« Le rapport peut faire ressortir certains enjeux et permet, du même coup, d’accompagner la prise de décisions. Certains programmes peuvent, par exemple, être orientés en fonction de ceux-ci. »
— Emma Couture, responsable de la rédaction et de l’accompagnement des collaborateurs au (MELCCFP)
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Impression
Héon et Nadeau
LES FOURMIS
Qu’ont en commun les fourmis et les employés du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP)? L’abnégation et une capacité de travailler en équipe au profit d’une cause commune beaucoup plus grande que soi.
est l’image qui m’est venue en tête à la lecture du plus récent reportage du magazine Source. On y raconte le processus qui a mené à la production du plus récent Rapport sur l’état des ressources en eau et des écosystèmes aquatique du Québec, déposé en juin dernier. Un travail colossal.
Plus d’une centaine d’employés du MELCCFP (techniciens, biologistes, scientifiques, etc.) ont participé, d’une façon ou d’une autre, à sa réalisation. Chacun a contribué, selon sa spécialité, à la collecte et au traitement d’une montagne de données issues des différents programmes de suivi gouvernementaux. On m’a d’ailleurs chuchoté que ces tâches ont été réalisées de façon volontaire. C’est d’autant plus admirable que ce travail a permis d’établir des constats clairs sur la qualité de l’eau, la biodiversité et les écosystèmes du Québec.
Certains de ces constats sont encourageants, comme la diminution des risques que posent les pesticides pour les organismes aquatiques du lac Saint-Pierre. D’autres le sont moins : la qualité des cours d’eau en milieu agricole demeure préoccupante.
Au total, 24 indicateurs ont fait l’objet d’une analyse minutieuse et pointue. Une dizaine de directions du MELCCFP ont contribué à ce travail d’équipe. Au cours des deux années ayant précédé le dépôt du rapport, le ministère
André Dumouchel adumouchel@maya.cc
Chapeau bas !
Il faut reconnaître la qualité du travail accompli dans le cadre de cet exercice réalisé tous les cinq ans depuis 2014, comme le prévoit la Loi sur les ressources en eau du Québec.
La transparence dont a fait preuve le ministère mérite également d’être saluée, il me semble. Comme le souligne avec justesse le directeur général de la Fondation Rivières, André Bélanger, la détérioration de certains indicateurs peut dénoter l’échec de politiques publiques. Cette réalité fait bien partie du « polaroïd » du moment que trace le rapport à travers ses faits saillants.
Chapeau bas également au chargé de projet, Charles Mercier, qui ne s’est pas contenté de reproduire la recette du rapport précédent. Il aurait été facile de se limiter au minimum, mais l’équipe a plutôt choisi de tout remettre en question afin de sabrer un grand nombre de pages en élaguant le contenu, sans sacrifier la richesse et la pertinence de l’information.
Bien outillés
Le Rapport sur l’état des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques du Québec a l’avantage de donner l’heure juste. Sa publication tous les cinq ans permet en outre de suivre l’évolution de la situation. Un atout précieux pour les décideurs et pour quiconque s’intéresse un tant soit peu au sujet.
Ajoutons à cela la Stratégie québécoise d’économie d’eau potable, l’Atlas de l’eau et le Plan national de l’eau (également le fruit d’un travail d’équipe). Le gouvernement du Québec dispose désormais de solides outils pour protéger et préserver la ressource en eau.
En cette période où prolifèrent la désinformation, TikTok et les vidéos de chats, le rapport, malgré son allure un brin aride, n’en a que plus de valeur. Ce travail de moine offre aux milieux municipaux, gouvernementaux, universitaires et scientifiques des bases fiables et crédibles pour asseoir leurs recherches, leurs prévisions et leurs décisions. Sa valeur dépasse les mots !
Le défi, maintenant, est de le faire connaître et le démocratiser, ce qui en soi est une tâche tout aussi longue et ardue que sa conception. Mais les fourmis du ministère sont déjà à l’œuvre, et nous sommes fiers de leur rendre hommage dans notre plus récent reportage. Car faire découvrir le beau et le bon en environnement, c’est un peu ça, la mission de Source depuis 20 ans. n
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DANS LES COULISSES DU RAPPORT SUR L’EAU
L’eau a un grand pouvoir de mobilisation au ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP). Tellement que plus d’une centaine de personnes a collaboré à la plus récente édition du Rapport sur l’état des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques du Québec. Regard sur la production de ce document choral, diffusé en juin dernier.
Publié tous les cinq ans à l’intention notamment des décideurs et des acteurs québécois de l’eau, le rapport a pratiquement des allures de « bible de l’eau », illustre le chargé de projet, Charles Mercier, qui a supervisé le bon déroulement du projet. Il a été secondé dans cette tâche par Emma Couture, responsable de la rédaction et de l’accompagnement des collaborateurs.
Le duo a travaillé en étroite collaboration avec les techniciens, scientifiques, biologistes et autres spécialistes d’une dizaine de directions du MELCCFP. Chacun, dans son champ d’expertise, a apporté de l’eau au moulin.
Le rapport, explique Charles Mercier, vise à brosser un portrait clair et actuel des ressources en eau
et des écosystèmes aquatiques du Québec : état, tendances, pressions subies, possibles effets des changements climatiques. Inscrit dans la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et favorisant une meilleure gouvernance de l’eau et des milieux associés, le Rapport est produit tous les cinq ans depuis 2014. Cet exercice permet de suivre la situation au fil du
« Le rapport vise à brosser un portrait clair et actuel des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques du Québec : état, tendances, pressions subies, possibles effets des changements climatiques. »
— Charles Mercier, chargé de projet au MELCCFP
temps à partir des données et connaissances relatives à plusieurs indicateurs.
Ceux-ci donnent des informations sur la qualité de l’eau ainsi que sur la biodiversité et les écosystèmes. L’état trophique des lacs, les pesticides dans les cours d’eau en milieu agricole, l’état global de la physicochimie et de la bactériologie des tributaires du fleuve ou encore les plantes aquatiques exotiques envahissantes sont entre autres analysés.
« Le rapport peut faire ressortir certains enjeux et permet, du même coup, d’accompagner la prise de décisions, fait valoir Emma Couture. Certains programmes peuvent, par exemple, être orientés en fonction de ceux-ci. »
Course de fond
Pour Charles Mercier et Emma Couture, la production du récent Rapport sur l’état des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques du Québec a eu toutes les allures d’une course de fond. Le duo a d’ailleurs enfilé ses chaussures de course pratiquement deux ans avant la date de dépôt ciblée.
Le processus a démarré avec la révision des indicateurs, question de s’assurer qu’ils demeurent pertinents, explique le chargé de projet. Puis, les contacts ont été lancés avec les différentes équipes du MELCCFP responsables de l’acquisition, de l’analyse et de l’interprétation des
données environnementales essentielles à la production du document.
« Il faut voir ce que ces équipes ont en main comme données et ce qu’elles peuvent nous transmettre selon nos échéances, explique Charles Mercier. Ce contact initial est quand même assez long. »
Sous l’impulsion du chargé de projet, les mandats de rédaction et de révision ont ensuite été détaillés et confiés aux différents collaborateurs ciblés dans chacune des équipes. Un guide de rédaction leur a par ailleurs été fourni pour assurer une certaine uniformité pour la présentation du contenu.
« Comme c’est un travail de rédaction commun, on ne veut pas que ça parte dans tous les sens, fait valoir Charles Mercier. Chaque scientifique peut avoir sa façon de présenter les choses, mais ça ne parle pas nécessairement à tout le monde. Il y a donc un travail d’uniformisation et de vulgarisation à faire. Mais ils [les experts] ont tous vu qu’il y a une plus-value à présenter leurs informations d’une autre manière. »
Le grand manitou du rapport sur l’eau relève d’ailleurs que plusieurs collaborateurs de l’édition 2020 ont réitéré l’expérience en 2025. Le travail s’en est trouvé facilité.
Travail important
Lyne Pelletier, coordonnatrice de l’équipe du suivi et de l’évaluation de l’état des cours d’eau, est l’une des collaboratrices de la première heure pour la production du rapport. Bien que son rôle ait évolué avec les années, elle a participé aux éditions 2014, 2020 et 2025.
L’équipe qu’elle coordonne, composée d’une douzaine de professionnels spécialisés, a contribué à la rédaction de 11 des 24 fiches d’indicateurs et à près d’une dizaine d’encarts portant sur des sujets précis et d’actualité. Certains traitent, par exemple, des résidus miniers amiantés, des pesticides dans les eaux souterraines en milieu agricole et du portrait global du fleuve Saint-Laurent.
Selon Mme Pelletier, il s’agit d’un travail d’ampleur qui s’ajoute aux mandats courants et quotidiens de chacun. Mais le jeu en vaut la chandelle. « C’est un rapport qui présente différentes informations vulgarisées et qui permet d’avoir un regard juste et éclairé sur l’état de nos milieux aquatiques », affirme Lyne Pelletier, biologiste de formation et détentrice d’une maîtrise en sciences de l’environnement.
« Il met de l’avant le travail de chacun des experts et montre que l’acquisition de connaissances qu’ils réalisent donne accès à des informations vraiment importantes », renchérit Emma Couture.
En effet, la production du rapport est rendue possible notamment par l’existence des différents réseaux de suivi des lacs et des cours d’eau du Québec qui permettent au Ministère de suivre de près leur état.
On s’en doute, l’un des plus grands défis rencontrés en cours de route est de gérer tout ce beau monde en fin d’échéancier et de veiller à l’approbation de leur contribution respective, souligne Charles Mercier.
Au fil des éditions, dit-il, le contenu a par ailleurs été adapté pour répondre davantage aux intérêts du lectorat visé, soit les acteurs de l’eau. Le nombre d’indicateurs a également été revu à la baisse afin de prioriser ceux pour lesquels la
disponibilité et la représentativité des données sont les plus grandes, ajoute le chargé de projet.
Un important travail de synthèse a en outre été effectué afin de diminuer le nombre de pages, qui atteignait 500 en 2020. La nouvelle édition en compte 220.
« J’en avais fait un objectif personnel, relève M. Mercier. Quand on a trop d’informations, on peut perdre l’essentiel. C’était audacieux, quand même, de couper de moitié, sans supprimer d’informations pertinentes. Mais on a réussi. »
Le chargé de projet, qui a fait des études universitaires en environnement, éprouve une grande satisfaction personnelle à l’accomplissement de son travail.
« Ça me fait voir tellement de sujets. C’est fascinant, lance Charles Mercier. J’ai une formation, avec un baccalauréat et une maîtrise, plus généraliste. Et même si j’ai des connaissances dans le domaine, j’en apprends beaucoup en coordonnant l’ensemble des indicateurs. »
« Je trouve ça impressionnant de voir ce que tout le monde fait, poursuit-il. Ça me fait réaliser qu’il y a beaucoup de travail accompli sur les réseaux de suivi au ministère. Il y a beaucoup de gens derrière tout ça. »
QUELQUES FAITS SAILLANTS DE L’ÉDITION 2025 DU RAPPORT SUR L’ÉTAT DES RESSOURCES EN EAU ET DES ÉCOSYSTÈMES AQUATIQUES
= La population du bar rayé du fleuve Saint-Laurent se porte bien.
= Le risque que posent les pesticides pour les organismes aquatiques a diminué dans le lac Saint-Pierre depuis 2015.
= La qualité de l’eau des cours d’eau en milieu agricole est préoccupante.
= Une tendance à la détérioration est observée pour cinq des sept indicateurs spécifiquement liés au fleuve Saint-Laurent.
= Près de la moitié des espèces d’amphibiens et de reptiles dépendantes des milieux humides et hydriques sont en situation précaire au Québec.
= L’introduction d’espèces exotiques envahissantes aquatiques animales demeure un enjeu au Québec.
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REPORTAGE
Plutôt unique
Question de rendre cette manne d’informations digeste, une attention a par ailleurs été portée à l’aspect visuel du document, souligne le chargé de projet. La navigation y est « dynamique ». Il n’est donc pas nécessaire de lire le rapport de façon intégrale.
« Si ce qui vous intéresse porte, par exemple, sur les macroinvertébrés, vous pouvez accéder à la fiche souhaitée en trois clics », dit Charles Mercier.
Par ailleurs, les informations du rapport peuvent être complétées par celles de l’Atlas de l’eau, présenté sous forme de cartes interactives. Ces dernières sont mises à jour régulièrement pour actualiser les différentes connaissances sur l’eau.
De l’avis de Charles Mercier et d’Emma Couture, l’outil aurait peu de comparables. « Je fais partie du Bureau des connaissances sur l’eau et, dans une optique d’amélioration continue de nos outils, on fait beaucoup de recherches pour voir ce qui se fait ailleurs, relève M. Mercier. Selon ce que j’ai vu, il n’y a pas beaucoup de provinces qui font un rapport comme ça. Je pense qu’on est un des chefs de file en matière de transparence sur le travail de nos réseaux de suivi. »
« C’est un outil assez unique, opine Emma Couture. Mais la ressource en eau au Québec a également une place assez unique, notamment avec la mise en œuvre de la loi sur l’eau. »
Mentionnons aussi que l’actuelle structure du Rapport est inspirée du Portrait global de l’état du Saint-Laurent, auquel le MELCCFP adhère et contribue aussi largement.
Visibilité
Tout ce travail doit maintenant être partagé, estime pour sa part le coordonnateur responsable du Plan national de l’eau au MELCCFP, Patrick Émond. « Le défi est de faire connaître le rapport », dit-il.
Les données de l’édition 2020 du Rapport sur l’état des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques avaient déjà permis « d’alimenter les réflexions » dans le cadre du Forum d’action sur l’eau pour la production du Plan, adopté en 2024.
Dans la foulée du dépôt de la nouvelle mouture du rapport, au début de l’été, les résultats ont été présentés aux membres du Forum, qui proviennent des milieux municipal, environnemental, scientifique et économique.
« Je dirais qu’on a franchi une seconde étape dans la sensibilisation à l’existence de ce rapport, se réjouit Patrick Émond. On a gagné en crédibilité et en visibilité auprès des différents acteurs de l’eau. »
Cette adhésion est essentielle, croit-il, car le rapport est appelé à perdurer. « La longévité est d’ailleurs gage de sa pertinence », est convaincu M. Émond.
Autre signe de l’intérêt, voire de la réception positive, à l’égard du document : plusieurs membres du Forum d’action sur l’eau ont exprimé le souhait que le rapport fasse l’objet d’une présentation particulière à leur organisme, souligne M. Émond. « Ça fait des petits, tout ça », se félicite-t-il.
Les récentes informations du rapport n’ont d’ailleurs pas fini de rayonner. Elles pourront servir de matériau de base dans le cadre d’une réflexion que le Ministère souhaite réaliser l’an prochain sur l’intérêt de bonifier le Plan, indique Patrick Émond.
Selon lui, les résultats du rapport, de même que le suivi de l’avancement des cibles du Plan, seront deux intrants importants dans la réflexion à venir. « On va voir s’il y a des ajustements à faire et s’il y a des éléments à prioriser davantage », dit le coordonnateur.
INDICATEURS DE LA QUALITÉ DE L’EAU
= Communautés de diatomées benthiques dans les petits cours d’eau en milieu agricole
= Communautés de macroinvertébrés benthiques en substrat grossier
= Communautés de macroinvertébrés benthiques en substrat meuble
= Contamination des poissons par les toxiques en eau douce
= État trophique des lacs
= Métaux en cours d’eau
= Pesticides dans le lac Saint-Pierre
= Pesticides dans les cours d’eau en milieu agricole
= Physicochimie et bactériologie des cours d’eau en milieu agricole
= Physicochimie et bactériologie des masses d’eau du fleuve
= Physicochimie et bactériologie des tributaires du fleuve
= Qualité bactériologique de l’eau en rive du fleuve Saint-Laurent
« UN OUTIL VRAIMENT
PUISSANT »
Les directeurs généraux de deux organismes environnementaux, sondés par le magazine Source, saluent l’importance du travail réalisé par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) pour la production du Rapport sur l’état des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques. Et ils y vont au passage de quelques critiques constructives pour une prochaine édition.
« Il y a quelque chose de rassurant à voir que le ministère de l’Environnement est transparent dans le partage des résultats, affirme André Bélanger, de la Fondation Rivières. Parce que c’est aussi un échec des politiques publiques quand on voit qu’il y a une détérioration [de certains indicateurs]. »
« Je tire mon chapeau au ministère là-dessus, ajoute M. Bélanger. Il y a une transparence et une ouverture qui sont tout à son honneur. Je crois qu’il faut le souligner. »
Le document est bien fait et n’est pas avare de données, confirme de son côté Karine Dauphin, du Regroupement des organismes de bassins versants du Québec (ROBVQ). L’Atlas de l’eau se révèle par ailleurs un complément au rapport très pertinent et précieux, dit-elle.
Pour aller plus loin
S’il n’en tenait qu’à André Bélanger, le rapport pourrait néanmoins profiter d’une analyse un peu plus pointue des données. « C’est un outil vraiment puissant, dit-il. Mais le mandat devrait comprendre la mise en lumière des politiques publiques et des actions gouvernementales pour guider la prise de décision qui va suivre. »
Karine Dauphin abonde dans le même sens. « C’est bien de dire si ça va mieux ou pas, dit-elle. Mais, finalement, où on en est par rapport à ce qu’on veut atteindre ? Intégrer des objectifs, par rapport aux tendances, pourrait être bien. »
En ce qui a trait aux conclusions du rapport à proprement parler, M. Bélanger dit trouver « très inquiétante » la qualité des cours d’eau en milieu agricole. Celleci demeure préoccupante, a-t-il été conclu à la lumière des données recensées.
Mais la diminution observée du risque que posent les pesticides pour les organismes aquatiques du lac Saint-Pierre, grâce à de nouvelles exigences réglementaires et au travail du milieu agricole, incite André Bélanger à se questionner. Y aurait-il des leçons à tirer de l’évolution du lac Saint-Pierre pour aider les cours d’eau agricoles ? La réponse viendra peut-être avec le prochain rapport, dans cinq ans. n
Le rapport complet et sa version synthèse peuvent être consultés à l’adresse suivante : www.environnement.gouv.qc.ca/eau/rapport-eau/index.htm.
Ce reportage a été réalisé grâce à la participation financière du gouvernement du
INDICATEURS DE LA BIODIVERSITÉ ET DES ÉCOSYSTÈMES
= Atteinte des seuils de conservation pour le saumon Atlantique
= Biovolume de la végétation aquatique submergée dans le fleuve Saint-Laurent
= Degré de naturalité des écosystèmes aquatiques
= Écologie et biodiversité floristique en milieux humides
= Espèces floristiques en situation précaire
= État des populations exploitées en lac (doré, touladi, omble de fontaine)
= État des principales espèces exploitées du fleuve Saint-Laurent
= Indice d’introduction des espèces exotiques envahissantes aquatiques animales
= Plantes aquatiques exotiques envahissantes
= Population du bar rayé du fleuve Saint-Laurent
= Tendance des rangs de précarité des espèces d’amphibiens et de reptiles dépendantes des milieux humides et hydriques
= Tendance des rangs de précarité des espèces de moules d’eau douce indigènes et de poissons d’eau douce et migrateurs
Québec
Grégory Pratte Vulgarisateur, expert ISÉ et co-animateur de Ça Va Mieux Qu’on Pense greg.pratte@videotron.ca
vez-vous remarqué que l’on a manqué d’eau cet été ? Selon leur propre chambre d’écho, certains diront que oui, tandis que d’autres refuseront d’y croire.
Les derniers mois ont été chauds. Les précipitations ont été moins fréquentes, mais on a connu des épisodes de pluies diluviennes. À titre d’exemple, les pluies du 13 juillet 2025 ont battu un record vieux de plus de 154 ans dans la région métropolitaine. En résumé, on alterne entre des pluies torrentielles et des sécheresses, et ce phénomène provoque tout un stress hydrique.
Pourtant, les douches se prolongent dans plusieurs chaumières, on arrose abondamment son gazon pour éviter qu’il jaunisse, et certains poussent de petites roches sur leur entrée d’asphalte à grands coups de boyau. On devra donc un jour où l’autre mettre en place des mesures efficaces pour mieux gérer l’eau – celle qui tombe du ciel et celle qui circule dans nos infrastructures.
UN COÛT
CACHÉ
Parlons plus précisément de l’eau potable dans nos maisons. Comment faire comprendre aux citoyens qu’il s’agit d’une richesse à protéger? Parlant de richesse, à votre avis, combien vaut l’eau potable ? Quel est le prix que paie la collectivité quand un citoyen remplit sa piscine ou son spa? Le coût de l’eau est inclus dans les taxes municipales, ce qui donne l’impression qu’elle est gratuite.
Cette question est primordiale sur le plan des leviers de changement. Si l’on détermine que le mètre cube d’eau coûte 1,50 $ ou 2,50 $, il faut le dire et le répéter encore et encore. Pour modifier un comportement, il faut comprendre le « pourquoi ». Et ce pourquoi est différent d’une personne à l’autre. De toutes les époques, l’argent a été un levier de changement important : cela est particulièrement vrai à l’heure actuelle, où tout coûte plus cher. Alors, commençons par éduquer les citoyens sur le coût réel de l’eau.
« L’ÉDUCATION EST L’ARME LA PLUS PUISSANTE
POUR CHANGER LE MONDE. »
Si vous suivez mon contenu, vous savez que je parle régulièrement de l’importance de l’information et de la sensibilisation. Dans le dossier de l’eau, je suis d’avis que pour l’instant, il faut s’éduquer collectivement. Comment l’eau arrive-t-elle dans nos maisons ? Qui sait comment fonctionne une usine d’eau potable ? Qui en a déjà visité une ? Très peu de gens. Pourtant, 100 % des citoyens du Québec boivent chaque jour de l’eau potable, se lavent à l’eau potable, nettoient la vaisselle et cuisinent avec de l’eau potable et font leurs besoins dans de l’eau potable.
À l’école, on apprend à lire, à écrire et à compter, mais rarement à mieux consommer. Dès la maternelle et jusqu’à la fin du secondaire, on devrait donner des cours sur l’eau. On constate déjà le phénomène dans quelques écoles, mais ce devrait être plus répandu et mieux encadré.
Plusieurs municipalités ont choisi de prendre le taureau par les cornes en lançant des campagnes de sensibilisation. Je crois néanmoins qu’avant de passer à la sensibilisation, il faut partir de la base : l’éducation.
Je le répète,il s’en fait des choses au Québec en information, sensibilisation et éducation concernant l’eau. Cet été, la Ville de Prévost a lancé la campagne Eau que oui!, regroupant quatre programmes de subvention et plusieurs astuces pour mieux consommer. On a même eu droit à une campagne nationale Pensez Bleu. Je vois beaucoup d’initiatives locales, et certaines sortent du lot. Mais en existe-t-il qui sont vraiment efficaces ? Je l’ignore, car je n’ai jamais vu d’indicateur de performance de ces campagnes.
EN FINIR AVEC LES COUPS D’ÉPÉE DANS L’EAU
Et si l’on mesurait un peu le succès ? C’est connu : tout ce qui se mesure s’améliore. Imaginez si l’on se donnait des objectifs, comme réduire le nombre de litres d’eau consommés par foyer. Je sais, il faudra des compteurs d’eau, ce qui n’est pas toujours populaire. Je propose donc une autre cible : réduire la quantité de lingettes qui sont jetées dans les toilettes et qui se retrouvent à l’usine de traitement. On lance une campagne d’éducation avec un seul objectif précis – de grâce, pas une pléthore de messages du type « tant qu’à y être ». Un seul message, avec un seul objectif, et on mesure. Selon les résultats obtenus, on ajuste et on recommence.
Vous trouvez que mon affaire est intense ? Avez-vous vu la dernière publicité nous invitant à boucler notre ceinture afin de minimiser les blessures en cas d’accident si l’on roule trop vite après avoir bu notre sixième bière de la soirée ? Bien entendu, elle n’existe pas. C’est pour vous illustrer l’importance de mettre l’accent sur un message à la fois. Et en ce moment, dans les campagnes que j’ai vues au Québec, on semble tellement pressé d’agir que l’on veut tout dire en même temps. On émet tout plein de messages dans une même campagne et les citoyens finissent par ne rien absorber.
Bravo aux municipalités et au gouvernement pour toutes les initiatives mises en place. Peut-être que le temps des silos est révolu et qu’il faut travailler davantage en équipe. On a les moyens d’éduquer la société afin de mieux protéger, gérer et utiliser l’eau. Je crois qu’ensemble, on peut y arriver.
Pourquoi, encore aujourd’hui, plus de 44 % des Québécois croient encore que l’eau est inépuisable dans leur province ? J’ai pensé à ça une bonne partie de l’été et je n’ai pas la réponse précise. Peut-être qu’il est temps de cesser de jaser entre nous et d’aller poser la question aux citoyens. Passons du monologue au réel dialogue, et trouvons ensemble des solutions pour préserver l’eau du Québec, pour vrai, concrètement. n
À l’école, on apprend à lire, à écrire et à compter, mais rarement à mieux consommer.
GUIDE PRATIQUE POUR LES OUVRAGES DE GESTION
DES EAUX PLUVIALES
Celia Abbas Ing., M. Ing.
Chargée de projets
Responsable du conseil permanent Infrastructures souterraines et infrastructures de surface celia.abbas@ceriu.qc.ca
Les ouvrages de gestion des eaux pluviales sont indispensables pour limiter les risques d’inondation, protéger les milieux de vie et s’adapter aux changements climatiques. Pourtant, leur implantation suscite encore des réticences dans plusieurs municipalités. Pour aider à lever ces freins, le Centre d’expertise et de recherche en infrastructures urbaines (CERIU) prépare un guide concret et pratique sur l’acceptabilité sociale de ces ouvrages.
CONTEXTE
En 2022, le conseil permanent Infrastructures souterraines (CP-ISO) du CERIU a été interpellé par de nombreuses questions sur les freins à la mise en œuvre des ouvrages de gestion des eaux pluviales (OGEP) au sein des municipalités. Un sondage a alors été proposé pour cibler ces freins et, en concertation, déterminer des solutions adaptées.
Le sondage, auquel ont répondu plusieurs municipalités, a révélé un défi commun : l’acceptabilité sociale des OGEP. Après plusieurs échanges, le CP-ISO a décidé de lancer un projet afin d’élaborer un guide référençant les outils nécessaires pour faciliter leur intégration au sein des communautés. Cette publication s’adresse aux professionnels impliqués dans la réalisation de ces ouvrages et tient compte de la diversité des contextes municipaux, notamment en ce qui concerne la taille des collectivités et les ressources disponibles.
PARMI LES OBJECTIFS DU PROJET :
= Brosser le portrait des pratiques actuelles des municipalités québécoises en matière d’intégration et de gestion de l’acceptabilité sociale des OGEP, à partir d’un questionnaire provincial.
= Relever les pièges fréquents et les erreurs de gestion de projet qui nuisent à l’acceptabilité sociale afin d’aider les professionnels à mieux anticiper les résistances.
= Sensibiliser et outiller les acteurs municipaux pour structurer des démarches relationnelles efficaces, en amont et en aval des projets, afin de favoriser l’adhésion des parties prenantes.
CONSTATS ET ENJEUX ENTOURANT L’ACCEPTABILITÉ
SOCIALE DES OGEP AU QUÉBEC
Les changements climatiques accentuent la pression hydrique en modifiant le régime des précipitations au Québec, entraînant une augmentation des volumes de ruissellement, des débits de pointe accrus et une fréquence plus élevée des événements extrêmes. Dans ce contexte, un changement de paradigme s’impose. Il faut passer d’une gestion en aval à une approche en amont.
Les OGEP jouent un rôle clé dans ce cadre : loin d’être de simples aménagements esthétiques, ils permettent notamment de ralentir le ruissellement, favorisent l’infiltration, réduisent la charge sur les réseaux souterrains, préservent la qualité de l’eau et limitent les risques d’inondation et d’érosion. Cependant, malgré les nombreux avantages qui en découlent, l’implantation de ces ouvrages fait parfois l’objet de certaines résistances sur le plan social. Ces aménagements peuvent être mal compris ou perçus comme des projets imposés ou encore comme des sources de préoccupations pour la communauté.
Ces perceptions alimentent plusieurs réticences liées à leur utilité, à des contraintes organisationnelles, à l’influence du type d’ouvrage, à leur intégration
dans le milieu de vie ou encore à leur coût. À cela s’ajoute la crainte que ces ouvrages ne soient pas bien entretenus avec le temps, ce qui pourrait réduire leur efficacité et nuire à leur image. Ces éléments, lorsqu’ils ne sont pas pris en compte, peuvent freiner l’adhésion de la population et ralentir la mise en œuvre des projets.
Ces différentes inquiétudes mettent en lumière le fait que l’acceptabilité sociale dépend largement de la manière dont les projets sont présentés et gérés auprès des parties prenantes. Les citoyens souhaitent généralement comprendre les bénéfices concrets pour leur milieu de vie, être rassurés quant aux répercussions potentielles et voir leurs préoccupations prises en considération. Des éléments comme la participation dès les premières étapes de la planification ou encore l’assurance d’un entretien à long terme contribuent fortement à renforcer la confiance et l’adhésion.
INTÉGRATION DE L’ACCEPTABILITÉ SOCIALE
DANS LES PROJETS MUNICIPAUX D’OGEP
Un guide est en cours de développement au CERIU, s’appuyant sur une collecte de données auprès des municipalités et se basant sur des connaissances existantes sur les bonnes pratiques en matière de participation publique et de gestion de l’acceptabilité sociale des projets.
Le guide Outils pour réussir l’acceptabilité sociale des ouvrages de gestion des eaux pluviales au sein des municipalités propose des outils concrets et éprouvés pour aider les acteurs municipaux à intégrer l’acceptabilité sociale tout au long du cycle de vie des projets d’implantation des OGEP.
Parmi ceux-ci, on trouve la cartographie et l’analyse des parties prenantes, qui permettent d’identifier clairement les acteurs concernés, de comprendre leurs profils, intérêts et préoccupations, et ainsi d’adapter les démarches de communication et de consultation de manière ciblée. Cette analyse, qui tient compte des caractéristiques sociodémographiques, des inquiétudes potentielles, des effets individuels, des attentes locales ainsi que des canaux de communication privilégiés, offre une vision fine du tissu social et des dynamiques locales. Elle facilite ainsi l’anticipation des risques d’opposition, l’adaptation des messages et l’élaboration de stratégies d’engagement en phase avec les réalités du terrain.
Le guide met également en lumière l’importance des bonnes pratiques relationnelles qui accompagneront chaque étape du cycle de vie du projet, de l’initiation jusqu’au suivi post-implantation. Il propose une liste de vérification permettant aux équipes municipales de s’assurer que les enjeux sociaux et humains sont intégrés tout au long du projet : sensibiliser et outiller les employés dès l’amorce du projet, intégrer les besoins du milieu et planifier la communication, informer des répercussions et gérer celles-ci durant l’exécution, accompagner l’appropriation lors de la mise en service, puis maintenir un dialogue et un suivi participatif à long terme. En structurant ainsi leur démarche, les municipalités augmentent leurs chances de succès et favorisent une acceptabilité sociale durable.
Le guide explore plusieurs autres outils pratiques qui seront à découvrir lors de sa publication, laquelle est prévue prochainement, offrant aux municipalités des ressources complémentaires pour renforcer l’acceptabilité sociale des OGEP. Une formation en ligne basée sur ce guide sera offerte en décembre 2025. n
Pour en savoir plus Centre d'expertise et de recherche en infrastructures urbaines (CERIU). Guide – Outils pour réussir l’acceptabilité sociale des OGEP au sein des municipalités.
CClément Cartier Ing., Ph. D. Directeur des ventes chez Brault Maxtech inc. clement.cartier@braultmaxtech.com
et été, au Québec, les aléas climatiques combinés à une forte demande en eau ont engendré une pression majeure sur les prises d’eau de plusieurs municipalités, particulièrement celles alimentées par des puits. Malgré ce contexte, le Québec demeure un champion mondial de la consommation d’eau. Ailleurs, l’eau est considérée comme une ressource précieuse, et sa réutilisation est devenue courante. Cet article trace le portrait d’une approche qui pourrait s’imposer ici plus rapidement qu’on ne le pense : le recyclage de l’eau usée.
DEUX TYPES DE RECYCLAGE
On distingue deux types de recyclage de l’eau usée :
= La réutilisation non potable, souvent en réseau séparé (irrigation, usages industriels, arrosage des espaces verts, chasse d’eau), qui permet d’ajuster le niveau de traitement selon l’usage visé.
= La réutilisation potable, directe ou indirecte, avec restitution dans une ressource (nappe, réservoir) avant le traitement final. Dans ce cas, le recyclage de l’eau devient un intrant principal de l’usine de production d’eau potable et contribue à sécuriser l’approvisionnement.
RÉGLEMENTATIONS QUÉBÉCOISE ET CANADIENNE
Ni le Québec ni le Canada n’ont de réglementation proprement dite sur le recyclage de l’eau usée. Certaines balises concernent néanmoins la réutilisation de l’eau pour des applications non potables.
Santé Canada a publié des lignes directrices pour l’eau recyclée domestique destinée aux toilettes et urinoirs. De la même manière, le Code national de la plomberie et le Code de construction du Québec intègrent la conception des réseaux d’eau non potable en s’appuyant notamment sur la norme canadienne.
En agriculture, l’encadrement de l’eau d’irrigation des fruits et légumes relève entre autres de la salubrité alimentaire. Ainsi, l’Agence canadienne d’inspection des aliments rassemble les exigences propres à chaque culture. Il est essentiel de cibler tout risque de contamination. Plus le contact avec les parties comestibles est direct, plus les exigences de qualité sont élevées. Par exemple, l’eau servant à l’arrosage des aliments peut exiger une désinfection UV, alors qu’un arrosage par goutte-à-goutte enterré ou au pied des aliments n’en demandera pas nécessairement.
Seule la Colombie-Britannique dispose d’un règlement complet sur le recyclage de l’eau usée. Celui-ci inclut un guide détaillant les classes d’usages, les exigences de qualité (ex. coliformes fécaux, turbidité, désinfection) et les obligations de gestion en fonction du niveau d’exposition. Ce règlement prévoit une gradation de l’exposition (faible, modérée, forte) et des prescriptions adaptées pour limiter les risques en cas de contact. Même s’il ne s’applique pas directement au Québec, ce cadre a inspiré certains projets québécois et pourrait servir de modèle pour d’autres applications d’eau non potable, comme l’arrosage des espaces verts, la voirie et certains usages industriels.
AILLEURS
DANS LE MONDE
La situation est bien différente dans d’autres pays. Aux États-Unis, une réglementation complète encadre la réutilisation de l’eau depuis 2012. Certains États ont pris des initiatives spécifiques pour le recyclage de l’eau
usée en eau potable. En effet, en 2023, la Californie et le Colorado ont mis en place un cadre couvrant la conception et les exigences de suivi menant à plusieurs projets d’envergure, notamment à Orange County, Los Angeles et Las Vegas.
En Europe, une réglementation est entrée en vigueur en juin 2023 pour fixer des exigences minimales relatives à la réutilisation de l’eau en irrigation agricole. Elle précise les catégories de qualité, le suivi nécessaire et les règles concernant la gestion des risques.
À Singapour, jusqu’à 40 % des besoins en eau sont déjà comblés par la réutilisation des eaux usées, une proportion appelée à croître dans les prochaines années.
Enfin, en Israël, près de 90 % des eaux usées traitées sont réutilisées, principalement pour l’irrigation agricole, ce qui démontre la faisabilité de réseaux d’eau recyclée à grande échelle.
FILIÈRES ET OBJECTIFS DE PERFORMANCE
En fonction de l’utilisation visée – potable ou non potable –, les filières avancées de recyclage de l’eau combinent différents blocs de traitement. Ensemble, ils permettent une gestion efficace des pathogènes, des micropolluants, dont les polyfluoroalkylés (PFAS), ainsi que des goûts et des odeurs.
= Les prétraitements incluent le tamisage, la coagulationfloculation, la décantation, la filtration rapide ou la biofiltration (BAF) pour stabiliser les charges. On ajoute parfois l’ozonationfiltration biologique pour l’oxydation des polluants organiques.
= Les barrières membranaires par ultrafiltration sont une composante clé du procédé pour éliminer les protozoaires et les bactéries.
= Selon les sels et micropolluants présents, les traitements avancés peuvent s’ajouter. On peut recourir à l’osmose inverse pour retirer les sels dissous et/ou une oxydation avancée suivie de charbon actif pour éliminer les pesticides et certains PFAS.
= Le conditionnement comprend la reminéralisation, le contrôle du carbone organique total (COT) et de la conductivité ainsi que le suivi opérationnel.
L’efficacité de ces filières de traitement repose sur une approche de traitement par barrières multiples qui assure en tout temps une réduction maximale des agents pathogènes et des contaminants chimiques. Elles doivent aussi intégrer des capteurs en continu corrélés à la performance (turbidité, pression transmembranaire, COT, UVT, rédox, désinfectant résiduel).
Pour ce type de filières, il est essentiel de travailler avec des firmes spécialisées ayant l’expérience dans ce genre de projets et une expertise couvrant l’ensemble des étapes de la filière de traitement.
LE RECYCLAGE DE L’EAU COMME UN ATOUT POUR LE FUTUR
Même si ce n’est pas pour demain, il est important que la population québécoise comprenne mieux le concept du recyclage de l’eau usée. Lorsque de tels projets verront le jour, il faudra s’appuyer sur trois piliers pour en garantir le succès : l’éducation, la collaboration entre les paliers de gouvernement et la transparence des autorités responsables, comme ce fut le cas dans les projets à l’international.
À court terme, l’adoption de meilleures balises pour encadrer le recyclage de l’eau permettrait de sécuriser la ressource, de lancer des projets structurés à valeur ajoutée et de développer l’expertise locale en matière de recyclage de l’eau usée. Cette expérience pourrait ensuite offrir un tremplin vers la potabilisation, si l’occasion se présente.
Et si, après avoir été champion de la consommation, le Québec devenait champion du recyclage de l’eau? n
Installations au Québec : Sherbrooke, Mascouche-Terrebonne, Repentigny, Le Gardeur, Prévost, Ste-Marianne, L’Assomption, Magog, Ste-Sophie, L’Epiphanie, Asbestos, Ste-Julienne, St-Zotique, Valleyfield, RAEVR, St-Placid. + de 2 000 installations à travers le monde.
CADRE RÉGLEMENTAIRE
ZONES INONDABLES
LMe Thibaud Daoust Avocat associé, LL. B. Daigneault, avocats inc. thibaud.daoust@daigneaultinc.com
es inondations de 2017 et 2019 ont marqué la population québécoise.
Leur intensité a aussi entraîné une vaste réforme de la législation et de la réglementation encadrant la gestion des zones inondables. Celle-ci s’est amorcée en 2021, par l’adoption d’un régime provisoire1. Le 11 juin 2025, le gouvernement du Québec a rendu public son nouveau régime de gestion des zones inondables, désigné comme le Cadre réglementaire modernisé. Ce cadre remplacera définitivement le régime provisoire en place depuis quatre ans. Il prévoit notamment l’adoption de trois nouveaux règlements et des modifications de fond à quatre règlements connexes. Il entrera en vigueur le 1er mars 2026. Dans les lignes qui suivent, nous soulignons quelques aspects clés de ces trois nouveaux règlements.
RÉGIME D’AUTORISATION MUNICIPALE
L’un des trois nouveaux règlements introduits par le Cadre réglementaire modernisé est le Règlement sur l’encadrement d’activités sous la responsabilité des municipalités réalisées dans des milieux hydriques et sur des ouvrages de protection contre les inondations 2. Il remplace le Règlement concernant la mise en œuvre provisoire des modifications apportées par le chapitre 7 des lois de 2021 en matière de gestion des risques liés aux inondations 3 .
Certes, comme son nom l’indique, ce règlement officialise la responsabilité des municipalités locales dans la délivrance de permis préalables à la réalisation d’activités en milieux hydriques et sur les ouvrages de protection contre les inondations. Cela concerne, par exemple, la construction de chemins et d’ouvrages de stabilisation en littoral et en rive. Bien que la plupart de ces activités soient liées aux usages résidentiels, certaines peuvent aussi s’appliquer à des bâtiments ou à des ouvrages de toute nature.
Le règlement établit également des normes et des interdictions générales applicables à ces activités, même lorsqu’aucun permis municipal n’est requis. Les municipalités sont responsables d’en assurer le respect. Le régime de permis municipal s’ajoute au régime d’autorisation ministérielle prévu par la Loi sur la qualité de l’environnement, sans toutefois le remplacer. Aussi, pour les mêmes travaux, un permis municipal et une autorisation ministérielle pourraient être requis simultanément.
Enfin, le quatrième chapitre du règlement crée le régime des plans de gestion des risques liés aux inondations, un nouvel outil de planification à la disposition des municipalités régionales de comté. Cet outil leur permet de gérer et de contrôler l’aménagement du territoire dans certains types de zones inondables. Il est toutefois strictement encadré par le règlement et soumis à l’approbation du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation afin d’éviter tout développement incontrôlé en zone inondable.
OUVRAGES DE PROTECTION CONTRE LES INONDATIONS
Le Règlement sur les ouvrages de protection contre les inondations4 est également un nouvel outil réglementaire introduit par le Cadre réglementaire modernisé. Il vise essentiellement à fixer des normes de conception, de performance, d’entretien et de surveillance applicables à l’ensemble des ouvrages permanents de protection contre les inondations.
Il prévoit notamment que les municipalités locales doivent réaliser des plans particuliers visant à décrire les ouvrages de protection présents sur leur territoire, les défaillances possibles de ces ouvrages ainsi que les secteurs les plus vulnérables. Ces plans doivent également prévoir les procédures d’alerte et d’évacuation en cas de défaillance.
L’un des objectifs du règlement est de brosser un portrait complet des ouvrages de protection contre les inondations et de leurs faiblesses, tout en assurant une uniformité dans leur entretien, leur performance et leur qualité.
ZONE TRANSITOIRE
Parallèlement à l’instauration du Cadre réglementaire modernisé, le gouvernement du Québec est en train de réviser et de mettre à jour la cartographie des zones inondables et des zones de mobilité des cours d’eau. Cette nouvelle cartographie viendra nécessairement augmenter le nombre de terrains privés inclus dans l’une ou l’autre de ces zones et, par le fait même, soumis aux restrictions particulières qui s’y appliquent.
Le troisième règlement adopté dans le contexte du Cadre réglementaire modernisé est le Règlement concernant les règles transitoires applicables en cas de changement à la délimitation des zones inondables et des zones de mobilité ainsi que celles applicables à la mise en œuvre des règlements instaurant un nouveau régime d’aménagement dans les zones inondables et encadrant les ouvrages de protection contre les inondations 5. Il prévoit les règles applicables aux activités projetées ou en cours lors de la modification de la cartographie et du cadre réglementaire.
Tout en reconnaissant la plupart des droits acquis découlant des activités amorcées ou autorisées avant les modifications de la cartographie ou du cadre réglementaire, ce règlement vient néanmoins en baliser et en limiter la portée. Cela concerne notamment les activités pour lesquelles des demandes de permis ou d’autorisation sont pendantes au moment de l’entrée en vigueur des nouvelles règles.
À la lecture des règlements adoptés et modifiés par le Cadre réglementaire modernisé, on constate une volonté claire de confier aux municipalités un rôle accru dans la gestion des risques liés aux inondations. Toutefois, il est permis de douter qu’elles puissent assumer efficacement et pleinement ces nouvelles responsabilités sans un transfert ou un partage adéquat des ressources financières et techniques de la part du gouvernement. n
1 Daoust, T. (2022, hiver). Nouveau régime d’autorisation municipale en milieux hydriques et zones inondables, Source, 18(1), p. 20.