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Emploi et formation
Peur de lâĂ©chec
LES DANGERS DE LâAUTOCRITIQUE ET COMMENT Y REMĂDIER Signe avant-coureur de la dĂ©pression, lâautocritique sĂ©vĂšre fausse notre perception de la rĂ©alitĂ© et diminue nos chances de rĂ©ussite, assurent les experts. Explications.
«J
e ne travaille pas assez», «jâabandonne trop facilement», «je ne suis pas Ă la hauteur». Qui ne sâest pas dĂ©jĂ parlĂ© de cette maniĂšre? PersuadĂ©s que lâautocritique nous pousse Ă nous dĂ©passer et nous met Ă lâabri des «bulles dâexcĂšs de confiance», nous sommes trĂšs souvent nos critiques les plus fĂ©roces. Beaucoup se fĂ©licitent mĂȘme de cette auto-flagellation et arborent leur sĂ©vĂ©ritĂ© envers eux-mĂȘmes comme une LĂ©gion dâhonneur. «AprĂšs tout, si on ne se surveille pas, qui va le faire?» interroge Emma SeppĂ€lĂ€, auteure de «La piste du bonheur» (Ă©d. deboeck). Perdre ses moyens Câest oublier quâĂȘtre trop dur avec soimĂȘme nuit au bien-ĂȘtre psychologique et compromet la rĂ©ussite. «Lâautocritique prive lâindividu de son sens de lâinitiative, dĂ©truit le pouvoir de son imagination,
freine son individualitĂ© et lui vole son autonomie», assure NapolĂ©on Hill, auteur du best-seller «RĂ©flĂ©chissez et devenez riche». De son cĂŽtĂ©, Kristin Neff, professeure associĂ©e de dĂ©veloppement humain Ă lâuniversitĂ© du Texas, fait observer que lâautocritique est souvent un signe avant-coureur de la dĂ©pression. «Au lieu de motiver, elle empĂȘche dâessayer, de peur dâĂ©chouer.» Elle ajoute que, dans notre cerveau, deux systĂšmes sont en compĂ©tition: lâun cherche la rĂ©compense, lâautre craint lâĂ©chec. Or, la peur de lâĂ©chec, quand elle est excessive, se met directement en travers de la rĂ©ussite. Des recherches effectuĂ©es sur des athlĂštes ont ainsi dĂ©montrĂ© que la peur dâĂ©chouer peut faire perdre ses moyens au pire moment et inciter Ă abandonner face Ă un obstacle. «Câest lâexemple du coureur qui trĂ©buche (et ne se relĂšve pas) dans une course Ă laquelle il sâest prĂ©parĂ© depuis des mois.» Au travail, elle peut
Dans notre cerveau, deux systĂšmes sont en compĂ©tition: lâun cherche la rĂ©compense, lâautre craint lâĂ©chec. LDD
ĂȘtre si anxiogĂšne que lâon finit par tricher plutĂŽt que dâapprendre. Ainsi, une Ă©tude conduite sur des entrepreneurs intitulĂ©e «Take the Money or Run? Investorâs Ethical Reputation and Entrepreneursâ Willingness to Parner» montre que ceux qui ont excessivement peur dâĂ©chouer sont plus susceptibles dâaccepter un partenariat douteux avec un investisseur peu respectueux de lâĂ©thique. Le fameux «lĂącher-prise» A lâinverse, rien nâest plus utile Ă qui entreprend une action difficile que de mettre en veilleuse ses exigences. Pour poursuivre avec la mĂ©taphore sportive, citons le cas de Yannick Noah qui, en dĂ©cembre 1982, la veille dâune finale de tennis contre le TchĂšque Tomas Smid, Ă©tait sur la piste de dance dâune boĂźte de nuit toulousaine dans un Ă©tat dâĂ©briĂ©tĂ© avancĂ©. Contre toute attente, et surtout contre la sienne, le lendemain il gagne 6-3, 6-2,