Horizons 131 - Publier Ă  tout prix!

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DOSSIER: PUBLICATIONS EN MUTATION

Des Ă©diteurs traditionnels peu bavards au sujet des idĂ©es nouvelles Horizons voulait faire la lumiĂšre sur le rĂŽle des Ă©diteurs de revues spĂ©cialisĂ©es et a rencontrĂ© des rĂ©sistances. Une approche en huit questions. Texte  Michael Baumann

MalgrĂ© la numĂ©risation, les maisons d’édition traditionnelles gardent encore la haute main sur les publications scientifiques. Les chercheurs ne pourraient-ils pas aujourd’hui s’organiser entre eux? Cela leur permettrait de fixer les rĂšgles eux-mĂȘmes et de publier leurs contenus Ă  prix coĂ»tant. Horizons a voulu aborder ce genre de questions avec des Ă©diteurs traditionnels de revues spĂ©cialisĂ©es et des partisans de l’open access. Il s’est avĂ©rĂ© que cela n’avait rien d’évident. De nombreux Ă©diteurs n’ont pas voulu entrer en matiĂšre alors que d’autres n’ont mĂȘme pas rĂ©pondu. Nous avons Ă©crit Ă  neuf Ă©diteurs au total: de grandes maisons traditionnelles et des petites plus rĂ©centes – dont six en Suisse et trois ailleurs en Europe. Deux d’entre elles, qui semblaient disposĂ©es Ă  aborder le sujet, se sont rĂ©tractĂ©es quand nous sommes devenus plus concrets. Finalement, deux Ă©diteurs ont tout de mĂȘme pris la peine de rĂ©pondre Ă  nos questions. Deux chercheurs engagĂ©s dans le monde de l’édition complĂštent le tableau. Pourquoi faut-il republier les prĂ©prints dans une revue spĂ©cialisĂ©e officielle? La pratique de la prĂ©publication est tendance depuis un certain temps dĂ©jĂ , et elle s’est encore renforcĂ©e durant la pandĂ©mie de coronavirus. C’était une question de rapiditĂ©.

senior communications manager du Springer Nature Group Ă  Berlin y voit aussi un problĂšme: «En l’absence de peer review, il n’est pas garanti qu’ils passeraient le cap d’une Ă©valuation objective.» Les Ă©diteurs garantissent donc pour leur part l’évaluation par les pairs et fournissent ainsi une rĂ©fĂ©rence pour les travaux scientifiques ultĂ©rieurs. Faut-il maintenir l’évaluation par les pairs bien qu’elle se rĂ©vĂšle rĂ©guliĂšrement dĂ©ficiente? Depuis dĂ©cembre 2020, tous les travaux soumis Ă  la revue spĂ©cialisĂ©e eLife doivent au prĂ©alable ĂȘtre disponibles sous forme de manuscrits en prĂ©publication sur internet. Ainsi, une premiĂšre Ă©valuation par les pairs a lieu avant la publication, explique le rĂ©dacteur en chef Matthias Barton. Toutefois, pour lui, l’évaluation par les pairs Ă  proprement parler aprĂšs la soumission d’un manuscrit reste indispensable. Elle permet d’écarter les mauvais travaux. Quand un manuscrit est acceptĂ© par la rĂ©daction, il est transmis Ă  un membre du comitĂ© de rĂ©daction ayant une connaissance de la thĂ©matique et qui sollicite l’évaluation d’experts et d’expertes externes. Les travaux retournent ensuite Ă  leurs auteurs pour ĂȘtre retravaillĂ©s avant la publication. Cette rĂ©vision a un effet positif sur la qualitĂ© des articles.

Est-il sensĂ© de demander aux spĂ©cialistes qui effectuent l’évaluation de dĂ©tecter aussi les fraudes? Le fait que des manipulations n’aient pas Ă©tĂ© dĂ©couvertes est rĂ©guliĂšrement imputĂ© Ă  des dĂ©faillances du systĂšme d’évaluation, note le journaliste scientifique Ralf Neumann, qui travaille pour la revue allemande Laborjournal. Il considĂšre cette accusation comme injuste. Dans un commenKerstin Mork taire, il Ă©crit: «IdĂ©alement, la tĂąche des Ă©valuateurs est de juger le travail de leurs collĂšgues certes de maniĂšre critique, Soudain, presque tous les travaux consacrĂ©s Ă  ce thĂšme mais Ă©galement aussi bienveillante que possible, et non ont Ă©tĂ© dĂ©posĂ©s sur des serveurs dits de prĂ©publication, de soupçonner d’emblĂ©e chaque auteur de fraude potenavant de paraĂźtre dans des publications spĂ©cialisĂ©es tra- tielle.» Les plaintes contre des manuscrits ou des articles ditionnelles. Le processus de publication est ainsi devenu publiĂ©s sont examinĂ©es par la rĂ©daction. «Si nĂ©cessaire, plus transparent. Matthias Barton, professeur de mĂ©decine on consulte d’autres personnes ou institutions, en partiĂ  l’UniversitĂ© de Zurich et rĂ©dacteur chevronnĂ© de la revue culier les autoritĂ©s universitaires ou des spĂ©cialistes du britannique en libre accĂšs eLife, est toutefois sceptique. Pour lui, les prĂ©prints ne sont que des synthĂšses de travaux scientifiques qui n’ont pas Ă©tĂ© examinĂ©s par les pairs. Les revues scientifiques, quant Ă  elles, refuseraient les mauvais manuscrits. Sur le covid, la presse a citĂ© des manuscrits prĂ©publiĂ©s sans prĂ©ciser qu’ils n’avaient pas fait l’objet Stefan Tochev d’une telle Ă©valuation, comme il le relĂšve. Kerstin Mork,

«En l’absence de peer review, il n’est pas garanti que les prĂ©prints passeraient le cap d’une Ă©valuation objective.»

«En cas de plaintes, si nécessaire, nous pouvons consulter les autorités universitaires ou des spécialistes du domaine.»

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