American Journal of Humanities and Social Sciences Research (AJHSSR)
2021
American Journal of Humanities and Social Sciences Research (AJHSSR) e-ISSN :2378-703X Volume-5, Issue-12, pp-17-24 www.ajhssr.com
Research Paper
Open Access
LA CONSTRUCTION PHILOSOPHIQUE DU CIVISME ET LA PERSPECTIVE DU CIVISME SUBSTANTIEL Scholastique Bilaure NGOUMGANG TAHADOUM (Docteure, Département de Philosophie-Psychologie-Sociologie, Université de Dschang-Cameroun) Résumé : Un demi-siècle après les indépendances proclamées, nombre d’État-nations africains ne vivent guère de leur propre choix. Ceux-ci sont alors ou bien affaiblis par la restriction de leurs domaines de compétence, ou bien annihilés dans leurs prétentions souverainistes. Au-delà des paradigmes du romantisme et du néocontractualisme, de la perspective étatiste et de la perspective juridiste, des positions de la récrimination et des positions de la victimisation, le civisme substantiel vise la possibilité d’une alternative crédible, profonde et durable pour le citoyen en proie à l’identité malheureuse. La présente réflexion tente, pour ainsi dire, d’articuler l’hypothèse d’un « trilème », d’une voie, au reste déjà en cours : celle du civisme substantiel par le biais politico-culturel. Comment l’envisager ? Mots-clés - Civisme substantiel, Corps politique, État de droit, Nation, Nation-État Abstract: Half a century after proclaimed independence, many African State-nations hardly live by their own choice. They are then either weakened by the restriction of their fields of competence or annihilated in their sovereignist claims. Beyond the paradigms of romantism and neo-contractualism, the statist perspective and the legalist perspective, the positions of recrimination and victimization, substantial civism aims at the possibility of a credible, deep and lasting alternative for the citizen prey to the unfortunate identity. The present reflection attempts, so to speak, to articulate the hypothesis of a ‘‘trilème’’, a path to the rest already in progress: that of the substantial civism, through the politico-cultural way. How can this be envisaged? Keywords -, Nation, Nation-State, Political body, Substantial civism, State of law
I.
INTRODUCTION
On note, à la faveur du retour tonitruant du nationalisme, retour qu’illustre notamment la Russie de Vladimir Poutine, la Turquie d’Erdogan, le Brésil deBolsonaro, la Chine de Xi Jinping ou les États-Unis de Donald Trump, un intérêt croissant pour les questions conjointes du civisme et du patriotisme, à quoi les nations africaines ne sauraient être indifférentes, jalousent qu’elles sont de la référence du droit et de la politique à leurs valeurs culturelles (CADHP 1 Monrovia : 1979). D’où le regain d’intérêt pour cette valeur résistante qu’est le civisme, cette fois-ci substantiel.Maisd’abord, qu’entendre par ces concepts ? La notion de civismerecouvre l’idée majeure d’une adhésion convictionnelle. 2 Dans cette perspective, on parlera du civisme substantiel pour désigner l’attachement infra- et trans-juridique de cette forme de civisme de portée minimaliste et restrictivement légale, qui caractérise un ensemble d’injonctions induit par le droit à la citoyenneté et par la symbolique des signifiants patriotiques.Parler d’une appropriation africaine du civisme substantiel revient donc à organiser une rencontre fructueuse entre ce qui en constitue l’orthodoxie, et le besoin historique de l’auto-émancipation de l’Afrique. Là où perdure les pires restes de l’« État d’acquisition » (Hobbes : 1971) et qui font pièces à la timide dynamique de l’« État de constitution » (Hobbes : 1971), l’exigence du civisme substantiel est perçue en Charte Africaine des Droits de l’Homme et des peuples. Du latin appropriacio (BLAY : 164), que l’on peut traduire littéralement par s’attribuer, l’appropriation renvoie à « l’adaptation d’une chose à un usage défini, dans une action visant à rendre propre cette chose qui d’emblée ne nous appartient pas » (BLAY : 164). D’après Le petit Larousse de la langue française, c’est « la transposition d’une œuvre littéraire dans un autre mode d’expression » (Jeuge-Maynart : 39). De cette manière se précise l’idée d’appropriation que l’on est en droit de rapprocher de celle de la contextualisation. Du latin contextus, (Blay : 573), qui signifie circonstance, l’idée de contextualisation permet de « préciser le cadre explicatif dans lequel se déroule l’appropriation » (Blay : 574). Plus précisément, l’idée d’une appropriation contextuelle traduit un objectif d’harmonie entre la chose désirée et l’usage pour lequel on la désire. Pour le Lexique des Sciences Humaines et Sociales, l’appropriation est alors, « la mise en relation d’une action, d’un fait avec les circonstances temporelles, spatiales, sociales, culturelles. [Elle permet de] comprendre les faits ainsi que les actions, décisions ou représentations humaines dans leur contexte ; ce qui est un préalable à toute interprétation. Elle permet de tenir compte des spécificités et de l’univers mental particulier à chaque société étudiée et, ainsi d’éviter les anachronismes ou les généralisations abusives » (Mesure, Savidan : 65). De fait, la référence au contexte est essentielle à la saisie correcte du concept d’appropriation. 1 2
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