Petit précis du chocolat

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SOMMAIRE

Les recettes

Victoire aime le chocolat. Elle ne l’aime pas un peu, ni beaucoup. Elle l’aime infiniment. Passionnément. Elle l’aime tant qu’elle a dessiné sa vie autour de lui. Comme une évidence. Comment aurait-elle pu faire autrement, elle qui n’a que le cacao à la bouche. De notre première rencontre, il y a une quinzaine d’années, alors qu’elle était étudiante et travaillait sur sa thèse L’Expertise du chocolat : dégustation et évaluation sensorielle, à aujourd’hui, Victoire n’a cessé de régler son pas sur celui du cacao, pour devenir à ce jour une figure incontournable du genre. Soit une critique de chocolat reconnue parmi ses pairs. Une chocologue. La seule au monde à ma connaissance. Aussi, c’est elle que j’appelle lorsque j’ai une question qui me taraude sur le sujet, je sais qu’elle aura immanquablement la réponse. Sa culture dans le domaine est inouïe. Pour y parvenir, chose singulière, la jeune femme n’a pas suivi la voie professionnelle classique mais un apprentissage plus personnel, dicté par l’analyse de la dégustation, la connaissance technique et bien sûr, sa sensibilité propre. Elle s’est formée aux méthodes et au vocabulaire aux côtés des plus grands chocolatiers (Robert Linxe, Jean-Paul Hévin...). Elle s’est rendue à la source, au contact de la matière première, au coeur des plantations de cacao, lors d’un voyage initiatique. Elle a écouté, étudié, goûté. Patiemment. Obstinément. Exclusivement. Je suis admiratif de ce genre de parcours. Réussir à rentrer dans ce milieu par un autre biais que le métier est un coup de maître. L’oeuvre d’une passionnée. Victoire a beaucoup apporté à la profession. Me concernant, elle m’a ouvert d’autres horizons. Un aspect du chocolat vu d’un autre angle, teinté de son cheminement très spécifique. Ce premier livre compilant recettes et bonnes adresses, est une nouvelle déclaration d’amour au chocolat. Un autre moyen, encore, de partager sa passion avec le plus grand nombre.

Quand le plaisir du chocolat déclenche

une vocation

J’ai imaginé mon métier à partir de mes rêves...

D’une obsession passionnelle, le chocolat est devenu un métier, une expertise, un engagement. Pour éduquer mon palais, je déguste chaque jour des chocolats rares et des pâtisseries exceptionnelles, et je développe une connaissance unique des accords cacaotés. Grâce aux nombreuses heures de dégustation, j’ai eu la chance de devenir « spécialiste » du chocolat. Aujourd’hui, je partage mon temps entre la création de mes chocolats (en vente dans ma boutique à Paris), la personnalisation de cadeaux pour les entreprises, le conseil en développement produit, les formations que je donne sur l’art subtil de la dégustation, et bien sûr, mon compte Instagram® @lachocologue !

Mon aliment

« préféré » depuis toujours

Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours été surnommée dans ma famille « Miss Chocolat ». Cette passion pour le chocolat provient de l’héritage laissé par mon arrière-grand-père paternel qui était chocolatier à Lyon puis par mon père qui allait dénicher des tablettes extraordinairement aromatiques chez les meilleurs artisans chocolatiers. De jour en jour, je me forge la conviction que cet aliment prodigieux a le pouvoir de nous plonger dans un état de bien-être profondément sécurisant et ressourçant. C’est prouvé scientifiquement, le chocolat rend heureux !

De la gourmandise à la chocologie

J’ai compris que le chocolat n’était pas seulement une gourmandise, mais que sa dégustation était tout un art pour lequel mon savoir-faire pouvait opérer… Mes premières rencontres avec Jean-Paul Hévin, Pierre Hermé et Robert Linxe ont été

extraordinaires, de véritables déclics. Ils m’ont initiée à partir à la découverte « de mes propres sens » et à l’interprétation des saveurs du chocolat…

Chocologue, une profession unique au monde…

En mars 2024, j’ai fondé l’École de Chocologie et du Goût, la première école certifiante, dédiée à l’expertise du chocolat et à l’art de la dégustation. J’aime aussi participer à des jurys internationaux pour l’évaluation de chocolats. Je voyage beaucoup en Amérique du Sud, dans les plantations de cacao à la rencontre des producteurs. Le dialogue avec les exploitants agricoles ou les « chefs chocolatiers » est au coeur de mon métier.

La création de nouveaux accords

À travers ces rencontres et ces moments passés dans le secret des laboratoires et des ateliers de torréfaction, j’ai également découvert le bonheur de créer. Dès la première année, je me suis spécialisée dans la création de recettes sur-mesure et dans le développement de coffrets personnalisés pour les cadeaux d’affaires. Depuis, je travaille chaque année avec de nombreuses sociétés, notamment présentes dans les secteurs du luxe, de la cosmétique, de la finance et de la communication. Cette consécration est surtout l’occasion de stimuler sans cesse ma créativité par de nouveaux défis, pour imaginer les recettes et les présentations qui raconteront au mieux la personnalité de la marque. Un pur bonheur !

Une grande histoire d’amour et de partage

Le chocolat, c’est une preuve d’amour, une pause à déguster ensemble pour donner de la saveur à la vie. Comme je suis persuadée que la recette du bonheur est forcément une recette au chocolat, j’ai voulu réunir ici les recettes qui me rendent heureuse et que j’aime préparer pour ceux que j’aime.

Première partie

La chocologie

De la fève de cacao à la tablette

Le chocolat est fabriqué à partir du cacao qui est récolté dans les pays tropicaux. Tous les pays producteurs se situent sur la ceinture équatoriale, bénéficiant d’un climat chaud et humide tout au long de l’année. Ce sont les conditions optimales pour permettre au cacaoyer de se développer.

Voyage dans les plantations de cacao

Je vous propose de partir en voyage avec moi pour découvrir la récolte du cacao et les différentes étapes de fabrication. Je vous emmène au Mexique, où j’ai réalisé mon premier voyage en 2008. Je réalisais un de mes plus grands rêves, celui de rencontrer les cacaoyers, de découvrir les coulisses, de comprendre le chocolat dans sa globalité : de la fève à la tablette. Depuis, je pars tous les deux ans dans les pays producteurs (Mexique, Pérou, Équateur, Brésil, Venezuela) pour rencontrer les planteurs et découvrir les méthodes de récolte propres à chaque plantation. Après douze heures de vol, direction la ville de Comalcalco pour une immersion au cœur des cacaoyers.

Étape 1 : la récolte

Une plantation ressemble à une grande forêt où cohabitent, autour des cacaoyers, des bananiers, des manguiers, des caféiers et des fleurs tropicales. L’humidité et la chaleur sont agréables. Le cacaoyer fournit une première récolte entre novembre et février, et une seconde plus faible, entre mai et juillet. Les fruits du cacaoyer sont appelés « cabosses ». La cabosse apparaît sur l’arbre une fois que la fleur du cacaoyer a été fécondée. De couleur verte pendant les deux premiers mois, les cabosses prennent par la suite une couleur jaune-orangée, rougeâtre, voire pourpre. Elles ont une forme ovale (comme un ballon de rugby). Leur peau n’est pas lisse, et suivant les cabosses, elles peuvent être

cannelées ou bosselées. Elles poussent sur le tronc, de bas en haut, et sur les branches, tel un arbre de Noël enguirlandé. Le spectacle est magnifique. La fleur du cacaoyer est très délicate. Sur un cacaoyer se développent environ 40 000 fleurs par an qui donnent naissance à 400 cabosses, dont seulement une quarantaine pourront être récoltées et exploitées. Selon la variété du cacaoyer, l’arbre donne entre vingt et cinquante cabosses par an. Au rythme des cris des singes et des oiseaux, Alberto m’invite à me rapprocher d’un cacaoyer bien garni en fruits colorés. À l’aide d’une machette très coupante, il sépare une cabosse du tronc en veillant à ne pas abîmer l’écorce de l’arbre, ni les autres fruits à côté. Il me tend la cabosse que je saisis en m’amusant à évaluer son poids. Plus loin, un tas de cabosses m’interpelle par son extraordinaire diversité de couleurs. Le cacao est là, dans ces coquilles végétales d’une beauté à couper le souffle.

Étape 2 : l’écabossage

Alberto saisit une deuxième cabosse bien mûre, de la couleur d’une orange sanguine, et la fend en deux avec sa machette. La moitié de la coque se détache et laisse apparaître les fèves de cacao, enrobées d’une pulpe blanche et humide appelée « mucilage ». Cette pulpe est délicieuse, je savoure sa saveur sucrée et acidulée qui me rappelle le litchi. Une cabosse contient entre vingt et quarante fèves de cacao. Leur couleur à l’état cru est violette, plus ou moins foncée. La couleur prune des fèves de cacao va brunir au fil des étapes de la récolte du cacao et de sa fabrication. Une fois sorties, les fèves sont versées avec leur mucilage dans des seaux afin d’être transportées vers les bacs de fermentation.

Étape 3 : la fermentation

Devant les bacs de fermentation, l’odeur est presque insoutenable. Elle attaque mes narines avec l’impression d’un effet corrosif. Les fèves sont entreposées pendant trois à cinq jours dans ces grandes cuves en bois, recouvertes de feuilles de bananier. La fermentation est rendue possible grâce à l’oxydation du mucilage au contact de l’air. Le mucilage fermente et chauffe pour atteindre 43 oC. Les fèves sont brassées à la main tous les jours pour permettre une fermentation homogène. La fermentation est un processus complexe, mais capital pour obtenir un cacao aromatique et de qualité. Elle permet de bloquer le processus de germination des fèves et de diminuer leur astringence naturelle, tandis qu’apparaissent les premiers arômes du cacao.

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