipline, même si cette chute était assez efrayante et qu’elle m’a beaucoup impactée émotionnellement. Des commotions cérébrales, j’en ai déjà fait, je misais sur une reprise au pire dans les deux mois, mais les symptômes ont empiré, ce qui a impacté toute ma préparation estivale. Je suis allée voir de nombreux spécialistes.
J’ai suivi tous les protocoles, je ne suis pas encore rétablie à 100 %, mais ça va mieux.
La dernière fois, on avait évoqué VOS GROS PROBLÈMES DE DOS… Ces six derniers mois, avec ma blessure, ce n’est plus trop ma priorité, mais là encore, j’ai toujours été très bien suivie, donc quand j’ai des crises, on prend le temps d’être à l’écoute de mon corps. On adapte mes entraînements. Ces maux de dos, je les traîne depuis mes 14 ans, donc j’ai appris à les gérer au quotidien !
À J moins cinq mois du grand rendezvous, comment abordez-vous ce RETOUR SUR LES SKIS ET LA COMPÉTITION ?
Depuis ma médaille obtenue en Chine, qui ne m’a pas comblée pleinement, ma mentalité a complètement changé. J’ai acquis de l’expérience, je pensais ne pas me laisser surprendre ; et puis cette blessure est arrivée. Et là, j’ai pris conscience de la petite horloge qui tournait dans ma tête me disant : « Il ne te reste plus que tant de mois pour te préparer », c’était trop de pression pour moi. Aujourd’hui, ce qui m’importe c’est d’arriver en bonne santé. Je n’ai pas envie de griller les étapes de rétablissement pour une course dans ma vie. J’ai toujours envie de performer, mais j’ai surtout envie de participer et d’apprécier pleinement le reste de ma carrière. Ne pas savoir où on va, ça
fait apprendre beaucoup de choses sur soi et ça change les perspectives…
AU NIVEAU DU MENTAL, comment ça se passe ? Lors de nos derniers échanges vous étiez encore sous le choc de la perte de votre papa… Je continue, je progresse. Je pense que l’on n’atteint jamais une pleine maturité de force mentale, certes j’ai vécu plein de choses, mais une grosse blessure comme celle-ci, jamais. Ce sont une nouvelle étape et un nouveau challenge à traverser.
Sur LE PLAN TECHNIQUE, sur quels points insistez-vous pour progresser ? C’est compliqué à verbaliser, ce ne sont que des termes techniques dans le freesyle. En gros, je travaille sur des détails infmes, comme rajouter quelque chose entre deux tours en l’air. La clé d’un saut, pour moi, et ce qui fait 80 % de la réussite, c’est l’impulsion qu’on donne. Je me concentre donc beaucoup sur cette partie-là, qu’on appelle le take of, ce moment qui dure un dixième de seconde où les pieds quittent le sol et où on lance la fgure.
Ce qui peut me freiner aujourd’hui dans ma progression, c’est moins le technique que le mental, la peur par exemple.
VOTRE PRÉPARATION va être courte…
Je suis en retard, c’est sûr, mais mon entourage est confant sur ma capacité à revenir, j’ai acquis beaucoup d’expérience toutes ces années. Ma motivation est de 10 sur une échelle de 10. Là, je suis dans les starting-blocks, je n’attends que ça : qu’on me donne le feu vert !
Comptez-vous privilégier LE BIG AIR OU LE SLOPESTYLE à l’avenir ?
Je m’aligne toujours dans les deux disciplines, pour moi elles sont complémentaires. Quand je fais du Big Air, je m’entraîne pour le slopestyle et vice-versa, le Big Air étant un élément du slopestyle. J’ai commencé par le slopestyle, il y avait de la nouveauté et des Coupes du monde. Je me suis mise au Big Air plus tard, pour moi c’est une discipline de jeunes où j’ai beaucoup performé, mais en prenant de la maturité, j’ai l’impression que la tendance est en train de s’inverser. Car en

Bosseuse et déterminée, Tess est l’une des pépites du sport français, qu’elle honore au plus haut niveau.
slopestyle, il faut être consistant, maîtriser plus de paramètres et j’ai acquis l’expérience nécessaire pour maîtriser cette discipline.
En Big Air, on peut gagner grâce à une seule figure, même s’il y a énormément de travail derrière.
Vous m’aviez dit il y a quatre ans : « J’ai juste envie d’être la meilleure, pendant encore dix ans. » L’ENVIE ET LE PLAISIR sont-ils toujours là ? Cette notion de plaisir, c’est ce qui me fait me lever le matin, parce que je fais un
métier passion, mais elle est infme. On prend beaucoup de risques, les conditions d’entraînement sont dures, le froid, les chutes. Je suis arrivée sur le circuit hyper jeune et l’an passé, je me suis posé des questions : est-ce que je prends encore du plaisir ou est-ce que l’angoisse a pris le pas sur le reste ? J’ai eu besoin de ce moment de recul, de ce break. J’ai skié pour moi, pour retrouver du plaisir. Et avec cette blessure, cette attente interminable de sept mois, je vois à quel point le ski me manque, à quel point je suis à ma place.
Aujourd’hui, je n’ai plus de doutes : je suis sûre de vouloir skier pendant encore beaucoup de temps.
J’avais besoin de traverser toutes ces étapes pour le comprendre.
Aujourd’hui, qu’avez-vous envie de PROUVER sur le plan sportif, mais aussi personnel ?
Je n’ai pas forcément envie de prouver des choses avec des résultats. Si à l’âge de 10 ans, on m’avait dit que je ferais une carrière pareille, j’aurais signé tout de suite ! À partir de maintenant, je prendrai chaque podium comme du bonus. J’ai plus envie qu’on se souvienne de moi comme quelqu’un de très résilient, qui a apporté plein de choses dans sa discipline, qui a tiré le ski freestyle féminin encore plus vers le haut. Ensuite, j’ai un combat : encourager les jeunes flles à faire des sports extrêmes, lever les blocages, leur dire qu’elles sont tout aussi capables que les garçons. Je le fais par le biais de mon événement, les Roxy Ride Days (en avril à La Plagne, ndlr) mais j’ai envie de plus : pourquoi pas des conférences, avec d’autres athlètes, d’autres sports ?
J’essaie de voir plus loin qu’une autre victoire en Coupe du monde…
IG : @tessledeux

Flavio Vitale, 20 ans, est originaire de Tignes, en Savoie. Il fait du ski alpin depuis 18 ans. Il a donc commencé… à l’âge de deux ans (sic). Avec ce jeune profil, on se frotte au futur du ski alpin et on comprend qui et quoi l’aide à se professionnaliser – en disciple rigoureux. Rencontre.

The red bulletin : Flavio, vous rejoignez dans nos pages les fgures internationales du ski de haut niveau que sont Alexis Pinturault et Clément Noël… On a tout à apprendre de vous, alors allons-y ! Quand a débuté votre (pour l’instant) très courte carrière pro ?
flavio vitale : En pro, en efet, ça a commencé il n’y a pas si longtemps. Ça fait seulement deux ans que je suis sur le circuit Coupe du monde et que j’ai intégré l’Équipe de France. J’ai commencé dans mes années FIS au sein de la structure Apex 2100 qui est une structure internationale avec pour but d’atteindre le haut niveau scolaire mais aussi sportif. Grâce à cette académie, j’ai eu l’occasion d’étudier en Angleterre, à St Edward’s School, à Oxford, pendant trois ans. J’ai fait un double projet entre le bac international à Apex et l’objectif premier qui est la Coupe du monde pour atteindre le plus haut niveau mondial en ski alpin. Grâce à cette académie (voir notre encadré, ndlr) où je suis resté six ans, j’ai réussi à faire les deux. Et il y a deux ans, j’ai rejoint l’équipe de France grâce à mes résultats.
Cette année en 2025, j’ai été Champion du monde junior et j’ai atteint mon premier top quinze en Coupe du monde. Petit à petit, j’atteins mes objectifs.
Comment cela a-t-il été accueilli par votre entourage ?
Ça a été compliqué, c’est sûr, parce que ce n’est pas une décision qui se prend à la légère. Ça a changé ma vie, dans le bon sens. On a beaucoup discuté mais je savais ce que je voulais, mes objectifs étaient très clairs. Mes parents savaient que c’était là où je voulais aller, que ça allait me demander du courage, et que ça ne serait pas facile. Je me souviens, je pleurais presque tous les soirs parce qu’on n’avait pas le droit d’appeler nos parents pendant les trois premières semaines. Quand j’ai enfn eu mes parents en ligne, ils m’ont demandé : « Tu veux qu’on vienne te chercher ? » Mais j’avais répondu non parce que déjà, à cet âge-là, j’étais déterminé à atteindre mes objectifs, et je savais que c’était la voie la plus complète.
Faites-vous encore partie d’Apex 2100 ? Non, mais j’ai gardé contact avec eux. Je fais partie de la famille. J’ai le droit d’aller m’entraîner quand j’ai en envie ou besoin. Ça a beaucoup changé depuis que je suis arrivé mais je crois qu’on peut intégrer Apex 2100 à partir de l’âge de 10 ans. Ils proposent un programme en trois ans qui est l’équivalent du brevet en France, mais au niveau international. Et puis après, ils proposent trois ans de plus, soit en bac international, soit au CNED. En général, on y reste à peu près trois ans, pour ma part je l’ai fait en six.
Comment avez-vous réussi à trouver un équilibre entre formation scolaire et carrière sportive ?
Quand tu es jeune, c’est ski le matin, cours l’après-midi. Mais ce qui a été compliqué pour moi, c’est que j’ai dû continuer mon éducation tout en passant les paliers en ski alpin. Lors de mon année de bac, je faisais déjà des Coupes du monde. Je n’étais donc presque jamais à l’école mais les professeurs m’ont beaucoup aidé. En tout cas, c’est un équilibre à trouver. Actuellement, je suis en train de regarder des universités anglaises pour pouvoir refaire un partenariat et continuer des études de haut niveau et du sport de haut niveau. C’est un challenge mais c’est important pour moi de préserver cet équilibre.
La journée type d’un jeune skieur pro de 20 ans
« On se lève tôt, aux alentours de 6 heures. On commence avec des exercices de mobilité, un peu d’étirements, des mouvements pour réveiller le corps. Ensuite, on part à l’entraînement pour deux, trois heures plutôt intenses avec soit du slalom, soit du géant, pour ma part. Ensuite, on rentre, on débriefe avec les techniciens sur le matériel qui a bien marché, sur les conditions, le type de tracé pour essayer d’optimiser les performances. On enchaîne sur une section de la récupération au déjeuner. L’après-midi, ce sont des soins avec les kinés, des étirements, un peu de préparation physique pour faire des rappels de force ou juste du gainage. Et puis après, c’est encore le temps de repartir pour une autre journée. Ça s’enchaîne comme ça. »


« Quand j’arrive en course ou dans des domaines que je ne connais pas forcément, j’essaie d’apprendre, d’observer ce qu’il y a autour de moi et de comprendre comment le système marche. Ce qui me permet de mieux m’exprimer sur les skis et de m’adapter à cet environnement – ça m’a aidé quand je suis arrivé en Équipe de France. »
Comment s’adapter,
À quelles études vous destinez-vous ? Je suis en train de voir avec l’Imperial College pour suivre un programme d’économie, de fnance et d’analyse de données. On a un peu des soucis d’organisation et de visa parce que le Royaume-Uni ne fait plus partie de l’Europe. Mais je suis soutenu par l’ancien sélectionneur de rugby d’Angleterre, Clive Woodward. C’est un projet qui lui tient à cœur, car il est de l’avis qu’un athlète éduqué est un meilleur athlète. C’est d’autant plus important de soutenir cette voie-là que beaucoup d’athlètes n’ont pas la chance de pouvoir faire des études à côté ; on se rend compte que les blessures ou une fn de carrière, ça arrive très vite. Il est essentiel d’être épanoui et de penser à autre chose. J’ai été le premier à être en Coupe du monde et à continuer à faire des études ; on m’a toujours dit que ça n’était pas possible, que ça ne se ferait jamais. Certes, pour le moment, je n’ai pas atteint le sommet mondial, mais j’ai déjà un petit parcours qui m’a permis de montrer que je peux quand même faire des études, me faire plaisir sur les skis et atteindre mes objectifs sportifs.
À propos d’entraînement, vous revenez d’un stage en Argentine avec l’Équipe de France. Comment ça s’est passé ? Cette année, malgré des conditions printanières avec un peu plus de variations que l’an dernier, où les conditions hivernales étaient idéales, on a quand même pu faire un stage plutôt global et on a toujours réussi à en faire quelque chose. Je pense qu’on a eu une vingtaine de jours vraiment efcaces. Ce qui m’a permis de progresser sur mon équipement : j’ai pu déterminer quelle sorte de ski, quelle sorte de chaussure me vont le mieux parce que c’était très nouveau pour moi l’année dernière, comme j’avais changé d’équipementier. Et puis, quand on est en Équipe de France, on a un panel de matériel beaucoup plus large.
En mars dernier, vous avez décroché votre premier titre mondial junior. Est-ce qu’il y eu un avant-après ?
Je ne dirais pas cela, mais il y a eu un avant-après ma blessure à Adelboden, en Suisse, où je me suis fait une contusion au talon. Ça m’a sorti de l’entraînement un mois, mais j’ai pu aller deux semaines à l’APC (Athlete Performance Center de Red Bull, ndlr) pour soigner ma blessure le plus rapidement possible. J’ai enchaîné avec deux semaines à Apex pour me remettre tranquillement sur les skis. Ça m’a permis d’avoir un second soufe. J’ai retrouvé ma personnalité, qui j’étais
et aussi mon plaisir de skier. Parfois, il y a des signes du destin. L’année dernière, j’étais parti trop fort sur mon stage d’Ushuaïa et sur le début de saison à Solden. Mais on ne peut pas mettre 100 % de son énergie sur tout le long. À cause de la fougue de la jeunesse, ça m’a coûté cher. J’ai compris que beaucoup de choses se passaient dans la tête.
Comment Red Bull vous accompagnet-il dans votre parcours pro ? Red Bull m’accompagne beaucoup à travers l’APC. Avec Clément Noël (voir notre article dans ce numéro, ndlr), on a l’habitude d’y aller l’été pour faire des tests physiques. Cette année, ça a été hyper riche. On a eu une grosse diférence entre les tests qu’on a fait en juin et ceux qu’on a fait en août avec une très belle progression. On a réussi à cibler les domaines sur lesquels il fallait qu’on s’améliore. L’APC apporte un vrai suivi et une précision grâce aux données, aux machines, mais aussi grâce à leurs connaissances. C’est un réel gain pour nous.
Quand on est jeune skieur, est-ce qu’on apprend des aînés ?
Oui. Les anciens nous aident surtout dans le domaine de la performance, même si, bien sûr, ils ne nous donnent pas tout. Il y a quand même de la rivalité.
Quel est votre relation avec Clément ? C’est une source d’inspiration. Il a été monstrueux cette saison. Voilà. De plus, c’’est quelqu’un de gentil, d’humble qui aime aussi taquiner. Il nous tire tous vers le haut, même s’il y a cette forte diférence de discipline. C’est géant pour moi et slalom pour lui.
Est-ce qu’il vous a donné des conseils ? Il donne parfois quelques conseils sur certaines conditions mais c’est plus avec Alexis Pinturault que je parle, car on est sur le même équipementier et on fait à peu près la même discipline. On est for-

maté un peu pareil, alors qu’avec Clément, c’est diférent. On gère diféremment nos motivations mais on échange quand même beaucoup. Je lui ai déjà posé des questions sur comment il a géré mentalement ses grands rendez-vous. Il a partagé son expérience, ce qui m’a beaucoup servi. C’est toujours un plus.
J’ai remarqué que vous suiviez d’autres athlètes sur Insta comme Lewis Hamilton ou Stephen Curry. Quels autres sports et athlètes vous inspirent ?
« En ski et en F1, on retrouve les notions de trajectoire, de vitesse, et de recherche de la ligne idéale. »

J’ai beaucoup joué au foot quand j’étais plus jeune. J’ai aussi fait pas mal de rugby quand j’étais en Angleterre. J’ai également fait de l’aviron, du cricket, du tennis. J’ai fait vraiment énormément de sport. J’aime tous les sports. En ce moment, je suis plus le golf mais j’ai aussi toujours été un grand fan de Formule 1. Je trouve qu’il y a une belle dynamique avec Isack Hadjar. La Formule 1 et le ski sont deux sports liés par la course et l’adrénaline. Ce sont deux sports extrêmes où l’on passe très vite à côté d’objets très proches. On retrouve également les notions de trajectoire, de vitesse, et de recherche de la ligne idéale. Donc oui, il y a beaucoup de similitudes entre les deux sports.
Quels pilotes vous inspirent ?
J’aime bien Lewis Hamilton, Charles Leclerc, Max Verstappen aussi. Au début, je ne l’aimais pas forcément mais j’ai regardé un épisode sur lui sur Canal+ qui montre qui il est vraiment et fnalement, j’apprécie le personnage. Dans un autre registre, j’aimais bien Kobe Bryant, pour sa mentalité et ce qu’il apportait.
Est-ce que vous appliquez leurs codes dans votre manière de skier ?
Bien sûr. J’essaye d’apprendre de tout le monde, pas forcément des meilleurs. Je m’inspire des autres, mais je m’eforce de trouver ma direction.
Quel est le meilleur moyen de s’aérer l’esprit après une grosse compétition ou une grosse saison ?
Après une compétition, c’est un moment sympa auprès de mes parents ; et après une saison, retourner chez moi dans le Sud, faire du bateau et voir mes amis.
Comment s’y prend-on pour gérer sa vie personnelle quand on est un jeune athlète pro ?
C’est compliqué parce que je ne côtoie pas de gens de mon âge, donc quand c’est le cas, je me sens en décalage. J’ai quand même mon petit groupe d’amis toujours là et qui me soutient. J’essaie de partir en vacances avec eux au moins une semaine par an. Même si ça devient de plus en plus difcile, c’est vraiment important.
Apex 2100 est un centre d’entraînement sportif et éducatif de classe mondiale situé à Tignes, à une altitude de 2 100 mètres, d’où son nom. Il est conçu pour former et accompagner des athlètes, en particulier dans les disciplines de sports d’hiver comme le ski alpin, mais également dans d’autres sports.
« Il faut savoir que quand j’ai rejoint l’académie à l’âge de 12 ans, c’était leur première ou leur deuxième année d’activité. À l’époque, il n’y avait pas toute l’infrastructure qui existe aujourd’hui. C’est à dire que maintenant, tout un bâtiment est optimisé avec des spécialistes dans de nombreux domaines. Il y a des salles de sport, des salles de kiné, des salles de classes pour les élèves. Quand j’ai rejoint Apex 2100, il n’y avait pas encore tout cela, on était une dizaine d’élèves dans un chalet.
À l’époque, Apex 2100 m’a contacté après ma victoire sur une course nationale – et comme c’était basé à Tignes, ça avait du sens.
Ils m’ont proposé un projet sportif ambitieux, très abouti, qu’on ne retrouvait pas ailleurs en France. Ce qui m’a séduit, c’est qu’on mettait la performance globale au cœur du parcours, tout en gardant l’importance du plaisir dès le plus jeune âge. En revanche, cela impliquait un choix scolaire : soit intégrer le système éducatif britannique, soit suivre les cours à distance via le CNED.
C’est une décision importante parce que ce n’est pas simple de quitter sa famille quand tu as 12 ans. Mais je voulais absolument rentrer dans cette académie parce que c’était la meilleure façon de réussir en termes sportifs. Déjà très jeune, on regardait comment améliorer la vision, le sommeil, prévenir et gérer les blessures.
Les premiers mois ont été très durs. Je ne connaissais personne là-bas, je ne parlais pas anglais, j’ai dû m’habituer à un système complètement différent du mien. Cette expérience m’a beaucoup apporté et forgé en profondeur. Et elle continue de me servir aujourd’hui encore. »

Voici un entretien ultra-détendu avec Romain Allemand. Âge : 18 ans. Spécialité : snowboard big air/slopestyle. Station : La Plagne. Highlight : 4 e aux Championnats du monde 2025 en Slopestyle et en Big Air.

« Tourner le plus vite possible, comme en compétition, je connais très peu de gens qui aiment le faire. »
Ce jeune talent se bouge pour le plaisir, le « kif » (ce mot lui colle à la peau), et sait que la compétition lui ouvrira bien des portes. Fraîchement intronisé athlète Red Bull, il nous parle depuis la Nouvelle-Zélande, sans fltre et avec une passion débordante. Un bon moment, via Teams.
the red bulletin : Salut Romain, comment vas-tu ? romain allemand : Ça va, et toi ?
Oui, ça va nickel. Tu es dans quel coin ? Je suis à Wanaka, dans la région de l’Île du Sud de la Nouvelle-Zélande pour un snow camp. Les stations organisent beaucoup ça là-bas car il y a de super conditions en automne, ce qu’on n’a pas du tout à cette période en Europe. Ça fait trois ans que je fais ça ; je viens y passer quelques semaines avec d’autres athlètes.
Quand tu as commencé à faire du snowboard, est-ce que tu t’imaginais passer des semaines à rider en Nouvelle-Zélande au mois d’octobre ? Quand j’ai commencé, je ne savais même pas qu’on pouvait faire du snow en Nouvelle-Zélande, je n’avais aucune notion de « l’ailleurs ». Il n’y avait même pas de snowpark à côté de chez moi, donc je voulais juste aller à un park dans la station d’à côté, faire du snow pour le kif avec l’envie de battre mes potes à la compète. Je ne pensais qu’à ça et je me disais qu’aller dans d’autres pays ça viendrait peut-être plus tard. Je me souviens, quand on me disait : « Tu vas faire une nuit d’hôtel ailleurs », pour moi c’était « wahou » alors qu’on était à la station d’à côté, à deux heures de chez moi.
Certains font du foot, du tennis, de la danse, tu te souviens pourquoi tu as choisi le snowboard ?
Ça remonte. En fait, je n’ai pas vraiment choisi, mon père était coach de snowboard. Logiquement, il m’a mis sur son snow quand j’étais petit, c’est comme ça que ça a commencé. Il m’a transmis sa passion. Il a vu que je m’éclatais, donc on est restés là-dessus dès le début et on a continué ! Et comme j’ai trop aimé, ça a collé.
Tu parlais de compète et le plaisir que tu y prends à gagner, comment tu as commencé ça ?
Ça n’était pas très développé au début… Il y avait un truc qui s’appelait les SST, de petites compétitions régionales tous les week-ends. La semaine, j’allais en cours et puis, le week-end, je partais en compète ! Ça me permettait de retrouver mes potes, de me la donner, d’essayer de gagner et de les battre. Même si on faisait ça pour le plaisir du snow, surtout. Car notre sport n’est pas forcément un sport de compète. Ce n’est pas comme l’athlétisme par exemple, où il y a moins de fun à le faire, c’est vraiment de la passion et de la compétition. Dans le snow, on s’éclatait et on se barrait rider tous ensemble, c’était notre pratique de base.
Et le fait que le snowboard soit devenu ton taf, comment le vis-tu ? Est-ce que ça te rajoute une pression ? Est-ce que ça t’enlève le côté « kif », dont tu parlais ?
C’est diférent c’est sûr… Avant, il s’agissait juste d’une compète le week-end avec les potes, c’était cool. Maintenant, c’est devenu un boulot, mais ça m’ouvre aussi d’autres portes, ça me permet de voir encore plus de gens, d’aller tester de nouveaux spots, de nouveaux parks, de partir découvrir de nouveaux pays ! C’est sûr que je ride un peu moins, mais en même temps, je fait le tour des meilleurs parks au monde, je voyage partout, et toujours avec des potes. Il y a quand même un côté très plaisir.

Juste du snow, juste du plaisir. Romain Allemand, un futur grand, lors d’une session printanière au bout du monde.

Et l’enjeu de la compétition dans tout ça : gagner, faire la ligne parfaite, devoir plaquer tous tes tricks. Ça change ta relation au sport ?
C’est une petite pression, mais c’est prenant, l’adrénaline de vouloir aller toujours plus loin. Quand tu réussis, que tu plaques ton trick en pleine compétition, c’est vraiment une sensation hyper agréable. C’est tout un mood qui peut être aussi vraiment pas cool, parce que parfois tu es juste en stress, limite tu n’as pas envie de faire du snow parce que les conditions sont horribles… Mais, c’est ce qui fait que l’adrénaline de la compète prend le dessus et t’amène plus loin.
Tu n’opposes pas le plaisir de rider et le plaisir de la compétition, mais entre un gros backside 180 ultra propre posé en session avec tes potes versus une triple rotation en compétition, la sensation est-elle diférente ?
C’est super intéressant parce que, dans les deux cas, tu prends du plaisir ! D’un côté la passion, tu fais des rotations, des fgures pour le plaisir, tu as envie d’être stylé pour toi et pour les autres, que les gens apprécient. Retrouver le plaisir simple de voler dans les airs à vraiment faire ce qu’il te plaît et avec lequel tu es à l’aise, sans esprit de compétition. Parce qu’en réalité, tourner le plus vite possible, comme en compétition, je connais très peu de gens qui aiment le faire. En revanche la pression, la satisfaction, l’adrénaline, la peur que te donnent la sensation de plaquer un gros trick en compétition, c’est autre chose. Quand tu fais des fgures tranquilles, tu n’as pas ce petit truc en plus que tu ressens quand tu fais de grosses rotations. Oui, tu aimes moins le moment, tu as le stress, la boule au ventre, tu pars, tu t’élances, tu as peur ! Mais quand ça se passe bien, c’est trop bien. La sensation est incroyable et ça compense le fait que le trick soit moins agréable à faire.
Est-ce que tu perçois la concurrence dans les compétitions comme un levier pour s’améliorer, ou ça ne te met pas trop de pression pour l’instant ?
La concurrence est saine, car on se pousse entre nous, on n’est pas ennemis, on n’est pas tous forcément copains non plus, mais quand tu vois une autre personne faire une fgure que tu as toujours voulu faire ou que tu as eu peur de faire, tu te dis « trop cool, moi aussi je vais l’essayer ! ». Tout le monde se pousse comme

ça et c’est pour ça aussi que ça va aussi haut. Tout seul, personne ne se dit qu’il faut tourner le plus possible parce qu’il n’y a personne à impressionner et rien à gagner ! La concurrence te fait évoluer super vite.
Parlons des « autres », justement : qui sont ceux qui t’inspirent ou t’ont inspiré dans le snow ? Quand j’étais petit, c’était Shaun White. C’est quand même une légende du snow, donc même si je ne captais pas tout ce qu’il faisait niveau style, c’était grave une inspiration. Le mec a tout réussi, X-Games et bien plus, c’est fou. Mais ce n’est pas mon rider préféré en termes de style : un peu après j’ai découvert Marcus Kleveland, un Norvégien… Lui, mais aussi d’autres mecs qui passaient dans les veilles VHS de mon père, comme JP Walker, que je regardais tout le temps.
Welcome ! Ridant désormais sous les couleurs de Red Bull, Romain allie une passion et une fougue inspirantes.
On voit pas mal de riders assez jeunes dans le snowboard ou le ski mettre la compétition de côté pour se concentrer sur la partie plus créative de leur discipline, ça te donne envie ?
J’adorerais de ouf, mais pas pour l’instant, car je n’ai ni le budget ni les relations pour ça. (Rires) Faire des vidéos créatives, ça me donne autant envie que de gagner des compètes. Mais maintenant que je suis à fond dans la compète, je reste dedans, je prends du plaisir mais j’ai aussi envie de faire des vidéos et j’en regarde beaucoup. Je suis les mecs quand ils sortent leurs nouvelles vidéos, que ce soit des riders de street, de parks, de backcountry, je regarde un peu tout et forcément ça donne envie d’en faire aussi. Avec des potes, on essaie de se motiver, de sortir la caméra et de flmer des sessions. On essaie de sortir de petits edits, comme à l’époque, mais ça n’est pas toujours facile. La compète, c’est cool, mais le snow reste une passion et du kif ! Donc il faut essayer d’alterner les deux… Ce qui est un peu dur, vu que je suis jeune… Et puis, j’ai encore une image de jeune compétiteur qui commence à gagner ses premières compétitions, mais qui n’a pas encore fait de vidéo, donc personne ne s’attend à ce que j’en fasse une. Si j’en fais une mais que personne ne la regarde, ça ne sert pas à grand-chose.
Tu te dis donc que la compétition est un tremplin pour pouvoir faire des projets créatifs, des vidéos, des parts ! Grave, c’est grâce à ça que je rencontre des gens, que j’ai des sponsors, que je suis en relation avec Red Bull (le jour de notre entretien, Romain ne sait pas qu’il deviendra un athlète Red Bull la semaine suivante, ndlr) et plein de gens du milieu. Tout ça c’est grâce à la compète donc, oui, c’est un tremplin que j’utilise. Quand je voudrai faire autre chose, ce sera un peu plus facile à faire.
Si je te laisse le choix entre repartir d’Italie en 2026 avec de l’or, et un gros flm à travers le monde entier de 52 min, tu choisis quoi ?
C’est un peu dur de te répondre… Pour l’instant, le truc pour lequel je me prépare, c’est l’Italie. Donc si je dois y répondre maintenant, ce sera forcément la compétition. Et j’y vais à fond. Posemoi la même question à un autre moment de ma vie et je répondrai diféremment, car en termes de satisfaction et d’envie, les deux sont au même niveau.
« La compète, c’est cool, mais le snow reste une passion et du kiff, quoi ! »
Justement, pour entretenir ta créativité, où vas-tu chercher l’inspiration ? Ailleurs ? Dans d’autres disciplines ? Grave, je suis un gros fan de skate. Et puis en faisant du snow, tu touches forcément une fois au skate dans ta vie. Après, étant donné que j’habite à Hyères l’été, je fais plus du kitesurf. Ça me permet de tenter des rotations et des mouvements que je ne tenterais pas forcément sur la neige. Je développe aussi pas mal de réfexes que je n’aurais jamais eus uniquement avec le snowboard. C’est un super mélange créatif de piocher dans d’autres disciplines et d’apprendre de celles-ci.
Dans le skate, il y a un côté super communautaire : tout le monde célèbre tout le monde et la compétition est parfois secondaire. Tu retrouves un peu cet esprit dans le snowboard ?
C’est intéressant, parce que ce sont des disciplines de gens passionnés : même si tu sais que tu te fais battre, tu vois l’autre faire un truc de ouf et tu as juste envie de célébrer avec lui. Et puis, ça n’est pas non plus un sport où on tire tous la gueule. On apprécie. On fait ça parce qu’on aime ça. Quand un autre gagne, c’est parce que tu n’en as pas fait assez, ça ne sert à rien de tirer la gueule. Après, il y a eu un gros changement sur les dernières années, avec une professionnalisation du sport.
C’est-à-dire ?
Je pense notamment à l’apport de certains pays comme le Japon qui ont développé une exigence et un esprit de compétition énormes. Avant, quand tu regardais les vieilles compètes de l’époque Travis Rice, les mecs faisaient n’importe quoi. Ils étaient là pour kifer, ils voulaient faire les cons, personne ne portait de casque et ça lançait des triples en bonnet et écouteurs. Il n’y avait pas ce côté très professionnel… Je me souviens que quand j’étais petit, ils faisaient quatre battements d’ailes pour s’échaufer… maintenant, ils prennent trente minutes, voire une heure au départ et t’as l’impression que tu vas te faire frapper si tu leur parles. Pour certains, t’as un côté hyper robotique genre si tu perds c’est terrible et si tu réussis, ils ne sont pas non plus hyper
contents. Quand certains gagnent, ils disent déjà qu’ils peuvent faire mieux ! C’est rare, mais ça casse parfois un peu le côté passion de notre sport avec des mecs qui ont un peu le seum ou qui ne célèbrent pas. Après, c’est bien, ça fait évoluer la discipline. Même si tout le monde n’a pas le même avis.
En parlant de ce côté plus à l’arrache de l’époque, ça te manque ce côté « bonnet-écouteurs » ?
Rider sans musique c’est toujours un peu triste mais rider sans casque, c’est juste parce que tout le monde le faisait à l’époque. Genre : « Ah tu mets un casque ? T’es pas stylé ! » C’est bien, mais tu te mets un boardslide et tu tombes sur le rail, tu perds cinq ans de ta vie d’un coup parce que c’est « cool et stylé ». Je t’avoue que maintenant, vu que je fais des sauts de 25 mètres, je n’ai pas envie d’être attardé à 30 ans parce que j’ai pris trop de chocs : c’est simple.
Et qu’est-ce qu’on peut entendre sous ton casque, dans tes écouteurs ?
Alors là, c’est hyper large parce que j’aime vraiment beaucoup la musique. C’est un truc qui me transcende. J’ai vraiment une playlist pour chaque mood ou style, que ce soit rap français, rap US, vieux rap, hard ou punk rock. J’écoute aussi du R’n’B, parfois de la country, de la house voire du jazz - moins souvent, quand même. (Rires) Sur mes vidéos Insta j’aime bien digger aussi, pas mettre les trucs les plus underground, mais pas non plus les musiques que tout le monde a en story. Kendrick, Travis, Kanye West, Ice Cube, Biggie, tout y passe. Même en rock ! Que ce soit Metallica ou d’autres. Quand je monte dans la voiture, parfois, je me dis : « Vas-y, là, faut que je me motive », et je fous du rock, tu vois ? Genre du bon gros rock, que ce soit du Nirvana ou n’importe quel groupe, ça me motive et j’ai envie de tout casser !
IG : @romain.allemand_

À 24 ANS, CRISTALE DE’ABREU PEUT DÉJÀ SE TARGUER D’UNE CARRIÈRE BIEN REMPLIE.
ENTRE HITS VIRAUX ET NOMINATIONS AUX MOBO AWARDS, ELLE N’A PAS CHÔMÉ.
POURTANT, LA RAPPEUSE ET ACTRICE
LONDONIENNE EN EST CERTAINE : LE MEILLEUR RESTE À VENIR.

Dans le clip vidéo de Regular Citizen, la rappeuse Cristale, originaire de Londres, présente sa vision du monde, entourée de bocaux de verre colorés dans un magasin de bonbons à l’ancienne : « La vie est belle, mais j’en veux plus./ Je travaille dur./Déso pas déso, j’en veux plus. » Puis elle envoie valser son tablier de travail et s’en va. « J’ai dit à Dieu que je n’essayais pas de jouer les ingrates./J’aime ce que j’ai, mais j’en veux beaucoup plus. »
Affichant un dynamisme à toute épreuve, une authenticité indéniable et une grande maîtrise lyrique, Cristale est une surdouée, capable aussi bien de jouer avec les mots que de tisser des rimes complexes autour des beats minimalistes de la UK drill ou des rythmes entraînants du dancehall. Elle a déjà travaillé avec des artistes influents des scènes américaine, caribéenne et britannique, comme Toddla T, qui a produit des noms tels que Stormzy ou encore Kneecap, et l’a surnommée « Baby GOAT » dans son podcast Gratitude is the Attitude l’an dernier. « Elle a beau avoir la moitié de mon âge, j’apprends énormément de cette jeune femme, confesse le DJ et producteur. Le rap perd parfois de sa dimension artistique, [mais Cristale] me rappelle pourquoi je suis tombé amoureux de cette musique. »
À l’heure actuelle, les plus grandes réussites professionnelles de Cristale ne sont rien de moins que sa performance en tant qu’actrice et rappeuse dans la saison 3 de la série Top Boy qui a fait un carton sur Netflix en 2023 – et lui a permis de chanter son titre Roadents –, et sa nomination pour la meilleure performance hip-hop aux MOBO Awards 2025. Elle travaille en ce moment à sa toute première mixtape et se prépare aux challenges qui jalonnent le chemin du succès.
À la voir assise là, dans le café d’un grand magasin de Brixton, vêtue d’un jogging noir, sans ses fameux grillz et sirotant un chocolat chaud, personne ne pourrait dire qu’il s’agit de la future star du rap. Mais dès qu’elle ouvre la bouche, Cristale parle avec l’assurance tranquille d’une artiste qui s’apprête à réaliser de grandes choses. « Si vous me connaissez bien, ou si vous connaissez mon parcours, explique-t-elle, vous savez que je suis capable de bien plus.
Même si je suis déjà arrivée très loin, ce n’est que le début. »
La jeune femme a dicté ses propres règles afin d’atteindre ses premiers objectifs. Hors de question qu’elle suive les traces de quelqu’un d’autre. « Si je me contente de repro-

duire ce qui a déjà été fait, il y a de grandes chances que je me freine toute seule », confie-t-elle. Elle considère toutefois Little Simz – la seule femme à avoir remporté le MOBO Award de la meilleure performance hip-hop en plus de vingt ans – comme un exemple inspirant ; Simz lui a d’ailleurs fait part de son soutien et l’a félicitée par SMS.
« Quand j’ai commencé, je me disais toujours : Little Simz ne remue pas son boule, pourquoi devrais-je ?, rappelle Cristale. Elle a fait des merveilles, sans pour autant renier sa vraie nature. Qui oserait dire que je ne peux pas aller aussi loin, voire plus loin, sans renoncer à mes croyances ?
Je suis toujours restée fidèle à moi-même. »
La façon dont la rappeuse londonienne perçoit la musique redessine le genre de la UK drill. Voisine du grime auquel Cristale est le plus souvent associée, la drill est connue pour ses paroles agressives et son esprit de compétition, mais la jeune femme est tout aussi susceptible de se pencher sur ses faiblesses ou de faire référence à l’auteur américain John Steinbeck que de se lancer dans la frime. Au travers d’Antisocial, qu’elle a chanté aux MOBO Awards de 2024, elle évoque son éducation relativement protégée, le fait qu’elle n’ait pas eu le droit de participer aux manifestations Black Lives Matter, et la gêne qu’elle peut ressentir en soirée. Plus récent, le single Ready 2 Go la montre gaie et sereine : « Je bois de la San Pellegrino… mais je reste une racaille », rappe-t-elle, impassible. « Si la vie me donne des citrons, j’en ferai un mojito. » Elle a toujours pris de bonnes décisions, se fiant à son instinct plutôt qu’aux gens qui l’entouraient. En 2023,

les réseaux sociaux ont présenté Cristale et une autre jeune MC de talent, TeeZandos, comme deux concurrentes sur une scène dominée par les hommes. Mais au lieu de jeter de l’huile sur le feu, Cristale a préféré collaborer. « Les gens ont tenté de nous monter l’une contre l’autre, regrette-t-elle. On les voyait s’écharper en ligne pour désigner la vraie reine de la drill. Un jour, on a décidé de faire équipe. Il en est ressorti quelque chose de génial ! » Le freestyle né de cette rencontre est une déclaration d’intention électrisante : deux femmes se sont unies et ont fait savoir au monde entier qu’elles étaient largement capables de se mesurer aux meilleurs. Enregistrée dans le cadre de la série Plugged In, leur vidéo YouTube cumule plus de 12 millions de vues et a permis d’asseoir la réputation de ces deux étoiles montantes. Pour Cristale, choisir une approche différente en vaut la peine. « Je n’appartiens à aucune bande dans le monde de la musique. Je suis plutôt une solitaire. Ça me donne parfois l’impression d’être une outsider, mais j’ai l’habitude. Je fais juste ma musique. » Élevée aux sons du dancehall caribéen, du hiphop américain et du grime britannique dans un foyer jamaïco-montserrato-guyanais, Cristale a appris à rapper à l’âge
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TITRES MAJEURS POUR CRISTALE




CHIP COWARD (2015)
« Ses arrangements et la façon dont il suit le rythme me captivaient quand j’étais jeune. »
BUJU BANTON BOGLE (1992)
« Ma mère écoutait cette chanson avant ma naissance. Quand j’ai créé Bong Bing, je savais intuitivement comment faire une chanson dansante. »
BUSTA RHYMES
PUT YOUR HANDS WHERE MY EYES COULD SEE (1997)
« Son rythme, son énergie, sa cadence, la maîtrise de sa respiration, tout en somme… C’est carrément inspirant. »
LAURYN HILL NOTHING EVEN MATTERS (FEAT D’ANGELO) (1998)
« The Miseducation… est mon album préféré de tous les temps. Ce morceau m’apaise. »
de 3 ans grâce à son oncle. Ce dernier lui avait écrit une chansonnette – « Je m’appelle Cristale et je n’ai rien bu… » – qui a permis à la petite fille de remporter tous les concours de talents de son école primaire. Au collège, elle a découvert les poètes britanniques Santan Dave, Suli Breaks, Nego True et George the Poet, et a commencé à participer à des compétitions de slam – et à les remporter. Mais son rêve était de devenir footballeuse professionnelle ou architecte. À l’âge de 14 ans, elle a été repérée par le Crystal Palace FC et elle a joué chez les moins de 16 ans et les moins de 18 ans, puis elle s’est inscrite en premier cycle de graphisme à la University of the Arts London, cherchant à exploiter le plus grand nombre possible de ses qualités. « On nous disait à ma mère et à moi que j’allais échouer parce que j’ai grandi à Brixton, se souvient-elle. Que je finirais mère célibataire à 17 ans. Mais à 17 ans, j’ai passé le bac… et je l’ai eu ! »
C’est une pause dans sa relation avec son petit ami de longue date au moment de son entrée en Terminale qui a amené Cristale à écrire ses premiers freestyles : « Je voulais mettre des mots sur ma souffrance, mais je ne pouvais pas véritablement en parler. J’ai écrit un poème en allant à l’église, et il s’est transformé en barres. » À l’époque, elle écoutait From Time (feat. Jhené Aiko), de Drake, et elle a fini par poser ses mots sur le beat minimaliste et syncopé de cette mélodie très simple au piano, puis elle l’a publié Instagram. « Après ça, j’ai juste fait des freestyles. »
En février 2020, alors que Cristale était en deuxième année à la fac, son père lui a suggéré d’enregistrer les quelques raps qu’elle gardait sur son smartphone en studio, et de publier des vidéos sur YouTube. Cela a immédiatement attiré l’attention. Cristale a été approchée par le rappeur drill Temz pour une collaboration (Scores sorti en 2021) et elle a reçu un DM peu après, lui proposant de signer chez le nouveau label britannique 4ZA, fruit d’un partenariat entre Sony Music et Black Butter Records. L’année suivante, Cristale a connu un succès viral dont la plupart des jeunes artistes rêveraient. Début 2022, elle a travaillé avec la star montante du dancehall jamaïcain, Laa Lee, sur le titre Bong Bing. Un soir, pendant une session de sport, elle a mis au point et filmé quelques mouvements avec son petit ami danseur pour illustrer la chanson. Le lendemain, Cristale a publié le clip entre deux tresses qu’elle faisait pour sa grand-mère. En quelques heures, sa vidéo affichait 100 000 vues ! Les gens ont commencé à se filmer en train de danser, des influenceurs ont lancé leurs propres tutoriels de la Bong Bing dance. À ce jour, ce titre a servi de bande-son à plus de 500 000 vidéos TikTok et compte plus de 11 millions d’écoutes sur Spotify. « C’était dingue, s’étonne Cristale. Cette chanson a changé ma vie. Jusque-là, je croyais en moi et j’étais sûre de faire de la bonne musique, mais je ne pensais pas que les autres pouvaient aussi croire en moi. Je suis passée de quelques centaines à un million de followers sur TikTok. »



Veste et short
STONE ISLAND ; débardeur ARKET ; chaussettes NIKE ; chaussures NIKE SHOX ; bijoux personnels.

Depuis, les opportunités se sont enchaînées et Cristale en a saisi la plupart. Au mois de juin 2022, elle a publié What It’s Like to Be Young, son premier EP qui regroupait sept titres, puis elle s’est produite dans le cadre de plusieurs festivals à Londres, à New York et en Jamaïque. À la fin de l’année, elle était nommée aux MOBO Awards dans la catégorie Révélation de l’année. Elle a aussi été invitée à passer une audition pour le thriller dystopique The Kitchen, coréalisé par l’acteur de Get Out, Daniel Kaluuya, et Kibwe Tavares, et mettant en scène Kane Robinson, star de Top Boy, aussi connu en tant que rappeur grime sous le nom de Kano. Cristale a décroché un second rôle, celui d’une jeune femme luttant pour survivre dans le dernier HLM de Londres. C’était sa première incursion sur les plateaux de tournage. « Tout le casting est devenu une famille, se réjouit-elle. Aller au bowling avec Kane et Daniel après le clap de fin, c’était comme me retrouver avec des cousins un peu plus vieux que moi. »
première expérience, elle est apparue dans plusieurs campagnes de la marque. « La petite Cristale aurait du mal à y croire, s’exclame la rappeuse. Elle ne se verrait pas avec des grillz et elle n’imaginerait pas qu’elle s’est (plus ou moins) débarrassée de son complexe causé par ses dents du bonheur. Elle ne penserait pas se retrouver au Top 50 et avoir un million de followers sur TikTok. Elle ne se croirait pas capable de faire de la musique. »
LA NAISSANCE
Pour Top Boy, le superviseur musical de la série, qui connaissait le patron de son label, a demandé à Cristale d’écrire un titre pour la troisième saison prévue sur Netflix. Cette dernière est particulièrement efficace sous la pression : enfermée dans sa chambre, elle a enregistré une boucle sur son ordi, et a composé un son grime très sombre, où les jeux de mots se bousculaient. Selon elle, c’est « l’un des morceaux les plus difficiles [qu’elle ait] jamais composés ».
D’UNE STAR
2020
Première fois en studio
2021
Signature chez 4ZA
2022
Sort un hit viral, Bong Bing ; nommée aux MOBO Awards catégorie Révélation de l’année
2023
Roadents pour Top Boy
2024
Apparition dans le film
The Kitchen
2025
Nommée aux MOBO Awards catégorie Meilleure performance hip-hop
Roadents a été choisi pour l’épisode 2, The Tour, pendant lequel le personnage interprété par Cristale freestyle au beau milieu de ses potes membres de gang dans un appartement bondé. Aujourd’hui, quand elle chante ce titre en live, le public en connaît chaque mot. « La première fois, avoue-t-elle, j’étais choquée. » En 2023, elle a été invitée à se produire sur un autre freestyle afin de rendre hommage à l’équipe britannique de football féminin dans le cadre d’une série sponsorisée par Nike. Travailler avec cette marque était un objectif de longue date pour Cristale –elle avait déjà vendu toutes ses chaussures de marques concurrentes afin de manifester un futur contrat. Depuis cette
ujourd’hui, Cristale ne voit plus les choses de la même manière. Les cinq années qui viennent de s’écouler l’ont convaincue de son propre potentiel, et lui ont beaucoup appris sur la difficulté à rester elle-même en rencontrant le succès si jeune. Au mois d’avril 2024, elle s’est séparée de son label, reprenant possession de ses masters encore inédits. Elle a depuis sorti plusieurs titres de manière indépendante. Et elle a déjà été adoubée par la communauté indie : au mois d’août 2025, l’AIM (Association of Independent Music) a nommé Cristale dans la catégorie Personnalité à suivre.
C’est désormais sa mère qui tient le rôle de manager et qui l’accompagne au studio, lors de ses shootings à travers le monde, et sur le tapis rouge. « J’ai l’impression que sans ma mère, j’aurais été manipulée au moins dix fois, reconnaît-elle. Vous ne pouvez pas faire confiance au premier venu dans ce milieu. »
La jeune femme de 24 ans a conservé le même rythme depuis qu’elle a repris son indépendance en tant qu’artiste. Cette année, en plus de lancer ses propres titres, elle a performé au Red Bull Culture Clash, contribué à Fine Art de DJ Drama, créateur de tendances à Atlanta, et composé une chanson avec le groupe de rock Kasabian pour couvrir le Championnat d’Angleterre de football sur Sky Sports. Sa première mixtape est terminée et devrait sortir au début de l’année 2026.
Cristale explique que cette prochaine sortie s’appuie sur des fondations qu’elle a déjà construites. « Cette mixtape est assez personnelle. L’évolution est incroyable par rapport à tout ce que j’aie pu entreprendre. Aucun feat. – juste moi qui parle de la manière dont on peut parvenir à plus de clarté en organisant sa vie de manière à atteindre ses objectifs. »
Cristale veut toutes sortes de choses. Elle veut faire plus de musique et performer devant une foule de 100 000 personnes qui peut rapper avec elle. Elle aimerait être signée par Nike, faire l’actrice, jouer au football, et créer un programme éducatif afin d’offrir de meilleures chances aux jeunes de Brixton. Mais elle adore aussi le fait d’ignorer où la vie la mènera. « Ne jamais dire jamais, chante-t-elle dans Regular Citizen, car quand la vie s’y met, tout devient possible. »
Alors que Cristale termine son chocolat chaud, elle s’explique : « Il faut faire preuve de patience, précise-t-elle. Et se tenir prêt. Tant que vous savez qui vous êtes, le reste suivra. »
IG : @cristaleyy

À
DANS LES DIX ANNÉES QUI ONT SUIVI LA SORTIE DE SON PREMIER LONG FORMAT, OPENING, L’AUTEUR-COMPOSITEUR CAENNAIS BASÉ À PARIS SUPERPOZE A TISSÉ UNE DISCOGRAPHIE RICHE, COMPOSÉE DE TROIS LONGS FORMATS, DE SIX BANDES ORIGINALES POUR LE GRAND ÉCRAN ET DE NOMBREUSES COLLABORATIONS DANS LE RAP FRANÇAIS. SIÈCLE EST SON 4e ALBUM.

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album et favori de l’artiste a été produit entre juin 2023 et janvier 2025.
Pour faire un album, il faut être bourré de certitudes », nous glisse Superpoze, 33 ans, ferronnier de l’électronique française, posé dans son antre à machines souterrain du XXe arrondissement parisien, qu’il vient tout juste de retrouver après quelques dates sur la carte de France. Par là, Gabriel Legeleux, dit Superpoze, laisse supposer qu’on ne peut pas se lancer dans un projet comme son quatrième album, Siècle, sans s’armer de convictions. Justement, l’histoire de ce long format sorti début octobre démarre par un lot de certitudes délivrées sous la forme d’un essai –Notes sur le cinématographe du réalisateur Robert Bresson – qu’une amie cinéphile lui ofre, en espérant qu’il y trouve de l’inspiration. Bingo ! Dans ce recueil de petites phrases saillantes sur le métier d’acteur, de réalisateur, de travailleur de récit, Superpoze bloque sur celle-ci : « Créer n’est pas déformer ou inventer des personnes et des choses, c’est nouer entre des personnes et des choses qui existent et telles qu’elles existent, des rapports nouveaux. »
Naît alors une idée, qui tranche avec ses précédents opus Opening (2015), For We The Living (2017) et Nova Cardinale (2022), où les éléments collaboraient pour former un tout. Avec Siècle, Superpoze met en scène une opposition. « J’ai cherché une tension entre ce que j’aime, à savoir faire des arrangements, m’appliquer, faire quelque chose de propre, et l’aspect très libre que les machines et la musique électronique permettent. Je n’ai pas cherché de symbiose entre les

éléments. J’ai cherché à les juxtaposer et à avoir leur interaction de façon assez pure, donc avec des moments de confit. » Ainsi les boîtes à rythmes chassent des improvisations au piano, qui se heurtent à des trouvailles au synthétiseur. Les sons ne se marchent pas dessus, ce qui pourrait donner lieu à une cacophonie peu accueillante, mais dialoguent comme les vents contraires d’une guerre froide. Ce confit est le fl conducteur du disque, et nous livre même une explication quant à son titre : « Quand on traverse l’album, il y a une sensation assez chaotique et assez tendue. Et quand on arrive au bout, fnalement, c’est assez clair. [...] C’est comme un siècle. Quand on écoute les historiens, ils nous expliquent que dans les années 20, c’était la crise, puis dans les années 30, c’était la guerre, et puis dans les années 40… Ça paraît très
L’écriture de Superpoze provoque l’imaginaire des auditeurs pour les inclure dans un tout.
« QUAND
lisible, mais au moment où c’est traversé par les populations, c’est illisible ce qui se passe. Et ce rapport-là, c’est ce qui m’intéresse. » Survient alors inévitablement la question de la relation qu’entretient Superpoze au temps . « Comme tous les musiciens, c’est mon maître suprême. J’en dépends totalement. J’en dépends au moment de créer, j’en dépends au moment d’enregistrer. J’en dépends absolument tout le temps. » Pour lui, le temps n’est pas seulement un concept auquel il se soumet, qui lui dicte le tempo et lui impose des deadlines. L’artiste peut aussi exercer un certain pouvoir sur l’horloge, et pourquoi pas, fabriquer des objets qui lui résistent. « Quand je fais des disques, j’ai l’impression de fabriquer du “passé”, et que c’est la seule chose qui dure. Je trouve ça très fort, parce que là, le présent, le moment qu’on passe ensemble, évidemment, ne dure pas, le futur, évidemment, ne dure pas, parce qu’à un moment, il advient. En revanche, le passé, lui, il est là pour toujours. Et quand on fait des disques, j’ai l’impression qu’on fabrique ça. »
Pour créer des objets qui durent, il faut bien s’entourer. Au fl des années, Superpoze s’est acoquiné d’un écosystème de partenaires de jeu fdèles, que l’on retrouve parfois en premier plan, parfois dans des rôles plus confdentiels, le long de son œuvre. « Il y a des gens avec lesquels on a l’impression d’avoir les mêmes oreilles, mais c’est rare. C’est rare et quand ça arrive, c’est extrêmement précieux. » Yndi, anciennement Dream Koala, fait partie de ces oreilles-là. Rencontrée en 2012 lors d’un concert puis retrouvée à l’occasion d’une création pour les Transmusicales de Rennes en 2015, Yndi contribue régulièrement aux créations de Superpoze (qui renvoie l’ascenseur), et signe sur Gosélia, troisième piste de Siècle, quelques lignes de guitare. « Avec Yndi, on se connaît depuis très longtemps, et ça n’a fait qu’augmenter. On ne fait que fabriquer des choses de plus en plus intéressantes quand on se retrouve ensemble. » Autre équipier régulier
présent sur Siècle, Sylvain de Barbeyrac du collectif Code, croisé sur cette même création aux Trans. « Il a enregistré, coproduit et mixé cet album. C’est la deuxième personne qui a tout fait avec moi, avec qui je travaille depuis dix ans aussi, et en qui j’ai une grande confance. On sait que quand on écoute un morceau, on entend les mêmes choses. »
Aux crédits de Siècle, on trouve aussi Camille Delvecchio du groupe Grand Blanc, le pianiste Jean-Michel Blais et Hugo Lamy du duo expérimental Glass. En studio, Superpoze enregistre leurs sons produits à l’instinct, sans exactement connaître leur destination. « Cet album-là, je l’ai commencé en enregistrant vraiment des fragments très disparates. Une idée de sound design, une idée d’une partie de corde, un thème de piano, un dictaphone. [...] Et en même temps que je faisais ça, j’étais plongé dans la lecture de Pascal Quignard. » Lauréat du prix Goncourt en 2002 avec Les Ombres errantes, premier tome de la saga encore inachevée Dernier Royaume, Quignard pratique une écriture morcelée, où il rassemble des textes d’apparence disparate pour au fnal construire une pensée précise. C’est au lectorat de combler les trous entre les fragments. Inspiré par ce patchwork littéraire, Siècle est donc un assemblage d’échantillons, certains improvisés, qui bâtissent un monde sonore où l’auditoire a une place à prendre. « C’est ça le lien que je fais avec l’idée d’une écriture fragmentaire ou d’une écriture poétique, c’est que cela laisse de la place pour nous, en tant qu’auditeur, imaginer des choses et donc se sentir inclus et donc se sentir intelligent et heureux d’écouter un disque. » L’idée de musicien comme créateur de monde est un concept qui revient plusieurs fois lors de notre discussion. « Il y a quelque chose de l’enfance ou de l’adolescence dans la création d’un monde. Ce que des gens vont trouver dans les mangas, dans l’heroic fantasy, dans des jeux vidéo, dans ces univers forts et marquants. Moi, j’ai l’impression que c’est ça qui me porte aujourd’hui. » Ainsi, chacune des décisions qui ont mené à l’aboutissement du disque servent à amplifer ce monde.
Quand il choisit un titre comme Siècle, ou Ravenne 1321 (référence au poète italien Dante, enterré en 1321 à Ravenne) pour la quatrième piste du disque, il va chercher un pouvoir évocateur, une puissance qui lui « permet de construire un monde qui m’intrigue, que je trouve mystérieux, que je trouve épais. En musique, j’adore les morceaux dans lesquels il y a un premier plan évident, mais que je ne vais jamais réussir à connaître par cœur, parce que si je décide au bout de la 17e écoute de me concentrer sur autre chose, je vais y trouver quand même mon compte ». C’est d’autant plus nécessaire, car ses productions ne contiennent pas de vocalises, de paroles, de texte et restent strictement instrumentales. Il utilise donc tous les éléments à sa disposition pour les renforcer. « Choisir des titres évocateurs sur de la musique instrumentale, c’est aussi une manière de faire une sorte de cartographie mystérieuse. » Dernier élément qui vient épaissir le mystère, la pochette du disque, qui afche en son centre une photo en noir et blanc entourée d’une illustration en nuance de gris. Brute, intrigante et pas très lisible au premier regard, cette photo a été prise par la mère de Superpoze à l’adolescence. « C’est un départ de feu en Corse auquel elle a assisté, à la fn des années 70. Une photo qui est développée dans une petite boîte Ilford qu’elle a gardée depuis ce temps-là. J’ai toujours été obnubilé par cette photo, ce départ de feu. Je le trouve incroyable. En fait, c’est un arbre, mais ce n’est pas lui qui est en feu, le feu est derrière. C’est l’arbre qui cache la forêt en feu. » Finalement, on aura assez peu parlé de musique, de genres auxquels rattacher cet album, de BPM. La pratique de Superpoze se concentre aujourd’hui autre part et pourrait se résumer en deux axes : la création d’un monde et l’événement qui va le perturber.
IG : @superpoze_




Trois jours, une pièce vitrée à Lyon et deux langages qui se cherchent puis s’emboîtent : Slikback et Flore signent, en résidence aux Red Bull Music Studios, une chimie de basses moites et d’angles tranchants. Entre Ableton et Fruity Loops, vitesse et précision, il et elle montrent ce que favorise une résidence : décider vite, oser le risque, inventer un même souffle sans lisser les différences.
CEqui est incroyable avec les résidences d’artistes, c’est qu’on s’y rencontre entre bons vivants, épicuriens de la vie qui dégustent la musique comme un repas en cinq étapes – os à moelle, saucisse pistache, ligne de bass, kick de trap – conçu pour nous faire voyager et dilater l’imaginaire. Si je commence ainsi, c’est parce que, pendant trois jours, je me suis retrouvée aux Red Bull Music Studios, au cœur de l’Hôtel71 à Lyon, avec Flore – DJ, productrice, patronne du label POLAAR – et Slikback – DJ et producteur, Fredrick Mwaura Njau pour l’état civil, originaire de Nairobi et désormais basé en Pologne – dont l’excellent album Attrition est sorti l’été dernier chez Planet Mu.
Ensemble, nous avons vécu de sacrés moments : réveils caféinés, débats sur les impasses et promesses des musiques électroniques, running gags, anecdotes de booking, interviews, souvenirs de teufs en Europe et ailleurs dans le monde ; les rires éclataient, et sur la table s’alignaient des plans aux possibilités infnies. Mais surtout, nous nous sommes rencontré·e·s pour mieux collaborer. Les premières heures ont eu la vitesse d’un montage cut : regards qui se comprennent avant les mots, langage commun qui se fabrique en temps réel. 72 heures à composer, démonter, re-séquencer : deux univers qui, sur le papier, ne cochent pas les mêmes cases, mais qui, une fois réunis, tracent une diagonale neuve dans le champ de la bass music sur fondation d’ambient avec des kicks de trap. Le point de départ est simple, presque naïf : enfermez deux artistes ultra-singuliers dans la même pièce avec une horloge, quelques machines et l’injonction tacite d’aller vite – que se passe-t-il ? Ce qui advient dépasse le simple résultat : c’est un processus, un apprentissage à deux, exactement ce pour quoi existent les résidences. À l’issue de celle-ci, quatre titres ont émergé, mêlant l’univers expérimental, sombre et fracturé de Slikback à la signature bass, précise et évolutive de Flore. Mi-chaos, mi-paradiso. Ce duo éphémère, a créé un mélange inattendu – pour le plus grand plaisir de toutes et tous – scellé le dernier jour dans l’enceinte du Sucre, lors d’une soirée mémorable. Retour sur une rencontre qui sonne juste.

Quoi de mieux que la transmission de son savoir et de son expertise musicale devant une audience attentive, qui a soif d’apprendre.

Masterclass. Après 72 heures de résidence, Flore et Slikback ont partargé conseils en productions sonores et tips de musique.
Prémices d’écoute
La scène, d’abord, se joue à distance. Flore a repéré Slikback depuis ses premiers EPs : « Je connais la musique de Slikback depuis son premier EP. Et j’ai tout de suite adoré la vibe et la sauvagerie du son. Le fait que ce soit vraiment radical. On a l’impression que chaque son est choisi “avec précaution”, mais avec un but précis. C’est assez minimaliste dans les éléments qu’on y trouve, mais tout est à sa place, et donc c’est vraiment efcace. Certains de ses morceaux sont absolument dévastateurs. Et ça m’a toujours impressionnée, parce que c’est unique. Ce que j’aime aussi, c’est qu’on sent une vraie inspiration de diférents univers : je dirais trap ou drill, mais aussi métal ou rock hardcore. C’est intéressant de voir que tout est si ample. La façon dont chaque son est traité me rappelle toute l’attention portée aux détails quand on
travaille l’ambient. C’est drôle, parce que sur le papier, ça n’a rien à voir, mais fnalement, sa musique a cette approche très singulière. »
Slikback, lui, a découvert Flore par la scène – au sens exact du terme : « Via ses sets. » Son intérêt et sa curiosité se sont portés sur la sélection des tracks et la narration qu’ofre Flore. « Chaque morceau qu’elle choisissait », a poussé le Polonais d’adoption à fouiller le Bandcamp de la productrice. Tous ses morceaux y sont passés « des anciens ou plus récents ». Pour lui : « C’est la dance music la plus “sound design” que j’aie jamais entendue : tout est très intentionnel, chaque chose a sa place dans le mix, tout est hyper percutant quand ça doit l’être, silencieux quand ça doit l’être, c’est efcace. J’étais super curieux de voir comment on allait fusionner, parce que même si on est tous les deux très intentionnels sur le son, nos approches sont complètement diférentes pour arriver au même résultat : faire danser les gens. » Une première reconnaissance mutuelle qui dit déjà l’essentiel : deux sensibilités intransigeantes quant au son et aux identités fortes.
Narration de club
Lorsque je demande à Slikback si, en écoutant Flore, il entend son récit sonore, une écriture consciente par le DJing, la réponse ne s’embarrasse pas d’ambiguïté : « Oui, absolument. Si tu écoutes un set de Flore, tu peux comprendre pourquoi sa musique est

spatiale et dure d’une certaine manière. C’est un son que je n’avais pas beaucoup entendu avant. Je pense que n’importe qui peut relier assez facilement ses centres d’intérêt à ce qu’elle produit et comment elle produit ; sa musique c’est une véritable histoire composée de pleins de minuscules détails qui vont et viennent. » Et d’enfoncer le clou : « Il y a des éléments qui te frappent quand il faut, qui s’estompent quand il faut pour devenir une évidence. Même sans lui parler, tu comprends son monde à travers sa musique. Souvent, ce que les gens jouent n’a rien à voir avec ce qu’ils produisent. Chez Flore, ce qu’elle aime, c’est ce qu’elle fait et ce avec quoi elle interagit. Et c’est tout son univers que l’on respire. » Flore renvoie la balle, attentive au mouvement du dancefoor comme à un sismographe, car oui, ça demande du talent de faire des trucs un peu odd, bizarres, et réussir à faire danser les gens. Slikback fnira par ajouter : « Quand tu mixes des morceaux qui sont, je ne sais pas, décalés rythmiquement, faire que les gens accrochent le tempo, c’est une vraie compétence. »
Clairvoyance
Mais que font les artistes dans un studio ? Il s’agit d’un environnement qui peut sembler fou lorsque nous ne sommes pas artistes, mais il faut savoir que la théorie n’a pas sa place entre les écrans d’ordinateurs et les instruments, du moins pour Flore et Slikback : « C’est marrant, on n’a pas vraiment parlé de ce qu’on voulait faire », disent-ils d’une même voix. Mais alors, par où commence-t-on pour produire ? Un ping-pong d’efcacité est de mise : « La première chose qu’on a faite, c’est d’écouter le pack de stems (audio multica-
nal qui contient un des éléments musicaux, par exemple les basses, la batterie, les voix et la mélodie). Et c’était cool, parce que Freddy les a aimés direct. Et comme on ne travaille pas sur le même logiciel, pour le premier track par exemple, je lui ai donné les samples séparés, mais aussi des patterns pré-écrits. Je lui ai tout passé. Et il a tout de suite commencé à poser des éléments pour faire une ébauche, sa signature de kick et la basse. Dès qu’il a eu terminé une minute trente, il me l’a envoyée pour que j’étende le morceau et que je crée des variations. C’était très intuitif. Habituellement, quand je travaille seule, je ne vais jamais aussi vite. »
En efet, le cadre d’une résidence dans un studio de musique favorise l’optimisation de la production, j’entends par là que les artistes veuillent « en tirer le maximum » comme le souligne Flore, surtout lorsqu’on se retrouve face à un artiste généreux : « Slikback m’a donné l’énergie pour ne pas trop sur-
« SOUVENT, CE QUE LES GENS JOUENT N’A RIEN À VOIR AVEC CE QU’ILS PRODUISENT. CHEZ

réféchir et juste faire, pour qu’on puisse avancer. C’était un vrai terrain de jeu. Franchement, je n’étais pas sûre de là où on allait atterrir, et je suis super contente du résultat. Slikback laisse de la place à la personne avec qui il collabore et pour ça merci. »
Les heures passent et dans l’ombre du workfow, une question de geek se pose : Ableton vs FL Studio. « Fruity Loops (FL Studio) », tranche Slikback, avant d’énumérer les diférences : « Le design, la manière de travailler les samples, la manière de mixer. Sur Ableton, tout est plus organisé : tu as des pistes, tu peux avoir des éléments dans la Session mode et d’autres dans la page Arrangement. À mon sens, l’organisation par grille, l’arrangement, ça marche mieux pour le séquençage. Mais quand tu arranges, ça peut devenir un peu le bazar–à moins d’être ultra organisé.»
En réalité, c’est surtout une histoire de positionnement précise le producteur : « Par exemple, dans Ableton tu peux avoir les drums sur une seule piste uniquement, alors que dans FL, tu peux tout mettre n’importe où ; c’est plus bizarre. Du coup, ça demande plus de discipline. Et comme je ne le suis pas vraiment, ça peut devenir rapidement le bazar. Mais, je rattrape ça avec le séquençage, car dans FL, c’est next level ! » L’échange des fchiers audio entre ces deux logiciels révèle l’importance de la communication entre les deux artistes, car ils ont aussi leurs propres efets qui sonnent diféremment, des manières diférentes d’arriver au même résultat. « Si tu veux glitcher un truc ici, ce n’est pas pareil que là-bas. C’est toute une aventure d’essayer de fusionner les deux », me raconte passionnément Freddy, qui est habitué à collaborer avec des producteur·ice·s qui sont sur Ableton.
parce que Freddy a posé les fondations et moi j’étais là pour la structure, les surprises. » Slikback, de son côté, parle plutôt de désacralisation : « C’était cool de travailler vite, mais on sait tous les deux que quand tu rentres chez toi, comme tu as posé la fondation et l’idée, tu peux ensuite approfondir le lendemain, avec une nouvelle écoute. Pour une session rapide, c’est toujours bien de foncer surtout si on a une bonne idée. » L’artiste dont on pourrait qualifer la musique d’expérimentale s’est même trouvé un nouvel intérêt aux côtés de Flore : « Les instruments et hardware : ce n’est pas si efrayant. »
Pourquoi ? « Ça m’a toujours semblé intimidant. Et c’est cher, tu ne sais pas si tu veux mettre X euros dans un truc et fnalement ne pas l’aimer. Mais là, avec Flore, on s’est amusé·e·s avec les synthés et les micros. C’était fun, très ludique, toucher les choses, voir ce qu’elles font, en discuter. Observer et travailler avec Flore m’a fait réféchir à l’espace, aux entredeux, à l’importance de laisser respirer nos prods, notre musique. »
Mais alors, comment sonnent ces trois jours ?
Ce que la résidence révèle
Résider, c’est d’abord se donner une règle simple : décider vite, accepter la clarté. Après ces trois jours aux Red Bull Music Studios, Flore s’étonne ellemême : « Ça m’a rappelé quelque chose que j’oublie toujours : la simplicité est la clé. Parfois, c’est bien d’aller vite, de ne pas trop se soucier des détails. C’est ridicule mais quand je suis seule, je peux passer des heures sur une caisse claire et oublier ce que je voulais faire à la base. J’exagère un peu, mais c’est vrai... Donc la force de notre combinaison a bien marché
La réponse tient en quelques mots qui condensent l’énergie des sessions : « moites, urbains, mutant bass », analyse Slikback. Flore spécife : « Il y a une inspiration hip-hop : le kick comme élément principal. Et en dessous selon le morceau et son BPM, on retrouve beaucoup de diversité le choix des instruments et la direction. » Trois jours, quatre tracks et un kife total pour deux artistes qui ne s’étaient jamais rencontré·e·s mais, dont l’osmose a provoqué une cohérence et une certaine homogénéité dans le résultat fnal. D’un côté, on sent l’aspérité du son de Slikback, de l’autre le côté plus élancé et bondissant de Flore, « comme une réaction chimique » afrme les deux producteurs avant de conclure par : « C’était le challenge de la session », en entendant par-là, la création d’un nouveau univers sonore, propre à eux. Au fond, cette résidence aura servi de révélateur : deux trajectoires singulières, deux univers sonores, et un même besoin de liberté. Slikback conserve la rudesse en première ligne – « mes racines restent du côté trap, EDM, dubstep et brostep américain. Même plongé dans l’expérimental, mon cœur n’a pas totalement déménagé. J’y reviens toujours pour sa promesse : la liberté. Zéro règle, juste l’espace d’essayer. » Un paradoxe, pour celui qui souhaitait à ses débuts « sonner comme Tomorrowland ». Face à cette impulsion brute, Flore sculpte l’espace et la ventilation. En 72 heures, il et elle n’ont pas seulement signé quatre titres : iels ont mis au point une façon d’être ensemble en musique – décider vite, écouter juste, laisser advenir. C’est précisément ce que favorisent les résidences : une temporalité protégée, un terrain neutre, une pédagogie par l’exemple qui n’aplatit rien mais aiguise tout. À la sortie du studio, demeure la sensation claire d’une rencontre vraie, humaine et technique, et la preuve qu’un langage commun peut naître sans renier les diférences. Le reste – la scène, les disques, la durée – viendra après, car dans l’espace-temps du studio, ce qui compte, c’est l’instant où ça s’ouvre et où ça tient, mais dont le mantra est : less is key.
IG : @floremusic ; @slikback
Augustin Héliot, alias « TheGreatReview », est une référence de YouTube. Il excelle dans l’art du storytelling, notamment au sujet du gaming. Créateur solitaire, il consacre des mois à la conception de chacune de ses vidéos, dans un esprit d’indépendance et pour toucher un public toujours plus large. Entretien rare avec un boss du YouTube game.

Augustin est un vidéaste YouTube passionné et apprécié pour sa façon d’expliquer des choses. Spécialisé dans le long format, il utilise les jeux vidéo comme support pour raconter des histoires soignées, proches du cinéma, tout en restant amateur. Après un début de carrière comme chroniqueur chez Jeuxvideo.com et un stage chez Millenium, Augustin s’est lancé sur YouTube il y a environ cinq ans. Profitant d’une période de chômage, il a créé ses premières vidéos, sans la contrainte des formats courts imposés par les rédactions.

Ces vidéos, d’abord confidentielles, ont progressivement trouvé leur public, lançant sa chaîne. Sa passion pour les jeux vidéo remonte à ses 7-8 ans, lorsqu’il découvre les jeux PC sur l’ordinateur familial. Plus tard, il se plonge dans Dofus, puis League of Legends, des jeux qui l’accompagnent au collège, au lycée et jusqu’à ses études de droit.
Aujourd’hui, il privilégie les expériences solos, tout en continuant à explorer sa créativité sur YouTube.
The red bulletin : On voit à travers le format vidéo Red Bull GeoGamers (voir encadré), sur la chaîne YouTube Red Bull Checkpoint, que tu t’es créé une culture gaming solide. Est-elle née tôt ou s’est-elle construite chez Millenium (désormais MGG France) ? augustin héliot : Si on parle de l’attrait pour les jeux vidéo et de la manière dont j’ai construit ma culture, c’était en moi dès le début. Certes, pendant le lycée et le collège, je n’avais pas beaucoup de thunes, donc je jouais surtout à LOL. Mais en fait, je me tenais au courant à travers les médias spécialisés : en lisant des articles et en suivant ce qui se passait sur les sites internet. D’ailleurs, on le voit dans Red Bull GeoGamers : même si je connais quasiment tous les jeux, j’ai joué à seulement environ 1/10e d’entre eux. Je n’ai pas besoin d’y avoir joué pour savoir de quoi ils parlent, à quelle période ils sont sortis et à quoi ils ressemblent parce que j’ai toujours suivi très assidûment la presse spécialisée dans les jeux vidéo. Je suis un lecteur de Jeuxvideo.com depuis que je suis petit. Dès qu’il y a une news, dès qu’il y a une grosse sortie, dès qu’il y a une actu, j’en suis informé. De plus, fnancièrement, j’étais confné aux jeux free to play et aux MMOG. Il n’était pas question pour un lycéen, puis pour un étudiant à la fac qui de toute façon n’a pas de thunes, de s’enquiller tous les triples A de l’année.
Et c’est ça qui t’as donné envie de déchifrer les dessous des jeux vidéo ?
C’est plus de la conscience professionnelle. À partir du moment où tu fais des vidéos pour un site, tu essayes de trouver des détails et de faire ton travail correctement. Je le fais parce que c’est bien pour le spectateur et je sais que si je ne le fais pas, je perds son attention.
Est-ce que le gaming t’attirais déjà quand tu étais en fac de droit ?
C’est quelque chose qui est arrivé par hasard. Juste avant d’avoir ma licence, j’avais vu passer que le site Millenium recrutait des rédacteurs bénévoles. Je me suis dit : « Pourquoi pas écrire des articles sur les jeux vidéo ? » Ça me permettait aussi de me changer les idées, le soir, quand j’avais fait trop de droit. J’ai donc commencé à écrire pour eux, pour le portail League Of Legends. Un an plus tard, quand j’ai eu ma licence, j’ai pris une année sabbatique.
Pour quelles raisons ?
J’en avais ras-le-bol du droit. Je voulais faire une pause avant d’attaquer le master. Et au lieu d’aller à l’autre bout du monde sur une plage à ne rien faire, j’ai fait un stage de rédacteur chez Millenium. C’est comme ça que je suis entré dans le jeu vidéo. Quand je me suis retrouvé à Webedia, entouré de journalistes qui vivent du jeu vidéo, j’ai réalisé que c’était possible d’en faire son métier.
Des gens t’ont épaulé à ce moment-là ?
J’ai eu un rédacteur en chef, Sam Vostok, qui me donnait quelques conseils, non pas de style, mais d’efcacité, pour ne pas trop perdre de temps sur un truc. Des conseils pour être un employé productif. Pas des conseils pour captiver les gens.
C’est lors de ce stage que tu as commencé à faire des vidéos ? Non, à ce moment-là, je ne faisais que de l’écrit. Cependant, je me souviens que j’avais eu envie de faire une vidéo. J’avais suggéré à mon rédacteur en chef d’en produire une sur l’histoire du Battle Royale parce que Fortnite marchait très bien à ce moment-là. Il m’avait répondu que ce n’était pas pour ça que j’étais payé et que si je voulais le faire, il fallait prendre sur mon temps libre. Donc je me souviens que le soir, chez moi, j’avais fait ma première vidéo sur l’histoire du Battle Royale. Elle est toujours sur Millenium. C’est la preuve que déjà, à l’époque, j’avais envie de faire du format vidéo. Ensuite, j’ai travaillé en freelance chez Jeuxvideo.com pour des formats vidéo.
C’est ce qui t’a amené à en faire à ton propre compte ?
J’ai fait mes premières vidéos qui ont bien marché pendant une période de chômage, parce que j’avais beaucoup de temps. Notamment une sur le streamer Otzdarva et sur le jeu vidéo Shadow of The Colossus. Mais à ce moment-là, j’étais complètement inconnu, donc mes vidéos ne dépassaient pas les douze vues. Le nouveau rédacteur en chef de Millenium m’a alors contacté pour revenir chez eux, cette fois en CDD, puis en CDI, afn de développer des formats vidéo. Il s’était basé sur mon expérience chez Jeuxvideo.com ; il savait que je pouvais écrire un script et monter une vidéo. Webedia ne m’avait pas recruté pour faire des formats longs mais uniquement de courtes vidéos de deux, trois minutes sur l’actualité des jeux. C’était exactement ce que je faisais déjà pour Jeuxvideo.com.
Est-ce que cela a généré de la frustration chez toi ?
Oui, à ce moment-là, je sors d’un an où il fallait négocier avec le rédacteur en chef de JVC pour pouvoir dépasser des formats de 30 secondes. JVC avait des règles très strictes. Ils voulaient des vidéos de cinq ou six minutes maximum. C’était impossible de raconter quoi que ce soit. Quand j’avais proposé la chronique à Jeuxvideo. com, je m’étais inspiré des Canadiens de theScore esports qui faisaient de longs formats, courts par rapport à ce que je fais aujourd’hui, mais longs pour l’époque, des 20-30 minutes. C’est pour ça que j’ai commencé à développer des formats longs : afn de pouvoir raconter correctement les histoires.
Est-ce que cela a eu une incidence sur ta manière de produire tes contenus ? Je les tournais et les montais déjà tout seul avant. La seule diférence, c’est que je n’avais plus de restrictions. Je me suis mis à faire les choses comme j’ai toujours voulu les faire. S’il fallait deux secondes pour raconter quelque chose, je prenais deux secondes. S’il fallait 15 minutes, je prenais 15 minutes. Je le faisais juste en fonction de ce qui allait rendre le mieux
« J’essaie de jouer uniquement à de très bons jeux et peut-être qu’être sélectif m’aide à garder la flamme. »
à la fn. Donc c’était très naturel. Le seul inconvénient qui vient quand tu te mets à le faire sans restriction, c’est que tu n’as plus de deadline et donc c’est plus facile de procrastiner. Quand il n’y a personne qui te surveille, tu te mets à être très lent. Tu gagnes sur à peu près tout le reste, la qualité suit mais la productivité tombe.
Comment trouves-tu un bon sujet ?
Ça peut venir de mes recherches sur Internet ou d’un pote qui m’envoie un sujet intéressant. Un bon sujet, c’est n’importe quelle histoire que je trouve sur Internet et je me dis : « Wahou, c’est trop stylé! » Par exemple, pour la vidéo sur le jeu Sea of Thieves, c’est que j’étais tombé sur un contenu YouTube. Pour la vidéo sur Call of Duty, c’était un bouquin que Bertrand Amar (Head of esports chez Webedia, ndlr) m’avait conseillé de lire à l’époque.
Parmi tes vidéos, y en a-t-il une qui te tient particulièrement à cœur ?
J’ai toujours eu un faible pour la vidéo sur Tunic parce que je trouve le jeu vraiment exceptionnel. Ça faisait des années à ce moment-là que je n’avais pas été impressionné par un jeu. C’était fun, c’était mystérieux, c’était rempli de découvertes. C’était vraiment quasiment parfait comme expérience. Après, ce n’est pas une dinguerie non plus. Ce n’est pas comme si c’était ma préférée de très loin, mais c’est probablement ma favorite.
Tes vidéos sont saluées pour leur style narratif, mais également pour le montage. Est-ce que tu te nourris de flms ou d’autres vidéos sur YouTube ? Non, ça marche complètement à l’instinct. Je mets une phrase sur une image et sur
« Un bon sujet, c’est n’importe quelle histoire que je trouve sur Internet et je me dis : “Wahou, c’est trop stylé !” »
une voix, je change de musique, je change d’image et je change de façon de le dire jusqu’à ce que tout fonctionne parfaitement. Je regarde et je me dis : « Ah oui, là c’est stylé ! » Ça se sent quand un moment est beau ou quand tu as un enchaînement intéressant.
Est-ce qu’aujourd’hui, tu arrives à ressentir un certain plaisir en jouant sans suranalyser le jeu vidéo ?
J’avais peur de perdre mon intérêt pour les jeux vidéo en grandissant, mais pas du tout. Beaucoup de mes potes ne jouent plus. Beaucoup de gens, passé la vingtaine, décrochent un peu des jeux vidéo. Mais j’ai été heureux de constater que je continue d’être passionné, que je suis toujours très heureux quand je tombe sur un bon jeu. Je suis peut-être aidé par le fait que je ne joue pas tant que ça. J’ai énormément de travail avec mes vidéos donc, au fnal, je joue à très peu de jeux à l’année. Je les sélectionne et j’essaie de jouer uniquement à de très bons jeux. Peut-être qu’être sélectif m’aide à garder la famme.
Concernant les jeux vidéo, est-ce que tu as constaté des changements, des évolutions qui t’ont marqué ces dernières années dans leur conception ? Le tournant le plus intéressant de ces dernières années dans le jeu vidéo, c’est l’essoufement du triple A et la montée en puissance de la scène indépendante. Quand tu étais adolescent, jouer à des jeux vidéo triple A comme Final Fantasy ou au dernier Call of Duty, c’était une évidence. Aujourd’hui, force est de constater que non seulement ce n’est plus vrai, mais que ça s’est complètement inversé. Les jeux vidéo sont devenus beaucoup trop chers à concevoir, donc les gros studios ne peuvent plus prendre le moindre risque, parce que si un jeu se vend mal, le studio coule. Donc ils ne font que des jeux copiés-collés les uns aux autres parce qu’ils n’osent pas s’éloigner d’un centimètre de la formule qui marche. Et donc, tous les triple A sont du vu et revu horriblement réchaufé et extrêmement ennuyeux. Aujourd’hui, si tu veux avoir du fun et des expériences nouvelles, tu es

Augustin vient d’écraser la concurrence lors du Red Bull GeoGamers, dont il est le boss incontesté. À date.
obligé de jouer à des jeux indés. À titre personnel, toutes mes meilleures expériences sont sur des jeux indés. C’est dans la scène indépendante que se trouve le futur du jeu vidéo.
Dans ces jeux vidéo indépendants, quel est ton dernier coup de cœur ?
Tunic était phénoménal, Hollow Knight et sa suite Silksong… je n’ai pas eu le temps de le fnir mais le jeu est hors du commun. C’est typiquement un jeu indé parce qu’il est fait par trois personnes avec très peu de moyens. Un parfait exemple de jeu indé attendu par la terre entière et qui fait de meilleurs résultats que des triples A qui ont 100 fois son budget. Outer Wilds est aussi un exemple de jeu indé. C’est ma vidéo la plus populaire. Il y a une créativité dans Outer Wilds qu’on n’aurait jamais trouvée dans un projet avec beaucoup de budget.
On a appris la fermeture de la chaîne Game One. Comment expliques-tu le déclin de la presse classique spécialisée dans le jeu vidéo ?
Je pense que ce déclin est dû à la concurrence avec les infuenceurs. Lorsqu’un jeu sort, tu pourrais lire le test écrit dans ton journal préféré ou avoir un test qui te per-
mettrait tout autant de savoir si le jeu est bien ou pas. Mais avec les infuenceurs, c’est coloré, nerveux, rapide et drôle, ton youtubeur préféré fait cinquante blagues par seconde.
Est-ce que tu regardes des confrères ?
Je ne regarde quasiment aucun autre youtubeur ni streamer. Quand je me perds sur YouTube, c’est pour regarder des extraits de flms. Mais du contenu fait pour YouTube, bizarrement je n’en consomme pas, alors que j’en fais.
Comment vois-tu l’avenir de ta chaîne YouTube ?
Il y a plusieurs pistes d’amélioration possibles. J’envisage d’acheter de l’équipement pour pouvoir aller flmer mes propres images. En efet, je suis parfois limité par ce que je peux trouver sur Internet. J’aimerais également refaire des vidéos en anglais pour permettre à un autre public de me découvrir. Ça demande de créer une nouvelle chaîne en anglais et de refaire toutes les vidéos et, a fortiori, le montage. Sinon, continuer à produire d’autres vidéos sur ma chaîne.
TheGreatReview sur YouTube.
Si vous êtes un passionné de gaming, vous connaissez forcément Red Bull GeoGamers. Si ça n’est pas le cas (ce qui paraît incroyable !), jetez-vous sur Red Bull Checkpoint, la chaîne YouTube gaming de Red Bull France, pour découvrir ce programme addictif qu’Augustin vous présente.
the red bulletin : Quel est le concept de Red Bull GeoGamers ?
augustin : Dans Red Bull GeoGamers, on te lâche dans un jeu, plus précisément dans un endroit de la carte du jeu. Tu peux regarder autour de toi mais tu n’as pas l’interface du jeu. Tu as uniquement le décor et tu dois dire dans quel jeu tu te trouves. Si tu trouves le nom du jeu, tu dois ensuite te placer précisément sur la carte du jeu pour le double de points. À la fin, on fait le total de tes points sur les vingt jeux du jour et on regarde si tu as gagné contre tes concurrents.
Comment cette aventure a commencé pour toi ? Red Bull m’a invité à participer au premier épisode sorti en août 2023. Sur les neuf épisodes sortis, j’ai participé sept fois grâce à la règle de « si tu gagnes, tu rejoues », mais à la base, ce n’était pas prévu que je reste aussi longtemps.
Dans ton parcours dans Red Bull GeoGamers, tu as identifié plus de 100 jeux sur les 128, toutes éditions confondues. Comment as-tu fait ? Est-ce que tu as une mémoire photographique ? Honnêtement, je ne pense pas qu’il y ait de pouvoir magique. J’ai juste une bonne mémoire pour les jeux vidéo. Mais il y a plein de moments où j’ai failli perdre. La vérité, c’est que je ne suis pas si exceptionnel que ça. Contre Mister MV et Leo - TechMaker, ça s’est joué à trois points. J’ai le niveau de connaissance d’un nerd qui baigne dans les jeux vidéo depuis les vingt dernières années.
Y a-t-il des jeux que tu as été frustré de ne pas avoir trouvés ?
Oui ! Dans un épisode, ils avaient mis Zelda : The Wind Waker qui est un classique absolu que je pensais connaître à 200 % et je ne l’ai pas reconnu. Ils nous avaient mis dans un niveau de nuit dans le jeu, à un endroit qui n’est pas proche de l’eau alors que le jeu est à 95 % recouvert d’eau. Aujourd’hui, je n’en reviens pas de ne pas l’avoir reconnu.
Ce type de concept te permet-il d’en savoir plus ou d’éduquer sur les jeux vidéo ?
Je ne suis pas sûr qu’il y ait besoin d’éduquer les gens aux gaming. Une partie de ce qui fait la magie, c’est d’ignorer comment c’est fait. Plus je connais des choses sur les jeux vidéo, plus je pense à les suranalyser quand je joue, moins je passe de temps à juste profiter du jeu. Red Bull GeoGamers, c’est ludique, c’est visuel, ça permet immédiatement de comparer qui connaît le plus de jeux. L’important, c’est que ça reste fun à faire et à regarder.
Un dixième épisode sort en décembre, est-ce que l’on peut s’attendre à des surprises ?
Complètement !
Retrouvez Red Bull GeoGamers sur la chaîne YouTube Red Bull Checkpoint.



S’équiper, optimiser et vivre la plus belle des vies

« Nous dégoulinons de sueur… C’est notre modeste offrande à la montagne, un rite de passage qui nous garantira la plus belle des descentes. »
Mes jambes flageolent, mon dos est trempé de sueur. À chaque pas, je m’enfonce dans une insondable et merveilleuse poudreuse. Une légère brise vient fouetter la crête au-dessus de nos têtes, faisant valser des volutes de neige à travers lesquelles le soleil tente de percer. Je me retourne vers Paul De Groot, skieur professionnel néerlandais, et Agathe Ledoux, photographe française. « On y est ! C’est dingue, non ? », soufflé-je entre deux respirations haletantes. Un immense sourire éclaire leurs visages incrédules.
Malgré les mers furieuses, les tempêtes, le matériel cassé et les alertes avalanche qui ont jalonné notre périple une semaine durant, nous sommes enfin arrivés à destination dans ce couloir glacé sur une péninsule norvégienne isolée à 400 km au nord du cercle arctique. Plus que 200 mètres pour atteindre le sommet et le couronnement de notre voyage. La lente ascension continue.
C’est une heureuse coïncidence qui nous a réunis : en juillet dernier, ma compagne Camilla et moi-même avons acquis à Oslo le Delfin, un voilier vieux de 45 ans et long de 25 pieds (7,6 m). Alors que nous
réparions une avarie de moteur dans le port de Kristiansand avant de rentrer à Tromsø, notre ville d’adoption, je suis tombé sur De Groot, skieur et marin chevronné que j’ai toujours admiré. Entre deux verres de vin, une amitié est née.
Nous avons parlé de l’hiver, et il m’a montré une photo d’un couloir naturel fantasmagorique repéré lors d’une traversée à la voile. « Une ligne parfaite », m’a-t-il confié, rêveur. Un passage raide et étroit situé à Loppa, péninsule norvégienne sauvage qui embrasse la mer de Barents, au cœur du cercle arctique. On ne peut l’atteindre que par la mer, ce qui en fait un lieu rarement visité par les skieurs. Cette ligne parfaite dont rêve De Groot se situe sur la face est d’une crête de 1 000 m en forme de fer à cheval autour d’Ullsfjorden. Pour l’atteindre, il faut jeter l’ancre dans le fjord, traverser la paisible vallée, puis tracer une série de lacets dans une pente d’accès à 30 ° avant de gravir à pied le couloir de 500 m… à 50 °. « En supposant que l’on se rejoigne à Tromsø, on pourrait s’y rendre en bateau et y skier l’hiver prochain », ai-je répondu avant de porter un toast à notre projet.



Après des heures et des heures d’ascension en crampons, la meilleure récompense au monde : une poudreuse fraîche et immaculée.


TOUT EN DOUCEUR Anderson (à gauche) et De Groot redescendent à ski vers le petit village de pêcheurs de Bergsfjord.
Nous revoilà huit mois plus tard dans une marina à la sortie de Tromsø, moi sur le pont du Delfin à dégager la neige, De Groot à l’intérieur entassant du matériel de ski dans tous les recoins encore disponibles, Ledoux faisant le tri de nos provisions. Les montagnes alentour reposent sous d’épais manteaux blancs. Nous sommes en avril, la nuit polaire ayant un tant soit peu relâché son emprise, le paysage gelé baigne dans une lumière dorée. Cette période de l’année n’est pas la plus fiable : en hiver, dans le nord de la Norvège, les fronts météorologiques sont souvent capricieux. Mais une petite fenêtre d’accalmie s’offre à nous, suffisante pour traverser les 185 km (environ 20 heures de bateau) qui nous séparent du petit village de pêcheurs de Bergsfjord, où nous pourrions attendre le passage d’une autre tempête avant de rejoindre Ullsfjorden, tout près de là. Nous partons à minuit, emmitouflés dans toutes les couches de vêtements que nous possédons, mais le froid arctique nous glace les os. Tromsø et les Alpes de Lyngen défilent devant nos voiles gonflées par le vent. Le moteur nous joue quelques tours, mais nous
atteignons malgré tout Bergsfjord la joie au cœur et dégotons une place libre au milieu d’une jungle de bateaux. Autour de Loppa, l’océan fait figure de mythe pour tous les pêcheurs, qui, comme nous, attendent la fin de la tempête.
Les jours s’écoulent dans des brumes de café, vérifications horaires, prévisions et séances de sauna dans le plus simple
appareil. Agglutinés dans le Delfin, forcés à l’attente, nous rions tous les trois et une immense complicité se tisse entre nous. La tempête apporte avec elle de fortes chutes de neige, mais l’hiver alterne entre gel et redoux, créant une couche fragile et persistante dans le manteau neigeux. Nous restons sur nos gardes. Grâce à Morten Christensen, guide de montagne qui nous transmet de précieuses infos locales, et Agathe, aussi instructrice spécialisée dans les avalanches, nous nous précipitons dans les montagnes autour du port pour tester la couche neigeuse. À Loppa, nous sommes aussi isolés qu’exposés : peu de réseau, et à plusieurs heures du poste de secours le plus proche, ce qui renforce cette abîme entre excitation du risque et nécessité absolue de prendre les meilleures décisions. D’un commun accord, nous décidons dès le départ que si la situation s’envenime, nous ferons immédiatement demi-tour.
Au bout de quatre jours, le vent finit par tomber. Les nuages se dissipent, révélant un ciel bleu turquoise. Nous détachons les amarres gelées du Delfin. Cap sur Ullsfjorden, à deux heures plus au nord. En contournant le cap, je découvre le couloir pour la première fois. Sa ligne semble avoir été sculptée par les dieux du ski. De Groot avait raison : la ligne est parfaite. Après trois heures de traversée à ski de fond, nous voilà enfin au pied du couloir, ôtant plusieurs couches de vêtements avant d’entamer l’ascension. C’est une progression quasi verticale, pas après pas, dans une neige fraîche, profonde et (par chance) stable. Les heures passent, nous suons sang et eau, nos jambes se dérobent. C’est notre modeste offrande à la montagne, un rite de passage qui nous garantira la plus belle des descentes. Enfin, quatre heures après avoir quitté la base, nous atteignons le sommet tant convoité. Plus qu’à vivre l’aboutissement de ce rêve vieux de huit mois, qui ne durera qu’un bref instant.
Into the wild Située à 70 °N, au cœur du cercle arctique, la péninsule de Loppa n’a pas d’accès routier. Depuis l’aéroport d’Alta, effectuer la suite du trajet en voiture jusqu’à Øksfjord, puis ferry vers Bergsfjord. Unique hébergement : le Bergsfjord Lodge, tenu par le guide Morten Christensen ; bergsfjordlodge.com
Tandis que nous remettons nos vêtements et réarmons nos harnachements, mon regard se porte vers le fjord et le Delfin, minuscule tache blanche sur les eaux sombres. Agathe et moi faisons un signe de tête à De Groot, qui se met à compter à voix haute. « Trois, deux, un… Go ! », hurle-t-il avant de disparaître dans un nuage de poudre soyeuse. La meilleure descente de sa vie. Et la nôtre aussi.
Écrivain britanno-néerlandais spécialiste de l’aventure et de l’écologie, membre de la Royal Geographical Society, Hugh Francis Anderson vit à Tromsø, en Norvège. hughfrancisanderson.com ; IG : @hughfrancisanderson



BMX, padel, pumptrack, fitness, yoga, good food et chill… Située à Val de Livre (51), La Farm est un lieu hybride où le Fitness Squad soutenu par Red Bull France est venu s’exprimer. Report.
Un rêve d’athlète et d’épicurien. Une base sportive aux multiples facettes façonnée par le dix fois champion du monde de BMX Matthias Dandois, où l’effort est récompensé par une offre de restauration au top conçue par le chef cuisinier Juan Arbeláez. La Farm, ancien corps de ferme niché dans quinze hectares de nature, est un spot unique au monde installé en Champagne, dans lequel le Fitness Squad de Red Bull s’est rendu en octobre dernier pour des sessions d’entraînement et un Hyrox. Emilie Detre (@emi_dtr), l’une des participantes, revient sur ses perf dans un cadre hors norme.
the red bulletin : Qui es-tu, Emilie ? emilie detre : Au sein du Squad, tout le monde m’appelle Emi ! J’ai 31 ans, je suis originaire de Lille et je suis coach sportif depuis bientôt dix ans. Le sport représente une énorme partie de ma vie, mon métier, ma passion : je vis, je dors, je mange sport au quotidien. (Rires)
Comment résumer la session du Fitness Squad à La Farm ?
Vous vous souvenez de vos colonies de vacances quand vous étiez ado ? Et bien, c’est la même chose, mais en faisant légèrement plus de sport. (Rires) Des copains, des entraînements, des activités, des repas à quinze et tous les soirs on se retrouvait dans des gîtes tous ensemble pour faire des parties de jeux de société... C’était génial !

TOUT DONNER Emi en plein effort, avec Noémie Hanse.
La Farm, pour toi, c’est quoi ?
Un endroit de partage ! Tout est réuni pour passer un bon moment, pas besoin d’être un grand sportif pour y trouver son bonheur, juste le cadre est incroyable. Le restaurant est merveilleux, la salle de sport très bien équipée et les gîtes ultra modernes et bien équipés.
« Pas besoin d’être un grand sportif pour y trouver son bonheur. »
Emilie Detre, coach
En quoi participer à un Hyrox dans un tel environnement est-il différent ?
C’est à la fois totalement différent d’un Hyrox classique et en même temps on y retrouve les belles sensations d’effort de l’Hyrox. C’était ultra challengeant de faire la course avec un gros dénivelé ! À côté, j’ai trouvé ça ultra ludique et agréable de faire les stations en extérieur dans ce cadre.
Quel est l’esprit du Squad ? Pourquoi c’est top d’évoluer avec tous ces talents ?
L’équipe est extraordinaire, chaque profil est différent et en même temps tout le monde se complète ! On rit énormément ensemble sans s’éteindre les uns les autres. Aux Hyrox, que ce soit lors des sessions training ou bien le jour J en compétition, on se soutient tous les uns les autres, je peux vous assurer qu’on nous entend à l’autre bout de la salle. (Rires)


GO ! Une partie des membres du Fitness Squad soutenu par Red Bull lors de l’Hyrox très spécial qui leur a été proposé sur le site de La Farm en septembre dernier.


Qu’apporte la présence de Matthias Dandois dans ce lieu et sur ce genre de sessions ?
Tu as réalisé le Red Bull 100, cela consistait en quoi, ça doit être costaud ?
J’ai été trop heureuse de relever ce défi que je n’avais jamais osé faire en une seule série ! Le but est de réaliser le plus rapidement possible les 100 WallBall shots de l’Hyrox (4 kg pour les femmes, 6 kg pour les hommes). Je me suis lancée le challenge de les faire en une seule série (sans poser la balle) et j’ai réussi à les terminer en 3 min 2 sec.
J’ai été étonnée de mon temps, et trop fière de moi. Et j’ai eu la chance d’avoir l’ensemble du Fitness Squad avec moi, l’ambiance était monstrueuse !
Matthias a une certaine renommée, c’est ultra satisfaisant de partager des moments avec un athlète de haut niveau dans son genre. En plus de ça Matthias est ultra abordable et simple, il a pris le temps de parler et rigoler avec chacun d’entre nous, il nous a fait nous sentir chez nous pendant ces quelques jours.
Côté structures, qu’est-ce qui t’a le plus séduit à La Farm ?
La salle de sport ! (Rires) La localisation, l’endroit est ultra chaleureux, c’est un grand espace où on a su très vite trouver nos repères, tout a été pensé pour qu’on s’y retrouve facilement et que tout soit facile d’accès !
IG : @lafarm ; ride.lafarm.fr
Qu’attendez-vous ?!
3 raisons de vivre l’expérience
La Farm, par Matthias Dandois (photo), co-fondateur du lieu.

1. Parce que c’est un terrain de jeu unique au monde
La Farm, c’est mon playground rêvé. Un endroit où tu passes du vélo au dojo, puis de la salle de fitness au terrain de padel, en passant par la pumptrack. Le fait qu’on puisse dormir sur place dans des gîtes hyper premium fait une énorme différence, comparé aux autres endroits. Je suis un grand fan de sports avec un grand S, et je pense que c’est une offre qu’on ne trouve nulle part ailleurs.
2. Parce qu’ici, le sport se vit différemment
On n’est pas dans une salle impersonnelle. La Farm, c’est une vraie communauté où chacun trouve sa place : que tu sois pro rider ou juste yogi amateur, boxeur ou juste là pour te défouler. Tu peux y croiser Lucas Pouille, Axel Clerget, Maxime Krantz, Ciryl Gane... Autant que des sportifs débutants avec qui tu vas pouvoir échanger. Un vrai lieu de vie où tout le monde va y trouver son compte.
3. Parce que le plaisir ne s’arrête pas au sport
Après la session, tu passes à table avec la cuisine du chef colombien Juan Arbeláez...
Deux options : le menu sportif avec choix de protéines et accompagnement, ou le menu plaisir accompagné des champagnes des producteurs du coin. Pour moi, c’est ça, La Farm : un lieu où l’on nourrit tous les corps et tous les esprits.

Ce nouvel accessoire transforme n’importe quelle Nintendo Switch en console de jeu rétro.
Nintendo est un pilier du jeu d’arcade depuis le début des années 1980. Ses franchises les plus emblématiques, dont Donkey Kong et Mario Bros d’abord été jouées sur des bornes d’ar cade, et parmi les trois grands fabricants de consoles, la marque basée à Kyoto s’appuie toujours sur ses origines.
Suite à la sortie en juin de la Switch 2, l’entreprise britannique d’accessoires de gaming iMP Tech nous ramène à l’es sentiel. Son support et sa manette Mini Arcade Pro permettent de transformer votre Switch en borne d’arcade miniature, avec un boîtier au style rétro, un joystick et huit boutons pour retrouver tout le plaisir des jeux d’antan.

MULTIPLAYER MODE
Les graphismes, eux, ne sont pas du tout 80 : l’écran tactile LCD haute définition de la Switch 2 est intégré dans le design du Mini Arcade Pro, connecté via un port USB-C ultra-rapide – ainsi que des fonctionnalités telles qu’une option de tir rapide, et des boutons Home et C qui permettent d’accéder à toute la techno de pointe de la console, dont GameChat. Comme le dirait le célèbre plombier italien de Nintendo : “Let’s-a go!” impgaming.co.uk
Le support dispose également d’un rack de rangement amovible à l’arrière pouvant accueillir jusqu’à douze de vos jeux et cartes SD préférés.


… sans trembler et en gardant le contrôle ? Il suffit de demander à l’un des experts de la slackline.
À mi-chemin à travers les Gorges du Verdon, les bras écartés, Friedi Kühne prit un moment pour se stabiliser. Sa highline – une bande de nylon de 110 m de long mais seulement 25 mm de large – frémissait alors que l’abîme en dessous avalait tout son et, apparemment, tout sens. L’Allemand n’avait ni corde, ni parachute, ni filet pour le rattraper en cas de chute. Un faux pas, une pensée égarée, entraînerait une chute mortelle de 200 m. Sa vie, tout comme son objectif d’établir le record de la plus longue traversée en slackline en solo intégral, dépendait de sa capacité à trouver l’immobilité dans le mouvement.
L’un des slackliners les plus talentueux au monde, Kühne sourit en repensant à cette journée ensoleillée en 2017. « Il est possible d’attraper la ligne avec les mains si l’on tombe, précise-t-il, donc votre réflexe est en quelque sorte un dispositif de sécurité. Mais si vous manquez l’attrapage, oui, vous mourez. » Kühne a réussi la traversée, a établi le record et en a ensuite battu plusieurs autres. Son plus marquant fut une marche en slackline entre deux montgolfières à une altitude
de 2 500 m en novembre 2024 (record battu six jours plus tard en Suisse par le Français Julien Roux, à 4 255 m d’altitude).
Lorsqu’on lui demande pourquoi il réalise ce genre d’exploit, cet homme de 35 ans adopte un point de vue similaire à celui de l’alpiniste George Mallory, qui disait à propos de l’Everest en 1923 : « Parce qu’il est là. » « Quelqu’un doit le faire, non ?, rit Kühne. Cette fois, c’était moi ! » Il y a une méthode derrière cette folie. « En équilibre sur une sangle de

« L’idée de tomber si près de la ligne d’arrivée est presque insupportable. »
Friedi Kühne, slackliner pro
2,5 cm au-dessus d’un canyon, je me sens aussi en sécurité qu’en grimpant à une échelle. Cela m’a demandé des années de pratique. J’ai appris cette confiance. » On peut donc dire que Kühne a passé sa vie à maîtriser l’art de l’équilibre. Voici ses conseils pour trouver le vôtre…
« Il faut regarder devant soi, un point fixe, un objectif en face », poursuit Kühne. Pour un slackliner, cela signifie fixer son regard sur un point stable, comme l’arbre au bout de la ligne, et non sur le sol en dessous. « Voir le vide dans son champ de vision fait s’affaisser le corps et le déséquilibre. »
« Vos bras sont vos outils d’équilibre, mais ne peuvent pas être complètement figés. Ils doivent bouger en permanence, car la slackline n’est pas un équilibre statique, comme sur un fil de fer, mais un équilibre dynamique – il faut bouger comme la ligne bouge. » Cela n’a jamais été aussi vrai qu’en 2018, lorsque Kühne a battu le record du monde de la plus longue marche sur slackline – 2 200 m sur une ligne de 2 800 m en Norvège : « Je marchais sous le soleil, puis une tempête est arrivée très rapidement. Même avec une longe, j’ai eu peur. Mais il faut continuer. »
« La peur n’est pas noire ou blanche –il y a de bons et de mauvais aspects. La bonne peur vous garde en alerte – c’est une réponse évolutive au danger. L’astuce consiste à apprendre à différencier le danger réel du danger perçu. » Certaines peurs peuvent sembler réelles, selon lui, mais elles n’ont pas toujours de sens –par exemple, lorsqu’il porte un leash de sécurité. « Il faut se parler à soi-même, et parfois les autres peuvent vous aider à voir si la peur est justifiée. »
Du rab pour le « désespoir »
Lors d’une traversée massive, l’épreuve mentale est aussi intense que la physique. Pour Kühne et les slackliners, la partie la plus difficile est la « zone de désespoir » – les dix derniers pour cent. « À ce stade, vous êtes épuisé. Vos muscles brûlent – vous avez gardé les bras levés pendant des heures – mais l’idée de tomber si près de la ligne d’arrivée est presque insupportable. C’est ça, la zone de désespoir. Plus vous avez investi de votre vie [dans ce sport], plus il est difficile d’accepter de tout perdre à la toute fin. Mais si vous parvenez à endurer la douleur, cela en vaut absolument la peine, à chaque fois. »
IG : @friedikuehne

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Je suis un touche-à-tout : j’ai pratiqué plusieurs sports à haut niveau, des collectifs comme le foot ou le rugby, des pratiques individuelles comme les sports de combat, ou des disciplines plus atypiques telles l’équitation.
C’est en devenant coach que j’ai compris à quel point le sport pouvait transformer une vie. L’entraînement n’est pas qu’une question de performance, c’est un équilibre, une énergie au quotidien.
Le fitness, la course, et plus largement tout ce qui fait bouger le corps m’ont profondément marqué. Soulever des poids, marcher, prendre les escaliers, jouer au foot ou courir 20 minutes… L’essentiel est de rester actif. C’est ce mouvement constant qui m’a appris la discipline, le dépassement de soi, mais aussi le sens du partage. Je le vis au

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« L’essentiel est de rester actif. »
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Léo Bordessoule, 29 ans, créateur de contenu et coach sportif basé à Paris. Passionné de performance et de bienêtre, il a fondé son club de sport ON MIND. IG : @lemovedeleo
L’Hyrox a été une révélation, car c’est un format unique qui crée une atmosphère de compétition incroyable. Pour me préparer aux Championnats du monde, avec mon coach spécialisé Hyrox, Maxime Krantz, on structure mon entraînement autour de l’endurance, de la force et du travail fonctionnel, avec un objectif: progresser en restant régulier.
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