Paperjam juillet 2021

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Ristretto #Entreprises

« Les entreprises ne veulent plus acheter asiatique» Jean-Luc Doucet, qui fabrique localement des masques virucides, s’insurge du manque de soutien des États qui prĂ©fĂšrent acheter des masques moins chers fabriquĂ©s en Asie.

PrĂšs d’un an aprĂšs la crĂ©ation de Family Concept, avez-vous concrĂ©tisĂ© vos objectifs ? D’un point de vue purement entrepreneurial, oui. Nous avons mis sur pied deux sites de production de masques et nous produisons dĂ©sormais des masques virucides. Malheureusement, les administrations d’État ne jouent pas le jeu et continuent d’acheter asiatique. C’est-Ă -dire ? Au contraire de l’Allemagne et des Pays-Bas, qui ont pris la dĂ©cision de passer des commandes, sur une pĂ©riode minimum de deux ans uniquement Ă  des productions nationales, la France, la Belgique et le Luxembourg regardent en premier lieu le prix.

la reconnaissance de l’État et de l’Administration française. AprĂšs, il faut aussi noter qu’aucune commune luxembourgeoise n’a achetĂ© des masques de chez nous. Vous avez Ă©galement ouvert un site de production au Luxembourg. Comment se porte-t-il ? On l’a mis en route le 21 dĂ©cembre dernier. Il se trouve Ă  Niederkorn. Nous avons une capacitĂ© de production de 250.000 masques par jour, mais le site tourne en capacitĂ© rĂ©duite avec une production de 80.000 masques par jour. Une particularitĂ© de vos masques est d’ĂȘtre virucide. C’est-Ă -dire ? On est quasiment les seuls en Europe Ă  faire des masques virucides inoffensifs. C’est-Ă dire que l’on injecte de l’acide citrique sur la matiĂšre bleue, puis on produit le masque. Ce produit, qui est un virucide, rend inactif le virus. Si le virus se met sur le masque, il devient inactif. D’autres font ce genre de masque, mais avec des produits solvants ou autres, et qui sont tout Ă  fait agréés.

À quel prix vendez-vous vos masques ? Pour les entreprises, nous sommes Ă  7 centimes par masque. C’est un tarif compĂ©titif et raisonnable. Mais face aux 3 centimes des masques chinois, c’est difficile. Surtout quand la Chine est en train de subventionner les fabricants de masques qui arrivent Ă  exporter. On peut comprendre que les États veuillent faire attention aux dĂ©penses
 Nous avons 15 salariĂ©s en France et 3 au Luxembourg. Il ne faut pas avoir fait l’Ena pour comprendre la rentabilitĂ© Ă©conomique, pour l’État, d’acheter un masque Ă  7 centimes qui est produit au niveau national contre un masque qui coĂ»te 3 centimes, mais qui ne ramĂšne ni charges sociales ni TVA ou ni impĂŽts, je l’espĂšre, sur les bĂ©nĂ©fices de l’entreprise. Vous avez rĂ©cemment pointĂ© du doigt la stratĂ©gie marketing ambiguĂ« des produits chinois, notamment en ce qui concerne le logo CE qui fait penser au logo CE pour « ConformitĂ© europĂ©enne »  Oui, alors que c’est China Execution, ou China Export... On voit des masques qui ne sont pas conformes, avec deux couches au lieu de trois. Il n’y a mĂȘme pas de filtre Ă  l’intĂ©rieur. C’est tout simplement honteux de comparer nos masques aux masques chinois. Vous faites revivre un ancien site sidĂ©rurgique de la rĂ©gion avec la rĂ©affectation des « Soufflantes », Ă  Longlaville. N’est-ce pas d’autant plus rageant de ne pas voir l’État jouer le jeu ? On revalorise le patrimoine et on crĂ©e de l’emploi en engageant des personnes qui Ă©taient au chĂŽmage en plus de produire au niveau national avec des prix compĂ©titifs. Le seul Ă©lĂ©ment qui manque, c’est

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L’acide citrique, pour rappel, c’est bien du citron ? Oui, c’est du citron. MĂȘme si un enfant s’amuse Ă  lĂ©cher notre masque toute la journĂ©e, il n’y a aucun risque. On voit que les mesures s’assouplissent de plus en plus et, bientĂŽt, on pourra se passer du masque. DĂšs lors, quel sera l’avenir de votre entreprise ? Je mise beaucoup sur le masque virucide Ă  destination du monde mĂ©dical, qui consommera toujours Ă©normĂ©ment de masques. Quelle clientĂšle visez-vous ? Les particuliers, les entreprises et les administrations. Les particuliers achĂštent nos masques sur internet depuis un peu partout en France. Les entreprises aiment aussi nos masques, car ils sont qualitatifs, et elles sont mĂȘme fiĂšres d’acheter des produits fabriquĂ©s en France, mĂȘme si cela coĂ»te 2-3 centimes de plus. Les entreprises ne veulent plus acheter asiatique. Le seul acteur qui ne joue pas le jeu, c’est l’Administration.

Jean-Luc Doucet fabrique des masques localement et regrette les achats en Chine par les administrations.

Interview JEREMY ZABATTA Photo MATIC ZORMAN


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