LE EN QUESTION SOL
SHARROL MUKENDIKLAASS Lauréate de la bourse de sommellerie de la Fondation




GĂ©rard Basset de lâASI

SHARROL MUKENDIKLAASS Lauréate de la bourse de sommellerie de la Fondation
GĂ©rard Basset de lâASI
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Publication par : Association de la Sommellerie Internationale
Rédacteur, gestionnaire de contenu : Mark DeWolf
Directeur des partenariats et du marketing : Claire Berticat
Assistante marketing : Xeniya Volosnikova
Assistante administrative : Juliette Jourdan
Traduction : MichÚle Aström ChantÎme, Manuel Negrete
Conception / Mise en page : Carissa Botha
Photographie : ASI/HRVPROD, 123RF, Getty Images, iStock, Unsplash, Jean Bernard, Lucas FrazĂŁo, Laurence Mouton
Photo de couverture : Unsplash
Collaborateurs :
Mark DeWolf, Jaba Dzimistarishvili, Reeze Choi, Alice Feiring, Francisco Figueiredo, Doug Frost, Romain Iltis, Marylou Javault, Kevin Lu, Alex Maltman, Sotiris Neophytidis, Monika Neral, Sylvain Nicolas, LoĂŻc Pasquet, Heather Rankin, Clement Robert, Ronan Sayburn, John Szabo, Jo Wessels, William Wouters, Eric Zwiebel
Bureau exĂ©cutif de lâASI
Président : William Wouters
Secrétaire général : Nina Basset
Secrétaire général adjoint : Julie Dupouy-Young / Beåta Vlnkovå
Trésorier : Philippe Faure-Brac
Trésorier adjoint : Samuil Angelov
Vice-prĂ©sidente pour lâAsie et lâOcĂ©anie : Saiko Tamura-Soga
Vice-prĂ©sidente pour lâAfrique et le Moyen-Orient : MichĂšle Aström ChantĂŽme
Vice-prĂ©sident pour lâEurope : Piotr Kamecki
Vice-président pour les Amériques : Marcos Flores Tlalpan
Renseignements sur le magazine : Mark DeWolf, directeur du contenu de lâASI markdewolf@asi.info
Renseignements généraux : www.asi.info | info@asi.info
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Le changement climatique est Ă lâordre du jour, et la façon dont nous produisons le vin Ă©volue sans arrĂȘt, mais il y a une constante. Câest le sol. Comme nous le rappelle si Ă©loquemment Alice Feiring, lâune des rĂ©dactrices invitĂ©es de cette Ă©dition, ainsi que le gĂ©ologue Alex Maltman et John Szabo MS, il sâagit de la variable constante. Le monde du vin a connu des dĂ©cennies de manipulations et dâaltĂ©rations. Bien que ces vestiges de la pensĂ©e âscience contre natureâ subsistent encore, je suis heureux de dire que la grande majoritĂ© de la production de vin de haute qualitĂ© revient Ă des processus plus naturels, Ă la fois dans le vignoble et dans la cave. Il nâest donc pas surprenant que les sommeliers se soient ralliĂ©s Ă cette tendance, en intĂ©grant de plus en plus de vins durables, biodynamiques et naturels dans leurs cartes des vins.
Avec la prise de conscience du rĂŽle de la nature dans les vins que nous servons et dĂ©gustons, nous parlons de plus en plus du sol. Certains sommeliers identifient mĂȘme le sol sur leur vin et quelques-uns organisent mĂȘme leur carte en fonction du sol. La question est de savoir comment et dans quelle mesure le sol contribue au caractĂšre dâun vin. Nous connaissons et aimons tous de nombreuses rĂ©gions viticoles dont la rĂ©putation repose sur leurs sols. Avons-nous accordĂ© trop dâimportance au sol dans ces rĂ©gions ? Peut-ĂȘtre pas assez ? Attribuons-nous les bons attouts au caractĂšre organoleptique dâun vin en fonction de ce qui se passe sous la terre ? Devrions-nous accorder plus dâattention Ă ce qui se passe au-dessus du sol ? AprĂšs tout, le sol ne nourrit pas seulement la vigne, mais aussi toute la flore et la faune qui cohabitent avec elle. Comment cela se passe-t-il ? Dans cette Ă©dition, outre nos rĂ©dacteurs invitĂ©s, nous avons demandĂ© Ă des sommeliers tels que Reeze Choi (Chine), Romain Iltis (France) et Heather Rankin (Canada) de nous faire part de leur point de vue sur le lien entre le sol et ce qui se trouve dans le verre. Nous avons demandĂ© Ă dâautres de partager leur âamour de la terreâ en identifiant les vins quâils aiment et le sol dans lequel ils ont grandi.
Si lâon parle de lâinfluence du sol, ne faut-il pas aussi parler des racines qui transmettent les nutriments et qui sont peut-ĂȘtre finalement responsables de ce que lâon trouve dans le verre ? Peut-on parler dâinfluence du sol si les raisins ne sont pas cultivĂ©s de maniĂšre biologique ou biodynamique ? Peuvent-ils Ă©mettre le vĂ©ritable langage de la terre si les vignes ne sont pas enracinĂ©es ? Nous avons interrogĂ© Francisco Figueiredo, de lâAdega Regional de Colares, et LoĂŻc Pasquet, de Liber Pater, dont les opinions tranchĂ©es sur les vignes enracinĂ©es sont Ă la fois fascinantes et opposĂ©es sur ce sujet.
Il sâagit dâune Ă©dition qui, nous en sommes convaincus, suscitera la rĂ©flexion, voire le dĂ©bat. Comme le dit lâauteur français Joseph Joubert, âil vaut mieux dĂ©battre dâune question sans la rĂ©gler que de rĂ©gler une question sans la dĂ©battreâ.
âLe terroir peut ĂȘtre influencĂ© par lâagriculture, le climat et lâintervention de lâhomme. Cependant, la roche mĂšre est la seule constante que lâon ne peut nier. Câest le âcontrĂŽleâ du vin.â
Alice FeiringWilliam Wouters, PrĂ©sident de lâASI
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du 25 au 27 mai 2024 Ă VienneLe rĂŽle que joue le sol dans le caractĂšre final dâun vin est un sujet de plus en plus abordĂ© et dĂ©battu. Le sol âkimmĂ©ridgienâ de Chablis, la poussiĂšre de Rutherford Ă Napa, la Terra Rossa de Coonawarra, le sol volcanique du mont Etna en Italie et lâAlbariza de Jerez ne sont que quelques-uns des sols qui ont permis dâĂ©tablir un lien entre le caractĂšre dâun vin et le sol mĂȘme sur lequel ont poussĂ© les vignes qui ont nourri les raisins utilisĂ©s pour produire le vin. Lâexistence dâun âquelque choseâ ne fait aucun doute, mais on peut se demander dans quelle mesure la gĂ©ologie dâun vignoble y est pour quelque chose.
A-t-on accordĂ© trop dâimportance au sol ? Ou pas assez ? Peut-ĂȘtre avons-nous trop regardĂ© sous la terre et pas assez au-dessus. Quelle est lâimportance des champignons, des bactĂ©ries ou mĂȘme des rĂ©sidus de sol sur les peaux de raisin dans le caractĂšre dâun vin ? Une question pour un autre jour. La question de lâinfluence du sol nâa jamais Ă©tĂ© aussi pertinente, car les sommeliers du monde entier en sont venus Ă adopter le sol, lâintĂ©grant souvent dans leurs descriptions et commentaires dâun vin. Certains vont mĂȘme jusquâĂ classer leur carte des vins par terroir.
Alice Feiring, cĂ©lĂšbre Ă©crivain amĂ©ricain spĂ©cialisĂ© dans le vin, est lâauteur de The Dirty Guide to Wine, qui invite les lecteurs Ă relier un vin Ă sa source, Ă la terre mĂȘme dont il est issu. Alice Feiring estime que lâintĂ©rĂȘt dâorganiser une carte des vins en fonction du sol nâest pas nĂ©cessairement de renseigner le consommateur sur le vin, mais de lui permettre de poser les questions qui en dĂ©coulent. Comme elle le dit Ă propos du concept, âpourquoi pas ? Que cela renseigne ou non sur le goĂ»t, cela oriente le consommateur vers un vin de lieu, plutĂŽt que vers un raisin, et encourage les questions et la curiositĂ©. Et si le sommelier peut identifier un sous-sol, comme cela a Ă©tĂ© demandĂ© lors du rĂ©cent concours du Meilleur Sommelier du Monde de lâASI, cela lâaide Ă penser que les vins sont issus de plantes vivantes provenant dâun lieu.
Ce sentiment est partagĂ© par le Canadien John Szabo MS, qui dĂ©clare : âSi le personnel est compĂ©tent et bien formĂ© pour guider les clients, il peut certainement sâagir dâune façon utile dâaborder la prĂ©sentation des vins, qui suscitera la curiositĂ©, engagera la conversation et
Dans ce numĂ©ro dâASI Magazine, nous explorons le rĂŽle que joue le sol dans le caractĂšre des vins que nous chĂ©rissons. Alex Maltman, gĂ©ologue rĂ©putĂ©, qui de plus est un amateur de vin et lâauteur de nombreux articles visant Ă dĂ©noncer les idĂ©es fausses et les malentendus sur le rĂŽle du sol dans le caractĂšre dâun vin. John Szabo MS est, avec VĂ©ronique Rivest, le sommelier le plus connu du Canada et lâauteur de Volcanic Wines : Salt, Grit and Power, qui a Ă©tĂ© saluĂ© par la critique et a notamment reçu le prix AndrĂ© Simon du meilleur livre sur les boissons.
encouragera les gens Ă avoir une vision un peu diffĂ©rente du vin et Ă essayer quelque chose dâautre. Mais je pense que cela ne fonctionne que dans un environnement intime oĂč lâĂ©change entre le serveur, le sommelier et le client est attendu, et oĂč les convives viennent pour vivre une expĂ©rience, et non pour simplement manger et boire. Le vin est dĂ©jĂ suffisamment complexe, avec tant de rĂ©gions, de cĂ©pages, de producteurs et de millĂ©simes. Ajouter le type de sol Ă tout cela, pour un client qui veut simplement un bon verre de blanc, est contre-productif et dĂ©couragera presque Ă coup sĂ»r la consommation. Mais pour quelquâun Ă lâesprit ouvert, qui est prĂȘt Ă vivre une expĂ©rience et peut ĂȘtre guidĂ© par un serveur ou un sommelier bien formĂ©, un voyage dans le monde du vin vu sous lâangle du type de sol peut ĂȘtre une rencontre fascinante et mĂ©morable, qui pourrait bien lâamener Ă revenir pour une autre tournĂ©e.
Au contraire, le Dr. Alex Maltman, gĂ©ologue de renommĂ©e mondiale, dĂ©clare : âJe pense que la tendance est allĂ©e trop loin. Les roches et les sols des vignobles font certainement partie du tableau, car ils influencent le choix du porte-greffe, la mĂ©thodologie de culture, la gestion de lâeau, etc. Cependant, la tendance que vous mentionnez est que le sol est important, voire primordial, pour le goĂ»t du vin.
Je comprends parfaitement lâattrait et lâutilitĂ© de cette idĂ©e et jâaimerais beaucoup y adhĂ©rer, mais malheureusement elle me gĂȘne. Les affirmations ne disent jamais comment cela se produit, et nos connaissances scientifiques sur lâinteraction entre le sol et la vigne ne permettent pas de voir comment cela pourrait se produire, du moins dans la mesure indiquĂ©e.â
Pour une derniĂšre rĂ©flexion sur le lien entre le vin, le sol et la nature ellemĂȘme, nous avons demandĂ© Ă Alice Feiring, cĂ©lĂšbre Ă©crivain amĂ©ricain spĂ©cialisĂ© dans le vin, crĂ©atrice de The Feiring Line, la premiĂšre lettre dâinformation indĂ©pendante sur le vin naturel au monde, protectrice passionnĂ©e de lâauthenticitĂ© et de la diversitĂ© du vin, de nous faire part de ses rĂ©flexions.
ASI au Dr. Alex Maltman (AM) : En tant que gĂ©ologue et scientifique, vous (Dr. Maltman) avez clairement exposĂ© dans vos recherches lâimpossibilitĂ© pour les roches et minĂ©raux du sol dâĂȘtre absorbĂ©s par les vignes, et encore moins par les raisins, et enfin par le processus de fermentation jusquâĂ la bouteille. Expliquez-nous.
AM : Les racines de la vigne absorbent lâeau interstitielle du sol et les Ă©lĂ©ments qui y sont dissous, en particulier les quelque quatorze Ă©lĂ©ments chimiques (nutriments) - potassium, calcium, magnĂ©sium, etc. Les racines sont incapables dâabsorber les solides, les roches gĂ©ologiques et les minĂ©raux comme ceux dont les sommeliers aiment parler, tels que le granit, le schiste, le quartz, le silex, etc. qui sont des solides pratiquement insolubles. La vigne ne peut tout simplement pas les absorber. Lorsque de telles affirmations ont Ă©tĂ© soumises Ă des tests de dĂ©gustation Ă lâaveugle, elles nâont tout simplement pas tenu la route (de la connectivitĂ© entre le sol et le goĂ»t). La croyance, aussi passionnĂ©e soit-elle, nâest pas une preuve. Je crains que lâidĂ©e ne soit surestimĂ©e.
ASI Ă John Szabo : Ătes-vous dâaccord ou non avec le Dr Maltman ? John Szabo (JS) : Oui et non. Les roches sont composĂ©es de minĂ©raux. Lorsque les roches sâaltĂšrent, leurs constituants minĂ©raux entrent dans la composition du sol. Les ions minĂ©raux (atomes ou groupes dâatomes chargĂ©s positivement ou nĂ©gativement), solubles dans lâeau contenue dans le sol, deviennent alors accessibles au systĂšme racinaire des plantes, qui peuvent les absorber et les assimiler. Sans les minĂ©raux essentiels prĂ©sents dans le sol, comme le calcium, le magnĂ©sium, lâazote, le phosphore, le potassium et le soufre, câest-Ă dire les macronutriments, ainsi que toute une sĂ©rie de micronutriments supplĂ©mentaires (et lâeau dans laquelle ils peuvent se dissoudre), une plante ne peut pas pousser. La vigne doit donc absorber les minĂ©raux et les distribuer dans toute la plante lĂ oĂč câest nĂ©cessaire.
La vraie question est de savoir si ces minĂ©raux (organiques et inorganiques) affectent directement lâarĂŽme, la saveur et la texture dâun vin. Prouver lâexistence dâune relation directe entre la teneur en minĂ©raux du sol et lâarĂŽme/le goĂ»t du vin est source de complications, notamment en raison de la complexitĂ© de la transformation du raisin frais en vin et (comme indiquĂ© dans la question initiale) des multiples processus impliquĂ©s, tels que le dĂ©bourbage, la fermentation, la conversion malolactique, la prĂ©cipitation, les divers ajouts possibles, etc. Bien quâil soit assez facile de montrer que des sols diffĂ©rents produisent des vins avec des signatures chimiques diffĂ©rentes, des prĂ©curseurs aromatiques diffĂ©rents et des profils polyphĂ©noliques diffĂ©rents, il nâest pas exagĂ©rĂ© de dire que des sols diffĂ©rents produisent des vins avec des compositions diffĂ©rentes. Et Ă partir de lĂ , il nây a quâun pas Ă franchir pour dire que des sols diffĂ©rents produisent des vins aux profils aromatiques et texturaux diffĂ©rents, compte tenu de leurs compositions diffĂ©rentes. Une planĂšte pleine de preuves anecdotiques (de dĂ©gustation) Ă©tablit ce fait. Mais il est impossible (pour autant que je sache) de dire exactement quels minĂ©raux, comment ils interagissent avec dâautres molĂ©cules (organiques) et quel impact direct et/ou indirect ils ont sur les caractĂ©ristiques sensorielles du vin, Ă ce stade de la comprĂ©hension.
Il convient de rappeler que la plupart des minĂ©raux inorganiques nâont ni odeur ni goĂ»t - ils sont inertes (le soufre est la principale exception notable) et ne peuvent donc pas avoir dâimpact direct sur lâarĂŽme et le goĂ»t du vin. Votre vin ne peut pas avoir lâodeur ou le goĂ»t de lâardoise ou du basalte, car ces roches (minĂ©raux agglomĂ©rĂ©s) nâont ni odeur ni goĂ»t en elles-mĂȘmes.
ASI Ă Alex Maltman : Vous avez Ă©tĂ© citĂ© comme disant que âla prĂ©sence de ces nutriments dans le vin peut indirectement affecter une sĂ©rie de rĂ©actions chimiques et ainsi influencer nos perceptions
âLes racines sont incapables dâabsorber les solides, les roches gĂ©ologiques et les minĂ©raux comme ceux dont les sommeliers aiment parler, tels que le granit, le schiste, le quartz, le silex, etc. qui sont des solides pratiquement insolubles. La vigne ne peut tout simplement pas les absorber.ââ Dr. Alex
MaltmanDr. Alex Maltman
gustatives. Mais il sâagit dâeffets complexes et dĂ©tournĂ©s, bien loin de la gĂ©ologie du vignoble qui domine le vinâ. Cela signifie-t-il que le sol peut avoir un impact sur le goĂ»t, mĂȘme sâil est faible, et quâil ne faut pas rejeter le sol, mais ne pas exagĂ©rer son importance sur le caractĂšre final du vin ?
AM : Exactement. La gĂ©ologie du sol dâun vignoble rĂ©git sa structure, ses propriĂ©tĂ©s hydriques, son comportement thermique, etc. et peut donc influencer le dĂ©veloppement des prĂ©curseurs dâarĂŽmes dans les raisins en cours de maturation. La vinification transforme ensuite ces prĂ©curseurs en composĂ©s qui donnent au vin sa saveur. Donc, oui, de maniĂšre indirecte, la gĂ©ologie peut avoir une certaine influence sur le vin final. Mais on est trĂšs loin des affirmations de la tendance actuelle : âLe sol, et non le raisin, est la derniĂšre chose Ă savoir pour choisir un vinâ, ce genre de choses.
ASI Ă John Szabo : Une question similaire Ă la vĂŽtre, John, mais plus spĂ©cifiquement en ce qui concerne le lien entre le sol et le goĂ»t. La relation entre la composition du sol et le profil gustatif du vin nâest-elle quâune partie de lâĂ©quation ? Y a-t-il dâautres effets du sol, tels que lâimpact du sol sur la
concentration, les niveaux dâaciditĂ© ou mĂȘme dâautres processus chimiques en jeu qui conduisent Ă la perception de la saveur ?
JS : Je dirais que dâautres aspects du sol, autres que la composition minĂ©rale, ont un impact beaucoup plus important sur les caractĂ©ristiques sensorielles dâun vin. Le plus important dâentre eux est la capacitĂ© du sol Ă retenir lâhumiditĂ©. La disponibilitĂ© de lâeau est directement liĂ©e Ă la composition des baies et Ă la concentration des composĂ©s quâelles contiennent, qui Ă leur tour ont un impact direct sur des aspects tels que la couleur du vin (concentration dâanthocyanes dans le vin rouge) et la texture (concentration de tannins).
LâaciditĂ© et le pH peuvent Ă©galement ĂȘtre directement influencĂ©s par la composition du sol. Les sols riches en potassium, comme les sols volcaniques du comtĂ© de Lake, en Californie, en sont un excellent exemple. Comme le potassium est ce quâon appelle un tampon acide, et que son abondance dans les sols se traduit par une abondance dans le moĂ»t et finalement dans le vin, les viticulteurs ont beaucoup de mal Ă essayer dâajuster le pH (abaisser le pH Ă un niveau auquel le vin serait plus stable et moins sujet aux attaques bactĂ©riennes). Les tampons comme le potassium rĂ©sistent (neutralisent) Ă un changement de pH aprĂšs un ajout dâacide, ce qui rend presque impossible lâabaissement du pH (sans dĂ©verser des tonnes dâacide tartrique, ce qui nâest pas conseillĂ©).
Un contre-exemple peut ĂȘtre trouvĂ© Ă Santorin, en GrĂšce, oĂč les sols sont Ă©galement dĂ©rivĂ©s de matĂ©riaux volcaniques, mais dans ce cas pratiquement dĂ©pourvus de potassium. Les vins issus de ce climat mĂ©diterranĂ©en chaud et sec, avec des alcools finis de plus de 14 %, prĂ©sentent un pH incroyablement bas, parfois infĂ©rieur Ă 3, le genre de niveau que lâon attendrait dâun riesling de la Moselle.
Il sâagit dâaspects liĂ©s Ă la texture et Ă la sensation en bouche, qui nâont rien Ă voir avec le goĂ»t, mais pour moi, la texture dâun vin a une relation beaucoup plus directe et concrĂšte avec les sols viticoles que ses arĂŽmes
et ses saveurs. Ces derniers sont plus étroitement liés au cépage et au climat, à la météo.
ASI Ă Alex Maltman : Pensez-vous quâil existe dâautres facteurs importants qui dĂ©terminent le caractĂšre final, le âterroirâ, dâun vin ?
AM : La grande valeur du concept de terroir est quâil rassemble en un seul mot tous les facteurs multiples qui donnent de la distinction Ă un site et potentiellement Ă ses produits. Ces facteurs interagissent de maniĂšre dynamique et nous savons maintenant quâils peuvent varier de maniĂšre Ă©tonnamment complexe, mĂȘme dâun rang de vignes Ă lâautre, dâun millĂ©sime Ă lâautre, dâune saison Ă lâautre, voire dâune heure Ă lâautre de la journĂ©e. Câest donc un vĂ©ritable dĂ©fi que dâessayer de dĂ©mĂȘler tous les facteurs et dâĂ©valuer leur importance relative.
Pourtant, certains ont essayĂ©. Et invariablement, le sol ne figure pas en tĂȘte de liste. Les facteurs habituellement regroupĂ©s sous le seul mot de âclimatâ ont tendance Ă occuper une place importante, quâil sâagisse de la tempĂ©rature ou de lâintensitĂ© de la lumiĂšre. Par exemple, nous savons maintenant comment ces facteurs affectent des Ă©lĂ©ments tels que les mĂ©thoxypyrazines (notes vertes et herbacĂ©es) et la rotundone (poivre noir) dans certains vins de Shiraz. Mais quel sommelier va parler avec lyrisme de lâintensitĂ© de la lumiĂšre ultraviolette et des amplitudes thermiques diurnes ? La terre, elle, a le bon son viscĂ©ral !
ASI Ă Alex Maltman : Comment expliquez-vous la connectivitĂ© de caractĂšre entre les vins de Chablis, par exemple, si ce nâest pas le sol ? Est-ce le climat ou dâautres facteurs ?
AM : Dans le monde du vin, les anecdotes et les croyances ont la vie dure ! En fait, le climat est essentiel Ă Chablis, le producteur de vin tranquille le plus septentrional de France. Les meilleurs sites se trouvent Ă mi-chemin des pentes bien drainĂ©es, exposĂ©es de maniĂšre optimale au sud-ouest ; lâAOC initiale (1938) a dĂ©limitĂ© ces sites en tant que Grand Cru. Les sites ne coĂŻncident pas avec le sol mais avec une roche mĂšre sous-jacente intacte (la raison pour laquelle les pentes sont lĂ ) qui se trouve ĂȘtre dâun
Ăąge gĂ©ologique particulier. Dâautres pentes reposent sur ce mĂȘme substrat rocheux mais sont orientĂ©es de maniĂšre dĂ©favorable, de sorte que les vignes nây ont pas Ă©tĂ© classĂ©es ; en effet, certaines dâentre elles ne comportent aucune vigne, mĂȘme aujourdâhui.
Depuis le classement de 1938, si la dĂ©limitation de Grand Cru (qui ne couvre dâailleurs que 2% du territoire chablisien) est restĂ©e la mĂȘme, il existe aujourdâhui de nombreux sites dâAOC Chablis et de Premier Cru, sur des sols variĂ©s, dâĂąges gĂ©ologiques diffĂ©rents.
Si vous me permettez une petite digression, la plupart des amateurs de vin savent que les roches de Chablis se sont formĂ©es sur un ancien fond marin et quâelles contiennent de magnifiques coquillages fossilisĂ©s. Tout cela fait penser Ă la mer ! Câest pourquoi des Ă©lĂ©ments maritimes apparaissent souvent dans les notes de dĂ©gustation des vins de Chablis, comme une note iodĂ©e. Par exemple, âChablis - on peut presque mĂącher lâiodeâ ; â...beaucoup de caractĂšre chablisien, en particulier lâiodeâ ; â...cette note dâiode propre au Chablisienâ. Et, naturellement, câest liĂ© aux sols : âles coquilles dâhuĂźtres fossilisĂ©es donnent au Chablis sa saveur iodĂ©e uniqueâ, etc.
Il mâest apparu il y a quelques annĂ©es que, contrairement Ă de nombreux mots de dĂ©gustation, lâiode est bien caractĂ©risĂ©, câest un Ă©lĂ©ment chimique que lâon peut mesurer. Câest pourquoi nous avons analysĂ© des Ă©chantillons de sol et de feuilles de vigne provenant de sites de grands crus, ainsi que des vins de Chablis finis. Nous avons ensuite fait de mĂȘme avec des sols et des vignes de chardonnay poussant sur la colline de Corton, en Bourgogne. Pour le plaisir, nous avons Ă©galement analysĂ© des vins de chardonnay de supermarchĂ© provenant de Mendoza (Argentine) et de la Barossa Valley (Australie). Toutes les valeurs analysĂ©es pour lâiode Ă©taient minuscules dans les vins, et bien en dessous des limites de dĂ©tection gustative. Mais ce qui Ă©tait frappant - franchement surprenant - câest que toutes les valeurs les plus basses provenaient des Ă©chantillons de Chablis et les plus Ă©levĂ©es de ceux de Barossa. Vous voyez !
ASI à John Szabo : Vos recherches se sont concentrées sur les sols volcaniques. Pensez-vous que les vins issus de vignes poussant sur des sols volcaniques possÚdent une qualité qui les lie ?
JS : Question simple, rĂ©ponse complexe. Je vais vous donner une citation de mon livre qui explique lâidĂ©e gĂ©nĂ©rale :
Soyons clairs : il nâexiste pas de âvin volcaniqueâ. En revanche, il existe des vins issus de culture sur des sols volcaniques qui se dĂ©clinent en un arcen-ciel rayonnant et infiniment nuancĂ© de couleurs, de goĂ»ts et de saveurs. Ce que je veux dire, câest quâil nây a pas de vin volcanique au singulier, mais une grande diversitĂ©.
...malgrĂ© de grandes variations, il y a nĂ©anmoins quelques caractĂ©ristiques qui apparaissent avec suffisamment de rĂ©gularitĂ© dans les vins issus de sols volcaniques (mĂȘme si elles ne leur sont pas exclusives) pour conduire Ă des conclusions anecdotiques, sinon rigoureusement scientifiques. Ces caractĂ©ristiques dessinent grossiĂšrement le tableau qui est ensuite complĂ©tĂ© par les infinies subtilitĂ©s de chaque rĂ©gion, de chaque vin et de chaque millĂ©sime.
Tout dâabord, les vins issus de sols volcaniques se caractĂ©risent par une qualitĂ© gustative commune, parfois due Ă une forte aciditĂ©, presque toujours Ă une salinitĂ© palpable, parfois aux deux. Les sels minĂ©raux impliquant des Ă©lĂ©ments prĂ©sents dans le vin, comme le potassium, le magnĂ©sium et le calcium, ainsi que leurs partenaires molĂ©culaires dĂ©rivĂ©s de lâacide, comme le chlorure, le sulfate et le carbonate, ont Ă©tĂ© mis en cause (bien que dans les vignobles de bord de mer, il sâagisse souvent dâun simple chlorure de sodium provenant des embruns marins, et non des sols). Les sels minĂ©raux peuvent Ă©galement expliquer le goĂ»t vague, mais agrĂ©ablement amer, que lâon trouve dans certains vins.
Le deuxiÚme est leur caractÚre savoureux. Les vins volcaniques sont fruités, bien sûr, mais ils sont souvent accompagnés, voire dominés, par des arÎmes non fruités dans les gammes de saveurs terreuses et herbacées,
ainsi que par les nuances couvertes par le terme magnifiquement utile et multidimensionnel de minéralité et par toutes ses définitions variées. La minéralité et les vins volcaniques vont de pair.
Les meilleurs exemples, comme tous les grands vins, semblent avoir une autre dimension, ou du moins une dimension diffĂ©rente, une sorte de densitĂ© commune qui ne peut provenir que dâun vĂ©ritable extrait dans le vin, et non de lâalcool ou du glycĂ©rol, ou simplement des tanins et de lâacide. Câest une sorte de gravitĂ© en apesanteur, intense, lourde comme une plume, ferme mais transparente, comme un bouclier impĂ©nĂ©trable et invisible de saveurs qui sortent de nulle part mais ne sâimposent pas, elles sont juste lĂ et vous devez les contourner avec votre langue. Elle peut ĂȘtre granuleuse, salĂ©e, dure, peut-ĂȘtre mĂȘme dĂ©sagrĂ©able pour certains, mais indĂ©niable.
Bien entendu, le terme âterre volcaniqueâ nâest que lĂ©gĂšrement plus descriptif que le terme âfromageâ. Le fromage est fabriquĂ© Ă partir de lait, tandis que la terre volcanique est issue de matĂ©riaux volcaniques. Il existe des centaines de types de sols diffĂ©rents que lâon peut qualifier de volcaniques, mĂȘme si lâon sâen tient Ă ma dĂ©finition relativement limitĂ©e. Dans des endroits Ă©vidents comme le VĂ©suve, lâEtna, Santorin ou les Ăźles de MacaronĂ©sie - des endroits formĂ©s par des volcans - la nature volcanique de la terre est incontestable. Mais mĂȘme lĂ , la composition du sol varie Ă©tonnamment. MĂȘme les laves pures prĂ©sentent des variations de couleur en technicolor. Leur Ăąge varie de quelques jours Ă des dizaines de
millions (milliards) dâannĂ©es et leur structure chimique et physique est diffĂ©rente, allant de la roche pure au sable volcanique ou Ă lâargile ancienne altĂ©rĂ©e. Ce nâest que la pointe du volcan. Je nâai mĂȘme pas mentionnĂ© lâinterfĂ©rence de lâhomme sur la chimie et la structure des sols.
Il faudrait un livre entier (ou deux) pour dĂ©crire toutes les catĂ©gories possibles de sols volcaniques et lâimpact quâils ont sur le caractĂšre du vin !
ASI Ă Alex Maltman : Les vignerons ont longtemps cherchĂ© des sols adaptĂ©s aux diffĂ©rents cĂ©pages. Il y a de belles histoires de viticulteurs comme Josh Jensen en Californie qui ont cherchĂ© du calcaire, par exemple, pour cultiver du chardonnay et du pinot noir. Pensez-vous quâils se sont peut-ĂȘtre trompĂ©s dans leur approche ? Se pourrait-il que lâallĂ©geance historique au sol ait donnĂ© aux viticulteurs et aux sommeliers une vision romantique, plutĂŽt que scientifique, de la relation entre le sol et le profil aromatique dâun vin ?
AM : Je comprends parfaitement ce que vous voulez dire. Par exemple, jâai sous les yeux un tableau (que jâai souvent vu reproduit) qui comporte des colonnes pour diffĂ©rents cĂ©pages et des lignes pour des sols particuliers. Certaines cases sont cochĂ©es en gras pour indiquer les combinaisons âprĂ©fĂ©rĂ©esâ - Syrah et granit par exemple - tandis que dâautres cases sont vides, ce qui indique vraisemblablement les combinaisons Ă Ă©viter. Il semble donc que lâon dise que pour produire de la Syrah de qualitĂ©, il faut des sols granitiques.
Mais tout cela, comme le suggĂšre votre question, nâest-il pas simplement
le reflet de certains sites europĂ©ens classiques, en lâoccurrence la syrah qui prospĂšre sur les sols granitiques cĂ©lĂšbres du RhĂŽne septentrional ? Cela ne tient pas. La syrah sâĂ©panouit et donne des vins superlatifs sur des sols non granitiques du RhĂŽne septentrional : la CĂŽte RĂŽtie nâest pas granitique et lâHermitage a des sols autres que granitiques. Et inversement, Condrieu est composĂ© de granit mais nâest pas plantĂ© de syrah.
Ailleurs, mĂȘme en France, cela ne fonctionne pas (par exemple, le Gamay sur les sols granitiques du Beaujolais). Les vignes de syrah prospĂšrent Ă©videmment sur les sols granitiques des rĂ©gions de Swartland et de Paarl en Afrique du Sud, par exemple, mais elles prospĂšrent Ă©galement dans la rĂ©gion de Barossa en Australie, de Hawkes Bay en Nouvelle-ZĂ©lande et de la vallĂ©e de Yakima dans lâĂtat de Washington, oĂč il nây a pas de granit. Les vignobles des contreforts de la Sierra, en Californie, sont fiers de leurs sols granitiques, mais ici, câest le Zinfandel qui domine. Etc., etc., avec des arguments exactement similaires pour les autres soi-disant combinaisons idĂ©ales.
Et pendant tout ce temps, il y a cet âĂ©lĂ©phant dans la piĂšceâ dont on ne parle pas, Ă savoir les porte-greffes de la vigne. AprĂšs tout, ce nâest pas le Pinot Noir, par exemple, qui interagit avec le sol, mais les racines rĂ©sistantes aux pathogĂšnes sur lesquelles il aura Ă©tĂ© greffĂ©, presque certainement dâespĂšces diffĂ©rentes. Mais je ne vois pas les sommeliers sâenthousiasmer pour 1103 Paulsen, AXR1, 41B, 161-49 Couderc.
âIl faudrait un livre entier (ou deux) pour dĂ©crire toutes les catĂ©gories possibles de sols volcaniques et lâimpact quâils ont sur le caractĂšre du vin !â
â John Szabo MS
Dans une discussion qui se concentre si fortement sur la science du sol, ellemĂȘme un Ă©lĂ©ment constitutif de la nature, il peut ĂȘtre surprenant de constater le peu de place accordĂ©e Ă la façon dont un vin est Ă©laborĂ© et Ă son rapport avec la discussion en cours. La question de lâimpact du sol ne sert-elle Ă rien si les pratiques de vinification et dâĂ©levage ne sont pas naturelles ? Des levures cultivĂ©es aux nombreux additifs potentiels qui masquent et altĂšrent le goĂ»t, lâargument est-il muet si la mĂ©thodologie nâest pas interventionniste et non manipulatrice ?
Pour Alice Feiring, câest un sujet qui tient Ă cĆur. âLe terroir peut ĂȘtre influencĂ© par lâagriculture, le climat et lâintervention de lâhomme. Cependant, la base est la seule constante que lâon ne peut nier. Pour quâun vin transmette cette magie que nous appelons terroir, la vinification doit ĂȘtre aussi libre que possible dâingrĂ©dients et de procĂ©dĂ©s. MĂȘme sans ajouts, il suffit de choisir la mĂ©thode de vinification, câest-Ă -dire la rafle, lâextraction, la tempĂ©rature, lâĂ©levage, lâajout ou non de soufre, pour que le vinificateur dispose dâune multitude de variables et dâoptions avec lesquelles jouer.
Alice Feiring ne prĂ©tend pas ĂȘtre une scientifique mais, comme elle le dit ellemĂȘme, âquelquâun qui prĂ©tend Ă la connaissance empiriqueâ. Si elle reconnaĂźt que le sol nâa pas dâincidence sur lâarĂŽme ou la saveur, elle dĂ©clare : âJe pense quâil a une incidence sur la texture, en influençant la nature verticale ou horizontale de la sensation en bouche. Il mâarrive aussi de penser ou de ressentir de la salinitĂ©, bien que cela soit plus compliquĂ© car la salinitĂ© peut provenir dâun certain nombre dâautres facteurs. Ceci est soutenu par la recherche du scientifique Benoit Marsan....ConsidĂ©rer le vin uniquement dâun point de vue scientifique, câest considĂ©rer lâart uniquement par le biais de lâanalyse. Le vin a le pouvoir dâavoir un impact Ă©motionnel et expliquer son existence uniquement par la science limite son immense pouvoir de connexion avec les gens, le moment, et un peu de je ne sais quoiâ.
Si le sol est Ă la âracineâ (jeu de mots voulu) du caractĂšre du terroir, et la vinification naturelle un moyen de faire entendre sa voix dans un vin, il est certain que le porte-greffe doit aussi jouer un rĂŽle. Alice Feiring dĂ©clare : âJe peux mâavancer et dire que le choix du porte-greffe a un impact Ă©norme sur le vin, principalement liĂ© au rendement et Ă la rĂ©tention dâeau, Ă lâabsorption dâazote et de potassium... plus quâĂ la saveur et Ă la rĂ©sistance aux maladies. Câest peut-ĂȘtre la raison pour laquelle les vignes franches de pied, bien enracinĂ©es, lorsque câest possible, sont le Saint Graal, un lien direct avec le solâ.
Si le sol est la voix du terroir, cette voix sâaffaiblit-elle, voire se perd-elle, si les raisins ne sont pas cultivĂ©s sur leurs propres racines ? Pour le viticulteur bordelais LoĂŻc Pasquet, propriĂ©taire du Liber Pater (le vin le plus cher du monde), câest le cas. Sa dĂ©cision de planter des vignes non greffĂ©es repose sur le dĂ©sir de produire des vins de Bordeaux tels quâils Ă©taient Ă©laborĂ©s dans le passĂ©, mais aussi sur la conviction que le greffage sur des porte-greffes amĂ©ricains masque le terroir. Comme il le dit, âsi vous pouvez ĂȘtre non greffĂ©, vous avez le meilleur message du terroir parce que vous nâavez pas de filtreâ. LoĂŻc Pasquet reconnaĂźt que, dans certains endroits, il nây a pas de choix, mais dans le sien, il y en a un.
Francisco Figueiredo ne travaille Ă©galement quâavec des vignes franches de pied. Contrairement Ă LoĂŻc Pasquet, qui a dĂ©libĂ©rĂ©ment choisi de revenir Ă une Ă©poque oĂč les vignes greffĂ©es Ă©taient la norme Ă Bordeaux, Franceisco Figueiredo travaille dans une rĂ©gion, lâAOC Colares au Portugal, qui nâa jamais eu besoin de greffer, car son sol sablonneux lâa longtemps protĂ©gĂ©e du flĂ©au du phylloxĂ©ra. Francisco Figueiredo, qui est vigneron et viticulteur de lâAdega Regional de Colares, la coopĂ©rative locale, a grandi Ă Lisbonne et se rappelle avoir aidĂ© son pĂšre Ă faire du vin maison Ă partir du Ramisco de Colares. Aujourdâhui adulte, il est responsable de la majeure partie de la production de la petite AOC situĂ©e dans les limites de la ville de Lisbonne, bien quâil soit de plus en plus rejoint par une nouvelle gĂ©nĂ©ration de viticulteurs basĂ©s Ă Lisbonne qui cherchent Ă redonner Ă Colares sa gloire dâantan.
En ce qui concerne sa dĂ©cision de crĂ©er le projet Liber Pater, LoĂŻc Pasquet explique que lorsquâil a lancĂ© son projet en 2004, ânous (Bordeaux) avions perdu, Ă cause du phylloxĂ©ra, beaucoup de cĂ©pages indigĂšnes et le goĂ»t du vin de Bordeaux. Aujourdâhui, Ă Bordeaux, nous (les autres viticulteurs bordelais) produisons un vin qui ressemble Ă une soupe. Au dĂ©but du projet, je me suis demandĂ© quel Ă©tait le goĂ»t du vin avant le phylloxĂ©ra. Si nous comparons le Bordeaux dâaujourdâhui Ă celui de 1855, lâĂ©poque de la classification, le goĂ»t du vin dâaujourdâhui nâest pas le mĂȘme que celui dâalors. Aujourdâhui, il nây a plus de cĂ©pages autochtones, il nây a plus de francs de pied. Tout a changĂ©. Je me suis dit âsi je replante le vignoble comme il Ă©tait avant le phylloxĂ©ra, peut-ĂȘtre quâon pourra retrouver un goĂ»t trĂšs ancienâ.... Avant le phylloxĂ©ra, on parlait de Bordeaux comme dâun grand vin. Aujourdâhui, lorsque nous parlons de Bordeaux, nous disons quâil est corsĂ©, alcoolisĂ©,
les francs de pied sont-ils le Saint-Graal de la viticulture ?LoĂŻc Pasquet
âJe me suis dit « si je replante le vignoble comme il Ă©tait avant le phylloxĂ©ra, peutĂȘtre quâon pourra retrouver un goĂ»t trĂšs ancienâ.... Avant le phylloxĂ©ra, on parlait de Bordeaux comme dâun grand vin.â
â LoĂŻc Pasquet
extrait, etc.... Nous devons retrouver le bon vin de Bordeaux. En fait, le Bordeaux peut ĂȘtre totalement diffĂ©rent (plus lĂ©ger, plus frais) et trĂšs bon. Câest pourquoi jâai tout replantĂ© non greffĂ©â.
Dans lâAOC Colares, une mince bande de terre situĂ©e sur la cĂŽte atlantique, prĂšs de Sintra, Ă lâextrĂ©mitĂ© ouest de Lisbonne, peu de choses ont changĂ©. Il nây a jamais eu de modification des cĂ©pages qui y sont plantĂ©s. Le cĂ©page autochtone Ramisco, qui nâest cultivĂ© que dans lâAOC Colares, est lâun des rares cĂ©pages vinifera dâEurope Ă nâavoir jamais Ă©tĂ© greffĂ© sur un portegreffe amĂ©ricain. Si les sommeliers recherchent actuellement lâauthenticitĂ© dans leurs sĂ©lections de vins, cela nâa pas toujours Ă©tĂ© le cas. La faible teneur en alcool, lâaciditĂ© Ă©levĂ©e et les tanins fermes des vins rouges de Colares nâĂ©taient pas populaires dans les annĂ©es 1980, 1990 et mĂȘme au dĂ©but des annĂ©es 2000. ParallĂšlement Ă la demande croissante de transformation des vignobles en lotissements, la production de Ramisco sâest rĂ©duite Ă des volumes minuscules. Au dĂ©but des annĂ©es 2000, lâappellation Colares DOC a atteint son niveau le plus bas, avec
environ 12 hectares de vignes. Alors que les sommeliers et les consommateurs de vin se tournent vers des styles plus frais, le Colares est de plus en plus demandé.
Francisco Figueiredo se demande si le caractĂšre particulier des vins de Colares est dĂ» au fait quâil sâagit de vignes non greffĂ©es. Il explique que le Ramisco âdoit offrir des notes fruitĂ©es subtiles telles que la cerise acide ou la griotte, ainsi quâun certain caractĂšre balsamique, des tons boisĂ©s, une note iodĂ©e fumĂ©e, des tons de terre et de feuilles sĂšches en bouche, en combinaison avec une aciditĂ© trĂšs fraĂźche et un caractĂšre salĂ©, ce qui est assez rare dans les vins rougesâ. Cette salinitĂ© provient des vignobles, qui se trouvent parfois Ă 100 mĂštres de lâocĂ©an. Elle provient du microclimat. Une partie peut provenir du sol, qui Ă©tait Ă un moment donnĂ© sous la mer, mais je pense que ce caractĂšre est surtout le rĂ©sultat de lâinfluence de lâocĂ©an Atlantique sur les raisins eux-mĂȘmes.
âAlors que les sommeliers et les consommateurs de vin se tournent vers des styles plus frais, le Colares est de plus en plus demandĂ©.â
â Francisco Figueiredo
LoĂŻc Pasquet est plus dĂ©monstratif dans ses rĂ©flexions sur les vignes enracinĂ©es, en ce qui concerne le Bordeaux. Il dĂ©clare : âSi vous plantez des vignes non greffĂ©es, vous avez la meilleure façon de communiquer le message de votre terroir. Câest pourquoi il Ă©tait trĂšs important pour moi de replanter ces variĂ©tĂ©s sur un bon sol, sur leur propre porte-greffe (francs de pied)â. M. Pater prĂ©cise quâil ne serait pas possible de planter du Merlot dans des graviers ou du Cabernet Sauvignon dans de lâargile, sâils Ă©taient sur leurs propres portegreffes. Il explique que le greffage sur des porte-greffes amĂ©ricains permet aux viticulteurs de planter nâimporte oĂč, mais que la motivation nâest pas dâexprimer le terroir, mais dâexprimer le caractĂšre variĂ©tal, et quâen les mĂ©langeant, on obtient une sorte de soupe variĂ©tale. âSi vous voulez faire de la soupe variĂ©tale, câest facile. Vous greffez, puis vous dites que je veux 80 % de merlot, parce quâil est corsĂ©, quâil a de lâalcool, quâil a du sucre. Ensuite, on dit quâil faut 10 % de cabernet sauvignon pour ajouter de la structure. Câest comme ajouter des pommes de terre et des carottes Ă la soupe. Ensuite, vous dites que vous voulez du piquant, alors vous ajoutez 10 % de petit verdot. On peut faire ce vin nâimporte oĂč. Le message du terroir est unique, car il sâagit de votre terroir. Vous seul pouvez produire le vin (qui reflĂšte votre terroir). Câest pourquoi il est important de replanter de bonnes variĂ©tĂ©s, sur de bons sols, en utilisant des francs de pied. Câest pour cela que je nâai pas de Merlot ou de Cabernet Franc, parce que je nâai pas dâargile et je nâai pas de calcaireâ.
Parmi les cépages historiques uniques que Loïc Pasquet a plantés, en plus du cabernet sauvignon, on trouve le manchin (Tarney Coulant), le Castet, le Saint Macaire, la Pardotte, le Prunelard, le Camaralet et le Lauzet.
Fait remarquable, il plante également à une densité de 20 000 pieds par hectare, une pratique courante au XIXÚme siÚcle.
Quant Ă la crainte de voir le phylloxĂ©ra apparaĂźtre dans ses vignobles, il nâest pas inquiet car il dispose dâune terre arable composĂ©e de gravier et de sable. Ce qui lâinquiĂšte, câest âla loi, parce que la loi ne permet pas dâutiliser les variĂ©tĂ©s indigĂšnesâ. Pour ne parler que de Bordeaux, lâappellation ne sert quâĂ faire du vin industriel. Lâappellation nâest pas intĂ©ressante, parce quâil nây a pas de libertĂ©. Il est impossible dâutiliser des variĂ©tĂ©s indigĂšnes. Actuellement, câest juste un goĂ»t de Merlot et de Cabernet Sauvignon. Jâai besoin dâavoir le goĂ»t du terroir, et pour cela jâai besoin des cĂ©pages autochtones. Je suis fier dâĂȘtre labellisĂ© Vin de France parce que je suis libre, et ĂȘtre libre, câest ce quâil y a de mieux â.
En ce qui concerne la question des pratiques viticoles et de la vinification par rapport Ă lâexpression du terroir, LoĂŻc Pasquet dit âpour moi, le choix est de ne pas greffer. La greffe est un filtre. La technique dans le vignoble pourrait ĂȘtre biologique ou biodynamique. Pour ĂȘtre honnĂȘte, je nâai jamais compris la biodynamie. Je nâai quâun seul dieu et je nâai pas assez de temps Ă leur consacrer. Si je devais aussi traiter Steiner comme un dieu, je nâaurais pas le temps. Ce qui importe en fin de compte, câest de maintenir la vie dans le sol. Nous sommes bien sĂ»r naturels puisque nous nâutilisons pas de soufre dans la cave. Nous pouvons dire que nous sommes naturels, mais nous sommes plus, nous sommes tout. Nous voulons faire du vin comme avant.
Leonardo Da Vinci âil est difficile de faire quelque chose de facileâ. Nous travaillons beaucoup dans la vigne pour ne rien faire dans la cave. Je ne
suis pas vinificateur. Je suis vigneron. Je ne fais rien. Je suis juste lĂ pour aider la nature Ă faire le vin.
LoĂŻc Pasquet est lâun des principaux membres de Francs de Pied, une association de grands vignerons qui croient en lâauthenticitĂ© de la saveur créée par les vignes non greffĂ©es. Parmi les autres producteurs notables, on trouve notamment lâAllemand Egon MĂŒller, le Bourguignon Thibault Liger-Belair, le Campanien Feudi San Gregorio et le Champenois Alexandre Chartogne.
âJe suis fier dâĂȘtre labellisĂ© Vin de France parce que je suis libre, et ĂȘtre libre, câest ce quâil y a de mieux.â
LoĂŻc Pasquet
La Moldavie a une histoire millĂ©naire dans le domaine de la viticulture, un climat idĂ©al, de nombreux types de sols diffĂ©rents et une gamme attrayante de cĂ©pages indigĂšnes et internationaux. Malheureusement, pendant la collectivisation de lâĂšre soviĂ©tique, lâindustrie viticole moldave a rĂ©gressĂ©. Il a fallu un certain temps pour se ressaisir aprĂšs la chute du rideau de fer, et bien que de nouvelles caves aient ouvert leurs portes et que la qualitĂ© se soit amĂ©liorĂ©e, ce nâest quâil y a une dizaine dâannĂ©es que la rĂ©volution viticole a vĂ©ritablement commencĂ©. En 2013, lâOffice national du vin et de la vigne a ouvert ses portes dans le cadre dâun partenariat public-privĂ© et, depuis, 500 millions de dollars ont Ă©tĂ© investis dans le secteur. Le nombre de caves est passĂ© Ă 200, dont soixante petits producteurs, et 40 caves accueillent dĂ©sormais des touristes, contre quatre en 2012. Les exportations au-delĂ des anciens marchĂ©s post-soviĂ©tiques ont triplĂ© au cours de la derniĂšre dĂ©cennie. Aujourdâhui, la Moldavie est le 20e producteur mondial de vin et le 14e exportateur. Plus important encore, la qualitĂ© sâest amĂ©liorĂ©e, comme en tĂ©moignent les plus de 5 000 mĂ©dailles remportĂ©es lors de concours internationaux. Mais ce nâest quâun dĂ©but. DâĂ©normes efforts sont dĂ©ployĂ©s dans les vignobles afin de cultiver les raisins idĂ©aux. Le vin de Moldavie a optĂ© pour la durabilitĂ©, ce que lâensemble du secteur vitivinicole sâest engagĂ© Ă faire en 2023. Les caves travaillent Ă©galement beaucoup pour augmenter les mĂ©langes de raisins locaux et de variĂ©tĂ©s locales et internationales, ce qui constitue la force particuliĂšre de la Moldavie en matiĂšre de vinification.
La Moldavie compte trois rĂ©gions dâindication gĂ©ographique protĂ©gĂ©e (IGP) : IGP CODRU, IGP ÈTEFAN VODÄ et IGP VALUL LUI TRAIAN. LâIGP CODRU a un relief caractĂ©risĂ© par une forte fragmentation des pentes avec des degrĂ©s dâinclinaison variables et est reprĂ©sentĂ©e de maniĂšre Ă©gale par tous les types dâexposition des pentes. Les vignobles de la rĂ©gion viticole de lâIGP âCodruâ sont situĂ©s aux altitudes les plus Ă©levĂ©es du pays, atteignant jusquâĂ 400 m, et les pentes sont principalement orientĂ©es vers le sud-ouest et lâest. La structure du sol est essentielle pour la qualitĂ© du vin et des produits de la vigne. Les sols de la rĂ©gion IGP âCodruâ sont principalement constituĂ©s de chernozems (sols noirs), Ă hauteur de 62 %, et de sols carbonatĂ©s, Ă hauteur de 21 %. LâIGP ÈTEFAN VODÄ prĂ©sente un relief moyennement fragmentĂ©, avec des vallĂ©es profondes et des pentes de diffĂ©rents degrĂ©s dâinclinaison. Les pentes dâune longueur moyenne de 200-400 mĂštres et dâun angle dâinclinaison de 3°-5° prĂ©dominent ici.
Lâaltitude de la rĂ©gion de ÈTEFAN VODÄ est caractĂ©risĂ©e par une variation de 7,0 mĂštres Ă 290,7 mĂštres au-dessus du niveau de la mer, et 73% de la superficie totale se situe dans les limites des pentes de 1° Ă 10°, oĂč les pentes de 1° Ă 5° prĂ©dominent. Le territoire de la rĂ©gion se trouve dans la zone naturelle de lâEurope de lâEst et de la MĂ©diterranĂ©e de la silvosteppe avec le chĂȘne pubescent et de la steppe xĂ©rophile avec le chaume - lâherbe Ă aiguilles, la barbe, lâherbe et lâabsinthe autrichienne.
Les rĂ©gions viticoles de Moldavie offrent un terroir et un profil aromatique uniques qui les distinguent dans le monde du vin. Lâhistoire unique de la Moldavie et la nouvelle gĂ©nĂ©ration de viticulteurs ambitieux contribuent au potentiel du pays Ă devenir un acteur majeur de lâindustrie vinicole mondiale.
Les sommeliers ont des opinions différentes sur le rÎle que joue le sol dans les caractéristiques de leurs vins préférés. Nous avons demandé à trois sommeliers, originaires de différents continents et représentant des points de vue divers, de nous faire part de leur point de vue sur le sol.
Reeze Choi est le fondateur dâune sociĂ©tĂ© de services de sommellerie et de conseil en vin, connue sous le nom de Sommâs Philosophy. Il est titulaire du diplĂŽme dâor de lâASI, est un advanced sommelier de la Court of Master Sommeliers et un Ă©ducateur certifiĂ© du WSET. Reeze a terminĂ© troisiĂšme au concours du Meilleur Sommelier du Monde 2023 de lâASI Ă Paris, a Ă©tĂ© premier au concours du Meilleur Sommelier dâAsie & OcĂ©anie 2018 de lâASI et a remportĂ© quatre fois le titre de Meilleur Sommelier de Chine.
Romain Iltis a obtenu le titre de Meilleur Sommelier de France en 2012, et en 2015 celui de Meilleur Ouvrier de France, dans la catégorie sommellerie. Né en Alsace, il a été formé au lycée hÎtelier Alexandre Dumas, à Illkirch-Graffenstaden, et a commencé sa carriÚre auprÚs du chef Alain Ducasse. Depuis 2015, il occupe le poste de chef sommelier à la Villa René Lalique, 2 étoiles Michelin à Wingen-sur-Moder.
Heather Rankin est cofondatrice et copropriĂ©taire dâObladee, un bar Ă vin qui met lâaccent sur les vins naturels et durables Ă Halifax, en Nouvelle-Ăcosse, au Canada. CertifiĂ©e par lâAssociation Canadienne des Sommeliers Professionnels, elle est rĂ©guliĂšrement juge pour les National Wine Awards of Canada et participe Ă de nombreux concours et jurys provinciaux.
ASI : Selon vous, comment le terroir sâexprime-t-il dans un vin ? Reeze Choi (RC) : Câest lâune des questions les plus dĂ©licates dans le monde du vin. En Ćnologie, deux opinions prĂ©valent. Certains affirment que les vignes absorbent certains minĂ©raux prĂ©sents dans le sol et que ces minĂ©raux dĂ©terminent le caractĂšre du vin. Lâautre opinion veut que le sol influence la façon dont les raisins poussent, ce qui Ă son tour façonne le caractĂšre du vin. NâĂ©tant pas un spĂ©cialiste du vin, je ne vais pas mâĂ©tendre sur lâinfluence du sol sur le vin. Mais si lâon observe les nuances de caractĂšre et de style des
Reeze ChoiâPour le sommelier que je suis, la mĂ©thode de production importe moins que la qualitĂ© gustative du vin.â
â Reeze Choi
vins issus du mĂȘme raisin et cultivĂ©s dans deux rĂ©gions voisines, on peut ĂȘtre sĂ»r que le sol a un impact considĂ©rable sur la façon dont un vin naĂźt. Le Barolo et le Barbaresco se trouvent tous deux dans le nordouest de lâItalie. Les vins de ces deux rĂ©gions sont produits Ă partir de 100 % de Nebbiolo et ont tendance Ă ĂȘtre moins influencĂ©s par le chĂȘne. Nous savons que le Barolo et le Barbaresco ont des combinaisons de sols diffĂ©rentes et que cette diffĂ©rence contribue aux caractĂ©ristiques dissemblables de leurs vins. Le Barolo a un sol beaucoup plus ancien, dâoĂč un vin plus structurĂ©, tandis que le sol du Barbaresco contient plus de nutriments, ce qui donne au vin un arĂŽme plus floral et un style plus facile et plus accessible, avec moins de tannins. Le sol peut sâexprimer de maniĂšre plus directe dans dâautres cas. Par exemple, le caractĂšre fumĂ© et salĂ© du Koshu et du Carricante est dĂ» Ă lâinfluence dâun sol volcanique ; le silex et la note de roche du Riesling cultivĂ© sur de lâardoise sont Ă©galement prĂ©sents.
Romain Iltis (RI) : Jâai la chance dâhabiter en Alsace oĂč il y a toutes sortes de sols diffĂ©rents, ce qui me permet de faire des comparaisons. Personnellement, je pense que le terroir sâexprime en bouche par la texture de lâaciditĂ© sur la langue. Pourquoi lâaciditĂ© est-elle importante ? Parce que lâaciditĂ© est prĂ©sente pendant toute la durĂ©e de vie dâun vin. Elle est comme le squelette du vin, sa structure, et elle est prĂ©sente pendant toute lâexistence du vin. En outre, lâaciditĂ© est principalement responsable de lâĂ©lĂ©vation du goĂ»t du vin... câest comme lorsque vous ajoutez un acide Ă une sauce, il en rehausse la salinitĂ©. Lorsque vous vous concentrez sur lâaciditĂ© dâun vin, vous vous apercevez quâil a une texture qui reflĂšte le sol. Par exemple, elle sera vive si les vignes sont cultivĂ©es sur du granit et tendre si elles sont cultivĂ©es sur du calcaire. Elle constitue un point commun lorsque lâon essaie des vins issus dâun mĂȘme terroir, mais Ă©laborĂ©s par des producteurs diffĂ©rents ou de millĂ©simes diffĂ©rents.
Heather Rankin (HR) : Je pense que le sol sâexprime dans le vin Ă travers la rĂ©ponse de la vigne Ă ce sol. Par exemple, une vigne vigoureuse plantĂ©e dans un sol limoneux trĂšs fertile peut produire un vin plus lĂ©ger et lĂ©gĂšrement diluĂ©, alors quâune vigne plantĂ©e dans un sol qui retient la chaleur, comme le granit, peut donner des raisins plus mĂ»rs et un vin plus corsĂ©. Je ne suis pas sĂ»re que nous âgoĂ»tionsâ le calcaire (ou le gravier ou lâardoise) dans un vin, mais nous goĂ»tons plutĂŽt les rĂ©sultats de lâeffet que le sol a eu sur les raisins et, en fin de compte, sur le vin. Le sol est trĂšs complexe et va au-delĂ de simples types dâargile, de sable ou de craie, par exemple. Il englobe des Ă©lĂ©ments tels que la structure, la profondeur, le pH, la tempĂ©rature, le contenu microbien, la fertilitĂ©, etc. Toutes ces facettes se combinent pour dĂ©terminer les types de raisins qui peuvent pousser, leur qualitĂ© et lâexpression ou les caractĂ©ristiques uniques que prendront ces raisins (et, en fin de compte, le vin).
ASI : Le sol est-il le principal facteur contribuant au goĂ»t du lieu ou lâun des nombreux facteurs contribuant au caractĂšre âterroirâ dâun vin ?
RC : Le sol est un facteur important pour le goĂ»t dâun lieu, certes, mais tout aussi important pour la survie de la vigne. En plus de donner certaines caractĂ©ristiques au vin, le type de sol dĂ©termine Ă©galement si la culture de la vigne est possible dans certains climats plus rudes. Par exemple, lâardoise de la Moselle retient et libĂšre la chaleur pendant les nuits froides pour permettre la maturation ; la craie aide Ă retenir lâeau dans les rĂ©gions plus sĂšches comme la Champagne ; un sol mieux drainĂ©, comme le gravier, facilite la concentration du vin dans le MĂ©doc.
RI : Le sol est important, mais ce nâest pas le seul facteur. Le climat, câest-Ă dire la quantitĂ© de pluie et de soleil, est tout aussi important car il dĂ©finit le potentiel agronomique de la vigne. Le viticulteur joue Ă©galement un rĂŽle important dans ce jeu. Il est le chef dâorchestre tandis que le raisin est lâinstrument de musique. Câest Ă lui de dĂ©cider quel raisin il va planter, de dĂ©terminer le niveau de maturitĂ© auquel il va rĂ©colter, la maturation du vin et bien dâautres choses encore. Toutes ces dĂ©cisions leur permettent dâexprimer le terroir. Un vigneron mâa dit un jour que les choix faits par le vigneron ne changeaient pas le sol, mais son expression dans le vin.
HR : Le sol nâest quâun Ă©lĂ©ment de lâenvironnement naturel dans lequel un vin est produit. La topographie et le climat sont Ă©galement des Ă©lĂ©ments clĂ©s qui contribuent au sentiment dâappartenance dâun vin. Ces trois Ă©lĂ©ments travaillent souvent ensemble (plutĂŽt quâindĂ©pendamment) pour soutenir la vigne et transmettre le terroir. Par exemple, les cĂ©lĂšbres sols ardoisiers de la Moselle sont connus pour leur excellent drainage et leur capacitĂ© Ă retenir la chaleur - deux Ă©lĂ©ments essentiels pour un Riesling de haut niveau, mais les sols seuls ne garantissent pas le succĂšs de la vigne ou la capacitĂ© du vin Ă exprimer le terroir. Les vignobles en pente raide de la rĂ©gion placent les vignes dans une position optimale pour une exposition maximale au soleil, et la proximitĂ© de la riviĂšre apporte une lumiĂšre rĂ©flĂ©chie supplĂ©mentaire ainsi quâun climat tempĂ©rĂ©. Ces trois Ă©lĂ©ments - sol, topographie, climatcontribuent Ă lâexpression du terroir du vin.
ASI : Quel est le rĂŽle de la mĂ©thode de production ? Lâinfluence du sol et du terroir ne peut-elle ĂȘtre exprimĂ©e que par des mĂ©thodes naturelles ou les vins conventionnels peuvent-ils Ă©galement exprimer le caractĂšre du sol et du terroir ?
RC : Ă mon avis, âexprimer le caractĂšre du solâ et âexprimer le terroirâ sont deux choses diffĂ©rentes. Si le terroir est dĂ©fini par le climat, le sol, la topographie - des caractĂ©ristiques de lâenvironnement naturel -, je considĂšre que lâintervention humaine est Ă©galement un facteur important. La façon dont les hommes cultivent le sol a Ă©galement une incidence sur le terroir. Ainsi, le terroir ne reflĂšte pas seulement les caractĂ©ristiques du sol en soi, mais aussi la culture. Certains vins conventionnels bien connus lâillustrent bien : par exemple, les arĂŽmes âclassiquesâ de Bordeaux sont plus marquĂ©s dans les vins conventionnels que dans les vins naturels. En ce sens, on peut dire que les vins conventionnels expriment encore mieux le terroir. Je pense que les mĂ©thodes naturelles et les vins conventionnels reprĂ©sentent des philosophies diffĂ©rentes de la nature et de la culture, et donc des
maniĂšres diffĂ©rentes de prĂ©senter les caractĂ©ristiques du sol et du terroir. Pour le sommelier que je suis, la mĂ©thode de production importe moins que la qualitĂ© gustative du vin. RI : Il est difficile de donner un avis tranchĂ©. Certains vins conventionnels sont merveilleux, ils expriment vraiment le terroir, mais la plupart du temps ils ont besoin de vieillir pour que le terroir se rĂ©vĂšle. Cela dit, je pense que lâon a une expression moins filtrĂ©e du terroir quand on utilise des mĂ©thodes bio ou biodynamiques.
HR : Je pense quâil est gĂ©nĂ©ralement admis que lâagriculture conventionnelle et non durable limite la capacitĂ© du sol Ă se rĂ©gĂ©nĂ©rer et Ă rester en bonne santĂ© au fil du temps. Je ne pense pas quâil soit exagĂ©rĂ© de suggĂ©rer quâun sol moins sain aurait plus de mal Ă soutenir la vigne et que le vin aurait plus de mal Ă exprimer le caractĂšre du terroir. Les mĂ©thodes dâagriculture durable qui favorisent la santĂ© microbienne des sols sont susceptibles de mieux soutenir la vigne et, de la mĂȘme maniĂšre, de permettre une expression plus claire du terroir. Dans le chai, on pourrait affirmer quâun vin fermentĂ© avec des levures indigĂšnes provenant de lâenvironnement local exprime mieux le terroir quâun vin fermentĂ© avec des levures cultivĂ©es, et que tout ce qui est ajoutĂ© (ou enlevĂ©) au vin peut âmasquerâ ou dĂ©former le caractĂšre original du terroir. Mais les mĂ©thodes naturelles ne garantissent pas lâexpression du terroir. Si le vin est trop volatil ou trop oxydĂ© (par exemple), lâexpression du terroir peut Ă©galement ĂȘtre bloquĂ©e. En gĂ©nĂ©ral, je pense quâun vin fait intentionnellement et avec soin par un entraĂźneur compĂ©tent intĂ©ressĂ© par la communication du terroir est ce qui est important - plutĂŽt que de savoir si le vin a Ă©tĂ© fait complĂštement ânaturellementâ ou non.
ASI : Avez-vous un sol préféré ou une combinaison de sol et de cépage préférée ?
RC : Jâai dĂ©couvert que jâaimais beaucoup la sensation que le sol calcaire donne Ă certains vins blancs. Il confĂšre aux vins, en particulier Ă ceux qui sont produits dans le cadre
Romain Iltis
âLe viticulteur joue Ă©galement un rĂŽle important dans ce jeu. Il est le chef dâorchestre tandis que le raisin est lâinstrument de musique.â
â Romain Iltis
dâune vinification rĂ©ductrice, un joli ton rocailleux, fumĂ© et savoureux. Le Domaine Follin-Arbelet, Corton Clos Blanche 2014 et le Domaine Leflaive Bourgogne Blanc 2004 sont deux des vins qui illustrent le mieux ces caractĂ©ristiques et que jâai apprĂ©ciĂ©s rĂ©cemment.
RI : Jâavoue que jâaime le riesling cultivĂ© sur un sol grĂ©seux. Câest une combinaison qui apporte de la linĂ©aritĂ©, une puretĂ© dâaciditĂ© et une texture granuleuse qui se traduit plus par une expression dans les gencives quâau nez. Je trouve aussi quâil apporte un caractĂšre salin en fin de bouche et des arĂŽmes de pierre chaude. En ce qui concerne les vins rouges, jâaime le grenache cultivĂ© sur un sol schisteux. Le schiste apporte au vin des tanins raffinĂ©s, une texture veloutĂ©e, de la fraĂźcheur, mais avec un caractĂšre brĂ»lĂ© en fin de bouche. Un accord parfait avec les viandes rĂŽties.
HR : Le Teroldego, cultivĂ© sur les contreforts des Dolomites dans la rĂ©gion alpine du Trentin HautAdige, Ă lâextrĂȘme nord de lâItalie, est lâun de mes prĂ©fĂ©rĂ©s. Le sol
est une composition unique de dolomite (carbonate de calcium et de magnĂ©sium, Ă©galement connu sous le nom de calcaire magnĂ©sien) qui donne aux montagnes une couleur rose-corail cristalline qui rĂ©fracte la lumiĂšre du soleil sur les vignes. Le Teroldego est originaire de la rĂ©gion du Trentin et est apparentĂ© Ă la Syrah. Comme la Syrah, il est trĂšs colorĂ©, avec des tanins fermes, une aciditĂ© vive, et des arĂŽmes de mĂ»re, de poivre et de terre. Ces vins sont dâune intensitĂ© et dâune fraĂźcheur peu communes, probablement dues Ă la combinaison unique du sol, de lâaltitude et du climat de la rĂ©gion.
âJe pense quâun vin fait intentionnellement et avec soin par un entraĂźneur compĂ©tent intĂ©ressĂ© par la communication du terroir est ce qui est important.â
â Heather Rankin
Sharrol Mukendi-Klaas est la premiĂšre laurĂ©ate de la bourse de sommellerie de la Fondation GĂ©rard Basset de lâASI
Sharrol Mukendi-Klaas ne sâattendait pas Ă entrer dans le monde du vin. En fait, Sharrol Mukendi-Klass a grandi loin de la culture du vin, au sens propre comme au sens figurĂ©. ĂlevĂ©e dans la petite ville de Klerksdorp, dans la province sud-africaine du Nord-Ouest, loin des vignobles du Cap-Occidental, Sharrol Mukendi-Klass raconte : âJe voyais le vin comme une boisson pour les gens qui avaient de lâargent. Une boisson de paillettes et de glamourâ.
LâidĂ©e de vivre du vin, sans parler de le boire, Ă©tait encore plus farfelue. Elle explique : âTravailler dans un restaurant est le moyen le plus facile pour quelquâun qui nâa pas de compĂ©tences particuliĂšres de trouver un emploi en Afrique du Sud. Je suis devenue serveuse par nĂ©cessitĂ©, pour gagner ma vie. Je suis tout de suite tombĂ©e amoureuse de lâinteraction que jâavais avec les clients lorsquâil sâagissait de les servir. Expliquer les diffĂ©rentes saveurs des plats me permettait de devenir une sorte de poĂšte. En mĂȘme temps, nous recevions une formation de base qui nous apprenait comment les vins se mariaient avec les plats, ce qui nous permettait de mieux vendreâ.
Selon RomanĂ© Basset, câest justement cette orientation client qui a permis Ă âSharrol de se distinguer auprĂšs des juges. Ce que jâai le plus admirĂ©, câest lâimportance quâelle accorde Ă lâexpĂ©rience des clients lorsquâelle les sert. Elle aime interagir avec eux, partager ses connaissances et sâassurer quâils choisissent un vin quâils apprĂ©cieront. Cela me rappelle lâinsistance de papa (GĂ©rard Basset) sur le fait quâun sommelier doit aimer les gens autant quâil aime le vinâ.
Sharrol Mukendi-Klass est la premiĂšre laurĂ©ate de la bourse de sommellerie de la Fondation GĂ©rard Basset de lâASI. Nina Basset a dĂ©clarĂ© : âJe suis personnellement ravie que nous ayons créé cette bourse en collaboration avec lâASI, notamment parce que lâASI a jouĂ© un rĂŽle trĂšs important dans lâorientation de la carriĂšre de GĂ©rard. Il est donc tout Ă fait appropriĂ© de sâassocier Ă lâASI pour aider Ă façonner et Ă amĂ©liorer la carriĂšre de Sharrol dans le domaine du vin, ainsi que celle de nombreux autres futurs boursiersâ.
La bourse est nĂ©e dâune discussion entre la fondation, dirigĂ©e par RomanĂ© et Nina Basset, et la Commission DiversitĂ© & Inclusion de lâASI. Ensemble, ils ont dĂ©cidĂ© quâune bourse centrĂ©e sur lâAfrique, dont la culture de la sommellerie se dĂ©veloppe rapidement, mais qui est encore sous-reprĂ©sentĂ©e dans le monde du vin international, aurait le plus grand impact pour montrer que la sommellerie est une profession vĂ©ritablement mondiale. Câest pourquoi la fondation sâest associĂ©e Ă lâASI et Ă lâAcadĂ©mie des sommeliers de Jean-Vincent Ridon pour dĂ©velopper et mettre en Ćuvre le programme de bourses dâĂ©tudes. RomanĂ© Basset explique la dĂ©cision de sâassocier Ă JV Ridon : âSa grande expĂ©rience du travail en sommellerie en Afrique, ainsi que sa carriĂšre dans lâenseignement et son rĂ©seau international de contacts, nous ont permis dâĂȘtre sĂ»rs que la laurĂ©ate recevrait un programme de premier ordre qui la mettra certainement Ă lâĂ©preuve, mais qui dĂ©veloppera aussi considĂ©rablement ses compĂ©tences et ses connaissancesâ.
Ce sera un grand pas en avant pour Sharrol Mukendi-Klaas qui dĂ©clare Ă propos de cette opportunitĂ© : âJâai lâintention dâutiliser lâĂ©ducation que je reçois de la Sommelier Academy pour inspirer les sommeliĂšres en herbe en Afrique du Sud et dans le reste de lâAfrique. Je sais quâaprĂšs avoir dĂ©couvert mon parcours dans lâindustrie du vin et de lâhĂŽtellerie et vu le chemin parcouru, elles pourront Ă©galement se projeter dans une carriĂšre, et une carriĂšre rĂ©ussie, dans ce domaine. Si lâon y croit et que lâon travaille dur, tout est possibleâ.
Pour ce qui est de lâavenir, Sharrol Mukendi-Klaas se voit comme juge du vin et âdirectement impliquĂ©e dans lâAcadĂ©mie sud-africaine de sommellerie, oĂč je peux partager mon expĂ©rience et enseigner aux femmes sommeliers en devenirâ.
âJâai lâintention dâutiliser lâĂ©ducation que je reçois de la Sommelier Academy pour inspirer les sommeliĂšres en herbe en Afrique du Sud et dans le reste de lâAfrique.â
Sharrol Mukendi-Klaas
Câest la question que Vinexposium a posĂ©e Ă Emmanuel Bourguignon, docteur en microbiologie et Ă©cologie du sol, ainsi que directeur associĂ© au Laboratoire dâAnalyses Microbiologiques des Sols (LAMS).
Alors que les sols vivants constituent le patrimoine aux fondements mĂȘmes de la notion de terroir, gage dâauthenticitĂ©, de typicitĂ© et de qualitĂ© des vins ; la crise climatique continue dâamplifier les consĂ©quences de la gestion irrĂ©guliĂšre des terres viticoles Ă lâĂ©chelle mondiale.
Face Ă cette urgence, Vinexposium rĂ©affirme son engagement auprĂšs de celles et ceux qui alertent, qui Ă©laborent de nouvelles solutions et qui ouvrent la voie. Rassembler les forces et les paroles lors des Ă©vĂ©nements du groupe Ă travers le monde (Wine Paris & Vinexpo Paris, Vinexpo Asia, âŠ) pour accĂ©lĂ©rer et faciliter le changement. Telle est la revendication du premier organisateur mondial dâĂ©vĂ©nements dĂ©diĂ©s aux vins et spiritueux.
Comment restaurer les sols viticoles ?
Le niveau de dĂ©gradation des sols viticoles est trĂšs disparate selon les rĂ©gions, les modes de viticulture et leur historique. Les vignobles ayant les sols les plus dĂ©gradĂ©s, sont fortement exposĂ©s Ă lâĂ©rosion, la compaction, la perte dâhumus, la perte dâactivitĂ© microbienne et les pollutions chroniques. Ces sols-lĂ peuvent ĂȘtre, tout de mĂȘme, restaurĂ©s, aggradĂ©s, redynamisĂ©s afin de leur permettre de retrouver toutes leurs fonctionnalitĂ©s et leur capacitĂ© Ă hĂ©berger une biodiversitĂ© foisonnante assurant une nutrition qualitative de la vigne. La vĂ©ritable question est plutĂŽt combien de temps faut-il pour restaurer ces sols? Selon leur niveau de dĂ©gradation et le climat oĂč ils se trouvent, cela peut prendre plus de dix ans voire, plus de 20 ans pour les cas les plus extrĂȘmes. Heureusement, il y a depuis plusieurs annĂ©es une importante Ă©volution du monde viticole avec une sensibilitĂ© croissante vis-Ă -vis du sol. Les pratiques vertueuses, basĂ©es sur les principes de lâagro-Ă©cologie se multiplient dans les vignobles.
Quel est le rĂŽle Ă jour des sommeliĂšres et des sommeliers ?
Cette profession joue un rĂŽle central, les femmes et les hommes qui exercent ce mĂ©tier permettent de faire dĂ©couvrir et dâinitier les gens Ă cette boisson extraordinaire quâest le vin. Ils doivent se former Ă comprendre pourquoi et comment une viticulture respectueuse des sols, respectueuse du terroir et de la biodiversitĂ© permet lâobtention de raisins plus qualitatifs, plus concentrĂ©s, plus complexes, empreint dâune forte typicitĂ©. Ces mĂȘmes raisins, mis entre de bonnes mains seront Ă lâorigine de vins vibrant de vie et dâĂ©nergie, des vins de haut lieu, des vins uniques portant en eux la complexitĂ© des interactions entre lâhomme, la vigne, le monde microbien et un terroir. Les acteurs de ce mĂ©tier doivent Ă mon sens ĂȘtre engagĂ©s pour aider le grand public Ă comprendre lâimportance de consommer des vins dont la production nâa pas Ă©tĂ© nĂ©faste pour lâenvironnement, les sols, la biodiversitĂ© et lâhumanitĂ©. Certains diront par les temps qui courent et les enjeux gĂ©opolitiques actuels que le vin, contrairement au pain et au riz, est un produit de luxe qui nâest pas vital Ă nos sociĂ©tĂ©s, argument recevable qui nous impose une gĂ©nĂ©ralisation des pratiques viticoles vertueuses, les sommeliers sont en premiĂšre ligne pour expliquer cela Ă leurs clients. Il existe de plus en plus de domaines viticoles de dimension modeste, dans des appellations dites « modestes » mais dont le travail est absolument exemplaire tant au niveau du respect des sols que de la qualitĂ© de leur vin, les sommeliers doivent aussi ĂȘtre moteur dans la mise en lumiĂšre de ces artisans de la vigne car ils exercent souvent la viticulture de demain.
A retrouver sur
Scannez le QR code pour Ă©couter lâĂ©pisode complet du podcast « Wines of The Future » produit par Vinexposium, avec Emmanuel Bourguignon.
Le diplĂŽme de lâASI est de plus en plus considĂ©rĂ© comme lâun des sommets de la sommellerie. Lorsque le premier examen a Ă©tĂ© proposĂ© en 2012, seul un petit nombre dâassociations membres de lâASI y participait. Aujourdâhui, un peu plus dâune dĂ©cennie plus tard, des sommeliers du monde entier y participent chaque annĂ©e. Lâobjectif ultime, selon MichĂšle ChantĂŽme, coordinatrice de la Commission Examens de lâASI et ambassadrice de lâASI, âĂ©tait et est toujours dâharmoniser le niveau de sommellerie dans le plus grand nombre de pays possibleâ.
Devenir sommelier ASI, en ayant rĂ©ussi le trĂšs exigeant examen du diplĂŽme, câest faire partie de lâĂ©lite mondiale et pouvoir prouver ses capacitĂ©s et son talent partout dans le monde. Câest une rĂ©fĂ©rence de haut niveau sur le plan personnel. Et pour les associations, câest un plus indĂ©niable de pouvoir offrir cette opportunitĂ© Ă leurs membres.
Selon MichĂšle ChantĂŽme, âle fait que de plus en plus dâassociations nationales organisent cet examen,
y compris les membres observateurs, montre quâil y a un rĂ©el besoin de reconnaissance de la part des sommeliers. De plus, de nombreuses nationalitĂ©s sont reprĂ©sentĂ©es, et donc diffĂ©rentes cultures, ce qui donne au diplĂŽme un caractĂšre diversifiĂ© et inclusifâ.
La Commission Examens de Certification de lâASI prĂ©pare Ă©galement un protocole pour les personnes handicapĂ©es. Cette annĂ©e, un candidat malentendant a passĂ© lâexamen. Pour cela, la commission a adaptĂ© le temps allouĂ© Ă certaines Ă©preuves, tout en maintenant un haut niveau dâexigence dans les Ă©preuves Ă©crites et les autres tĂąches pratiques.
âJe pense que les prĂ©sidents des associations nationales sont heureux de profiter de notre offre car, en plus de leur donner un examen âclĂ© en mainâ, nous les guidons par le biais dâune hotline sur WhatsApp au moment de lâexamen et des instructions et conseils trĂšs prĂ©cis leur sont Ă©galement fournis avant le jour de lâexamenâ, prĂ©cise MichĂšle ChantĂŽme.
Les membres de la Commission elle-mĂȘme, dirigĂ©e par un Meilleur Sommelier du Monde, Giuseppe Vaccarini, reprĂ©sentent diffĂ©rents pays dont lâAfrique du Sud, lâEstonie, la GrĂšce, lâIrlande, lâItalie, le Japon, le Maroc, les Pays-Bas, le RoyaumeUni et le Venezuela, ce qui assure diversitĂ© et neutralitĂ© tant dans la prĂ©paration des Ă©preuves que dans leur Ă©valuation.
GrĂące au DiplĂŽme et aux examens de Certification 1 et 2, lâASI encourage les sommeliers du monde entier Ă amĂ©liorer leurs compĂ©tences et les associations Ă les former. Il existe une forte demande de cours, en particulier de la part des associations qui ne sont pas Ă©quipĂ©es pour les dispenser. Les Bootcamps rĂ©pondent en partie Ă cette attente en proposant des cours de maĂźtre, chaque annĂ©e sur un continent diffĂ©rent. Bien que la portĂ©e globale soit limitĂ©e, il sâagit dĂ©jĂ dâun Ă©norme pas en avant.
De nombreux sommeliers se réfÚrent à la notion française de terroir et au lien entre le sol, les vignes et, en fin de compte, le verre. ASI a demandé à des sommeliers quelle était leur combinaison de terre et de vin préférée.
Jo WesselsLâune des formations du sol en viticulture qui me fascine souvent est le granit. Non seulement il me rappelle mon pays dâorigine, lâAfrique du Sud, avec les spectaculaires affleurements granitiques de Paarl et de Stellenbosch, mais il reprĂ©sente aussi le terroir de nombreux vins que jâapprĂ©cie profondĂ©ment Ă titre personnel. Je pense Ă des rĂ©gions comme le Beaujolais, le Portugal (DĂŁo et certaines parties du Douro), la Galice (oĂč mĂȘme les piquets des vignes sont en granit) et les crus du RhĂŽne septentrional - en particulier la cĂ©lĂšbre colline de lâHermitage.
Le granit est une formation rocheuse ignĂ©e qui prĂ©sente une certaine juxtaposition. Dâune part, il est trĂšs riche en minĂ©raux, notamment en potassium, mĂȘme sâil nâest pas toujours disponible pour les vignes. Dâautre part, elle nâoffre pas beaucoup de rĂ©tention dâeau sous sa forme brute. Je suis sĂ»r que tous ceux qui ont un comptoir en granit dans leur cuisine se demandent comment les vignes peuvent pousser sur un matĂ©riau aussi robuste. En effet, cela peut sâavĂ©rer
difficile. Ă moins dâune dĂ©composition complĂšte et dâune prĂ©sence suffisante de matiĂšre organique, ce nâest pas un sol particuliĂšrement luxuriant. Sur les sols granitiques, les vignes doivent souvent faire preuve de combativitĂ© et plonger leurs racines en profondeur. Et cela sâavĂšre souvent payant, avec une qualitĂ© de fruit qui mĂ©rite lâadmiration.
Je trouve gĂ©nĂ©ralement que les vins issus de sols granitiques prĂ©sentent une prĂ©cision, une fraĂźcheur et un caractĂšre floral particuliers. Les cĂ©pages noirs tels que le gamay noir, le shiraz et le cinsaut ont tendance Ă mieux exprimer ces nuances. Je suis Ă©galement convaincu que le Chenin Blanc issu de vieilles vignes sur des sols granitiques en Afrique du Sud est trĂšs prometteur. Ils valent vraiment la peine dâĂȘtre recherchĂ©s ! Ce sont souvent mes vins de prĂ©dilection, ceux qui me font du bien lorsque je suis coincĂ© entre le marteau et lâenclume (mauvais jeu de mots) et que jâai besoin de me rappeler la valeur de la combativitĂ© dans les situations difficiles !
Le sommelier : Jo Wessels, Afrique du Sud
Le sol : le granit
âJe trouve gĂ©nĂ©ralement que les vins issus de sols granitiques prĂ©sentent une prĂ©cision, une fraĂźcheur et un caractĂšre floral particuliers.â
Le Banyuls est lâun de mes terroirs prĂ©fĂ©rĂ©s. LâAOP Banyuls, qui comprend les communes de Collioure, Port-Vendres, Banyuls-SurMer et CerbĂšre Banyuls, est nichĂ©e entre la MĂ©diterranĂ©e dâun cĂŽtĂ© et les PyrĂ©nĂ©es de lâautre, lâEspagne nâĂ©tant quâĂ une courte distance en voiture. Ici, les vignes sont plantĂ©es sur des pentes abruptes (souvent jusquâĂ 45 degrĂ©s) dans les sols dâardoise noire uniques de la rĂ©gion. Ces pentes traĂźtresses, qui semblent plonger directement dans la mer, ainsi que le sol, rendent la culture de la vigne difficile et amĂšnent la flore locale Ă creuser profondĂ©ment, parfois jusquâĂ 15 mĂštres, Ă la recherche dâeau et de nutriments.
Les sols dâardoise noire sont euxmĂȘmes dâorigine marine, datant de 300 millions dâannĂ©es. Ils sont riches en matiĂšre organique et en hydrocarbures, ce qui explique leur couleur foncĂ©e. Les vignes qui poussent sur ces sols doivent en outre faire face Ă de fortes pluies au
printemps et Ă lâautomne, ainsi quâĂ des tempĂ©ratures caniculaires et Ă la sĂ©cheresse en Ă©tĂ©. Ces sols et ce climat feraient fuir bien des cĂ©pages, mais pas le Grenache, le monarque de Banyuls. Le Grenache sâest habituĂ© Ă lâenvironnement inhospitalier de Banyuls, nâobtenant un peu de rĂ©pit de la chaleur torride que grĂące Ă la Tramontane, le fameux vent mĂ©diterranĂ©en qui rafraĂźchit et aide Ă maintenir les vignes en bonne santĂ©.
Tous ces Ă©lĂ©ments font de Banyuls un terroir trĂšs particulier, oĂč lâeffort annuel des vignerons, qui comprend la taille, la gestion du couvert vĂ©gĂ©tal et les vendanges, toutes effectuĂ©es Ă la main, est rĂ©compensĂ© par des vins doux naturels dâune qualitĂ© indĂ©niable. Les trĂšs faibles rendements, dus Ă la richesse des vieilles vignes combinĂ©e Ă la pauvretĂ© du sol en ardoises noires, confĂšrent Ă ces vins une Ă©tonnante concentration aromatique. Les vins doux ne sont pas les seuls Ă en bĂ©nĂ©ficier. Les vins secs produits sous lâAOP Collioure
sont Ă©galement fabuleux. Ces vins issus de vignes cultivĂ©es sur les sols locaux dâardoises noires rĂ©vĂšlent toujours un bel Ă©quilibre en bouche, alliant une superbe fraĂźcheur Ă des tanins souples et soyeux. Le nez des vins peut ĂȘtre variĂ©, jonglant entre les fruits noirs mĂ»rs et confiturĂ©s, la rĂ©glisse et les Ă©pices douces.
Bref, le terroir de Banyuls vous séduira par ses paysages, son sol et le goût de ses vins !
Marylou Javault La sommeliĂšre : Marylou Javault, France Le terroir : Black Slate, BanyulsâLâeffort annuel des vignerons, qui comprend la taille, la gestion du couvert vĂ©gĂ©tal et les vendanges, toutes effectuĂ©es Ă la main, est rĂ©compensĂ© par des vins doux naturels dâune qualitĂ© indĂ©niable.â
Le sol graveleux du MĂ©doc a quelque chose de particulier. Il offre au cabernet sauvignon de la rive gauche de Bordeaux une immense quantitĂ© dâĂ©nergie dans le vin, en particulier Ă Pauillac qui est lâun des meilleurs endroits pour cultiver ce cĂ©page. Lorsque jâai visitĂ© le chĂąteau de Pauillac, la qualitĂ© du vin Ă©tait
exceptionnelle. Cependant, lâun des secrets les mieux gardĂ©s est que le cabernet sauvignon peut ĂȘtre lâun des vins les plus avantageux. Les vins Ă base de cabernet sauvignon cultivĂ©s sur des graviers prĂ©sentent une trĂšs grande qualitĂ© tout au long de leur Ă©volution, avec de belles notes de cassis, de bois de cĂšdre et de violette.
LancĂ©e par Symington Family Estates en 2020, lâĂ©cole du porto enseigne depuis aux professionnels et aux amateurs du vin ce quâest cette catĂ©gorie, dissipe les idĂ©es fausses, sĂ©duit les papilles et rehausse le profil du porto, tant Ă lâintĂ©rieur quâĂ lâextĂ©rieur de lâindustrie.
LâannĂ©e derniĂšre, le Douro Somm Camp, un camp dâentraĂźnement Ă©ducatif basĂ© dans la vallĂ©e du Douro, a Ă©tĂ© inaugurĂ© pour la premiĂšre fois. Il reviendra cette annĂ©e entre le 3 et le 6 juillet. Outre un nouveau programme dâĂ©vĂ©nements, de dĂ©gustations et dâactivitĂ©s, lâĂ©dition de cette annĂ©e accueillera Ă©galement des sommeliers amĂ©ricains et asiatiques, en plus de ceux venus de toute lâEurope.
Les sommeliers participants auront lâoccasion de visiter plusieurs propriĂ©tĂ©s historiques du Douro, dâassister Ă des dĂ©gustations et Ă des cours de maĂźtre, de faire connaissance avec les personnes qui se cachent derriĂšre le vin, notamment les vignerons, les viticulteurs et les vendeurs, et dâavoir accĂšs aux coulisses du processus de vinification dans le Douro.
Bien que de nombreux dĂ©tails du programme soient gardĂ©s secrets, nous avons appris que le camp dâentraĂźnement comprendra une classe de maĂźtre sur le changement climatique dans la rĂ©gion, un dĂźner Ă la Factory House historique de Porto et une visite de lâemblĂ©matique Quinta do VesĂșvio dans le Douro supĂ©rieur - lâun des derniers domaines de porto Vintage oĂč lâon foule encore les raisins Ă pied.
âNous sommes ravis dâaccueillir Ă Porto et dans le Douro un autre groupe de jeunes sommeliers prometteurs venus du monde entier. En partageant notre amour pour cette rĂ©gion et les vins quâelle produit, nous espĂ©rons leur offrir une riche expĂ©rience dâapprentissage quâils pourront ramener chez eux et partager avec dâautres.â
ClĂ©ment Robert est responsable de lâachat des boissons et des vins pour les Birley Clubs, un ensemble de clubs privĂ©s situĂ©s Ă Londres, en Angleterre.
Ronan Sayburn est Master Sommelier, ancien laurĂ©at du concours britannique du meilleur sommelier de lâannĂ©e et a reprĂ©sentĂ© Ă deux reprises le Royaume-Uni au concours du meilleur sommelier dâEurope de lâASI. Il a Ă©tĂ© chef sommelier et sommelier consultant dans de nombreux restaurants prestigieux du Royaume-Uni.
Sylvain Nicolas a commencĂ© sa carriĂšre de sommelier en tant quâapprenti de Philippe Faure-Brac, Meilleur Sommelier du Monde ASI 1992. Depuis 2008, Sylvain est chef sommelier du restaurant Guy Savoy Ă la Monnaie de Paris.
Pour de nombreux sommeliers, le passage quotidien, hebdomadaire ou mensuel au sous-sol pour compter les bouteilles est une routine redoutĂ©e. Rares sont les sommeliers qui se dĂ©lectent de la tĂąche souvent pĂ©nible de compter les Ă©tiquettes. Câest le cas de ClĂ©ment Robert, responsable de lâachat des boissons et des vins pour les Birley Clubs, un ensemble de clubs privĂ©s de Londres, en Angleterre. MalgrĂ© sa relative jeunesse, ClĂ©ment Robert, 37 ans, se souvient dâune Ă©poque âpas si lointaine, oĂč lâon faisait lâinventaire au stylo sur papier avant de transfĂ©rer les informations sur une feuille de calcul Excelâ. Plus rĂ©cemment, ils disposaient dâun logiciel fonctionnel qui leur permettait de passer, dâenvoyer et de recevoir des commandes, mais ce nâĂ©tait pas tout Ă fait lâoutil spĂ©cifique dont ils avaient besoin pour leur activitĂ©. Si de nombreux grands restaurants et groupes de restauration tels que The Birley Clubs ont optĂ© pour des solutions technologiques, tous ne considĂšrent pas ces systĂšmes comme une solution. Câest le cas de Sylvain Nicolas, du restaurant Guy Savoy Ă Paris, qui prĂ©fĂšre conserver une approche pratique, au sens littĂ©ral du terme.
Les systĂšmes de gestion des stocks, tels quâAlfred Technologies, permettent aux sommeliers de numĂ©riser leurs commandes et de faciliter la validation des stocks reçus, dâenregistrer facilement les livraisons et dâajouter automatiquement les crĂ©ances Ă lâinventaire. Il permet Ă©galement aux sommeliers dâavoir toujours une vue en temps rĂ©el des niveaux de stock. Guy Doucet, dâAlfred Technologies, explique : ânotre Ă©quipe dâexperts travaille sans relĂąche pour proposer la meilleure solution qui aide les gĂ©rants dâĂ©tablissements et les sommeliers Ă contrĂŽler leurs opĂ©rations et Ă concentrer leurs efforts sur des tĂąches
vĂ©ritablement crĂ©atrices de valeur, en consacrant leur temps Ă lâaspect le plus important de leurs activitĂ©s quotidiennes, leurs clients. Les sommeliers qui mettent en Ćuvre Alfred ont certainement un atout dans leur poche, en Ă©liminant le processus fastidieux dâinventaire pĂ©riodique, tout en augmentant les marges bĂ©nĂ©ficiaires de maniĂšre significative.â Des sentiments partagĂ©s par Rajat Parr, un dĂ©fenseur du travail de Doucet, qui dĂ©clare : âAlfred change la donne au moment oĂč la restauration en a le plus besoin. Cette application de gestion, alimentĂ©e par lâintelligence artificielle, aide votre restaurant Ă ĂȘtre plus rentable, facilite les tĂąches ennuyeuses et fastidieuses et vous redonne du temps pour ĂȘtre avec vos clients.â
Alors que beaucoup voient la valeur de la rĂ©duction des heures de travail et dâautres avantages de la technologie, Sylvain Nicolas ne veut pas risquer de perdre le lien physique avec les bouteilles. Sa carte des vins comprend environ 1 300 rĂ©fĂ©rences, soit 24 000 bouteilles, conservĂ©es dans deux caves - une cave de travail au restaurant et une grande cave de vieillissement situĂ©e Ă lâextĂ©rieur du restaurant - cette derniĂšre Ă©tant gĂ©rĂ©e par une tierce partie extĂ©rieure au restaurant. Comme il le dit en tant que chef sommelier, âil est important dâĂȘtre connectĂ© Ă lâinventaire des vins, il est important de toucher les bouteilles, de les regarder, car on peut voir lâĂ©volution, le changement de
volume dans la bouteille, des choses quâun ordinateur ne peut pas faireâ.
Il y a six mois, ClĂ©ment Robert a franchi une Ă©tape supplĂ©mentaire en rĂ©volutionnant son systĂšme de gestion des stocks en y ajoutant la IDFR (identification par radiofrĂ©quence). Cela lui permet dâĂ©tiqueter chaque bouteille dĂšs son arrivĂ©e avec sa propre identification. Un scanner enregistre le prix unitaire et, en quelques minutes, la bouteille est enregistrĂ©e dans le stock. Lâajout de la IDRF permet Ă lâentreprise de suivre en temps rĂ©el le mouvement de chaque bouteille, car les caves peuvent ĂȘtre situĂ©es Ă lâextĂ©rieur, de lâautre cĂŽtĂ© dâune rue par exemple, ou mĂȘme un site individuel peut abriter plusieurs restaurants, ce qui permet de savoir oĂč se trouve le vin dans le complexe. Le fait de savoir oĂč le vin se dĂ©place au sein de leur complexe sâest avĂ©rĂ© une aubaine logistique pour leur entreprise extrĂȘmement complexe et imbriquĂ©e.
Ronan Sayburn MS, dĂ©clare Ă propos de lâintroduction dâun systĂšme de gestion des vins sur mesure installĂ© au 67 Pall Mall : âLa nouvelle technologie a permis dâĂ©liminer une grande partie des erreurs humaines dues Ă la fatigue des sommeliers qui
âNotre Ă©quipe dâexperts travaille sans relĂąche pour proposer la meilleure solution qui aide les gĂ©rants dâĂ©tablissements et les sommeliers Ă contrĂŽler leurs opĂ©rations.â
â Guy Doucet, Alfred TechnologiesClement Robert Ronan Sayburn Sylvain Nicolas
faisaient les stocks Ă deux heures du matin, aprĂšs une garde, en reliant nos vins Ă un systĂšme de point de vente utilisant des puces IDRF et des codes-barres. Elle a Ă©galement permis dâidentifier les erreurs, par exemple si un Chassagne 1er Cru Les Caillerets a Ă©tĂ© servi Ă un client au lieu dâun Chenevottes 1er Cruâ.
Sylvain Nicolas, quant Ă lui, nâest pas dĂ©couragĂ©. Bien quâil ait envisagĂ© dâintroduire un systĂšme dâinventaire informatisĂ©, il dit ânous nâavons pas Ă©tĂ© convaincus de changer notre systĂšme, car ce que nous faisons fonctionne bien pour nousâ. Son systĂšme repose toujours sur le fait quâil passe des commandes quotidiennes Ă la cave de vieillissement pour remplir la cave du restaurant, ce qui, selon lui, lui donne une comprĂ©hension de son stock que ne peut avoir un systĂšme informatisĂ©. Quant Ă la question des pertes potentielles, lâensemble du stock fait lâobjet dâun inventaire trimestriel et dâun audit afin de garantir la responsabilitĂ©, la traçabilitĂ© et la rentabilitĂ© du programme vinicole.
Pour dâautres, les systĂšmes numĂ©riques nâapportent pas seulement la tranquillitĂ© dâesprit, mais aussi de rĂ©els avantages Ă©conomiques. ClĂ©ment Robert explique que le systĂšme permet dâĂ©conomiser jusquâĂ 20 heures de travail par site, soit 150 heures par mois pour lâensemble des opĂ©rations, en rĂ©duisant le temps passĂ© Ă compter les stocks. Ronan Sayburn partage cet avis : âAu 67 Pall Mall, nous pouvions faire lâinventaire dâune carte des vins de 5 000 rĂ©fĂ©rences en quelques heures Ă lâaide de codesbarres et dâun scanner manuel, et reconfirmer les emplacements dans la cave. Cela nous a Ă©galement permis de suivre les tendances des prix de vente moyens, des styles de vin, etc.
En fait, sâagit-il de choisir entre la modernitĂ© et la tradition ou la comptabilitĂ© par rapport Ă la connaissance intime de chacun ? La rĂ©ponse aux vĂ©ritables avantages dâun systĂšme de gestion des stocks peut dĂ©pendre du sommelier qui gĂšre la carte et dans les besoins spĂ©cifiques du restaurant.
âLe fait de savoir oĂč le vin se dĂ©place au sein de leur complexe sâest avĂ©rĂ© une aubaine logistique pour leur entreprise extrĂȘmement complexe et imbriquĂ©e.â
LâArgentine est mondialement connue pour ses vignobles de haute altitude oĂč sont produits des vins concentrĂ©s et Ă©lĂ©gants, des vins aux caractĂ©ristiques propres et aux styles variĂ©s, comparables aux meilleurs du monde.
Les vallĂ©es de CalchaquĂes sont un systĂšme de vallĂ©es et de montagnes du nord-ouest du pays qui sâĂ©tend sur 270 km du nord au sud, traversant les provinces de Salta, TucumĂĄn et Catamarca. Elle concentre certains des vignobles les plus hauts du monde, culminant entre 1 700 et 3 100 mĂštres audessus du niveau de la mer, ce qui reprĂ©sente 2 % des vignobles plantĂ©s en Argentine.
Cette rĂ©gion est dĂ©limitĂ©e par les sierras de Quilmes Ă lâouest et dâAconquija Ă lâest, ce qui conditionne le climat en empĂȘchant les masses dâhumiditĂ© de pĂ©nĂ©trer dans la vallĂ©e, gĂ©nĂ©rant ainsi un climat dĂ©sertique/continental. LâariditĂ© et la raretĂ© des prĂ©cipitations (200 mm par an) rendent indispensable lâutilisation de lâirrigation avec de lâeau de fonte pure provenant de la montagne.
En altitude, la tempĂ©rature moyenne est plus basse puisquâelle diminue dâenviron un degrĂ© tous les 100 m de dĂ©nivelĂ©. Cela signifie que les processus de la vigne sont lents et progressifs, ce qui permet dâobtenir des raisins de grande qualitĂ©.
Lâaltitude favorise Ă©galement lâamplitude thermique, ce qui permet aux plantes de travailler pendant la journĂ©e et de se reposer et de rĂ©cupĂ©rer pendant la nuit, en particulier pendant les chaudes journĂ©es dâĂ©tĂ© qui prĂ©cĂšdent les vendanges.
Lâaltitude dĂ©termine Ă©galement lâintensitĂ© du rayonnement UV. Plus la couche atmosphĂ©rique que les rayons du soleil doivent traverser est mince, plus le rayonnement UV est Ă©levĂ©. Cela gĂ©nĂšre une rĂ©action physiologique chez la plante, qui dĂ©veloppe des peaux plus Ă©paisses pour se protĂ©ger, crĂ©ant ainsi une plus grande concentration de polyphĂ©nols.
Les principaux aspects du vin proviennent de la peau, notamment la couleur, les arĂŽmes et les tanins. Ceci, associĂ© Ă une viticulture de prĂ©cision qui recherche le point optimal de maturitĂ© pour la rĂ©colte, permet dâobtenir des vins avec de la personnalitĂ© et de lâĂ©lĂ©gance, concentrĂ©s mais subtils, des vins mĂ©morables Ă boire aujourdâhui ou Ă conserver pendant des annĂ©es.
Ălâheure oĂč le monde du vin revient aux cĂ©pages indigĂšnes et les recherche, il est logique que lâon assiste Ă un retour similaire aux accords traditionnels qui reflĂštent lâunisson de la vigne et de la nourriture, enracinĂ©s dans un goĂ»t authentique du lieu. Nous avons demandĂ© Ă deux sommeliers de pays aux traditions viticoles ancestrales de nous faire part de leurs recommandations en matiĂšre dâaccords mets et vins indigĂšnes.
Le sommelier : Jaba Dzimistarishvili
Le cépage : Saperavi
Lâaccord : Porc Lagaza de KakhĂ©tie avec une demiglace aux baies, prĂ©parĂ©e par le chef Levan Kobiashvili
Ă propos du cĂ©page : La GĂ©orgie compte quelque 525 variĂ©tĂ©s de raisins indigĂšnes, dont 60 % sont des blancs et 40 % des rouges. Le saperavi, qui se traduit littĂ©ralement par âdonner de la couleurâ, se distingue parmi les cĂ©pages rouges, car câest lâun des rares cĂ©pages dont les pigments (anthocyanes) se trouvent non seulement dans la peau, mais aussi Ă lâintĂ©rieur du raisin. Ce raisin est Ă lâorigine de vins produits dans des appellations cĂ©lĂšbres telles que Mukuzan, Kashmi Saperavi, Kvareli pour les vins secs et Akhasheni et Kindzmarauli pour les vins mi-doux.
Lorsquâil est transformĂ© en vin rouge sec, le Saperavi a un potentiel de vieillissement Ă©tonnant et offre des arĂŽmes et des saveurs rappelant la mĂ»re, la prune noire, la cerise et le poivre noir. Il peut Ă©galement ĂȘtre vieilli en fĂ»ts de chĂȘne ou en Qvevri.
A propos de lâaccord : Quel que soit le lieu de vieillissement, nous obtenons un vin merveilleusement gastronomique qui se marie parfaitement avec la cuisine gĂ©orgienne. Le Saperavi Ă©tant considĂ©rĂ© comme un cĂ©page kakhĂšte, jâai choisi dâassocier les vins issus de ce cĂ©page Ă la cuisine kakhĂšte, qui offre un large choix de plats Ă base de viande.
Le Lagaza, une race de porc kakhĂšte, est nourri aux glands de la forĂȘt, ce qui confĂšre Ă la viande un goĂ»t unique. Pour prĂ©parer ce plat, le chef Levan Kobiashvili fait rĂŽtir des porcelets lagaza et assaisonne la viande, qui est tendre et moelleuse, avec une demi-glace aux baies, Ă©picĂ©e Ă la cannelle et Ă lâanis Ă©toilĂ©. Le plat est accompagnĂ© dâune purĂ©e de pommes de terre agrĂ©mentĂ©e de truffes de KakhĂ©tie et dâune adjika de Gurian (une sauce de lâouest de la GĂ©orgie Ă base de noix et de poivrons verts) qui apporte une douce chaleur.
Ce plat se marie parfaitement avec un vin issu de Saperavi Ă©laborĂ© selon la mĂ©thode traditionnelle, câestĂ -dire quâil est fermentĂ© sur le chacha (marc) et conservĂ© dans le Qvevri pendant 6 mois. Les tanins du Saperavi neutraliseront parfaitement le gras du porc. Les saveurs du cĂ©page sont Ă©galement intensifiĂ©es par la sauce aux baies et la garniture Ă la truffe se prĂ©sente dĂ©licatement. Les amateurs de plats Ă©picĂ©s apprĂ©cieront lâadjika de Gurian, car lâarĂŽme de poivre noir, caractĂ©ristique du Saperavi, associĂ© Ă lâadjika, crĂ©e un feu dâartifice culinaire en bouche.
Le sommelier :
Sotiris Neophytidis
Le cépage : Promara
Lâaccord : Asperges sautĂ©es Ă lâĆuf et Ă la tomate
à propos du cépage :
Soyons honnĂȘtes : lorsque quelquâun entend parler de Chypre en termes de vin, la premiĂšre chose qui lui vient Ă lâesprit est le Commandaria, Ă©laborĂ© Ă partir de Xynisteri et de Mavro. Ces deux cĂ©pages sont les plus plantĂ©s sur lâĂźle.
Cependant, lâun des nouveaux cĂ©pages blancs qui mĂ©rite dâĂȘtre mentionnĂ© est le Promara. Le Promara est un cĂ©page blanc Ă peau Ă©paisse et, comme son nom lâindique, câest le raisin qui mĂ»rit le plus tĂŽt Ă Chypre. En tant que tel, il nĂ©cessite beaucoup de soins pour maintenir sa structure acide. Il nâoccupe actuellement quâenviron un pour cent de lâensemble du vignoble chypriote. RĂ©flĂ©chissez donc Ă la faiblesse de sa production dans le contexte mondial et Ă la raison pour laquelle il est si rare et si spĂ©cial.
A propos de lâaccord :
Lâun des plats les plus cĂ©lĂšbres et les plus traditionnels de Chypre est lâasperge sautĂ©e avec un Ćuf et une tomate. Lâamertume des asperges sera combinĂ©e aux composĂ©s phĂ©noliques du Promara, lâĆuf apportera le corps nĂ©cessaire et la tomate soulignera lâaciditĂ© vive de ce raisin.
Le parcours pour ĂȘtre reconnu comme un sommelier dâĂ©lite et un expert en vin peut emprunter de nombreuses voies. Au sommet, il y a le diplĂŽme ASI Gold, le Master of Wine et la distinction de Master Sommelier. Chacune de ces distinctions comporte ses propres dĂ©fis et rĂ©compenses. Nous avons demandĂ© Ă Monica Neral, ASI Diploma Gold, Doug Frost, Master of Wine (et Master Sommelier), et Eric Zwiebel Gold ASI Sommelier et Master Sommelier de nous Ă©clairer sur leur chemin vers lâexcellence en matiĂšre de sommellerie.
Monica Neral est originaire de Rijeka, en Croatie, mais elle a passĂ© 17 ans en Italie. Elle y a obtenu des diplĂŽmes en langues et littĂ©ratures Ă©trangĂšres et est tombĂ©e amoureuse du monde du vin. Elle est sommeliĂšre, titulaire du WSET Level 3 award in wines, et la seule femme en Croatie Ă avoir obtenu le Gold Diploma de lâASI. Elle a Ă©galement terminĂ© troisiĂšme des championnats nationaux de sommellerie croate de 2021 et 2022.
AprĂšs avoir travaillĂ© dans plusieurs hĂŽtels de luxe au fil des ans, elle sâest rĂ©cemment lancĂ©e dans lâentrepreneuriat avec lâouverture de VINNER. GrĂące Ă VINNER, Monika organise des ateliers sur le vin, des cours Ă©ducatifs et des visites guidĂ©es dans le but de partager ses connaissances, en fusionnant de maniĂšre unique et professionnelle les deux plus grandes passions de sa vie : les langues et le vin. LâASI a interrogĂ© Monica sur le chemin quâelle a parcouru pour devenir laurĂ©ate du DiplĂŽme Or de lâASI.
ASI : Avez-vous toujours aspirĂ© Ă faire carriĂšre dans le vin et lâhĂŽtellerie ?
Monika Neral (MN) : Une carriĂšre dans le vin et lâhĂŽtellerie est arrivĂ©e par hasard, au bon moment, alors que je faisais une pause entre mes Ă©tudes en 2017. Cela nâa jamais fait partie de mes plans, mais les meilleures choses arrivent spontanĂ©ment. Câest ce que la vie mâa appris. Cela mâa prise par surprise, et câest rapidement devenu un amour, puis un travail.
ASI : Le fait dâavoir Ă©tudiĂ© pour obtenir dâautres certifications vous a-t-il aidĂ©e Ă vous prĂ©parer Ă lâexamen du diplĂŽme ASI ?
MN : Oui, jâai obtenu le niveau 3 du WSET dans le domaine des vins, ce qui a constituĂ© une Ă©tape importante dans ma formation, car cela mâa ouvert un monde complĂštement nouveau. Avant cela, jâanalysais le vin uniquement en tant que produit final. Ensuite, jâai commencĂ© Ă comprendre le processus qui mĂšne au
âEn ce sens, je peux dire que le diplĂŽme de lâASI est beaucoup plus inclusif et complet parce quâil prend en considĂ©ration plus de compĂ©tences quâun sommelier devrait avoir.âMonika Neal
produit final : ce qui se passe dans le vignoble, sur la vigne, lâimportance du terroir, lâintervention humaine dans les chais et de nombreux aspects que jâignorais auparavant. Par consĂ©quent, la formation WSET a Ă©largi mes connaissances Ă bien des Ă©gards et mâa dĂ©finitivement aidĂ©e Ă prĂ©parer le diplĂŽme de lâASI.
ASI : Les études pour le DiplÎme ASI vous ont-elles aidée à vous préparer à la compétition, et vice-versa ?
MN : Jâai participĂ© deux fois au championnat national de sommellerie croate et jâai terminĂ© Ă chaque fois Ă la troisiĂšme place. Jâai passĂ© lâexamen du diplĂŽme de lâASI aprĂšs le premier concours. Cela mâa beaucoup aidĂ©e car jâai acquis une conscience de moi-mĂȘme qui mâa permis de gĂ©rer le stress du diplĂŽme. Et aussi la prĂ©paration Ă lâexamen du diplĂŽme a Ă©tĂ© si intense quâen 2022, je me suis sentie motivĂ©e pour participer Ă nouveau au championnat et jâai une fois de plus obtenu un trĂšs bon rĂ©sultat.
ASI : Quelle a Ă©tĂ© la partie la plus difficile de lâexamen du diplĂŽme ?
MN : La partie la plus difficile de lâexamen du diplĂŽme a Ă©tĂ© la gestion du stress devant le comitĂ© pendant les tĂąches pratiques telles que lâaccord mets et vins, la vente dâune bouteille de vin et la dĂ©cantation. Je pense que lâon peut apprendre Ă gĂ©rer le stress en acquĂ©rant de lâexpĂ©rience sur scĂšne mais, avant cela, il faut travailler sur son contrĂŽle interne avec des exercices de respiration, de mĂ©ditation ou en faisant des choses qui nous calment et nous permettent de mieux nous comprendre.
ASI : LâASI est une association mondiale reprĂ©sentant des pays qui produisent un large Ă©ventail de boissons. Cela se reflĂšte-t-il davantage dans lâexamen du diplĂŽme ASI que dans dâautres certifications ?
MN : Comme je nâai pas tentĂ© lâexamen du Master Sommelier, je ne peux que comparer le diplĂŽme ASI avec la certification WSET qui comprend une partie thĂ©orique et la description de la dĂ©gustation de vin, mais pas dâexamen pratique. En
ce sens, je peux dire que le diplĂŽme de lâASI est beaucoup plus inclusif et complet parce quâil prend en considĂ©ration plus de compĂ©tences quâun sommelier devrait avoir : thĂ©orie, dĂ©gustation et pratique. En outre, il implique la connaissance non seulement du vin, mais aussi des spiritueux, des biĂšres, du cafĂ©, du thĂ©, des cigares, etc. alors que le WSET est principalement axĂ© sur le vin. Je peux Ă©galement dire que câĂ©tait incroyablement stimulant et complexe, car les questions exigeaient non seulement une connaissance plus approfondie dâun Ă©ventail plus large et plus diversifiĂ© de boissons, mais aussi des rĂ©ponses extrĂȘmement prĂ©cises. Le fait dâavoir obtenu la mention Gold me donne la confiance nĂ©cessaire pour continuer Ă obtenir les certifications WSET Diploma et MS.
ASI : Comment envisagez-vous lâaide que le diplĂŽme ASI apportera Ă votre carriĂšre ?
MN : Le diplĂŽme de lâASI a Ă©tĂ© une grande rĂ©ussite pour moi et une Ă©norme satisfaction. JâĂ©tais dĂ©finitivement plus consciente de mes connaissances lorsque jâai reçu les rĂ©sultats et je peux dire que jâĂ©tais fiĂšre de moi. Il sâagit dâune certification
trĂšs importante qui mâouvrira de nombreuses âportesâ au cours de ma carriĂšre, mais cela ne signifie pas que le processus dâapprentissage est terminĂ©, ce nâest quâun point de dĂ©part dans mon parcours. JâespĂšre Ă©galement que cette rĂ©ussite sera un exemple et une source dâinspiration pour dâautres femmes qui souhaitent sâimpliquer davantage dans lâindustrie du vin et concourir au plus haut niveau de la profession de sommelier.
Doug Frost est prĂ©sident de la BUSA (Best USA Sommelier Association), PDG de Echolands Winery, Master of Wine et Master Sommelier, ainsi quâauteur et consultant en vin basĂ© Ă Kansas City, dans le Missouri. Doug Frost est lâune des trois personnes au monde Ă dĂ©tenir simultanĂ©ment les titres de Master of Wine et de Master Sommelier, ayant obtenu son MS en 1991 et son MW en 1993. Nous avons interrogĂ© Doug sur son expĂ©rience du programme Master of Wine.
ASI : Vous avez grandi Ă une Ă©poque et dans un endroit, Kansas City, que lâon nâassocie pas instinctivement Ă la culture du vin. Comment quelquâun se dĂ©couvre-t-il une passion pour le vin Ă une Ă©poque oĂč la consommation de vins fins nâen Ă©tait quâĂ ses dĂ©buts aux Ătats-Unis, et dans le Midwest plus encore quâen Californie ?
Doug Frost (DF) : Jâai commencĂ© par faire la plonge dans lâarriĂšre-boutique dâun steakhouse dâune petite ville du Kansas, Ă lâĂąge de 14 ans. CâĂ©tait un endroit vraiment bizarre, mais jâaimais bien la folie qui rĂ©gnait dans lâarriĂšreboutique en plein samedi soir. AprĂšs lâuniversitĂ©, jâai commencĂ© Ă travailler dans un restaurant âchicâ pour payer quelques factures et, dĂšs le premier week-end, jâai gagnĂ© un concours de vente de vin. Le sommelier sâest dit que je devais mây connaĂźtre en vin (je lâavais clairement trompĂ©, lui et les clients) et mâa invitĂ© Ă une dĂ©gustation. CâĂ©tait dans les annĂ©es 1970 et tout le monde jetait un billet de vingt dollars sur la table, puis nous buvions un premier cru de Bordeaux. Jâai Ă©tĂ© sĂ©duit. Kansas City Ă©tait alors une ville dâenviron un million dâhabitants et il y avait beaucoup de vins sĂ©rieux Ă trouver, mais pas beaucoup de gens qui essayaient de les acheter.
ASI : Vous avez obtenu votre MS en 1991, quâest-ce qui vous a poussĂ© par la suite Ă vouloir Ă©galement obtenir le titre de MW ?
DF : Ă vrai dire, jâai essayĂ© dâentrer dans le programme MW au milieu des annĂ©es 80, mais je suis devenu directeur des ventes au niveau national pour une sociĂ©tĂ© de vente en gros et je nâavais plus le temps de mâoccuper de mes affaires. En 1989, jâai pu mây remettre et, alors que je mâapprĂȘtais Ă passer mon premier examen de MW, un ami mâa parlĂ© du programme de MS. Je nâavais aucune idĂ©e de ce que câĂ©tait, mais les restaurants coulent dans mes veines et, quinze jours aprĂšs, je suis allĂ© passer lâexamen avancĂ© (on pouvait sâen tirer Ă bon compte Ă lâĂ©poque).
Ă ma grande surprise, je lâai rĂ©ussi et jâai donc fini par faire en mĂȘme temps Master of Wine et Master Sommelier, de 1989 Ă 1993.
ASI : Lorsque les gens vous demandent quelle est la différence entre Master Sommelier et Master of Wine, que leur répondez-vous ?
DF : Le MS est un examen de service. Le MW est un examen de rĂ©daction. En plaisantant Ă moitiĂ©, je pourrais dire que le MS est large dâun kilomĂštre et profond de quelques centimĂštres et que le MW est large de quelques mĂštres et profond dâun kilomĂštre. Il y a un diagramme de Venn Ă tout cela, bien sĂ»r, mais câest vraiment la façon dont vous prĂ©sentez les informations Ă lâexaminateur qui fait la diffĂ©rence.
ASI : Pensez-vous que le fait dâavoir le titre de Master Sommelier et dâavoir vĂ©cu lâexpĂ©rience de passer ces examens vous a aidĂ© pour les examens de Master of Wine ?
DF : Comme je lâai dit, ça sâest fait plus ou moins simultanĂ©ment, mais chaque examen a Ă©tĂ©, dâune certaine maniĂšre, utile Ă lâautre. LâĂ©tendue de lâexamen de la CMS mâa donnĂ© plus dâidĂ©es et dâexemples pour lâexamen de MW, et la profondeur de lâexamen de MW mâa aidĂ© Ă Ă©tayer mes idĂ©es et mes rĂ©ponses pour la CMS. Et une dĂ©gustation Ă lâaveugle reste une dĂ©gustation Ă lâaveugle, quelle que soit la maniĂšre dont on vous demande de formuler vos rĂ©ponses et vos preuves.
ASI : Quelle a été la partie la plus difficile du programme de Master of Wine ?
DF : La partie dĂ©gustation est certainement plus difficile pour beaucoup que la thĂ©orie. Jâai rĂ©ussi la thĂ©orie la premiĂšre fois, mais il mâa fallu deux tentatives pour rĂ©ussir la dĂ©gustation. Je crois fermement que le travail de dĂ©gustation Ă lâaveugle que jâai fait dans le cadre du MS a alimentĂ© et renforcĂ© ma dĂ©gustation Ă lâaveugle dans le cadre du MW. Je conseille aux candidats au MW dâĂ©tudier le format de la CMS pour se prĂ©parer.
ASI : Quels mots dâinspiration donneriez-vous Ă quelquâun qui essaie actuellement de devenir
Master of Wine ?
DF : Vous devez Ă©crire selon une norme qui est britannique par nature. Ătudier la rĂ©daction dâessais courts et supprimer tous les mots superflus. RĂ©diger comme si vous Ă©criviez un mĂ©moire juridique ou un document de recherche mĂ©dicale. Pour ce qui est de la dĂ©gustation, il faut procĂ©der de la mĂȘme maniĂšre Ă chaque fois. Les dĂ©gustateurs qui rĂ©ussiront sont ceux qui font preuve dâune prĂ©cision quasi militaire dans leur forme et leur processus.
âĂ ma grande surprise, je lâai rĂ©ussi et jâai donc fini par faire en mĂȘme temps Master of Wine et Master Sommelier, de 1989 Ă 1993.â
ASI : Ayant grandi en Alsace, entourĂ© de vignobles et de grands restaurants, nâavez-vous jamais envisagĂ© de ne pas faire carriĂšre dans le vin ou lâhĂŽtellerie ?
Eric Zwiebel (EZ) : Jâai cela dans le sang. Mes parents tenaient un restaurant. Mon pĂšre Ă©tait le chef cuisinier et ma mĂšre travaillait en salle. Le jour oĂč jâai annoncĂ© Ă mon pĂšre que je souhaitais travailler dans un restaurant, il a Ă©tĂ© trĂšs contrariĂ© car il pensait quâils (mes parents) avaient travaillĂ© trĂšs dur pour nous offrir, Ă ma sĆur et Ă moi, un meilleur avenir. Il nâen revenait pas. Il mâa dit : âNous avons travaillĂ© si dur toute notre vie et maintenant tu as dĂ©cidĂ© de faire les mĂȘmes erreurs que moiâ. Mais en grandissant Ă RibeauvillĂ©, en Alsace, le vin faisait partie de mon ADN, alors jâai dĂ©cidĂ© de travailler dans ce domaine.
ASI : Décrivez comment votre carriÚre dans le vin a commencé ?
EZ : Jâai commencĂ© Ă travailler dans les cuisines, mais je dĂ©testais cela, alors je suis passĂ© Ă lâaccueil. Jâai commencĂ© dans un restaurant local avec une forte tradition gastronomique, mais qui nâavait pas dâĂ©toile Michelin. Le chef sommelier, le directeur du
Eric Zwiebel est titulaire du DiplĂŽme Or de lâASI et du titre de Master Sommelier. Il a reprĂ©sentĂ© lâAngleterre et la France Ă de nombreuses reprises lors de concours de sommellerie. Il travaille actuellement comme directeur des vins au Samling, Ă Windermere, en Angleterre. Nous avons interrogĂ© Eric sur son parcours dans lâenseignement du vin, et plus particuliĂšrement sur son titre de maĂźtre-sommelier.
restaurant et le propriĂ©taire Ă©taient trĂšs impliquĂ©s dans le vin. Le premier jour, mon pĂšre mâa accompagnĂ© et mâa dit quâil serait bon dâapprendre le vin ici, car cela pourrait me donner lâoccasion de faire quelque chose dâun peu spĂ©cial et diffĂ©rent Ă lâavenir. Jây ai fait un apprentissage de deux ans.
Ensuite, mon pĂšre mâa amenĂ© Ă lâAuberge de lâll, oĂč officiait Serge Dubs. Jây ai travaillĂ© comme commis sommelier. Pour ĂȘtre honnĂȘte, je nâai pas eu beaucoup dâoccasions dâentrer en contact avec Serge. MĂȘme sâil ne mâa pas formĂ©, il a Ă©tĂ© la premiĂšre grande influence sur ma carriĂšre dans le vin. Un jour, Serge servait un groupe de 16 personnes et je lâĂ©coutais dĂ©crire le vin aux clients. Tout dâun coup, jâai compris et je me suis dit que câĂ©tait quelque chose que je pouvais faire. En mĂȘme temps, jâai Ă©tĂ© sĂ©duit par le fait quâen tant que sommelier se promenant dans le restaurant, les clients vous considĂšrent comme quelquâun qui a des connaissances. Ils vous regardent comme quelquâun quâils veulent rencontrer, car ils veulent que vous leur transmettiez votre savoir. Jâavais dĂ©sormais le âvirusâ de la sommellerie. AprĂšs une annĂ©e
passĂ©e Ă LâAuberge de LâIll, jâai su que je voulais absolument devenir sommelier.
Ă ce stade, jâavais tout appris sans avoir suivi dâĂ©tudes formelles. Pour acquĂ©rir plus dâexpĂ©rience, jâai dĂ©mĂ©nagĂ© Ă Paris oĂč jâai travaillĂ© avec Olivier Poussier pendant environ six mois avant dâaller travailler dans divers restaurants Ă©toilĂ©s de la ville. Ces diffĂ©rentes expĂ©riences mâont permis dâapprendre de plus en plus. Ă cette Ă©poque, je ne faisais pas de concours, car je ne voulais pas ĂȘtre considĂ©rĂ© comme une simple encyclopĂ©die du vin.
Ă 24 ans, jâai dĂ©cidĂ© dâaller en Angleterre, oĂč jâai rencontrĂ© GĂ©rard Basset, et les choses ont changĂ©. Ă cette Ă©poque (1997), GĂ©rard Ă©tait cĂ©lĂšbre, ayant dĂ©jĂ remportĂ© le titre de Meilleur Sommelier dâEurope. Jâai commencĂ© Ă travailler pour lui. LâexpĂ©rience en Angleterre a tout changĂ© pour moi. Je pense quâen France, des sommeliers comme GĂ©rard et moi nâavaient pas toujours lâimpression dâĂȘtre assez bons. Soudain, en Angleterre, jâai appris que les gens vous apprĂ©ciaient. CâĂ©tait trĂšs gratifiant.
Eric ZwiebelâLe MS nâest quâune Ă©tape dans un long voyage. Câest un peu comme la cerise sur le gĂąteau, car vous vous rendez compte que ce pour quoi vous avez travaillĂ© a Ă©tĂ© reconnu.â
GĂ©rard et moi parlions beaucoup. Jâadore parler et GĂ©rard aussi. Nous Ă©changions des idĂ©es. Jâaimais son approche de la sommellerie. Il parlait aussi de ses expĂ©riences, notamment des concours de sommellerie. Il a dĂ©crit la maniĂšre dont il sâest formĂ©. Nâoubliez pas quâĂ cette Ă©poque, il nâĂ©tait pas facile de trouver des connaissances. GĂ©rard mâa incitĂ© Ă participer Ă des concours et Ă me lancer des dĂ©fis.
Avec le recul, je peux dire que Serge mâa aidĂ© Ă dĂ©couvrir ce que je voulais faire. GrĂące Ă GĂ©rard, jâai dĂ©couvert ce que je voulais devenirâ.
ASI : Comment a commencé votre parcours pour devenir Master Sommelier ?
EZ : Cela a commencĂ© en Angleterre. En sortant de France, en tant que sommelier travaillant avec des chefs cĂ©lĂšbres, ma connaissance du vin Ă©tait bonne mais pas spĂ©ciale. Câest GĂ©rard qui mâa encouragĂ© Ă passer les examens du WSET, Ă participer Ă des concours et Ă Ă©tudier Ă la âCourtâ, pour finalement obtenir le titre de MS. Je peux dire que tout ce que jâai fait pour amĂ©liorer ma carriĂšre, câest grĂące Ă GĂ©rard. Jâai travaillĂ© cinq ans avec lui. CâĂ©tait une pĂ©riode merveilleuse. Bien sĂ»r, il ne mâa pas seulement inspirĂ©, il a inspirĂ© et aidĂ© beaucoup de sommeliers. GĂ©rard, avec son groupe dâhĂŽtels HĂŽtel du Vin, a vraiment changĂ© la culture de la sommellerie en Angleterre.
ASI : Comment appliquez-vous votre titre de MS dans votre vie quotidienne ?
EZ : La façon dont jâutilise mon titre de Master Sommelier est Ă©galement un peu inspirĂ©e par GĂ©rard. Je suis lâun des rares MS Ă travailler encore sur le terrain, mĂȘme si mon nouveau travail va mâamener Ă acheter des vins pour des clients privĂ©s. Il mâa Ă©galement incitĂ© Ă comprendre que le titre de MS nâest pas une question de personne. En bref, ce titre a Ă©tĂ© un plus, mais la philosophie que jâai maintenant est que mon travail consiste Ă aider les autres dans leur cheminement. Comme un Sensei dans les arts martiaux, il est de mon devoir de transmettre mes connaissances.
ASI : Quels mots dâinspiration donneriez-vous Ă quelquâun qui essaie de devenir MS ?
EZ : Pour ĂȘtre franc, mon voyage ne sâarrĂȘte jamais. Le MS nâest quâune Ă©tape dans un long voyage. Câest un peu comme la cerise sur le gĂąteau, car vous vous rendez compte que ce pour quoi vous avez travaillĂ© a Ă©tĂ© reconnu. Depuis, jâai participĂ© Ă de nombreux concours de sommellerie : jâai remportĂ© le titre de Meilleur Sommelier dâAngleterre en 2004, jâai participĂ© deux fois Ă la finale du concours du Meilleur Sommelier dâEurope, jâai terminĂ© Ă la quatriĂšme place du concours du Meilleur Sommelier du Monde de lâASI en 2013 et jâai terminĂ© deuxiĂšme en 2007 en affrontant GĂ©rard Basset, Paolo Basso et le vainqueur Andreas Larsson en
finale. MalgrĂ© tout, je vous conseille de continuer. MĂȘme si jâarrĂȘte la compĂ©tition, je suis aujourdâhui viceprĂ©sident de lâUK Sommelier Academy et membre de son comitĂ© technique, et je continue Ă former dâautres personnes.
Lorsque jâai passĂ© mon diplĂŽme ASI, jâai reçu lâOr. Jâai utilisĂ© cette expĂ©rience pour me prĂ©parer Ă concourir pour le titre de Meilleur Sommelier du Monde Ă Anvers. Je dirais quâaujourdâhui, le diplĂŽme de lâASI est un trĂšs bon examen. Il devrait ĂȘtre davantage reconnu, car je pense que la certification ASI est trĂšs stimulante et trĂšs complĂšte, puisquâelle implique Ă©galement dâautres compĂ©tences telles que lâaccord mets et vins. Elle est trĂšs rĂ©aliste par rapport Ă ce que nous faisons, et elle est Ă©galement trĂšs internationale. Il ne faut pas oublier que le âMSâ est trĂšs axĂ© sur le vin, alors que le diplĂŽme de lâASI est plus large et plus inclusif. Je trouve quâil prĂ©pare mieux Ă la compĂ©tition. Le diplĂŽme de lâASI a Ă©tĂ©, en fin de compte, un nouveau pas en avant dans mon parcours, un pas que je suis trĂšs fier dâavoir accompli. Je suis impatient de voir ses progrĂšs, car je pense que le diplĂŽme de lâASI apporte une nouvelle Ă©nergie et quâil est trĂšs positif pour notre industrie.
Vinexposium, lâorganisateur de Vinexpo America, a une fois de plus rĂ©uni le monde des boissons alcooliques pendant deux jours le mois dernier Ă New York. OrganisĂ©s en tandem avec Drinks America, ces Ă©vĂ©nements combinĂ©s mettent en avant le vin, les spiritueux, la biĂšre, le sakĂ©, les boissons prĂȘtes Ă boire, ainsi que dâautres produits et services connexes. Gabriela Pozo, prĂ©sidente de lâAssociation Ă©quatorienne des sommeliers et PDG de MUZE Ecuadorian Chocolate, ainsi que lâassociation Best USA Sommelier, ont Ă©tĂ© invitĂ©es Ă prĂ©senter un sĂ©minaire sur lâassociation du chocolat et des vins effervescents Ă Vinexpo America Ă New York. Au cours de ce sĂ©minaire, certains des chocolats les plus dĂ©licieux du monde ont Ă©tĂ© servis et associĂ©s Ă des vins reprĂ©sentant les styles de vins effervescents les plus cĂ©lĂšbres du monde afin de dĂ©terminer les meilleurs accords.
LâAssociation canadienne des sommeliers professionnels (CAPS) a entamĂ© sa route vers Halifax, oĂč se dĂ©roulera le concours du Meilleur Sommelier du Canada 2023. Justin Madol, sommelier au Don Alfonso 1890 Ă Toronto, a remportĂ© le concours du Meilleur Sommelier dâOntario Ă la fin de lâannĂ©e 2022, tandis que Kelcie Jones, directrice des vins de lâĂ©tablissement Ă©toilĂ© Burdock & Co. a rĂ©cemment remportĂ© le titre de Meilleur Sommelier de Colombie-Britannique. Le duo sera rejoint par des reprĂ©sentants des associations de lâAlberta, du Manitoba, du QuĂ©bec et de lâAtlantique, ainsi que par dâautres anciens champions rĂ©gionaux, lors du concours du Meilleur Sommelier du Canada qui se dĂ©roulera du 12 au 15 novembre Ă Halifax, sous la direction de Mark DeWolf, rĂ©dacteur en chef du magazine ASI et ancien prĂ©sident de la CAPS.
Le mois dernier, Emma Ziemann a remportĂ© pour la troisiĂšme fois le championnat suĂ©dois de sommellerie. La finale opposait quatre candidats, contre trois habituellement, Ă la suite dâune demi-finale trĂšs serrĂ©e. Câest Emma Ziemann qui est arrivĂ©e en tĂȘte, Albert Wendensten terminant deuxiĂšme et Elliot Björkman troisiĂšme.
La victoire dâEmma Ziemann suit de prĂšs celle de Nikolai Haram Svorte, qui a remportĂ©, lui, le titre de Meilleur Sommelier de NorvĂšge lors dâun concours organisĂ© Ă lâhĂŽtel Bristol dâOslo en janvier. Haram Svorte a battu Kristoffer Aga et Sander Johnsson en finale. Filmon Fitsum, de lâhĂŽtel Britannia Ă Trondheim, a remportĂ© le prix du vin junior lors dâun Ă©vĂ©nement organisĂ© au mĂȘme moment.
AssemblĂ©e GĂ©nĂ©rale de lâASI Ă Helsinki, Finlande