tentation de faire une simple projection de lâexistant, de prolonger les tendances climatiques, consumĂ©ristes, sociales ou environnementales actuelles, de dramatiser ces phĂ©nomĂšnes en cours qui paralysent lâaction, tant lâeffondrement paraĂźt imminent. Ensuite la formalisation dâun grand projet qui, par la sĂ©duction des images, prĂ©tendrait rĂ©soudre les crises Ă venir sur le territoire. Ă lâanalyse, on constate que les sept rĂ©ponses restent Ă un niveau conceptuel, ce qui est peut-ĂȘtre lâapproche la plus correcte Ă lâaune de tout le savoir qui a Ă©tĂ© embrassĂ© par cette immense Ă©tude.
Cette consultation produit un foisonnement de rĂ©flexions, de pistes dâaction qui mĂȘlent la nĂ©cessitĂ© dâinflĂ©chir la trajectoire actuelle et lâadaptation Ă des changements qui sont dĂ© l uvre. ci, l urgence d une prise de conscience ne doit pas forcĂ©ment impliquer une rĂ©volution qui Ă©radiquerait tout ce qui a fait le ciment de nos domaines de compĂ©tence. Il sâagit plutĂŽt de retrouver le liant qui a de tout temps mis en lumi re les valeurs humaines, dans ces arts appliquĂ©s qui font le quotidien des mandataires du monde du bĂąti. La conception architecturale a eu ses pĂ©riodes de rupture le mur romain versus la colonne grecque, la perspective versus l agrĂ©gation moyen geuse, le ouvement moderne versus l cole des eaux- rts, etc. mais elle a aussi connu des moments de continuum ou de lĂ©g res variations Ă lâintĂ©rieur dâune pĂ©riode forte. Câest aux confins de ces articulations subtiles que se situe le moment prĂ©sent. La question climatique, sujet sociĂ©tal devenu trĂšs Ă©pidermique pour dâaucuns, peut faire craindre le retour dâun combat entre les Anciens et les Modernes, comme celui qui a enflammĂ© les joutes scripturales corbusĂ©ennes au dĂ©but du siĂšcle passĂ©. Toutes les crises offrent des opportunitĂ©s de remise en cause qui stimulent la crĂ©ativitĂ© et lâadaptabilitĂ© de nos sociĂ©tĂ©s. De la mĂȘme maniĂšre que nos prĂ©dĂ©cesseurs ont su assimiler lâinvention du mĂ©tal et du bĂ©ton armĂ© dans la construction pour donner de nouvelles rĂ©ponses constructives, par exemple, au problĂšme du logement, il sâagit peut-ĂȘtre dans un proche avenir de ne plus raisonner uniquement en mĂštres carrĂ©s ou mĂštres cubes qui gĂ©nĂšrent des coĂ»ts, des ratios, des plans financiers, des plannings de chantier. Il nous faut au contraire inscrire dans «âlâhistoire du projetâ» une composante dans laquelle la matiĂšre, qui est le fondement de nos professions, ne soit plus seulement gĂ©nĂ©ratrice de Stimmung, de lumiĂšre et dâombre, mais Ă©galement de ressources, dâĂ©nergie ou de rĂ©utilisation et de recyclage. Ă lâimage des ingĂ©nieurs du siĂšcle passĂ©, la pensĂ©e profonde sur lâĂ©conomie de la matiĂšre peut ĂȘtre la source de nouvelles formes, loin des normes et des marges qui font les beaux jours de la consommation effrĂ©nĂ©e qui a caractĂ©risĂ© ce passage de millĂ©naire.
Lâarchitecture est une pensĂ©e De ces approches doit Ă©clore lâĂ©bauche, encore sous-jacente, dâune nouvelle Ă©criture architecturale et constructive. LâinventivitĂ© se nourrit souvent de la contrainte et cette consultation dĂ©montre quâil demeure pour les professionnels un monde d explorations mener. insi, le sol, celui qui a ancrĂ© l assise de visions paysag res
Konrad Witz, La PĂȘche miraculeuse, 1444 (dĂ©tail)
17
16
Rupture et continuité de la pratique
dans une conception qui en rĂ©f re au territorio celui de ittorio regotti ou de Luigi nozzi ou encore au parti architectural , porte certainement en lui une autre valeur que celle de seul support gĂ©otechnique des fondations de lâouvrage bĂąti. uant la densification exigible, elle implique de mettre en avant l espace public comme bien le plus prĂ©cieux l intĂ©rieur d un environnement b ti o la question de la fronti re paysag re se retrouve partout. our l aborder, les architectes doivent utiliser tous leurs sens 3, dans un paradigme Ă©mergent Ă inventer. Il sâagit donc dâĂ©voluer ensemble pour affirmer des positions et non de se retrancher derriĂšre des postures intenables, pour aller vers un avenir quâĂ lâunisson les Ă©quipes mandatĂ©es souhaitent partageable. Câest assurĂ©ment lâune des seules conditions pour quâune communautĂ© habitante puisse cohabiter dans un territoire rĂ©duit, mais dont la beautĂ© gĂ©ographique nâest plus Ă redire depuis que onrad itz l a immortalisĂ©e, un our de 1 , dans son tableau La PĂȘche miraculeuse. ne uvre qui peut re devenir le symbole de ce partage pour les dĂ©cennies venir et tre l image d une sociĂ©tĂ© organique, mouvante, qui peut se distendre, se rassembler .4 â
1
2
3 4
Alain Berset, « Alexandre Jollien dialoguant avec Alain Berset : âč Dans cette crise, on peut tisser le lien de la fraternitĂ© âș », le temps.ch, publiĂ© jeudi 24 dĂ©cembre 2020, consultĂ© le 4 janvier 2021 Josep Ramoneda, « Quâest-ce que la ville ? », in Jean Dethier et Alain Guiheux (dir.), La Ville, art et architecture en Europe, 1870-1993, Paris, Ăditions du Centre Pompidou, 1994, p. 15 GĂŒnther Vogt, « Les frontiĂšres du paysage », TRACĂS 11/2020, p. 25 Alain Berset, op. cit.





