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PROLOGUE

Le roi Vortigern descendit de cheval et ordonna à son escorte de rester en retrait.

Les hommes protestèrent : il n’était pas prudent de s’aventurer seul en territoire hostile. Les Pictes ravageaient la région à quelques milles au nord et les Saxons avaient débarqué sur les rives prochaines. Mais le roi demeura inflexible. Les soldats n’osèrent insister. Ils connaissaient assez leur souverain pour savoir qu’on risquait la mort en le contrariant.

L’homme suivit la longue route qui s’étirait depuis la rivière. Sur les côtés, des fossés parallèles délimitaient la voie. Pour le reste, la plaine était rase.

Au loin, l’horizon tranchait entre l’herbe jaune pâle et le ciel blanc d’automne. Au bout du chemin, on apercevait les cercles de pierres levées. Vortigern allongea le pas.

Bientôt, il dépassa un important talus et escalada la butte pour pénétrer dans le mégalithe. Il franchit ensuite un premier rideau de menhirs, sur lesquels étaient disposés d’imposants linteaux de grès. Les piliers avaient la hauteur de quatre hommes. On murmurait que des ogres avaient bâti cet ensemble jadis, avant d’être balayés par Brittys, le fondateur du royaume de Britannia.

À l’intérieur, une structure en forme de fer à cheval avait été bâtie en blocs de dolérite. Cette pierre bleue donnait à l’ensemble une aura surnaturelle. Le souverain s’arrêta au centre.

Bien qu’il ne montrât aucun signe d’impatience, le roi bouillait intérieurement. Le temps lui manquait et il n’aimait pas l’idée de laisser le camp à Vortimer, son incapable de fils, ne fût-ce que pour quelques heures.

Le cauchemar de la nuit précédente lui revenait, obsédant.

Dans ce rêve, il tentait d’ériger une immense tour qui touchait les nuages. Mais chaque fois que la construction était près de se terminer, elle s’écroulait à cause d’un tremblement de terre. Irrité, le souverain faisait creuser autour des fondations pour découvrir ce qui déclenchait ces secousses. Les ouvriers fouillaient profondément et déterraient un grand rocher plat. En le soulevant, on découvrait deux dragons qui se battaient à mort. L’un était rouge et l’autre blanc. L’affrontement durait longtemps avant que la créature pâle ne l’emportât finalement.

À ce moment, Vortigern s’était réveillé.

Quittant ces pensées, il leva les yeux vers la silhouette encapuchonnée qui venait d’apparaître devant lui.

– Te voilà, lança-t-il avec mauvaise humeur. Tu m’as fait attendre.

Aucune réponse ne vint. Le roi sentit la colère lui enflammer les veines, mais il se contint. Ces entrevues se passaient toujours de la même manière.

– J’ai fait un…

– Un rêve, compléta l’autre d’une voix sépulcrale. Je sais.

– Peux-tu l’interpréter ?

Un moment de silence passa tandis que la brise couchait les herbes dans la plaine.

As-tu bien trouvé les soldats que j’ai envoyés à ta rencontre ? reprit le souverain.

– Tu connais déjà la réponse. Ils sont là.

Du doigt, il désigna la pierre centrale du mégalithe. C’était un énorme bloc étendu, taillé dans du grès vert. Sur sa surface horizontale étaient assis une douzaine d’hommes enchaînés et bâillonnés. On les avait vêtus de cottes de mailles noires et de braies de la même couleur. Tous portaient un casque sombre à la visière relevée sur laquelle était fixé un masque d’argent. Malgré leur accoutrement effrayant, les prisonniers affichaient un air apeuré.

– Bien sûr, ce sont tous des volontaires, glissa le roi avec un sourire cruel. Je leur ai choisi un costume de guerriers sarmates que les Romains nous ont laissé avant de partir. De cette manière, ils seront plus convaincants.

Il les contempla et reprit après une courte pause :

– Maintenant, vas-tu me dire ce que signifie ce cauchemar ? J’ai besoin de savoir si je vais réussir à repousser les Pictes qui me pressent depuis le nord, ainsi que les Saxons qui viennent de poser le pied sur les côtes de Britannia…

Son interlocuteur ne broncha pas. Sa voix monta dans l’air, assourdie par l’épaisse capuche :

– Cette tour… Ton œuvre de conquête est menacée…

Vortigern pencha la tête sur le côté, comme il faisait toujours quand il réfléchissait. Ses longs cheveux raides, d’un blond tirant sur le roux, flottèrent doucement dans le vent.

– Si je comprends bien, cette tour que je bâtis en rêve représente ma domination sur Britannia. Et le dragon rouge, c’est moi. Cela me semble un peu facile, mais je veux bien te croire. Que dois-je faire alors ? Trouver le dragon blanc et me débarrasser de lui ? Je ne sais même pas de qui il s’agit !

– À cela, je peux répondre…

– Fais vite, mon temps est précieux ! dit-il d’un ton glacial.

Malgré l’exaspération du roi, la silhouette voilée ne se pressa pas :

– J’ai consulté les signes. Les présages ne sont pas clairs. Ta tour sera protégée par le sang d’un enfant sans père…

Le souverain eut un rictus incrédule.

– C’est tout ? Cela veut dire que je dois enfermer tous les enfants de la région qui n’ont pas de père ? Et faire couler leur sang ?

Seul le silence lui répondit. Vortigern se résigna dans un grognement.

– S’il le faut, après tout. Je vais donner des ordres… Maintenant, fais ce que tu as à faire.

La main de son interlocuteur s’éleva et Vortigern entendit une sorte de chant sortir de la bouche dissimulée. Alors, des colonnes de vapeur s’élevèrent tout autour de l’enceinte circulaire.

Le roi devina sans peine qu’il s’agissait du fameux Souffle du Dragon, le brouillard qui transportait une magie millénaire.

Les tourbillons de brume s’enroulèrent autour des piliers de pierre, masquant totalement le paysage. Le mégalithe était coupé du monde. Puis le brouillard convergea vers les prisonniers avec les ondulations d’un serpent. Ces derniers se débattirent et tirèrent vainement sur leurs liens. Le bâillon étouffait leurs hurlements de terreur.

La fumée blanchâtre pénétra dans les corps par les yeux, le nez, les oreilles. Il y eut des soubresauts, des frémissements d’agonie. Les victimes se renversèrent sur le sol et se tordirent de douleur.

Soudain tout s’arrêta.

Les derniers nuages s’évaporèrent et plus personne ne bougea.

– Pourvu qu’ils soient encore vivants, soupira le souverain. Sans quoi, il faudra tout recommencer.

Comme pour le rassurer, l’un des hommes se releva, le regard vide, les traits creusés. Ses chaînes tombèrent, brisées. Ses onze compagnons l’imitèrent bientôt.

Les douze cavaliers noirs se dressaient, immobiles, attendant les ordres. La chair noirâtre de leur visage pourrissait déjà.

– Ils sont parfaits ! se félicita le roi. M’obéiront-ils ?

– Tant que tu seras en vie, ils t’appartiendront, répondit la voix caverneuse. Une fois mort, ce sera toi qui leur appartiendras…

– Très bien, fit Vortigern sans relever la menace. Ils vont pouvoir commencer immédiatement à me servir : trouvez-moi tous les enfants sans père. Et tuez-les !

CHAPITRE 1

Le prince était beau et doux. Il souriait.

Ana regarda l’ogre qu’elle venait de terrasser. Elle ignorait comment elle avait réussi cet exploit mais le monstre était bel et bien mort.

– Venez, mon prince, dit-elle. Allons dans votre château. Nous pouvons nous marier maintenant.

Il ne parla pas mais se contenta de hocher la tête. Déjà des chevaux s’approchaient. Ils montèrent en selle et la chevauchée commença.

Soudain, elle sentit qu’elle glissait sur le côté. Elle essaya vainement de se rattraper aux rênes. La chute continua. Elle tombait, elle tombait, comme du haut d’une falaise. * * *

Ana fut réveillée d’un coup de pied dans les côtes.

– Debout, feignante !

Il lui fallut un moment pour émerger des brumes du sommeil. Peu à peu, elle revint à elle. Il faisait froid, elle avait faim et sentait mauvais.

– Dépêche-toi de te lever, insista sa mère en reniflant. Et va nous chercher à manger !

La jeune fille se redressa, encore confuse.

Autour d’elle, la vieille villa romaine que sa famille avait investie tombait en ruines depuis longtemps. Les plantes du jardin, mêlées aux abondantes fougères, redevenaient sauvages et le mur du fond s’était écroulé sous la pression des branches de chêne.

Les sept frères et sœurs dormaient dans l’ancien atrium, seul endroit où subsistait un pan de toit en tuiles qui les protégeait à peine des intempéries. Ana repoussa doucement le petit Bleïz qui s’était blotti contre elle à la recherche de chaleur, et lui caressa tendrement les cheveux. Son regard accrocha l’espèce d’autel taillé dans la paroi. Les dieux qu’on y adorait avaient été oubliés après le départ des Romains et plus personne ne connaissait ne fût-ce que leurs noms.

La jeune fille gagna le seuil de la demeure.

Le jour se levait à peine et la rosée faisait scintiller les feuilles dans les lueurs de l’aube. La villa se trouvait en lisière de la forêt, un peu à l’écart du village de Carduel.

Ana frissonna. Elle ramena ses cheveux et les cacha dans un chaperon de laine qui lui protégeait la tête et le cou. En réalité, elle voulait surtout dissimuler la mèche blanche qui contrastait avec sa crinière châtain et dont ses frères se moquaient.

Chaque respiration se transformait en un nuage de vapeur au sortir de sa bouche. Elle aimait ces heures où les siens ronflaient encore, entassés comme des brutes. Le monde alors lui appartenait.

Ses grands yeux verts admirèrent encore le soleil levant. Puis elle se mit en route vers les maisons paysannes.

Rapporter de la nourriture n’était pas une tâche aisée. On trouvait du miel dans les troncs creux, des champignons dans les sous-bois, mais Ana n’aimait pas quitter la clairière. On

pouvait dérober quelques galettes ou du beurre, mais les gens du village risquaient de les chasser de la villa. Quant à travailler, il n’en était pas question.

À quinze ans passés, la jeune fille ressemblait à un garçon trop frêle, avec ses braies, sa tunique serrée à la taille par une ceinture, et la capuche qui dissimulait sa chevelure. Cela lui convenait car elle évitait ainsi les tâches les plus rudes, ainsi que le sort de ses sœurs qui devaient parfois se vendre aux cavaliers de passage. Mendier ne servait à rien auprès de gens aussi pauvres qu’eux. Il ne restait plus qu’à espérer un riche voyageur qu’on pourrait détrousser.

– Ana !

Tout à ses réflexions, elle avait dépassé les premières habitations de bois et de chaume. L’homme qui l’interpellait, souriant derrière sa barbe noire, était Antor le forgeron. Ana l’aimait bien. Elle s’arrêta.

– Comment allez-vous ?

L’homme rayonna. À trente ans passés, Antor n’avait jamais eu d’enfant. Sa première épouse avait accouché de nourrissons trop faibles pour survivre, jusqu’à ce qu’elle mourût en couches. Après son second mariage, le forgeron avait enfin engendré une descendance. Sur le sujet, il était intarissable.

– Ma femme se porte comme un charme et mon fils tète goulûment. Si le Merlin ne l’emporte pas, ce sera un fier gaillard… Du Merlin, on disait qu’il était issu de l’Autre Monde et qu’il venait la nuit enlever les nourrissons et les petites filles. Les parents racontaient ces fables aux enfants pour qu’ils se tiennent tranquilles. Chaque villageois possédait une anecdote à ce sujet : un fils avait disparu, un autre avait été retrouvé, les cheveux blanchis par la terreur.

En grandissant, on ne cessait pas de le redouter. Les paysans les plus superstitieux hésitaient à prononcer son nom. Dans la masure qu’il se plaisait à appeler auberge, Léodagan expliquait bravement à ses rares hôtes que, selon lui, le Merlin était un être à demi humain, à demi féerique, qui hantait les bois de Brocéliande, n’attendant qu’une occasion pour enlever les jeunes vierges et en faire ses épouses. Étonnamment, il avait cessé de débiter ce conte depuis qu’il avait eu une fille.

Les sourcils d’Antor se froncèrent soudain ; il dévisagea longuement la jeune fille.

– Quel âge as-tu ?

– Quinze ans, je crois…

– Il faudrait que tu manges pour t’étoffer. J’ai peut-être quelque chose pour toi dans ma huche…

Quand le forgeron se retourna pour appeler sa femme, Ana en profita pour partir. Elle ne voulait pas dépendre de sa générosité. Bientôt la famille de voleurs partirait vers un autre village en dérobant tout ce qu’elle pourrait.

Cette idée la mettait mal à l’aise, car bien des gens du coin, tels Léodagan l’aubergiste ou Lot le potier, s’étaient montrés bons avec elle. Même l’esclave Urien lui avait un jour offert la moitié de sa pomme.

Elle avança dans le petit village en songeant qu’il lui était impossible de revenir les mains vides à la villa. Une nouvelle fois perdue dans ses pensées, elle ne vit pas arriver un homme en sens inverse. Le remarquant au dernier moment, la jeune fille ne put l’éviter.

L’inconnu la bouscula sans broncher et continua d’un pas égal. Étourdie, Ana le suivit du regard, s’attardant sur ses épaules voûtées et ses cheveux blancs. Il marchait comme

un somnambule, s’aidant d’un bâton de voyage. Sans doute était-ce un fou.

En tout cas, un fou riche. Elle soupesa dans sa main la bourse qu’elle venait de lui subtiliser. Ses mains agiles de voleuse avaient opéré machinalement.

Au loin, quelques cavaliers noirs avançaient à leur tour sur la route, comme autant de dupes à dépouiller, mais il valait mieux ne pas trop tenter le sort.

Dissimulant son trésor sous sa tunique, la jeune fille rentra en hâte à la villa.

Tout s’était passé si vite qu’elle ne prit pas garde à éviter la maison d’Antor. Celui-ci ne manqua pas de la héler de nouveau, marchant à grands pas derrière elle.

– Attends !

Il lui tendit un bol qu’il tenait entre ses deux mains, comme un trésor. L’odeur de bouillon fit saliver la jeune fille. Son ventre se contracta douloureusement.

– C’est pour toi, dit le forgeron.

Ana aperçut un lardon qui flottait à la surface du potage. Elle leva les yeux vers l’homme, indécise.

– Mange tout, l’encouragea Antor. Tu en as grand besoin. Et puis, avec la guerre, on ne sait pas ce qui peut arriver. Je préfère que ce soit toi qui profites de cette soupe plutôt que tes parents…

Il avait un beau regard, plein de bonté. Alors, avidement, elle attrapa le bol et but à longs traits le liquide brûlant. Lorsque ses dents mordirent dans le bout de viande, gras, fondant, sa gorge nouée l’empêcha d’en avaler davantage.

Au même moment, la lourde bourse glissa de sa tunique et tomba à terre avec un cliquetis métallique.

Écarlate, Ana ne put éviter les prunelles sombres du forgeron.

Sa mine était réprobatrice mais il ne dit rien, détournant les yeux vers le ciel où de maigres sansonnets planaient en bandes.

– Ne t’attarde pas en route… C’est le premier jour de la Samain. Les portes de l’Autre Monde s’ouvrent souvent en cette période et ses créatures n’hésitent pas à les franchir…

Muette, la jeune fille ramassa prestement le fruit de son larcin et prit congé de son bienfaiteur. Elle foula les mottes craquantes du chemin qui la firent trébucher à plusieurs reprises.

La lumière blanche réfléchissait la couche de givre qui recouvrait les frondaisons de Brocéliande.

Ana arriva à la villa, essoufflée d’avoir couru. Les dernières paroles d’Antor résonnaient comme une menace à ses oreilles.

Lorsqu’elle entra dans le bâtiment désolé, sa famille était déjà debout, grelottante, au milieu de l’atrium. La mère, l’air mauvais, se tourna vers sa fille en reniflant.

– Où étais-tu, souillon, pendant que tes parents meurent de faim ?

Enveloppée dans une vieille peau d’ours, elle ressemblait à un animal sauvage. La matriarche huma l’air encore plusieurs fois. De sa main calleuse, elle attrapa le menton d’Ana et la souleva à demi.

– Tu sens la viande !

Ses doigts puissants comme des serres écrasaient les joues de la pauvre voleuse.

– Regardez-moi cette petite méchanceté, fit-elle en prenant les autres à témoin, qui dévore en cachette alors que la famille souffre famine ! J’espère que tu nous en as gardé un peu !

Ana réussit finalement à se dégager de l’étreinte de fer.

J’ai fait mieux !

Triomphante, elle présenta la bourse. Les yeux de la marâtre se plissèrent, filtrant seulement un ignoble éclat de convoitise.

Puis ce fut un désordre indescriptible.

Père, frères, sœurs se précipitaient pour arracher un morceau du butin. On repoussa Ana sur le côté. La lutte fut brève, mais féroce et le feutre trop fin du sac ne résista pas. Les pièces volèrent dans toute la salle, rebondissant sur les murs, roulant sur la vieille mosaïque. Les hurlements ne cessèrent pas pour autant. Des ongles rapaces se mirent à fouiller dans les débris à la recherche du précieux métal. Le spectacle évoquait des porcs creusant la terre pour en extraire les glands.

Pas un seul ne se tourna vers Ana. Tous grognaient de satisfaction à chaque fois qu’ils découvraient un nouveau denier.

– Mère… commença-t-elle.

– Et quoi ? coupa cette dernière. Tu veux ta part ? Mais tu as mangé sans nous en garder, donc…

Les autres se figèrent soudain. Dans la lumière rasante de l’aube, leurs iris pâles fixaient la jeune fille sans tendresse.

– Il n’y a aucune raison que nous partagions avec toi…

La marâtre fouilla dans sa paume ouverte, extrayant de la pile de monnaie un petit paquet qu’elle jeta négligemment à sa progéniture.

– Tiens ! Ça ne vaut rien : c’est tout ce que tu mérites !

Tous ensemble, ils éclatèrent d’un rire détestable et retournèrent à leur fouille. Seul le petit Bleïz lui lança un regard de ses grands yeux d’enfant affamé. Comprenant qu’elle n’obtiendrait rien de plus, Ana ramassa l’aumône qu’on lui avait accordée et quitta la pièce.

Dehors, l’air lui parut plus froid encore qu’à l’aube. Un soupir lui gonfla la poitrine. Si seulement elle avait pu être la fille d’Antor !

Elle aperçut, au creux de sa main, une étrange pile de cartes parcheminées. Contrairement à sa première impression, les petits rectangles étaient faits d’un cuir dur et fin, non de papier. En outre, ils comportaient nombre de signes dessinés au recto. À quoi pouvait-il bien servir ?

La voleuse alla s’asseoir à l’écart de la villa, non loin d’un rocher, dans l’herbe rase. Là, le soleil naissant avait déjà séché la rosée. Bleïz la rejoignit et se pencha par-dessus son épaule. Elle observa alors les images qu’arboraient certaines cartes.

Ana s’arrêta devant l’image d’un étrange vagabond qui se soutenait au moyen d’un bâton d’or. Contrairement aux autres figures, ce dernier était en mouvement. Un molosse cherchait à lui mordre les fesses, comme pour le chasser.

La voleuse n’eut guère le temps de songer à ce qui lui arrivait qu’une ombre glacée s’étendit autour elle. Un chien aboya dans le lointain.

Le voyageur qu’elle avait dépouillé se tenait debout, la dominant de toute sa taille. Armé d’un bâton, il paraissait jailli de nulle part, comme par magie. Le soleil timide qui scintillait dans sa chevelure l’auréolait d’un halo blanchâtre, irréel. Le visage barbu demeurait à contre-jour si bien que ses traits étaient indiscernables. Seuls ses yeux bleu-vert, mêlant les couleurs des rivières et des feuilles, brillaient d’un éclat mystérieux.

La poitrine de la jeune fille se serra sous l’effet de la peur. L’étranger qui lui faisait face ne pouvait être que le Merlin, échappé sans bruit de l’Autre Monde. Il désigna les cartes.

– Je crois que ceci m’appartient, dit l’homme d’un ton rogue.

Ana, quinze ans, détrousse les passants pour survivre. Mais, aujourd’hui, elle s’est attaquée à plus malin qu’elle : le mystérieux voyageur n’est autre que le légendaire Merlin. Et justement, l’enchanteur cherche une apprentie. Les règles du mage sont strictes, pourtant Ana tient bon. Ensemble, ils ont une mission : donner un nouveau roi à Britannia.

Mais en ces temps de guerre, quel seigneur est digne de brandir Excalibur ? Qui pourra rétablir la paix ? Fées et dragons sont les pièces d’un jeu de pouvoir dont Merlin lui-même ne connaît pas tous les enjeux. Ana pourrait bien en être l’atout maître, celle qui est destinée à changer les règles…

Et si l’un des plus grands mythes devait tout à Ana, la petite voleuse devenue apprentie enchanteresse ?

Prix TTC: 17,95 €

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